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Nous avons déjà évoqué la communication web des établissements documentaires dans ses lieux les plus connus, à savoir le site web de la bibliothèque et les réseaux sociaux. Ajoutons le site web de l’établissement académique qui peut plus ou moins mettre en avant son service documentaire – à cet égard, le SCD jouit d’une position favorable sur le site web de l’UPEC puisque le premier onglet du bandeau supérieur est celui des bibliothèques – ainsi que les ENT (Environnement numérique de travail) et autres intranets qui permettent de communiquer en ciblant les publics – une possibilité exploitée par les BU Jean Moulin Lyon 3 qui publient des informations différentes sur les intranets des étudiants et des enseignants - chercheurs193.

Mais ces lieux sont-ils réellement efficaces pour communiquer ? On peut en douter en ce qui concerne le site web, comme le montrent au SCD de l’Université Paris Diderot (Paris 7) des tests d’utilisabilité révélant que les usagers s’en tiennent aux informations pratiques et n’explorent pas la page présentant les services (alors que plusieurs services dont le PEB ne sont pas signalés ailleurs que sur le site) ou encore, à la BU d’Angers, les statistiques selon lesquelles 30 000 requêtes pour la

190 Administration et échanges internationaux

191 Entretien avec Trevor GARCIA, Chargé de la communication du SCD de l’UPEC, le 6 septembre 2018. 192 Entretiens avec Mathilde POULAIN, Directrice de la Bibliothèque universitaire du Havre, le 13 juillet 2018 ; David BENOIST, chargé de mission Web à la Bibliothèque interuniversitaire de Santé , le 6 septembre 2018 ; Olga JEANNAUD, Chargée de la mission communication du SCD de l’Université Nice Sophia Antipolis, le 29 août 2018.

193 Entretien avec Émilie BARTHET, Directrice-adjointe des Bibliothèques universitaires Jean Moulin Lyon 3, le 7 janvier 2019.

bibliothèque s’arrêtent aux informations données par Google – les internautes n’allant pas jusque sur le site web194. Les moteurs de recherche, et Google plus particulièrement, paraissent donc être des lieux privilégiés pour la communication de la bibliothèque. En témoignent également des entretiens menés avec des usagers lors de l’atelier UX sur l’affichage et la signalétique au SCD de Paris 7 qui ont révélé que les étudiants utilisaient peu l’affichage pour trouver des informations et que le premier réflexe était d’utiliser Google195. L’importance de Google dans la recherche d’informations concernant la bibliothèque conduit à s’interroger sur l’opportunité de communiquer à travers Google : les entreprises et les institutions peuvent en effet revendiquer gratuitement leur profil d’établissement avec Google My Business et ainsi ajouter des informations (adresse, numéro de téléphone, site web, photos…), modifier les horaires d’ouverture voire configurer des horaires exceptionnels. Ces informations s’affichent dans le Knowledge Graph196 lorsque

l’internaute fait une recherche sur l’établissement. Être là où les usagers sont, c’est aussi prendre en compte leurs usages et donc, exploiter les possibilités offertes par Google.

« Être là où les publics passent » sur Internet revient donc à communiquer en dehors des limites du site web de l’établissement documentaire, d’où l’intérêt d’exploiter les sites de réseaux sociaux. La création et l’alimentation d’un compte sur Facebook ou Twitter n’entraînant pas toujours le succès escompté, la bibliothèque pourrait aller plus loin en communiquant dans les endroits où les publics sont réellement sur les réseaux sociaux, notamment sur les groupes Facebook que se créent les étudiants pour avoir un moyen de communiquer avec l’ensemble d’une promotion ou d’une classe, ou bien en faisant venir les publics à elle, par exemple à travers l’identification d’usagers et de partenaires sur une publication ou le partage de publications des pages d’associations et de communautés étudiantes, afin d’instaurer réellement une communication communautaire. Certaines BU emploient déjà ces pratiques comme la BIU Santé qui diffuse parfois des informations dans les groupes Faceb ook des facultés de pharmacie et de médecine. Guillemette Trognot est quant à elle réticente à communiquer sur les groupes Facebook créés par les étudiants, considérant que cela pourrait être perçu comme une intrusion de la part d u service documentaire197. L’évolution actuelle de Facebook tend pourtant vers une plus grande importance accordée aux groupes, au détriment des pages. La participation à des groupes pourrait donc être un sujet de réflexion pour les bibliothèques de l’ESR.

