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Chapitre 2 – Analyse des trajectoires de développement agricole dans le monde à l’échelle

C. Construction de variables agricoles et non agricoles potentiellement explicatives du

3. Analyse préalable des données : classification ascendante hiérarchique

Nous ne cherchons pas tout de suite à faire de la statistique inférentielle c’est-à-dire à expliquer une variable dite « dépendante » par un ensemble de variables « indépendantes » ou explicatives. Nous voulons d’abord comprendre les relations entre les 41 variables décrivant ces 135 pays : leurs interdépendances et leur « proximité » relative. Les méthodes de classification des données s’y prêtent bien. Elles permettent précisément de regrouper des individus (ici, les pays) en groupes les plus homogènes possibles. Parmi ces techniques, la classification ascendante hiérarchique nous a paru pertinente. On réalise donc une classification ascendante hiérarchique (CAH)31, reposant sur la méthode de la dissimilarité, utilisant une distance euclidienne et la méthode d’agrégation de Ward32. Nous imposons une troncature (à 3 classes), la troncature automatique donnant seulement 2 classes. Voici les résultats33.

La CAH, à troncature imposée à 3 classes, appliquée aux 38 variables, met évidence une classe C1 (39 pays), une classe C2 (60 pays) et une classe C3 (36 pays). Le niveau de

développement agricole est faible dans C1, intermédiaire dans C2 et fort dans C3. L’objet

central de C1 est le Kenya, celui de C2 est Panama et l’Allemagne est l’objet central de la classe C334. Les dendrogrammes et résultats sont présentés ci-dessous.

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On retire la variable Population totale en 2005 de la CAH.

32 La méthode de Ward consiste à regrouper les classes entraînant la perte d'inertie interclasses la plus faible. 33

Les résultats d’une CAH sont le nombre de pays par classe, le dendrogramme, la variance intra-classe, les distances minimale, moyenne et maximale au barycentre et les barycentres et objets centraux de chaque classe.

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Dans cette CAH, les pays de la classe 1 sont : Afghanistan, Angola, Belize, Benin, Burkina Faso, Burundi, Cameroon, Central African Republic, Chad, Congo, Côte d'Ivoire, Democratic Republic of the Congo, Djibouti, Gambia, Ghana, Guinea, Guinea-Bissau, Haiti, Kenya, Lao People's Democratic Republic, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritania, Mozambique, Niger, Nigeria, Paraguay, Rwanda, Senegal, Sierra Leone, Somalia, Sudan, Togo, Uganda, United Republic of Tanzania: Mainland, Zambia, Zimbabwe.

Dans cette CAH, les pays de la classe 2 sont : Albania, Algeria, Argentina, Bangladesh, Bhutan, Bolivia, Botswana, Brazil, Bulgaria, Cambodia, Cape Verde, China, People's Republic of Colombia, Costa Rica, Cuba, Cyprus, Dominican Republic, Ecuador, Egypt, El Salvador, Fiji, Gabon, Grenada, Guatemala, Guyana, Honduras, Hungary, India, Indonesia, Iran (Islamic Republic of), Iraq, Jordan, Lesotho, Malaysia, Mauritius, Mexico, Morocco, Myanmar, Nepal, Nicaragua, Oman, Pakistan, Panama, Peru, Philippines, Poland, Portugal, Romania, South Africa, Sri Lanka, Suriname, Swaziland, Syrian Arab Republic, Thailand, Tunisia, Turkey, United Arab Emirates, Uruguay, Venezuela (Bolivarian Republic of), Viet Nam.

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La croissance de la productivité de la terre est moins contrastée que ne l’est celle de la surface par actif agricole. Le niveau moyen en 2005 (735 contre 3731) et le taux de

croissance entre 1980 et 2005 de la productivité du travail agricole (+20% contre +73%) sont plus faibles dans C1 que dans C2. La moyenne de la surface par actif agricole est plus faible dans C1 que dans C2 en 1980 et en 2005. La surface par actif agricole diminue en moyenne de 30% dans C1 quand elle croît en moyenne de +12% dans C2 et de +73% dans C3. La moyenne de la productivité de la terre est environ 4 fois plus faible dans C1 que dans C2 en 1980, tout comme en 2005 : en effet, les taux de croissance moyen de la productivité de la terre sont presque identiques dans C1 (+69%) et C2 (+71%) et il est de +83% dans C3.

Le PIB agricole double en moyenne dans C1 (+99%) tandis qu’il augmente en moyenne de +91% dans C2 et de +71% dans C3 ; que la surface agricole croît de +16% dans C1, de +12% dans C2 tandis qu’elle diminue (-6%) dans C3 ; et enfin que le nombre d’actifs agricoles augmente en moyenne de +71% dans C1 quand il n’augmente que de +20% dans C2 et qu’il diminue dans C3 (-20%).

