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Chapitre 1 – Constat des écarts de développement agricole dans le monde, hypothèses sur

D. Présentation de deux approches suivies dans la thèse, questions posées et hypothèses

3. Concepts, notions et périodes utilisés dans ce document

Développement agricole : « niveau » et « taux de croissance » de la productivité du

travail agricole.

Trajectoire de développement agricole : ensemble de valeurs prises par les variables

suivantes au cours du temps : productivité du travail agricole (t) ; productivité de la terre (t) ; surface travaillée par actif (t) ; production agricole (t) ; nombre d’actifs agricoles (t) ; surface totale travaillée (t).

Diachronie et synchronie : l’évolution diachronique d’une variable V pour un individu i

désigne l’évolution observée au cours du temps de la variable V chez l’individu i.

Par opposition, on parle d’observation synchronique d’une variable V chez n individus observés à une date t.

La période 1980 – 2005 est utilisée dans le chapitre 2 pour procéder à des

comparaisons internationales de trajectoires agricoles.

La période 1991 – 2007 est utilisée dans le chapitre 3 pour procéder à des

comparaisons de trajectoires de développement agricole entre régions mexicaines, états fédérés mexicains et municipes mexicains.

Dans le chapitre 4, les enquêtes ont été réalisées au cours des années 2006, 2007 et

2008.

Les deux plus récents recensements agricoles mexicains ont été utilisés (1991 et 2007). Le recensement Ejidal de 2007 a également été utilisé. Il est à noter que bien qu’ayant été réalisé en 2007, les données recensements « agropecurario » (agricole) et « ejidal », ont été rendues publiques en 2010 et 2011. D’autres recensements mexicains, économiques et de population ont été utilisés (1990 à 2005). De nombreuses variables ont été construites dans ce travail à partir de ces données statistiques.

Les unités d’analyse ne sont pas les mêmes dans les différents chapitres de cette thèse : il s’agit des macro régions (constituées de plusieurs pays) et des pays dans le chapitre 2, des cinq régions mexicaines (constituées de plusieurs états mexicains), des Etats mexicains fédérés et des Municipes mexicains dans le chapitre 3, et enfin, des producteurs agricoles et de leur famille (le ménage agricole) dans le quatrième et dernier chapitre.

L’analyse des déterminants du niveau de la productivité du travail agricole et du taux

de croissance de la productivité du travail agricole permet de mettre en évidence des

corrélations et non des causalités.

Courbes d’iso-productivité du travail agricole : dans les graphiques à 4 dimensions, il

s’agit des courbes le long desquelles la productivité du travail agricole est constante (malgré les variations de la productivité de la terre et du nombre d’hectares agricoles travaillés par actif agricole).

54 Les concepts de « course de vitesse » entre actifs agricoles et terres » et de « transition agricole démographique » (TAD) et de ses diverses modalités (TAD « standard

économe en terres », « standard gourmande en terres », « standard artificielle », et trois modalités de TAD « bloquée »), qui sont un des apports de cette thèse, sont explicités dès

le chapitre 2.

La notion d’actif agricole mobilisée sera dépendante des bases de données utilisées : nous utiliserons la définition « total economically active population in agriculture » de la FAO (données issues de UN Population Division et de l’OIT) dans le chapitre 2 et la définition des instituts mexicains de statistique et d’information géographique (INEGI) dans le chapitre 3 (« total de poblacion economicamente activa en el sector agro pecuario y forestal »).

Ces deux définitions ne distinguent pas les actifs agricoles des ménages agricoles, auto-employés sur l’exploitation familiale, des salariés agricoles employés dans des exploitations familiales ou de type plus capitalistique.

Nous adoptons une définition large de ce qu’est un actif agricole dans le quatrième et dernier chapitre. Un actif agricole peut être un actif d’un ménage agricole (impliqué dans les activités agricoles de l’exploitation familiale même à temps partiel – temps évalué en proportion d’un actif agricole à temps plein) ou un actif salarié d’une exploitation agricole qu’il appartienne ou non à un ménage agricole. Cependant, grâce à nos enquêtes, nous aurons la possibilité de distinguer les deux.

Une approche « positive » plutôt que « prescriptive» : Rodrik (2010) montre

comment la discipline académique et universitaire de l’«économie du développement » influe sur les représentations et cadres de la pensée des experts et conseillers des décideurs. Chaque grande stratégie de développement au cours des 50 dernières années a été sous-tendue par un corpus d’idées constituant une certaine théorie de la croissance et du développement : stratégie dite de « substitution aux importations », théorie des « étapes de la croissance » de Rostow, vision du « Big Push » basé sur des investissements massif dans l’industrie, ouverture et libéralisation de l’économie orientée par le marché international et pour les exportations, préconisations du « Consensus de Washington », stratégies de croissance visant la « lutte contre la pauvreté ».

