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Composante énonciative et microsystémique : sens et invariants

D’abord, un argument a priori; l’auxiliarité peut être décrite indépendamment du sens, mais ceci ne signifie pas qu’elle ne doit rien au sens.(…) Rien n’exclut non plus que les propriétés morphologiques de certains auxiliaires soient motivées par leur sens.

(Cotte 1989: 21-22)

7.1 Introduction

Bien que les approches abordées dans le chapitre précédent soient pertinentes à plus d’un titre, nous consacrerons ce chapitre à la poursuite de la recherche du sens de DO en explorant des propositions d’invariance sur le plan de l’énonciation en perspective néo-guillaumienne. Ensuite, nous prendrons en compte la démarche microsystémique qui consiste à relever les pertinences significatives en paires d’opposition.

7.2 Parcours énonciatif sur la signification et l’invariance de

DO

Dans cette section, nous nous intéresserons essentiellement à la variété des approches de sens proposées pour les auxiliaires en général et

pour DO en particulier. En prenant en considération plusieurs études fondamentales s’inscrivant dans la tradition grammaticale anglaise, nous aurions pu prendre comme point de départ les analyses de Palmer (1974) ou de Quirk & alii. (rééd.1993) ; mais il ne nous a pas été donné de constater une quelconque approche invariante du sens ni chez F. R. Palmer, ni dans la grammaire de R. Quirk & alii, qui reste pourtant une des grandes grammaires descriptives dont la notoriété est restée inconstestée jusqu’à la fin du XXe siècle. (Cette valeur descriptive avérée vient confirmer à juste titre le point de vue traditionaliste énoncé en 6.6.) Ce qui nous réduit à l’examen direct des propositions linguistiques et théoriques tributaires des courants énonciativistes néo-guillaumiens et sémantiques. Dans ce cas la démarche chronologique nous semble pertinente à plus d’un titre.

7.2.1 H. Adamczewski : « La trace de l’opération de prédication »

En partant initialement d’un constat d’homologie de structuration entre l’emploi de DO en tant que métaopérateur et l’article défini, Adamczewski (1974) va ensuite (Adamczewski, 1977 : 2) proposer le point de vue suivant sur l’emploi métaopérationnel de DO :

DO est la manifestation en surface d’une propriété remarquable des

énoncés où il apparaît (…) à savoir que le caractère préconstruit, présupposé de la relation sujet-prédicat (…) nous sommes ici dans le métalinguistique.103

103 Le contenu des travaux d’Adamczewski (1974) « Esquisse d’une théorie de DO » Neuchâtel ; et

(1977) « Le concept de saturation en linguistique anglaise et en linguistique générale » Tours : SAES, est cité par Delmas (1987 : 163).

Dans le système de représentation méta-opérationnelle, les implications d’une telle analyse peuvent être schématisées de la façon suivante :

opération

relation présupposée

Figure 9 : Représentation méta-opérationnelle de la portée prédicative de DO

(Adamczewski : 1977 ; 1982)

Il s’agit ici de l’étude d’une proposition d’invariance limitée à l’emploi métaopérationnel de DO (proche de la valeur d’auxiliaire). Cette démarche va trouver son élargissement dans le cadre d’une recherche qui marque l’aboutissement des concepts de la grammaire métaopérationnelle : Grammaire linguistique de l’anglais.

Dans le cadre de l’étude générale des « énoncés avec DO » (notamment, l’emphase, l’interrogation et la négation ; etc.) en grammaire métaopérationnelle, Adamczewski (1982 : 79-107) observe que DO n’apparaît seulement que dans le cadre des temps notionnels de l’anglais et propose d’emblée une analyse contrastive avec le français avant d’aboutir à la conclusion provisoire suivante :

Bien que notre démonstration soit à peine amorcée, nous pouvons d’ores et déjà dire que do est l’indice de surface d’opérations qui portent sur la prédication, plus exactement sur le lien prédicationnel. Que les opérations d’emphase, d’interrogation et de négation concernent au premier chef le lien prédicationnel (« la soudure » entre sujet et prédicat devrait être acceptée sans difficulté à ce stade, puisque l’emphase porte forcément sur la réalité du lien, que l’interrogation le met en question et que la négation le nie). Dans les trois cas il s’agit donc d’opérations

purement métalinguistiques c’est-à-dire appartenant en propre à ce domaine où la langue enregistre ses propres opérations d’encodage.

