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Comportements le jour de l’abattage dans les parcs et lors de l’abattage

Chapitre 3 Résultats et discussion

3.4 Comportements le jour de l’abattage dans les parcs et lors de l’abattage

Le tableau 3.8 présente les facteurs ou comportements qui ont été observés avant l’abattage et durant l’abattage.

Tableau 3.8 Facteurs observés le jour de l’abattage

Variable Moyenne Écart-Type Minimum Maximum

Décibels attente abattage 80,05 2,24 72,60 83,80

% porcs agressifs avant abattage1 2,72 2,59 0,00 10,99

% porcs couchés avant abattage1 65,67 17,05 28,02 91,11

Température douches abattage 35,03 5,62 24,00 48,00

% blessures 16,80 10,33 5,86 40,66

Pression de CO2 92,39 1,43 89,00 95,00

% porcs s’entassent abattage2 1,62 1,14 0,00 4,68

% porcs glissent ou tombent au CO23 1,63 1,46 0,00 4,39

% porcs fuient, refusent, reculent au CO23 26,57 10,42 9,01 51,65 % porcs se couchent ou s’assoient au CO23 1,78 1,79 0,00 6,76

% porcs grimpent au CO23 1,38 1,66 0,00 8,91

% porcs s’entassent au CO23 0,45 1,04 0,00 5,32

Durée d’abattage (min) 78,55 21,49 37,00 112,00

Durée d’abattage (/porc) 0,38 0,05 0,29 0,49

Nombre de porcs abattus 207,10 49,80 91,00 256,00

1Ces observations ont été faites le lendemain de l’arrivée des porcs dans les enclos.

2Ces observations ont été fait dans les parcs d’attente au moment de l’abattage

Les comportements d’agression et de repos (porcs couchés) le jour de l’abattage, soit le lendemain du déchargement, ont été observés et les facteurs affectant ces comportements sont présentés aux tableaux 3.9 et 3.10.

Tableau 3.9 Facteurs influençant le pourcentage de porcs d’agressifs le jour de l’abattage

Facteurs Coefficient ou

moyenne Écart-type P-Value

Variables quantitatives %Porcs agressifs 0-10min après

déchargement -0,450 0,181 0,025

%Porcs couchés 2h après déchargement 0,047 0,014 0,003

Température intérieure moyenne 0,386 0,106 0,003

Décibel attente 0,892 0,216 0,001

Variables qualitatives, %porcs agressifs

Saison 0,001

Automne 3,79a 0,69

Été 5,83a 0,11

Hiver 0,36b 0,78

Printemps 1,11ab 1,57

Les lettres a et b représentent des différences significatives entre les résultats (p < 0,05) R2 = 88,48% et R2 ajusté = 81,99%

Tout d’abord, comme il est indiqué dans le tableau 3.8, la moyenne du pourcentage de porcs agressifs le jour de l’abattage est de 2,72 %. Cette valeur est plus faible que celles observées durant les 2 heures après le déchargement. Les comportements agressifs après le déchargement ont généralement lieu dans les 60 premières minutes, avec des pics surtout autour de 30-40 minutes ou 40-50 minutes, pour ensuite observer une baisse de ce comportement (Geverink et al., 1996; Fraqueza et al., 1998; Brown et al., 1999). Par contre, les comportements agressifs toujours présents le jour de l’abattage peuvent être attribuables au jeûne à l’abattoir qui contribue à augmenter la frustration et la nervosité des porcs (Faucitano, 2018). Les résultats de l’étude du pourcentage de porcs agressifs le jour de l’abattage ont montré une relation négative avec le pourcentage de porcs agressifs entre 0 et 10 minutes (et donc probablement durant la première heure après le déchargement). Il semblerait que plus les porcs sont agressifs entre eux durant les 10 premières minutes après le déchargement, moins il y aura de porcs agressifs le jour de l’abattage (Tableau 3.9). Il est probable que des conflits associés à la dominance plus importants dès le rassemblement des porcs viennent réduire les agressions plus tardives considérant que le statut hiérarchique est déjà partiellement établi dans les 2 heures suivant le déchargement. En fait, il est intéressant de noter que le pourcentage de porcs agressifs le jour de l’abattage était également lié au nombre de porcs couchés 2 heures après le déchargement : plus il y a de porcs couchés 2 heures après le déchargement, plus il y aura de porcs agressifs le jour de l’abattage.

