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Depuis 2015, des ferrocènes hybrides difonctionnels possédant une fonction amine secondaire ou tertiaire, ainsi qu’un groupement phosphine sur chaque Cp ont été synthétisés au laboratoire.60 Différents groupements ont été introduits sur la phosphine, afin de pouvoir étudier leurs effets électroniques sur la coordination du phosphore avec des métaux de transition, et l’utilisation de ces complexes dans des réactions catalytiques. Ainsi, le groupement phényle peut être remplacé par un groupement ayant un caractère plus électro-donneur, l’isopropyle, ou par un groupement plus électro-attracteur, comme le méthylfuryle (Schéma I-48). Ensuite, des groupements acycliques (méthyle et éthyle) ou cycliques (sous forme de pyrrolidine) ont été introduits sur la fonction amine.

Schéma I-48 Ferrocènes doublement difonctionnalisés.

La synthèse de ces composés (N,N')-diamino-(P,P')-diphosphinoferrocène tertio-butyle peut être réalisée de deux manières différentes. Pour commencer, le composé 85 a été formé par la voie de synthèse convergente, c’est-à-dire en fonctionnalisant chaque cyclopentadiényle

tertio-butyle lithium avant de les assembler par ajout de dichlorure de fer (Schéma I-49). En

d’obtenir le Cp difonctionnalisé E. Puis l’ajout d’hydrure de lithium suivi de l’assemblage des cyclopentadiènes par FeCl2, forme deux isomères du ferrocène 85, rac et méso avec une majorité de l’isomère rac dans un ratio 2:1.

Schéma I-49 Voie de synthèse convergente utilisant un sel lithium de cyclopentadiényle.

Lorsque la voie de synthèse divergente est utilisée pour former des ferrocènes du type du composé 85, de meilleurs rendements sont obtenus avec une haute diastéréosélectivité. Une réaction de lithiation du composé 83 est réalisée en présence de TMEDA, puis l’intermédiaire lithien obtenu est mis à réagir avec du DMF pour former le ferrocène dicarbaldéhyde 86, obtenu avec un rendement de 75% (Schéma I-50).63 Puis, une réaction d’amination réductrice sur le dicarbaldéhyde, en présence d’amines secondaires et de l’hydrure NaBH(OAc)3, permet d’obtenir les N-aminoferrocènes 8788 avec de très bons rendements allant de 74 à 95%.

Schéma I-50 Synthèse de liagnds N,N’-amino-P,P'-phosphinoferrocènes par une voie de synthèse de post-fonctionnalisation de 83.

La lithiation de l’aminoferrocène est suivie de l’addition de chlorure de phosphine pour former sélectivement les ligands N,N’-amino-P,P’-phosphinoferrocènes 8992 de conformation rac avec des rendements allant de 48 à 78% (Schéma I-51).

Schéma I-51 Synthèse de liagnds N,N’-amino-P,P’-phosphinoferrocènes par voie de synthèse divergente.

La comparaison de ces deux voies de synthèse montre bien la haute sélectivité de la synthèse divergente, qui permet de former uniquement des ferrocènes rac portant trois substituants différents sur chaque Cp. Pour cette raison, la voie de synthèse divergente sera l’unique voie utilisée pour les synthèses décrites dans les chapitres suivants relayant les travaux de cette thèse.

Ces ferrocènes 89–90 et 92 ont pu être étudiés en complexation avec deux métaux de transition : le palladium et l’or. La complexation au palladium a montré des résultats intéressants avec deux conformations différentes en fonction de la quantité de palladium mis en réaction.64 En effet, si un équivalent de précurseur de palladium est ajouté alors les atomes de phosphore seulement se coordonnent au palladium pour former un complexe hétéroannulaire (complexes 93a–c, Figure I-16). Alors que si deux équivalents de palladium sont ajoutés, chaque atome de palladium va se coordonner au phosphore et à l’azote formant un complexe dinucléaire homoannulaire, 94ac.

Figure I-16 Structures de DRX des complexes de palladium 93a–c et 94a–c.

Les deux complexes ont montré des modes de coordination qui induisent une orientation des substituants différente sur le ferrocène. Malgré la présence des groupements tertio-butyle très encombrants, le ferrocène est capable de pivoter suffisamment pour stabiliser les complexes formés de type 93. Ainsi, la coordination du phosphore avec le palladium est favorisée par rapport à la coordination du palladium avec l’azote (ce qui avait été déjà souligné dans la partie 1 précédente).

En ce qui concerne la complexation de ces ligands à l’or, la géométrie linéaire favorisée de l’or(I), avec ces mêmes ligands induit la nécessité d’ajouter deux équivalents de précurseur d’or afin de former un complexe avec un rendement quantitatif (Schéma I-52).65 Ces ligands ont pu ensuite être utilisés dans une réaction de type Suzuki pour l’arylation d’iodoarènes, qui

a montré une très bonne sélectivité du ligand 90 portant une phosphine avec un fort caractère électro-donneur, l’isopropyle (complexe 95).

Schéma I-52 Complexe 95 utilisé dans l’arylation d’iodoarènes.

Dans notre laboratoire, une nouvelle famille de ligands Phosphine/Amine a également été synthétisée.61,66 Il existe deux exemples de ligands appartenant à cette famille, il s’agit des

3,3'-tert-butyle-1-diphosphino-1’-diéthylaminométhylferrocènes portant une phosphine et une

amine en position hétéroannulaire. La synthèse débute à partir du rac 3,3'-di-tert-butyle-1,1'-dibromoferrocène 84, où le groupement phosphine va être introduit après la lithiation sélective

du ferrocène pour former les phosphinoferrocènes 9697 (Schéma I-53).61 Ensuite, une seconde lithiation sélective va avoir lieu suivie d’une formylation afin d’introduire l’aldéhyde conduisant aux ferrocènes carbaldéhyde 98–99.

Puis, à partir des ferrocènes carbaldéhyde, une réaction d’amination réductrice, en présence de la diéthylamine, est réalisée afin d’obtenir les produits 100–101 avec un rendement de 70 et 30%, respectivement (Schéma I-54).

Schéma I-54 Synthèse des ferrocènes amidophosphines 100101.

L’utilisation de cette voie de synthèse, pour introduire des amines secondaires ou tertiaires proche du squelette ferrocénique, est très intéressante, et elle peut être utilisée pour placer différents substituants sur la phosphine. L’étude des ligands ferrocène P/N en chimie de coordination puis dans des réactions catalytiques ouvre la possibilité d’explorer les propriétés d’hémilabilité sur l’activité et la sélectivité de réactions innovantes, telles que le couplage de Suzuki à l’Au(I) (d10) au lieu du Pd(0) (d10).