Cette définition qui nous situe au plan des opérations d’énonciation, cherche à attribuer un invariant métalinguistique à DO en s’appuyant sur sa portée prédicative. Ce qui reste légitime et justifiable. Cependant on peut déplorer la frustration qu’entraîne l’absence – en fin d’analyse (page 107), de conclusion définitive faisant suite (a posteriori) à cette conclusion provisoire. Ce qui revient à en déduire que cette conclusion vaut pour les deux (la provisoire et la définitive) ; d’ailleurs Adamczewski (1982 : 84) s’en doute lorsqu’il tient le propos suivant à la fin de la conclusion provisoire :

Pour l’instant il ne s’agissait que d’offrir au lecteur le fil d’Ariane qui lui permettra d’accéder à la compréhension de tous les emplois de do derrière l’invariant que nous avons pu déceler dès les premières analyses.

Ceci revient à dire qu’il nous incombe de rechercher et d’accéder à la conclusion (par « la compréhension de tous les emplois de do ») basée sur l’invariant décelé : DO : « indice de surface d’opérations qui portent sur la prédication, plus exactement sur le lien prédicationnel ». Quels peuvent être l’étendue et les implications d’une telle invariance sur le linéaire ?

7.2.2 C. Delmas : « l’interface DO dans le linéaire »

Tout en réfutant l’hypothèse d’un « unmeaning form word », l’analyse de Delmas (1987 : 158-70) complète l’approche énonciative de DO par un examen de « l’interface DO dans le linéaire » avec la mise en

place des concepts de vecteur, de connexion sémique et de rafle métalinguistique. Ce qui permet de profiler une certaine continuité structurale. En établissant une distinction entre DO1 dit pro-sémique et DO2 dit métaopérateur, Delmas (1987) propose l’analyse suivante :

Les diverses phases du fonctionnement de DO appellent le concept de

vecteur. En début de vecteur, DO joue le rôle de « trait quasi-

syntaxique », de marqueur de place verbale. Il représente alors l’invariant qui réconcilie les verbes d’action ; d’où l’utilisation que nous faisons du terme de « trait ». A ce stade, il marque donc une certaine incomplétude sémique, incomplétude qui peut être diversement réparée avec WHAT, THIS, THAT, SO, SOMETHING. Ce trait peut, à défaut d’une plus grande information, jouer le rôle de recharge minimale. (…)

Le DO métaopérateur est lié à une structuration plus profonde. Il joue le

rôle d’interface prédicationnel et peut être associé par coordination à un modal : (…)

Contrairement au DO métaopérateur qui sert d’interface prédicationnel, le DO pro-sémique n’est pas encore un relateur prédicationnel car en constituant une opération première sur le vecteur, il sert à construire la « matière première » sémique du prédicat. Bien qu’inscrit dans une sorte de continuité, la différence entre DO1 et DO2 peut

être schématisée (représentation en ellipsoïde avec valeur vectorielle) de la façon suivante (Delmas 1987 : 161) :

I S ∆ … DO …

II S DO V

Figure 10: Représentation ellipsoïdale et vectorielle de la portée de DO pro-

sémique (I) et de DO métaoperateur (II) (Delmas : 1987)

Avec l’emploi de DO pro-sémique en I, on a affaire à une connexion sémique avec visée transitive dans laquelle le sujet est potentiellement agent alors qu’en II, on a affaire à un emploi métaopérationnel de DO qui suppose une connexion prédicative pouvant entraîner « une mise en abîme, non pas de programmes sémiques simples, mais de programmes sémiques ayant subi une conversion à partir de la notion » comme dans le cas d’emploi métaopérationnel de DOES. Bien qu’elle s’inscrive dans la même perspective structurale, le concept de rafle métaopérationnelle est lié à la troncation ; et de ce fait, il sera réexaminé infra (voir chapitre suivant et passim).

7.2.3 J-C. Souesme : « La fonction unique de DO »

Résolument inscrite dans le courant énonciativiste et axée sur l’étude de do something, la proposition de J.C. Souesme (1985; 1989 : 91- 151) – en faisant appel aux concepts énonciativistes culioliens, repose sur

une démarche allant de la variation à l’invariance. La démarche variationniste de Souesme (1985 : 295-303) consiste à proposer initialement une fonction à DO (a) dans les cas de reprises de prédicat (b) puis dans les cas où DO est auxiliaire ou opérateur.