Zhen et al. (2013) ont observé différentes périodes d’attente à l’abattoir et ont obtenu un taux de cortisol sanguin plus faible chez les porcs qui avaient passé 3 heures d’attente à l’abattoir avant d’être abattus comparativement à ceux qui avaient passé 8 ou 24 heures à l’abattoir avant d’être abattus. Ils expliquent ces résultats en mentionnant que le taux de cortisol sanguin diminue généralement pour atteindre un taux normal de 2 à 3 heures après le déchargement et que les taux plus élevés de cortisol sanguin à 8 et à 24 heures d’attente à l’abattoir seraient liés au nombre plus élevé d’agressions et de blessures chez les porcs de ces groupes. On peut donc supposer que les porcs 2 heures après le déchargement sont reposés du stress causé par le transport et le déchargement et qu’ils auront tendance à se coucher et que si les animaux passent plus de 3 heures dans les parcs, ceux-ci auront tendance à avoir encore des comportements agressifs plus tard. Après de 3 à 4 heures d’attente ou lorsque l’attente dure toute la nuit, les comportements agressifs reprennent et les taux sanguins de cortisol peuvent augmenter (Álvarez et al., 2009).

Parmi les autres facteurs associés au pourcentage de porcs agressifs le jour de l’abattage, nous avons pu identifier la température ambiante dans l’abattoir et la saison. L’augmentation de la température ambiante de l’abattoir est associée positivement au nombre de porcs agressifs. Cette association suit ce qui a été observé pour l’effet de la saison, où en été et en automne, le pourcentage de porcs agressifs était plus élevé comparativement à celui observé en hiver et avec une valeur intermédiaire pour le printemps. D’autres chercheurs ont observé des résultats contraires, c’est-à-dire une hausse des agressions en conditions plus froides (Dalla Costa et al., 2007). Dans le cas de la présente étude, il serait possible d’expliquer ce résultat encore par la présence de douches avant l’abattage (Weeding et al., 1993). Pendant l’hiver, les douches étaient souvent en fonction seulement 30 minutes (généralement entre 6 h et 6 h 30 le matin) en raison de la température (moyenne 16,3 ºC avec un minimum de 13,2 ºC et un maximum de 20,5 ºC) à l’intérieur de l’abattoir à ce moment. Lorsque les animaux étaient observés en hiver, les douches n’étaient donc pas en fonction. Le pourcentage plus élevé de porcs agressifs observés pendant l’été et l’automne pourrait s’expliquer par l’action des douches qui est connu pour augmenter l’activité des porcs.

Enfin, nous avons pu mettre en évidence une relation positive entre le niveau de décibels et le pourcentage de porcs agressifs. L’élément pouvant expliquer ce lien est que lorsqu’en présence de comportements agressifs, il n’est pas rare d’entendre les porcs crier parce qu’ils viennent de se faire mordre ou attaquer. En général, les vocalisations moyennes des porcs représentent des valeurs entre 80 et 103 décibels (Weeks et al., 2009). La moyenne de nos observations se situait à 80,05 décibels, ce qui permet de croire que la présence de vocalisations est en partie responsable des niveaux de décibels obtenus. Les autres éléments contribuant à l’augmentation des décibels sont la machinerie pour l’abattage et la ventilation (Weeks et al., 2009). Bien que la hausse du niveau de décibels puisse être une conséquence de l’activité des porcs, il est possible que cette hausse du niveau sonore soit une cause de la hausse du nombre de porcs agressifs. Lorsque

les porcs perçoivent des niveaux de décibels élevés, soit au moins entre 80 et 90 décibels, ils auront tendance à être plus stressés et se tiendront plus près les uns des autres pour se « protéger » de l’élément stressant (Geverink et al., 1998). Comme les porcs se tiennent plus près les uns des autres, il est possible que les comportements agressifs augmentent, puisque les porcs se retrouvent alors en densité plus élevée dans une section du parc, ce qui peut augmenter les incidences d’agressions (Llonch et al., 2017).