Les niveaux d’intensification agricole (la proportion moyenne des hectares irrigués,

la quantité moyenne de fertilisants par hectare et le stock net de capital par hectare) en 1980 et en 2005 sont très nettement inférieurs dans C1 par rapport à C2, mais la moyenne des taux de croissance y est très supérieure (il y a un effet rattrapage).

La moyenne de la proportion du PIB agricole, le PIB total réel par habitant, la productivité du travail non agricole, sont en 1980, et restent en 2005, nettement plus faibles dans C1 que dans C2.

Classe 1 2 3

Objets 39 60 36

Somme des poids 39 60 36

Variance intra-classe 26368440,93 606325542,90 2433124658,07 Distance minimale au barycentre 487,37 1474,34 10324,01 Distance moyenne au barycentre 3589,78 14007,40 41817,63 Distance maximale au barycentre 20022,97 152127,72 101802,71

Figure 2.11 : Dendrogrammes de la CAH à troncature imposée à 3 classes.

86 Les niveaux de PIB total réel / habitant sont croissants de C1 à C3, en 1980 comme en 2005 mais ce classement ne se retrouve pas dans le taux de croissance moyen du PIB total réel par habitant : il est le plus faible dans C1 (+5%) mais il est maximum dans C2 (+80%) et vaut +54% dans C3. On retrouve ici l’idée évoquée dans la première partie de ce deuxième chapitre, selon laquelle il n’y a pas de nécessaire linéarité entre la croissance du PIB réel /

habitant, et le taux de croissance de la productivité du travail agricole.

Nous remarquons également que le taux de croissance moyen de la productivité du

travail non agricole est négatif dans C1 (-26%) tandis qu’il vaut +42% dans C2 et +21% dans

C3.

Cependant, le taux de croissance de la population active non agricole est de +202% dans C1, de 145% dans C2 et de 97% dans C3.

Enfin, en ce qui concerne les variables démographiques, les pays de la classe 1 voient en moyenne leur population doubler (+95%) quand elle n’augmente en moyenne que de 61% et de 43% dans les classes C2 et C3. La fécondité est nettement supérieure dans C1 en

1968 et le reste en 1993 : entre 1968 et 1993, elle ne diminue en moyenne que de 9% dans C1 contre -38% dans les deux autres classes.

Sans inférence statistique à ce stade, cette CAH apporte les éléments descriptifs suivants :

 Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, la classe C3 dans laquelle le développement agricole (des niveaux et des taux de croissance élevés de la productivité du travail agricole) est élevé n’est pas celui dont les taux de croissance du PIB agricole, de la surface agricole, de la productivité de la terre, ou de l’intensification agricole sont élevés.

les classes de pays se différencient par des variables non agricoles dont on suppose qu’elles influencent le développement agricole (la démographie, la démographie des actifs agricoles, l’économie non agricole) mais la classe C3 n’est toutefois pas celle de plus forte élévation de la productivité du travail non agricole ni celle ayant eu le taux de croissance de la population active non agricole la plus forte.

 Il apparaît de nouveau que le taux de croissance de la surface par actif agricole semble jouer un rôle discriminant (et les variables qui le déterminent, tout particulièrement l’évolution du nombre des actifs agricoles) dans l’évolution de la productivité du travail agricole.

 En annexes 2.5 et 2.6, nous montrons les résultats de deux analyses statistiques de type « logit polytomique non ordonné » permettant d’expliquer l’influence de variables explicatives sur la probabilité d’appartenance à une classe plutôt qu’à une autre. Ces analyses confirment ce qui a été écrit ci-dessus.

87 Il convient de noter que dans la CAH, le Mexique appartient à la classe 2, c’est-à-dire au groupe dont le niveau de développement agricole est intermédiaire.

