• Aucun résultat trouvé

1.3 Plan de la thèse

2.1.2 Comportement statique et dynamique des suspensions colloïdales, l’exemple

Nous présentons dans cette section le diagramme de phase des suspensions colloïdales de sphères dures, nous présentons quelques propriétés de la dynamique moyenne de ces suspensions.

Figure 2.1 – Diagramme de phase des sphères dures monodisperses en fonction de la fraction volumique. Quand la fraction volumique augmente, la suspension de liquide devient cristalline, avec un domaine de fractions volumiques pour lesquelles le liquide et le cristal coexistent. Le cristal existe jusqu’à la fraction maximale d’empilement cristallin ΦCP ∼ 0.74. Quand la fraction

volumique est augmentée suffisamment rapidement, et dépasse une valeur autour de Φg ∼ 0.58,

on forme un verre, état désordonné et hors équilibre, jusqu’à la fraction maximale d’empilement désordonné ΦRCP ∼ 0.64

Diagramme de phase

La figure2.1présente le diagramme de phase d’une suspension de sphère dures monodisperses. Ce diagramme de phase a été prédit théoriquement pour sa partie équilibre (phase liquide et cristal), et numériquement pour sa partie hors équilibre (phase verre) [Hoover and Ree, 1968,

Woodcock, 1981]. Quand la fraction volumique augmente suffisamment lentement pour que la suspension reste dans son état d’équilibre, la suspension liquide à basse fraction volumique, nuclée des cristaux qui après une zone de coexistence emplissent tout l’échantillon, et existent jusqu’à la fraction maximale d’empilement cristallin (crystaline closed packed), qui pour un système en trois dimensions vaut ΦCP = 0.74, pour un empilement hexagonal compact, par exemple. Si la

fraction volumique de la suspension est augmentée rapidement (trempe), on forme aux fractions volumiques comprises entre Φ = 0.494 et Φ = Φg un état métastable, assimilable à un état

surfondu, qui va finir par relaxer vers le cristal. Au-delà de la fraction volumique de transition vitreuse, Φg ∼ 0.58, on forme un verre, un état désordonné, hors équilibre qui ne relaxe pas

vers le cristal sur plusieurs mois [Pusey and van Megen,1986]. La valeur de Φg est variable, elle

dépend notamment de la vitesse de trempe, elle change également quand le potentiel d’interaction s’éloigne du potentiel sphère dure. La fraction volumique maximale que l’on peut atteindre dans un verre est la fraction d’empilement désordonné compact (random close packing, ΦRCP ∼ 0.64).

2.1. LES SUSPENSIONS COLLOÏDALES, BONS VERRES MODÈLES

Figure 2.2 – Viscosité relative en fonction de la fraction volumique, pour différentes suspen- sions de particules de sphères dures. La viscosité est renormalisée par la viscosité du fluide sus- pendant. Ce graphique résume une décennie de mesure de viscosité. La viscosité diverge à l’ap- proche de la transition vitreuse. Graphique re- produit de Cheng et al. [Cheng et al.,2002]

Même dans les suspensions de sphères dures où elle est le mieux définie, la fraction volumique d’une suspension colloïdale est très difficile à mesurer précisément [Poon et al., 2011]. De plus, le moindre changement du potentiel d’interaction, l’introduction de polydispersité dans la sus- pension, modifient le diagramme de phase donné en figure 2.1. Il faut donc prendre les fractions volumiques données dans cette figure comme une indication de ce qu’il se passe dans le cas idéal. Dans les situations expérimentales, les fractions volumiques bornant les différents domaines sont fortement dépendantes du système effectivement utilisé. Dans les cas où la suspension s’éloigne trop d’une suspension de sphères dures monodisperses, certaines phases sont supprimées, comme on le discute en section2.2pour la suspension colloïdale que nous utilisons.

Ralentissement de la dynamique à l’approche de la transition

Pour les suspensions colloïdales, notamment de sphères dures, la dynamique ralentit à l’ap- proche de la transition vitreuse, comme pour tout matériau vitrifiant. La viscosité des suspensions de sphères dures a été mesurée en fonction de la fraction volumique par de nombreux expéri- mentateurs [Cheng et al., 2002, Choi and Krieger, 1986, De Kruif et al., 1985, Meeker et al.,

1997,Phan et al., 1996, Segrè et al., 1995]. La figure 2.2 résume ces mesures. On observe une augmentation de la viscosité, renormalisée par la viscosité du fluide suspendant, à mesure que la fraction volumique augmente. Au prix d’une légère renormalisation de la fraction volumique mesurées dans certaines expériences, toutes les mesures tombent sur une même courbe. Aux basses fractions volumiques, la viscosité est bien modélisée par la formule d’Einstein Batchelor [Batchelor,1977] :

η/ηS = 1 + 2.5 Φ + 6.2 Φ2. (2.1)

Dans cette formule, le premier terme prend en compte la dissipation supplémentaire induite par la présence des particules, et le second les interactions hydrodynamique entre particules. On se sert parfois de cette relation pour calibrer la fraction volumique de suspensions colloïdales. À plus haute fraction volumique, on peut ajuster la courbe par un certain nombre d’expressions semi-empiriques [Krieger and Dougherty,1959,Quemada,1978]. On associe à cette augmentation de la viscosité une augmentation du temps de relaxation de la suspension dense.

A plus haute fraction volumique, on voit se développer une élasticité de la suspension. La relaxation devient de plus en plus lente et en deux temps. Si l’on mesure la fonction de corrélation

de l’intensité diffusée par une suspension colloïdale en fonction du temps de corrélation [van Megen and Underwood,1993], qui est une des manière de quantifier la dynamique du système, on constate que celle-ci, qui doit décroitre de 1 à 0 dans un système à l’équilibre décroît d’abord à une valeur non nulle, forme un plateau, puis décroit à 0. Ce comportement se comprend de la façon suivante. À petit temps, les particules vibrent dans un espace confiné (ce qui permet d’expliquer la première décroissance), puis sont bloquées dans leur mouvement par leurs voisines, elles passent un certain temps confinée par ces voisines (qui explique le plateau de la fonction de corrélation), enfin elles trouvent un chemin pour s’échapper de la « cage » de leurs voisines (qui explique la seconde relaxation). Cette image a été formalisée dans le cadre de la théorie de couplage des modes (MCT) [Götze and Sjögren, 1995], qui prédit qu’au delà d’une certaine fraction volumique, le temps de relaxation diverge, donc la formation d’un verre. La théorie de couplage des modes semble capturer quantitativement relativement bien ces phénomènes, tant que la fraction volumique en particule est raisonnable [van Megen and Underwood, 1993,

Van Megen and Underwood,1994]. Elle sous-estime cependant la fraction volumique à partir de laquelle la transition vitreuse a lieu, car elle néglige certains phénomènes comme des mouvements collectifs de grande échelle.

Grâce aux suspensions colloïdales, on est également capable de visualiser la dynamique de chaque particule, donc de visualiser les hétérogénéités de dynamique dans la suspension, comme cela a été démontré en imageant les particules au microscope confocal [Kegel and van Blaaderen,

2000,Weeks et al.,2000]. Nous allons nous servir intensivement de cette propriété dans la thèse. Nous avons montré que les suspensions colloïdales sont de très bons systèmes modèles pour étudier la transition vitreuse. Nous présentons dans ce qui suit les colloïdes que nous utilisons dans cette thèse, les microgels de pNIPAm.