En ce qui concerne le nombre de porcs couchés le jour de l’abattage, il serait inversement lié au pourcentage de porcs couchés entre 0 et 10 minutes et 2 heures après le déchargement (Tableau 3.10). Cela signifie que plus il y aurait de porcs couchés dans les premières heures après le déchargement, moins il y aurait de porcs couchés le lendemain. Les animaux couchés rapidement après le déchargement sont généralement ceux qui sont épuisés en raison du chargement, du transport et du déchargement (Weschenfelder et al., 2012). Après cette période de récupération, les porcs sont probablement plus actifs. D’ailleurs, nous avons observé que le pourcentage de porcs couchés 2 heures après le déchargement était positivement associé au pourcentage de porcs agressifs le jour de l’abattage. Malgré cette relation négative, le pourcentage de porcs couchés a augmenté entre 2 heures après le déchargement et le jour d’abattage, passant de 54 à 68 %. Les données publiées par Brown et al. (1999) ont également montré que le nombre de porcs couchés augmentait avec le temps après le déchargement.

Tableau 3.10 Facteurs influençant le pourcentage de porcs couchés le jour de l’abattage

Facteurs Coefficient Écart-type P-Value % porcs couchés 0-10 min -1,503 0,488 0,011

% porcs couchés 2 h 0,250 0,116 0,056

Décibels attente -5,976 1,60 0,003

Durée du déchargement 1,54 0,603 0,027

R2= 91,84% et R2 ajusté = 86,20%

Comme dans le cas du pourcentage de porcs agressifs, les décibels moyens le lendemain du déchargement sont associés au pourcentage de porcs couchés. Toutefois dans ce cas, les décibels étaient négativement associés au pourcentage de porcs couchés. En fait, plus le niveau de décibels est élevé, moins il y aura de porcs couchés. Cela est probablement en lien avec le fait que les porcs auront tendance à être plus calmes lorsqu’il y a moins de bruit. Des niveaux de décibels entre 80 et 90 contribueraient à augmenter le rythme cardiaque des animaux, ce qui démontre un stress face aux bruits à l’abattoir (Grandin, 2018). Les porcs stressés auront donc moins tendance à se coucher et à se reposer, ce qui contribue à diminuer le nombre de porcs couchés lorsque les décibels sont plus élevés. Un autre aspect à considérer concerne le lien entre les

décibels et les agressions expliqué précédemment. La présence de comportements agressifs peut contribuer à augmenter les décibels moyens à cause des vocalisations des porcs lors d’agressions, et la présence de ces comportements peut faire en sorte de diminuer le nombre de porcs couchés, puisque ces derniers ont plus de chance de se faire déranger par les comportements agressifs.

Enfin, un lien entre la durée du déchargement et le pourcentage de porcs couchés le jour de l’abattage a pu être établi. En fait, plus le déchargement était long, plus le pourcentage de porcs couchés le jour de l’abattage était élevé. Comme les porcs prennent généralement de 2 à 3 heures pour récupérer du transport et du déchargement, il est difficile de penser que le jour de l’abattage, soit le lendemain du déchargement, la durée du déchargement ait réellement une influence sur le nombre de porcs couchés, puisqu’ils ont déjà récupéré du transport et du déchargement. Il a déjà été démontré que la durée de déchargement pourrait avoir un impact sur le comportement des porcs à court terme après le déchargement (Weschenfelder et al., 2012), et selon ce que nous avons obtenu, on peut supposer que la durée de déchargement pourrait avoir un impact à plus long terme sur les comportements observés. À noter que la saison et la sortie n’ont eu aucun effet significatif sur le pourcentage de porcs couchés le jour de l’abattage.

