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III. Mieux définir les outputs de la fonction de production scolaire

3.5. Compétences transversales et compétences disciplinaires

Outre les trois types de compétences (savoirs cognitifs, savoir-faire, savoir-être) que nous avons distingués, il semble opportun de façon à parfaire cette typologie, d’argumenter en faveur d’un dernier critère susceptible de rendre compte de la notion de compétence : la transversalité ou la spécificité de la compétence. L’hypothèse est alors faite selon laquelle une compétence peut être développée soit dans diverses situations (savoir-faire, savoir-être principalement) soit dans une discipline ou une situation donnée (savoirs théoriques notamment).

Pour Roegiers (1999), une compétence a un caractère souvent disciplinaire, parce que, visant à résoudre des problèmes liés à la discipline, et reposant nécessairement sur des connaissances qui lui sont liées. Cependant, dans le même temps, pour résoudre ces problèmes, elle s'appuie également sur un ensemble de savoir-faire généraux qui, eux, sont transversaux. Ainsi, les compétences disciplinaires ne couvrent que partiellement les habiletés essentielles à l’atteinte des objectifs du programme de formation. D’autres compétences, dites transversales, sont requises et ne peuvent se développer que dans la mesure où elles sont l’objet d’interventions dans toutes les disciplines et les activités de l’école. Les compétences transversales font référence à des outils de divers ordres que l’école juge essentiels pour permettre à l’élève de s’adapter à des situations variées et de poursuivre ses apprentissages sa vie durant.

Les recherches en sciences sociales permettent de surpasser cette distinction entre compétences transversales et compétences disciplinaires. Ainsi pour Rey (1998), les compétences scolaires ne sont pas, dans la plupart des cas, utilisables dans la vie courante ; elles contribuent toutefois à former les jeunes, et à développer des compétences plus générales, transversales aux disciplines, qu’ils pourront mettre en œuvre dans la vie personnelle, civique ou professionnelle. Ces connaissances plus générales s’apparentent à des compétences transversales dont nous retiendrons la définition donnée par l’auteur : « des savoir-faire ou dispositions qu’on pourrait repérer ou tenter de construire chez les élèves et qui seraient communs à plusieurs disciplines ou du moins qui ne seraient pas spécifiques à telle ou telle ». De cette définition jaillit l’idée selon laquelle une compétence transversale se rapporterait davantage à un savoir-faire ou un savoir-être, et moins à un savoir théorique ; « ce sont ces façons de faire et d’être, qui inaperçues de ceux là même qui les détiennent, préparent au jeu scolaire, et dont parle Bourdieu sous le nom d’habitus » Rey (1996). Leur possession conditionnerait l’accès aux disciplines scolaires sans être le produit d’aucune autre. C’est en partie pour cette raison que l’on va retrouver dans ces compétences transversales un certain nombre de compétences méthodologiques (savoir prendre des notes, organiser son travail, mettre en ordre des documents, lire un tableau, faire un résumé, …) qui sont les conditions d’acquisition des autres.

Il semblerait alors à la lumière de certains résultats de nos recherches (Morlaix, et al., 2004b 2004d, 2005c, 2005f, encadré D) et de la littérature déjà très fournie sur le sujet, que les élèves les plus faibles développent principalement des compétences disciplinaires, n’étant en mesure d’évoquer les apprentissages qu’en référence à la situation où ils ont été acquis ou mis en œuvre. A l’inverse, les bons élèves développeraient outre les compétences disciplinaires, des compétences transversales. En effet, en prenant leur distance par rapport au contexte d’exercice, ils font preuve d’une plus grande capacité d’objectivation, transfèrent les notions apprises à d’autres domaines d’apprentissage et font le parallèle avec d’autres situations qu’ils ont rencontrées. « Pour les élèves qui ne se situent pas dans le seul « métier d’élève » mais dans le travail d’apprenant, les tâches et exercices scolaires, sont l’occasion d’une réelle activité cognitive et d’un travail de décontextualisation–recontextualisation par lequel les savoirs s’émancipent des situations et activités où ils sont acquis et peuvent être reconnus et mobilisés dans d’autres contextes, devenir constitutifs d’autres situations et expériences » (Bautier, Rochex, 1997).

Les compétences transversales seraient plus volontiers apparentées soit à des savoirs méthodologiques (savoir-faire que l’on peut transférer d’une activité à l’autre), soit à des savoirs comportementaux (savoir-être liés à l’estime de soi ou au comportement adéquat adopté pour résoudre un problème ou aborder une situation). Cette hypothèse semble corroborée par les directives ministérielles de 200217, qui reconnaissent d’ailleurs officiellement l’attribut de transversalité pour certaines compétences particulières. Parmi celles-ci, nous retrouvons la maîtrise du langage et de la langue française assimilables à des savoirs méthodologiques et de façon plus générale aux savoir-faire, et l’éducation civique, second groupe de compétences transversales, permettant de développer notamment des comportements appropriés à la vie en collectivité, et qui se rapportent, de fait, plus aux savoir-être.

Alors qu’il serait nécessaire de définir de façon plus fine les différents inputs de la fonction de production scolaire, il serait également utile d’appréhender les résultats de cette production plus précisément par les différents types de compétences développées par les élèves. La re-définition du produit scolaire, substituant au terme « acquisitions » celui de « compétences » constitue le point de départ du travail présenté ici. Ainsi, après s’être attardé sur l’aspect multiforme que revêt la notion de compétences, il semble intéressant de s’attacher à la façon dont elles sont définies et mesurées par les acteurs du système éducatif. Si l’intérêt de la mesure de ces compétences parait évident, sa mesure, en tant que telle, l’est beaucoup moins,

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tant l’évaluation des compétences développées par les élèves pose des problèmes méthodologiques, qu’elle soit effectuée par les enseignants, des instances nationales ou internationales. Ces difficultés soulevées vont nous permettre de revenir sur les modèles statistiques à disposition du chercheur en éducation pour mesurer les compétences. Nous en isolerons un, particulièrement utile à l’opérationnalisation du concept : les modèles structuraux, avec des variables latentes. Nous traitons ces différents points dans le chapitre suivant.

CHAPITRE II

OPERATIONNALISER LE CONCEPT DE

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