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Connaître ses publics et les catégoriser selon leur statut, leur niveau, leur discipline ou encore leurs usages n’est pas suffisant pour rendre sa communication efficace. Pour intéresser les publics à la bibliothèque, il est nécessaire de développer une forme d’empathie, comprendre leurs manières de penser, ce qui les fait agir et à quoi ils accordent de la valeur, connaître leurs préoccupations et leurs logiques d’usage117.

Les enquêtes sociologiques sur les catégories de publics des bibliothèques de l’enseignement supérieur constituent déjà une première approche pour tenter de comprendre comment fonctionnent les usagers. Il est par exemple utile de savoir que l’expérience des étudiants primo-arrivants est caractérisée par une série de ruptures brutales qui génèrent une perte de repères et un sentiment d’étrangeté et d’isolement et que la découverte du monde universitaire, l’apprentissage du « métier d’étudiant » et l’initiation au langage scientifique des disciplines sont sources de difficultés118. Les nouveaux étudiants, entourés d’écrans, sont habitués à l’immédiateté de l’information et à la souplesse des moteurs de recherche qu’ils utilisent de façon intuitive, ce qui entraîne une incompréhension face au fonctionnement des catalogues de bibliothèques (usage des mots-clés et des opérateurs booléens) d’où des usages peu satisfaisants (résultats pléthoriques ou inexistants)119.

Au-delà des enquêtes, les bibliothécaires peuvent essayer de comprendre leurs publics en usant de leur sens de l’observation et en profitant de la proximité géographique avec leurs usagers pour les interroger. Pour le bibliothécaire américain

115 MATHEWS, Brian Scott. Marketing today’s academic library: a bold new approach to communicating with

students. Chicago : American Library Association, 2009, p.14.

116 MUET, Florence et SALAÜN, Jean-Michel. Stratégie marketing des services d’information: bibliothèques et

centres de documentation. Paris : Éditions du Cercle de la librairie, 2001 , p.147.

117 POISSENOT, Claude, « Les publics au cœur de la communication » dans : VIDAL, Jean-Marc (dir.). Faire

connaître et valoriser sa bibliothèque: communiquer avec les publics . Villeurbanne : Presses de l’enssib, 2012, p.19.

118 Voir COULON, Alain. Le métier d’étudiant: l’entrée dans la vie universitaire . Paris : Économica : Anthropos, 2005.

119 CAILLÉ, Alice. Génération Y, premier contact: l’accueil des étudiants de première année de licence en

bibliothèque universitaire. Villeurbanne : École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques,

2015, p.20-21. Voir aussi ASHER, Andrew D. et DUKE, Lynda M. « Searching for answers : student research behavior at Illinois Wesleyan University » dans : DUKE, Lynda M. et ASHER, Andrew D. (dir.). op.cit., p. 74-85.

différents en bibliothèque académique

Brian Mathews, les bibliothécaires ne doivent pas prétendre connaître ce que les publics veulent et ont tout intérêt à comprendre leurs préférences et leurs besoins (en termes sociaux, académiques, de détente, de divertissement, etc.), en se promenant sur le campus, en repérant où les différents publics se réunissent et comment les espaces sont utilisés, en écoutant les conversations et en engageant des conversations avec les différents usagers, en participant aux activités du campus, en utilisant eux-mêmes ce que la bibliothèque offre comme services et collections (par exemple, les ordinateurs publics)120…

Pour connaître les goûts et les référents socioculturels des publics, Émilie Barthet recommande quant à elle de faire de la veille sur les réseaux sociaux utilisés par les usagers (étudier le profil des fans ou followers de la BU, observer les réactions aux publications de la BU), de faire du service public et d’observer les usagers, de demander des statistiques ou des portraits d’étudiants par exemple au Service commun universitaire d'information et d'orientation (SCUIO) pour connaître leurs origines sociales, et de tenter des actions de communication et observer voire solliciter des réactions et des retours de la part d’usagers121. D’une manière générale, évaluer sa communication est nécessaire pour mesurer son efficacité mais aussi pour mieux connaître et comprendre ses publics et améliorer ses prochaines campagnes de communication en conséquence. Plusieurs moyens impliquant un retour des usagers permettent d’évaluer la portée de sa communication et de mesurer ce qui plaît et ce qui fonctionne ou pas : inclure dans son message un « call to action », c’est-à-dire une formulation incitant le destinataire à faire une action (cliquer sur un lien, participer à un évènement ou à un jeu…), lancer une enquête après l’utilisation d’un service pour savoir comment le service a été connu ou après une campagne de communication pour savoir si les usagers se souviennent d’avoir vu ou entendu parler de l’objet de la communication…

En se mettant à la place des publics, les professionnels des bibliothèques peuvent ainsi concevoir une communication assez proche des préoccupations et des références culturelles des usagers pour qu’ils puissent s’y identifier. C’est ce que le SCD de l’UPEC cherche à faire à travers ses campagnes de communication, comme celle de la rentrée universitaire 2018, avec la conception d’un tote bag promouvant les ressources électroniques et dont le visuel rappelle l’univers d’Harry Potter en référence à la sortie du film Les animaux fantastiques 2 à l’automne122. Avant ça, la campagne de 2014-2015 présentait des visuels avec des citations de films et de séries télévisées populaires – le graphiste que nous avons pu interroger déclarait d’ailleurs s’être mis dans la peau d’un étudiant et s’être demandé ce qu’un étudiant faisait beaucoup pour élaborer cette idée en coordination avec les bibliothécaires, en se fondant sur le fait que les jeunes adultes regardent beaucoup de séries123.

120 Brian Mathews centre son propos sur le public étudiant, mais nous considérons que ses recommandations s’appliquent à tous les publics des bibliothèques. MATHEWS, Brian Scott. op.cit, p.xiv et p.2-5.

121 Entretien avec Émilie BARTHET, Directrice-adjointe des Bibliothèques universitaires Jean Moulin Lyon 3, le 7 janvier 2019.

122 Voir une photographie du tote bag en annexe 6.

123 Entretien avec François GENTIL, designer graphique, photographe et plasticien, du collectif de design graphique monsieurgentil.fr, le 25 juillet 2018 .

Être explicite sur les avantages que les usagers peuvent