Le jour de l’abattage, les blessures présentes sur les animaux ont été notées et remises sur un pourcentage du nombre de porcs observés. Pour être considéré comme une blessure, le porc devait avoir au moins 5 égratignures sur au moins un endroit sur le corps (oreilles, devant, milieu du corps, derrière, pattes). L’augmentation des pourcentages d’agressions 2 heures après le déchargement et le jour de l’abattage contribuerait à augmenter la présence de blessures sur les porcs (Tableau 3.11). Le lien entre les agressions et la présence de blessures sur l’animal est un lien bien établi et qui a été mis en évidence lors de la période d’attente à l’abattoir (Čobanović et al., 2017). En fait, les pourcentages d’agressions tendent à augmenter lorsque le temps d’attente à l’abattoir augmente et les risques de lésions tendent par le fait même à augmenter. La présence de lésions passerait de 10 à 18 % lorsque le temps d’attente à l’abattoir passe de 3 à 15 heures (Faucitano, 2018). Fraqueza et al. (1998) ont également observé une augmentation des lésions lorsque les porcs passaient 3 heures dans le parc avant l’abattage au lieu de 30 minutes, et expliquent ce résultat par le nombre d’agressions plus élevé lorsque les porcs passaient plus de temps dans le parc de rassemblement. Les résultats préalablement obtenus dans la littérature permettent donc d’appuyer ce qui a pu être observé concernant l’augmentation du pourcentage de blessures en fonction de l’augmentation du pourcentage d’agressions 2 h après le déchargement et le jour de l’abattage. Le pourcentage d’entassement dans les parcs lors du chargement contribuerait à augmenter le pourcentage de blessures sur les porcs le jour de l’abattage

(Tableau 3.11). En effet, les porcs qui s’entassent peuvent, dans un moment de panique, se mettre à grimper les uns sur les autres, causant des blessures sur les porcs qui seront observées le jour de l’abattage.

Tableau 3.11 Facteurs affectant la présence de blessures le jour de l’abattage

Facteur Coefficient ou

moyenne

Écart-type P-Value

Variables quantitatives

% porcs agressifs 2 h 1,676 0,673 0,021

% porcs agressifs abattage 1,667 0,502 0,003

% porcs s’entassent parcs au chargement 0,536 0,255 0,048 Variables qualitatives, % porcs avec blessures

Saison 0,013

Automne 15,2a 1,9

Été 19,2ab 3,3

Hiver 13,4a 2,1

Printemps 26,9b 3,3

Les lettres a et b représentent des différences significatives entre les résultats (p < 0,05) R2 = 76,24% et R2 ajusté = 66,05%

Pour ce qui est des saisons, on observerait plus de blessures au printemps comparativement à l’hiver et l’automne. Ce qui a été observé précédemment dans la littérature fait état du contraire, soit une augmentation de la présence de blessures en hiver. Ces résultats ont été expliqués par le fait que la présence de blessures était principalement liée au transport et que les porcs l’hiver avaient tendance à moins se coucher pendant le transport pour éviter de toucher aux parois et au sol froids du camion. Aucune différence n’avait été notée entre les saisons pour ce qui est du comportement et du pourcentage d’agressions durant la période d’attente (Scheeren et al., 2014). Par contre, dans la présente étude, nous avons constaté une différence par rapport aux saisons pour ce qui est des agressions le jour de l’abattage, où il y a eu significativement moins d’agressions en hiver et significativement plus d’agressions en été. Comme les agressions 2 heures après le déchargement et le jour de l’abattage contribuent à augmenter le pourcentage de blessures, il est logique d’observer une diminution des blessures en hiver, puisque les comportements agressifs en hiver étaient beaucoup moins présents en général tout au long du processus.

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