Rodrick explique pourquoi on peut considérer que pour certains pays, cette discipline a joué un rôle décisif et positif dans l’accélération de leur développement et dans l’accession à la classe moyenne (satisfaction de besoins fondamentaux comme la santé, l’éducation) de millions d’individus (Chine, Corée du Sud, Malaisie, Vietnam). Cependant, il montre également qu’elle est à l’origine d’erreurs importantes de politiques et plaide, simplement mais fortement, au sein de la profession des « économistes du développement » pour la réalisation de bons diagnostics, permettant une meilleure compréhension des situations singulières, avant de préconiser telle ou telle politique ou réforme.

C’est dans ce cadre que nous voulons inscrire ce travail de thèse. Notre démarche est avant tout inductive, c’est-à-dire partant des faits, des observations empiriques, caractérisées autant par des données statistiques que par des enquêtes de terrain, plutôt que prescriptive.

Notre posture épistémologique est positive et non normative. Nous voudrions contribuer à une meilleure compréhension des liens entre croissance du PIB / habitant, transformations structurelles de l’économie, dynamiques démographiques et développements agricole.

55 L’observation des économies au cours de leur développement révèle des invariants ou « régularités ». Des économistes du développement (Paul Bairoch (1999a, 1999b, 1975), Timmer (1988)) ont mis en évidence des « régularités agricoles ». Ils ont montré combien le développement et la croissance économiques étaient liés à des transformations structurelles de l’agriculture. La « transformation structurelle d’une économie» est classiquement définie comme la baisse de la proportion des actifs agricoles et la baisse de la proportion du PIB agricole dans le PIB total. Ces économistes ont montré que les transformations structurelles de l’économie présentent une certaine homogénéité à travers le temps et l’espace : ces phénomènes se répètent et s’observent dans différentes régions du globe en synchronique (à un instant t donné) tout comme en diachronique (lorsque l’on suit un même pays au cours de son développement). Un autre exemple de régularité est la « loi de Engel ». Elle observe, « et donc » prédit, la baisse de la proportion des dépenses alimentaires des ménages dans le total de leurs dépenses « lorsque leurs dépenses s’accroissent » au cours du temps.

D’autres régularités encore méconnues ou insuffisamment mises en évidence existent-elles ? En particulier, d’autres régularités existent-elles, non pas pour la transformation structurelle de l’économie, mais pour le développement agricole, c’est-à- dire pour les valeurs (moyennes) prises au cours du temps pour un pays donné, dans l’espace à quatre dimensions (nombre d’hectares par actif agricole ; productivité de la terre ; productivité du travail agricole ; temps) et constituant sa « trajectoire de développement agricole » ?

Existe-t-il des expériences passées d’augmentation de la productivité du travail agricole dans un contexte de population active agricole croissante23 ? Si ce n’est pas le cas, peut-on en déduire l’existence d’une régularité ?

Relégué au second plan derrière la baisse de leur part relative dans le total des actifs, l’évolution du nombre des actifs agricoles et ses interdépendances avec le développement agricole est un phénomène simple mais peu étudié.

Pourtant, aujourd’hui, le contexte démo-économique de nombreux pays en développement est tel qu’il y a à la fois baisse de la part relative des actifs agricoles mais croissance de leur nombre, tandis que dans d’autres, ces deux variables décroissent simultanément. Parmi les pays où leur nombre baisse aujourd’hui, il y eu une époque au cours de laquelle il augmentait.

Une nouvelle « régularité » jamais énoncée24, pourrait donc se formuler ainsi: « dans

tous les pays, au cours du développement économique, le nombre d’actifs agricoles croît dans une première phase puis décroît ; ces deux phases correspondent à des dynamiques

23 Nous posons et analysons cette même question dans le chapitre suivant, pour des périodes plus récentes. 24

D’après nous, aucun auteur ne parle du nombre des actifs agricoles et de ses effets sur le niveau de la productivité du travail sauf brièvement, Timmer (1988) qui nomme explicitement la phase à partir de laquelle le nombre d’actifs agricoles commence à diminuer (c’est donc bien qu’il considère ce moment comme important) : c’est, dans son découpage temporel, la 3ème phase (dite phase de « Schultz-Ruttan »).

E. Brève revue de littérature sur le lien entre productivité du travail