Les bibliothèques iront-elle jusqu’à utiliser la publicité ciblée ? Utiliser les outils mis à disposition par les « géants du web » peut en effet poser la question de la légitimité pour une institution publique à financer ces grandes entreprises et à les aider à collecter les données personnelles de ses usagers , d’autant plus si elle décide de payer des services de Google pour que des publicités sur la bibliothèque

194 Entretiens avec Lucie CHANAS, Responsable de l’Observat oire des usages et des espaces de la Bibliothèque des Grands Moulins de l’Université Paris Diderot (Paris 7), le 19 octobre 2018 et Nathalie CLOT, Directrice de la Bibliothèque universitaire d’Angers, le 3 septembre 2018.

195 Je remercie Lucie Chanas de m’avoir transmis des documents relatifs à cet atelier UX.

196 Le Knowledge Graph est un outil permettant à Google, via une base de connaissance compilant des informations sémantiques issues de diverses sources, d’offrir une information structurée centrée sur l’objet de la recherche, en plus de la liste de liens vers d’autres sites. Il permet ainsi aux internautes d’accéde r à l’information qu’ils recherchent sans avoir besoin de naviguer vers d’autres sites.

197 Entretiens avec David BENOIST, chargé de mission Web à la Bibliothèque interuniversitaire de Santé , le 6 septembre 2018 et Guillemette TROGNOT, Responsable des servic es au public et de la communication du SCD de l’INSA de Lyon, le 19 juillet 2018.

communication

apparaissent dans les résultats du moteur de recherche ou bien de payer des services de Facebook pour augmenter les probabilités que ses publications apparaissent sur le fil d’actualité de ses usagers. Pour reprendre les termes de Frédéric Desgranges : « Ne vaut-il pas mieux accorder plus d’énergie au local (…), à l’interaction directe appuyée sur une information descendante utile et bien contextualisée dans les usages réels ? »198. La réflexion autour de la légitimité des lieux de la communication concerne par ailleurs aussi les lieux physiques. Par exemple, Nathalie Clot indiquait qu’elle n’avait jamais souhaité communiquer sur la bibliothèque dans un bar qui était pourtant tout proche de la BU et recevait le même public étudiant199.

L

ES TEMPS DE LA COMMUNICATION

Les moments de la communication sont tout aussi importants que ses lieux afin de s’assurer que le message atteigne le public. Les moments de la communication doivent en effet s’accorder aux moments où le public est le plus réceptif, en fonction de son état d’esprit et de ses besoins. En effet, les usagers sont d’autant plus réceptifs aux messages communicationnels qu’ils ont besoin du service promu au moment où il est promu. Cet enjeu est particulièrement fort en bibliothèque universitaire, car l’établissement documentaire propose des services dont les différents publics n’ont pas besoin en permanence : les usagers auront besoin de ces services ponctuellement au cours de l’année universitaire , voire au cours de leur parcours universitaire ou de leur carrière académique. Il est par exemple notable que l’organisation des études en France est faite de telle sorte que les étudiants de premier cycle n’ont pas nécessairement besoin des collections et des services de la bibliothèque : ils peuvent travailler uniquement sur leurs propres documents issus de leurs cours, conçus comme des synthèses d’ouvrages les dispensant d’aller chercher les sources. C’est particulièrement vrai dans les disciplines scientifiques où, jusqu’en master, les étudiants font davantage des exercices que des recherches200.

L’enjeu est donc de savoir identifier les moments où il faut communiquer en fonction des besoins et des préoccupations des publics, d’avoir une bonne granularité dans la diffusion de l’information et de ne pas « manquer le coche » : communiquer trop en amont, c’est s’exposer au risque que les personnes oublient les évènements ou ne saisissent pas l’intérêt d’un service ou d’une ressource pour eux ; communiquer tardivement, c’est risquer que les personnes n’aient plus besoin du service ou de la ressource en question, aient déjà prévu de faire autre chose le jour d’un évènement ou n’aient pas le temps de s’organiser (en cas de fermeture exceptionnelle de la bibliothèque par exemple).

198 DESGRANGES, Frédéric. Audastudieuse et non délocalisable, la BU d’Angers sur les réseaux sociaux.

Ar(abes)ques. 2018, no 91, p.9.

199 Entretien avec Nathalie CLOT, Directrice de la Bibliothèque universitaire d’Angers, le 3 septembre 2018. 200 JUNG, Laurence. « Je ne travaille jamais en bibliothèque »: enquête auprès d’étudiants non -fréquentants ou

faibles fréquentants. Villeurbanne : École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques, 201 1,

Communiquer en fonction du rythme et des besoins de sa