Dans les cas de reprise de prédicat correspondant aux emplois du type do it, do this, do that, do so, Souesme (1985) émet la proposition suivante :

Selon nous, le do de toutes les formes de reprise de prédicat est un verbe ‘dévitalisé’. C’est un simple support prédicatif dont la présence est nécessaire pour assurer la cohésion syntaxique – et préserver le schéma < a r b > de tout énoncé canoniquement bien formé– lorsque it, this, that, so fonctionnent en tant que méta-opérateurs renvoyant au prédicat antérieur. (…) Do indiquerait la remise en cause du procès antérieur, sans pour autant le reprendre lui-même.

Lorsque DO est auxiliaire ou opérateur, Souesme (1985) propose une « fonction intrinsèque » liée à ses conditions d’emploi en partant de l’étude d’un énoncé tiré d’un dialogue de film. Ce qui l’amène à faire la proposition suivante :

Do est selon nous l’opérateur de mise en cause de la validité de la relation prédicative antérieure, c’est-à-dire une fois celle-ci débarrassée de toute opération de détermination, i.e. de tout repérage modal, aspectuel ou temporel.

Bien que la différence entre les deux types de fonctions soit tenue, il convient de préciser que Souesme (1985) insistait déjà sur une distinction absolue et nécessaire entre les termes « prédication » et « relation prédicative ». Ce constat l’ayant inéluctablement conduit à mettre en place une fonction unique de DO formulée dans les termes suivants :

Par suite, nous pensons pouvoir généraliser et considérer que dans do + ( ), do est le marqueur de surface indiquant que l’énonciateur a effectué une opération sur une notion prédicative.

Souesme (1985) en conclut que les deux inférences de sens proposées plus haut en termes de fonction dérivent du sens général ci-dessus selon que DO est opérateur de mise en cause d’un prédicat ou auxiliaire. Il reste à se demander si cette fonction unique s’applique explicitement à d’autres valeurs de DO non prises en compte dans cette approche. Souesme (1989 : 131 ; 136) en fournira la réponse conclusive suivante : « DO est donc l’opérateur de mise en cause de la validité d’une relation

prédicative antérieure »104.

En partant de la distinction que Gauthier (1976 : 389) établit entre DO transitif (do1), DO pro-verbe (do2) et DO périphrastique (do3), J.C.

Souesme (1985 : 317-9) reconnaît les limites de la théorisation et prolonge l’analyse initiale en proposant (suivant les remarques de T. Lattes) une « solution de discontinuité dans la diversité des emplois de DO » :

…faire de do un « opérateur modal de certain » constitue une proposition identique à la nôtre et nous ne la contesterons pas ; faire de do un opérateur modalo-aspectuel et un opérateur de diathèse active nous paraît convaincant également mais on ne voit pas bien sur lequel de ces opérateurs on va par exemple greffer le DO1 ou le DO2 de A. Gauthier.

Nous devons donc considérer que ce travail de synthèse qui demeure fondamental reste à faire.

Bien qu’il soit évident de reconnaître que le mérite d’un tel point de vue repose sur sa capacité à rechercher une « fonction » énonciative de DO,

on peut néanmoins confirmer qu’un travail reposant sur une solution de discontinuité est effectivement loin d’être achevé. C’est d’ailleurs dans cette perspective que la position adoptée par Souesme (1985 et passim) garde tout son intérêt. En cela, elle rejoint sensiblement celle qu’avait déjà formulée J. Lavédrine (1978 : 214) selon laquelle DO pourrait être considéré comme « opérateur de validité et indice du débat de validité de la prédication ». Bien évidement, il convient de signaler que les propositions analysées ci-dessus ont été reprises et complétées dans Souesme (1992 et 2000). Nous en ferons une exploitation extensive dans les analyses subséquentes ; notamment l’approche contrastive DO/MAKE que nous nous proposons de considérer infra (cf. 7.3).

Mais au paravant, notons qu’il convient d’examiner deux autres propositions d’analyse sémantique de DO. Nous analyserons donc successivement la proposition unitaire de Stein (1990), puis l’analyse psycho-grammaticale proposée par Lapaire & Rotgé (1991).

