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Caractères généraux des profils latéritiques et facteurs de mise en place

1 CHAPITRE I : REVUE DE LITTÉRATURE

1.3 Caractères généraux des profils latéritiques et facteurs de mise en place

Les sols latéritiques montrent les traits généraux communs suivants :

 ce sont des sols profonds ; certains atteignent 15 à 20 mètres d’épaisseur et même

plus de 40 mètres comme cela a été rapporté par une étude sur les cuirasses

latéritiques en Côte d’Ivoire (Cougny, 1988),

 les horizons sont habituellement peu différentiés, surtout s’il n’y a pas cuirassement

ou concrétionnement,

 les transitions entre horizons sont progressives,

 l’horizon de surface est rarement tout à fait en place (érosion superficielle,

glissement de terrain). Il est souvent graveleux ou caillouteux et les teneurs en

argiles sont faibles,

 les horizons sous-jacents sont le siège de mouvements verticaux, latéraux ou

obliques (tassements, apports d’éléments en solution ou en pseudo-solution venant

des profils voisins ou entrainement de ces éléments vers d’autres profils),

 en profondeur les liaisons avec les horizons de surface paraissent souvent

incertaines. Ce sont fréquemment de très vieux sols qui ont évolué à travers plusieurs

cycles climatiques, des millénaires, voire du million d’années,

 ils sont très colorés (rouges ou jaunes) avec des valeurs pédologiques et des

intensités dites « chroma » élevées. Les variations de couleur entre l’état sec et l’état

humide sont faibles,

 ils sont généralement profondément et intensément altérés. Peu de minéraux, en

dehors du quartz et de quelques débris de roches, échappent à l’altération. Les

processus d’argilisation y sont intenses.

Selon Maignien (1966), à travers ces caractéristiques morphologiques générales certaines

variations peuvent y apparaître en jouant sur quatre niveaux, à savoir : les horizons de surface,

les horizons d’accumulation de sesquioxydes, les horizons argileux (le plus souvent la

kaolinite), les horizons d’altération (exemple de profil latéritique en Figure 1-3).

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Figure 1-3: Exemple de profil latéritique type (Alexandre, 2002).

1.3.1 Conditions de formation des sols latéritiques

Selon (Newbold, 1844 ; Gidigasu, 1974, 1976 et 1983), les conditions nécessaires à la

formation des latérites sont les suivantes :

 un climat tropical, sujet aux alternances de saisons sèches et humides ou de moussons,

 un plateau ou une superficie topographique doucement inclinée, non sujette à une

érosion mécanique appréciable,

 la composition chimique et minéralogique de la roche du substratum contenant les

constituants latéritiques (alumine et fer),

 une texture poreuse permettant l’infiltration des eaux de percolation,

 l’eau d’infiltration doit demeurer dans les interstices de la roche pendant une longue

période réunissant ainsi les possibilités maximales d’érosion chimique,

 une eau d’infiltration devant contenir un composé acide ou alcalin susceptible de réagir

avec les composés de la roche de manière à donner un électrolyte permettant aux

phénomènes électrodynamiques d’opérer (latéritisation).

Ce processus annuel doit continuer au moins pendant une époque géologique,

approximativement du million d’années (Autret, 1983).

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1.3.2 Genèse des formations latéritiques

Dans la genèse des latérites, interviennent plusieurs facteurs conditionnant une évolution

plus ou moins poussée de latéritisation. Ce sont les facteurs climatiques, la topographie, la

végétation et la nature géologique de la roche altérée (Humbert, 1948 ; Alexander & Cady,

1962 ; Beauvais, 1989 ; Bagarre, 1990 ; Braun, et al., 2012). Le phénomène de latéritisation est

un processus de formation des sols, spécifique aux régions tropicales chaudes et humides. Il

s’agit d’une altération de la roche mère dont la caractéristique essentielle réside dans une mise

en solution puis un départ de la silice (SiO

2

), phénomène de lessivage, accompagné d’un

enrichissement en fer et en alumine sous forme de sesquioxydes (Fe

2

O

3

et Al

2

O

3

) (Autret, 1983 ;

Tardy, 1993).