1 2 3 Classe 1 : Kenya Classe 2 : Panama Classe 3 : Allemagne

TxCrProdtéWAgric 0,20 0,73 2,17 -0,08 0,73 2,72 LOGProdtéWAgric2005 2,69 3,36 4,34 2,58 3,59 4,42 ProdtéWAgric2005 734,50 3731,41 30138,03 376,88 3916,73 26538,12 SurfaceParActifAgricole2005 7,89 12,83 76,50 2,24 8,68 20,74 SurfaceParActifAgricole1980 11,34 13,12 65,46 4,63 9,71 7,56 ProdtéTerre2005 188,49 769,20 3321,65 168,23 451,39 1279,30 ProdtéTerre1980 123,32 519,65 2162,58 88,03 233,72 942,78 ProportionIrriguée2005 0,01 0,15 0,15 0,00 0,02 0,03 ProportionIrriguée1980 0,01 0,11 0,09 0,00 0,02 0,02 FertiParHectare2005 4,04 73,16 79,84 5,29 12,88 152,33 FertiParHectare1980 1,49 46,38 111,57 2,01 12,24 272,73 StockNetCapitalParHectare2005 21,65 213,10 2166,05 22,56 114,30 2887,91 StockNetCapitalParHectare1980 18,72 118,48 1689,68 11,32 91,50 4536,15 %PIBagric2005 0,30 0,11 0,03 0,24 0,07 0,01 %PIBagric1980 0,30 0,16 0,04 0,26 0,07 0,01 LOGProdtéWAgric1980 2,66 3,15 3,94 2,61 3,36 3,85 LOGPIBtotParHab2005 2,69 3,43 4,36 2,72 3,68 4,53 LOGPIBtotParHab1980 2,71 3,22 4,21 2,72 3,49 4,35 ProdtéWNONAgric2005 3521,07 12512,74 60143,17 3201,04 12038,38 67784,68 ProdtéWNONAgric1980 5324,20 12997,31 57448,63 5251,00 11687,27 52875,55 TxCrSurfaceParActifagric -0,30 0,12 0,74 -0,52 -0,11 1,74 TxCrProdtéTerre 0,69 0,71 0,83 0,91 0,93 0,36 TxCrPIBagric 0,99 0,91 0,71 1,02 1,32 0,25 TxCrHectares 0,16 0,12 -0,06 0,06 0,20 -0,08 TxCrPopActiveAgric 0,71 0,20 -0,30 1,18 0,35 -0,66 TxCrPopActiveNONAgric 2,02 1,45 0,97 2,71 1,51 0,23 TxCr%Irrigation 1,14 0,50 1,63 1,44 0,28 0,15 TxCrFertiParHectare 7,84 1,79 0,96 1,62 0,05 -0,44 TxCrKnetparHectare 2,06 0,67 1,22 0,99 0,25 -0,36 TxCrPIBtotParHabitant 0,05 0,80 0,54 0,00 0,55 0,49 TxCrProdtéWNONAgric -0,26 0,42 0,21 -0,39 0,03 0,28 TxCrPIBManufact 1,31 3,40 1,30 1,14 0,32 0,33 TxCrPIBMining 2,04 2,90 1,00 0,97 0,72 0,33 TxCrPIBConstruction 1,61 2,87 0,69 0,50 0,87 -0,29 TxCrPIBCommercesrestoHotels 1,23 1,81 1,11 1,28 1,28 0,68 TxCrPIBTransport 7,61 3,51 2,31 2,20 2,23 1,18 TxCrDémographique 0,95 0,61 0,43 1,19 0,66 0,05 Fecondité1968 6,68 5,74 3,94 8,12 5,57 2,38 Fécondité1993 6,02 3,51 2,26 5,51 2,86 1,28 TxCrFécondité -0,09 -0,38 -0,38 -0,32 -0,49 -0,46

Barycentres des classes Objets centraux

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1. Objectifs et méthode

Nous passons maintenant à la recherche, via l’inférence statistique, des déterminants agricoles et non agricoles de la productivité du travail agricole (moyenne d’un pays).

Nous effectuons deux régressions linéaires multiples (RégLin) du type :

Y

i

= b

0

+ b

1

.X

1i

+ b

2

.X

2i

+ … + b

n

.X

ni

+ ε

i Avec :

Yi la variable dépendante (ou endogène)

Xi les variables explicatives (ou indépendantes ou encore exogènes)

BJ les paramètres linéaires associés aux variables explicatives XJ

εi le terme d’erreur.

Tout d’abord, nous cherchons à mieux comprendre les déterminants du niveau en 2005 de la productivité du travail agricole observée dans les pays. Pour ce faire, nous avons

réalisé 4 régressions linaires multiples dites « A »:

 RegLinA_1 : les variables explicatives testées sont les variables en 1980 (8 variables),  RegLinA_2 : les variables explicatives testées sont les variables en 2005 (6 variables

seulement car nous excluons les valeurs en 2005 de la surface par actif agricole et de la productivité de la terre, puisque leur produit est égal à la productivité du travail en 2005, variable endogène nous cherchons à expliquer par d’autres facteurs que ses leviers directs issus de la décomposition en facteur),

 RegLinA_3 : les variables explicatives testées sont les taux de croissance des variables entre 1980 et 2005 (13 variables),

 RegLinA_4 : les variables explicatives testées sont les variables significatives de RegLinA_1, RegLinA_2 et RegLinA_3.

Dans un deuxième temps, nous allons chercher les déterminants du taux de croissance de la productivité du travail agricole entre 1980 et 2005 à l’échelle des pays. De la même

façon que pour les régressions « A », nous allons procéder par étapes en réalisant 4 régressions linaires multiples dites « B »:

 RegLinB_1 : les variables explicatives testées sont les variables en 1980 (8 variables)  RegLinB_2 : les variables explicatives testées sont les variables en 2005 (6 variables

seulement car nous excluons évidemment les valeurs en 2005 de la surface par actif agricole et de la productivité de la terre, puisque leur produit est égal à la productivité du travail en 2005, variable endogène)

 RegLinB_3 : les variables explicatives testées sont les taux de croissance des variables entre 1980 et 2005 (13 variables)

 RegLinB_4 : ne seront testées que les variables statistiquement significatives des régressions RegLinB_1, RegLinB_2 et RegLinB_3.