7.2.4 D. Stein : « the semantic unity of do-uses »

Inscrite dans une approche historique et structurale, la proposition sémantique unitaire de Stein (1990 : 267-84) s’appuie principalement sur la négation, l’exclamation, l’emphase et l’inversion. Toutes ces opérations syntaxiques vont être analysées en termes d’opération sur la « valeur de vérité » de la proposition. En partant de ces considérations, Stein (1990 : 278) va aboutir à la conclusion provisoire selon laquelle :

If one considers the uses of do in Standard English as they developed from stage III [Early Modern English] onwards, then, “truth or untruth of the proposition” is the common denominator.

Ainsi, si la négation nie la valeur de vérité de la proposition affirmative, l’exclamation, au même titre que la négation et les questions bipolaires (cf. inversion en yes-no questions), présuppose la proposition sur laquelle elle opère en termes de valeur de vérité. Bien plus, l’exclamation est contrastive car elle exprime » la surprise par rapport à l’attente. Quant à l’emphase, elle ne s’en démarque pas dans la mesure où « the semantics of emphatic do in Modern English, of which the first occurrences are observed around 1600, may be characterized as both contrastive and focused on the truth of the proposition ».

Au delà de cette unité de sens que D. Stein propose pour les occurrences auxiliées de DO, on serait bien en droit de se demander si elle s’applique aussi à l’emploi lexical de DO. A cette préoccupation Stein (1990 : 299) apporte la précision suivante :

The upshot of the discussion of the semantics of do in the present study is that all uses including the main verb use of do seem semantically related, with a very basic factive and change of state semantics, involving a contrast to previous states.

Donc de DOAUX à DOLEX, on serait donc passé du travail sur la

« valeur de vérité » de la proposition au contraste, puis du contraste à la valeur factitive impliquant le changement d’état. Bien que Stein propose des explications qui puissent rendre compte des mécanismes en jeu, on pourrait affirmer que l’on n’est plus en présence d’une unité componentielle stricte, mais d’une unité en termes de continuité. Ce qui reste un apport non négligeable dans l’analyse invariante de DO.

Sur un plan purement énonciativiste, on retrouve chez Larreya & Rivière (1991) une analyse en termes de « valeur de vérité », de présupposition et de substitution.

7.2.5 P. Larreya & C. Rivière : DO - valeur de vérité & présupposition Inscrite dans le cadre des théories de l’énonciation, la proposition invariante de Larreya & Rivière (1991 ; 1999) se fonde essentiellement sur l’analyse des constructions emphatiques d’une part, et de l’ellipse et le remplacement d’autre part. Le tout étant sous-tendu par le concept de la présupposition qui remonte à Larreya (1979)105. Dans cette perspective d’analyse, Larreya & Rivière (1991 : §20.4) formulent la proposition suivante :

En fait, DO – quel que soit son emploi – est toujours la marque d’une

opération portant sur la valeur de vérité (le caractère vrai ou faux) d’une

proposition qui a déjà été posée dans le contexte précédent (ou qui est

présentée comme ayant déjà été posée). Dans le cas du DO emphatique

des phrases déclaratives, on affirme avec force le caractère vrai d’une proposition qui a été niée ou mise en doute dans le contexte précédent (ou du moins que l’on présente comme ayant été niée ou mise en doute) ».106

Ainsi, en tant que « mise en relief », l’emphase est une opération dans laquelle DO indique le caractère vrai ou faux d’une proposition. Par

105 En distinguant le présupposé du posé et du sous-présupposé, Larreya (1979 : 59) définit le présupposé

comme « l’information que le locuteur suppose ou feint de supposer commune à lui-même et au destinataire ».

106 Il convient de signaler que Larreya & Rivière (1999) ne reprennent pas les termes « valeur de

vérité » ; mais conservent tout de même le « caractère vrai ou faux d’une proposition ». Ce qui n’implique pas a priori un changement dans leur démarche explicative.

conséquent, DO « pose le caractère vrai (faux dans le cas de DO + négation) d’une proposition qui est reprise » et « est porteur de l’accent emphatique »107 comme tout autre auxiliaire qui serait placé en premier dans le groupe verbal.