1.3.3 Définition d’un profil latéritique type

Little (1969) a proposé une classification générale des sols résiduels basée sur leur degré

d’altération, le pourcentage de cimentation et les caractéristiques morphologiques générales des

profils latéritiques (Figure 1-4). Des classifications similaires ont été proposées par Jones &

Knill (1965). Cependant, sur la base des expériences de terrain, Duncan (1970) indique que de

tels systèmes de classification qualitative sans quantification liée aux propriétés mécaniques

conduisent généralement à des valeurs douteuses.

La classification de Little (1969), permet une description graduelle de l’érosion des roches

mères jusqu’aux sols latéritiques. Les différentes étapes sont :

roche saine : il s’agit de la roche fraiche non encore altérée mais pouvant contenir des

joints tachetés en limonite juste en dessous de la roche légèrement altérée. La coloration

indique des joints de percolation d’eau. Elle ne peut être disloquée que par dynamitage.

roche légèrement altérée : cet horizon est caractérisé par une altération préférentielle

des zones colorées par la limonite. Quelques débris de feldspaths provenant des roches

granitiques peuvent y être retrouvés. Sa résistance avoisine celle de la roche saine. La

dislocation de cet horizon requiert l’utilisation d’explosifs. Cet horizon est très

perméable à cause de la présence des joints de limonite.

roche moyennement altérée (50 à 90% érodée) : horizon considérablement altéré, il

possède une certaine résistance due aux parties non encore altérées. Il contient de gros

blocs de roche non pulvérisables à la main. On observe un réseau de joints à limonite

important. La pulvérisation de cet horizon est difficile sans l’usage d’explosifs.

roche fortement altérée : dans cet horizon, la roche est tellement fragilisée par

l’érosion que les blocs retrouvés peuvent être cassés ou pulvérisés à la main. Horizon

très tacheté à la limonite. Il contient moins de 50% des minéraux de la roche saine.

roche complètement altérée : roche décomposée par l’érosion mais la texture de la

roche mère est reconnaissable, surtout pour les sols d’origine granitique, le feldspath

originel est complètement décomposé en minéraux argileux. Cet horizon peut être

excavé à la main sans utilisation d’explosifs ou d’engins spéciaux.

sols latéritiques : horizon ne permettant pas la reconnaissance de la texture de la roche

mère à cause de la nature humifère de la couche de surface ou les racines de plantes.

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Figure 1-4: Définition morphologique du degré d'altération des roches (Little, 1969).

Pour examiner et comprendre les profils latéritiques types, nous devons nous intéresser à

la dynamique des différents faciès au sein de ce profil, de l’altération de la roche mère à la

formation de l’horizon latéritique. Il s’agit du profil de Walther (1915), du nom du premier

descripteur, en Australie, en 1915. Ce sol représente environ 20 m d’épaisseur (Figure 1-5). À

la base nous avons la roche non altérée avec une densité de l’ordre de 2,7 (granite et roches

voisines). Au-dessus de cette roche saine, on observe une couche de plusieurs mètres dans

laquelle les minéraux semblent intacts, lorsqu'on les observe de loin. En réalité ils sont

profondément altérés et corrodés. Un couteau peut y pénétrer. La densité tombe à 1. Le matériau

a donc déjà perdu par dissolution plus de la moitié de sa masse. C’est la roche profondément

dégradée, la saprolithe. Plus haut dans le profil, l'évolution est telle que les minéraux de la roche

ne sont plus clairement visibles sauf dans quelques poches. C’est la limite de la roche, la

lithomarge. Son allure typique est bariolée. Encore plus haut dans le sol, les oxydes de fer

dominent en trois couches successives. À la base, ils apparaissent en taches ; c’est la zone

tachetée. Plus haut, le fer est suffisamment abondant pour lier entre eux les minéraux présents,

les masquer par enrobage et former in fine une cuirasse résistante dont la densité dépasse 2.

Mais elle contient encore au moins 25% de kaolinite (Beoglin, 1990). Encore plus haut, la

cuirasse apparait en blocs séparés. C’est la zone de démantèlement. Tout en haut du profil de

sol, on observe en général une couche d'argile de type kaolinite, riche en fer et donc de couleur

rougeâtre. Lorsque cette couche meuble et rougeâtre est éliminée par érosion - ce qui est

fréquent - la cuirasse sous-jacente est portée à l’affleurement. Elle sert alors d’armature au

paysage, en zone tropicale sèche en particulier.

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Figure 1-5: Profil type des sols ferrugineux, dit profil de Walther (1915).