Etant donné que la valeur de vérité porte sur une proposition reprise, il y a nécessairement présupposition. De même, dans la négation ou l’interrogation, l’opération « posée » par DO est sensiblement la même ; c’est pour cela que Larreya & Rivière (1999 : § 20.6) admettent que (voir aussi Larreya & Rivière : 1991 : § 20.4) :

Le mécanisme du DO emphatique n’est pas très différent, en fait, de celui

du DO utilisé pour la négation ou l’interrogation (si l’on met à part

l’absence habituelle d’une accentuation forte de DO avec les formes

négatives ou interrogatives) : le fait de nier une proposition, tout comme le fait de demander si elle est vraie, implique son existence préalable (autrement dit implique que son contenu est d’une certaine façon présupposé). Ceci est à mettre en relation avec la valeur générale de DO :

si DO peut remplir cette fonction, c’est parce qu’il est toujours le substitut

d’un verbe ou d’un ensemble verbe + compléments.

Nous sommes donc en présence de deux perspectives d’analyse qui s’imbriquent l’une dans l’autre : (a) la fonction de DO en tant qu’opération sur le caractère vrai ou faux d’une proposition, et (b) la valeur générale de DO en tant que substitut d’un verbe avec ou sans ses compléments. La fonction de DO apparaîtrait comme la conséquence de sa valeur générale.

A la suite de l’analyse des phénomènes d’ellipse et de remplacement, cette même valeur générale de DO (cf. substitut) permettra à Larreya et Rivière (1999 : 361) de proposer trois statuts pour DO : (1) « Do verbe lexical », (2) « Do verbe de remplacement de verbe (+

107 Larreya & Rivière (1999 : 246) reconnaissent par ailleurs que « ce n’est pas obligatoirement DO (ou

compléments) » et (3) « Do auxiliaire, substitut du verbe (+ compléments) ».

Cette analyse en termes de présupposition et de valeur de vérité a le mérite de rechercher une sorte d’invariant qui rende compte de la valeur et du fonctionnement général de DO. Il en découle qu’en tant que substitut de tout verbe (+ compléments), DO permet donc de poser la valeur de vérité d’une proposition déjà posée (donc présupposée).

Sur un plan psycho-grammatical, on pourrait se demander si le travail sur la valeur de vérité renvoie probablement à une opération sur la validation du lien sujet / prédicat. Dans cet ordre d’idée, il conviendrait d’analyser la proposition psycho-grammaticale de Lapaire & Rotgé (1991).

7.2.6 J-R. Lapaire & W. Rotgé : « DOAUX outil de manipulations psycho-

grammaticales »

Dans une approche énonciative inspirée de plusieurs courants néo- guillaumiens, Lapaire & Rotgé (1991) formulent une approche basée sur le « travail mental qui gouverne le choix des signes et leur agencement en énoncés ». D’une façon générale, ces auteurs (1991 : 524) s’inscrivent en faux contre la conception traditionnelle de l’auxiliaire et s’accordent à défendre l’idée selon laquelle les auxiliaires ne sont pas des « verbes amnésiques » : 108

L’inconvénient majeur de cette conception est qu’elle a tendance à placer les auxiliaires sur le même plan en n’y voyant qu’une série de verbes

outils vidés de toute substance. S’il est exact que HAVEAUX, BEAUX et

DOAUX semblent s’être dépouillés des traits de sens que HAVELEX, BELEX et

DOLEX contenaient, il n’est pas moins vrai qu’ils en ont conservé

l’empreinte abstraite. C’est cette empreinte qui les différencie et qui

conditionne le type de relation qu’ils instaurent entre le sujet S et le prédicat P. En faire des verbes amnésiques – qu’on nous passe cette formulation– est donc profondément réducteur.

Pour ce qui est de la valeur énonciative de DOAUX, Lapaire & Rotgé

(1991 : 523-36) reprennent l’approche énonciative proposée supra par Adamczewski (1982) (cf. 7.2.1) et procèdent à l’analyse d’une série d’énoncés avant de formuler une valeur commune (un invariant en quelque sorte) pour tous les emplois de DOAUX.

Si un même DOAUX est requis dans des constructions obéissant à des objectifs énonciatifs très différents (« nier », « interroger », « persuader », « confirmer », etc.), c’est que ces constructions traitent

d’un sujet, d’un thème langagier commun. Ce « thème », nous allons

le voir à la suite de H. Adamczewski, est la validation du lien Sujet /