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attirer les talents et compétences entre les personnes publiques et les personnes privées sera complexe dans la mesure où reposera sur l’attractivité de chacune d’elles

125. A cet égard, la difficulté sera d'autant plus importante pour les personnes publiques

qu'elles devront améliorer leur image pour recruter. Cependant elles ne sont pas dénuées

d'atouts, mais devront les faire valoir, ainsi « l’envie de servir aussi bien qu’une vocation

professionnelle affirmée, la garantie de l’emploi comme les perspectives de carrière ou de

mobilité constitueront autant de raisons valables qui, demain comme hier, pourront conduire

à un engagement dans la fonction publique. Dans tous les cas, cependant, et demain mieux

qu’hier, les employeurs publics devront savoir recruter, former, fidéliser, motiver et au besoin

reconvertir leurs ressources humaines. Le défi ne sera pas aisé à relever car il leur faudra dans

le même temps tirer les conséquences de l’allongement de la vie professionnelle et revoir à cet

égard les schémas de carrière qui ont été conçus pour des durées de vie professionnelle plus

courtes d’au moins cinq ans »

208

.

126. Quoi qu'il en soit, il semble que l'enjeu soit davantage à gommer les frontières entre

l'emploi public et l'emploi privé à mesure que ces deux mondes seront « à l'avenir moins

cloisonnés, que des passages de l'un à l'autre, et pas seulement du public vers le privé, seront

plus fréquent et plus désirés »

209

.

2. La question de la performance

127. La « performance » est communément définie comme la conjonction réussie de trois

facteurs de l’entreprise : les moyens (dont le personnel), l’objectif et les résultats

210

. On

compare souvent la performance des entreprises publiques à celle des entreprises privées bien

que cette comparaison rencontre une limite importante dans la mesure où leurs objectifs

divergent : ainsi, les objectifs des entreprises publiques sont plus souvent politiques

qu’entrepreneuriaux

211

.

208 B. Pêcheur, La fonction publique, Rapport au Premier ministre, 2013, Paris, La doc. fr., p. 62.

209Ibid, p. 62.

210Sur la notion, cf. not. IGPDE, Performance de la fonction ressources humaines : définitions et cadre d’analyse, Ministère du budget, des comptes publics et de la Fonction publique, 31 mars 2008

(http://www.fonction-publique.gouv.fr).

211 Ibid. Adde A. Taillefait, « Sélectivité et performance dans la Fonction publique », in Performance et droit administratif (dir. Albert N.), Paris, Litec, Lexis Nexis, p. 174 – E. Aubin, « Flexibilité et performance dans le déroulement de carrière des fonctionnaires, Performance et droit administratif », Ibid., p. 200 – H. Pauliat, « La gestion publique : une performance subie ? », REAP, n° 1, octobre 2009, p. 19.

128. De ce point de vue, on reproche fréquemment au personnel de l’administration son

manque de « sens commercial ». Par exemple, l’autorité de la concurrence dans son avis

96-A-10 du 25 juin 1996 relatif au fonctionnement des services financiers de La Poste rappelait les

reproches des clients de l’établissement public aux nombres desquels notamment la « lourdeur

de fonctionnement […] le manque de sens commercial de son personnel […], le manque de

confidentialité des locaux, les files d'attente aux guichets »

212

. Cette observation est cependant

à recevoir avec précaution. D'une part, aucune étude sérieuse n'a jamais prouvé le moins bon

sens commercial des personnels publics, ni d'ailleurs le meilleur sens commercial des

personnels privés

213

. D'autre part, s’il est vrai que l’intervention des personnes publiques sur le

marché concurrentiel nécessite de renforcer la formation économique du personnel, ce constat

est largement reproductible aux personnels des entreprises privées. Ainsi, est assez édifiante la

conclusion du Rapport d’information de l’Assemblée Nationale sur la gouvernance des

entreprises qui rappelait que : « s’agissant des pratiques, il convient d’étoffer la formation

économique des salariés, a fortiori de ceux d’entre eux qui exercent des fonctions

d’administrateurs représentant les salariés dans les conseils d’administration […]. Il faut en

effet maîtriser et partager des concepts et des données en commun pour évaluer et répondre

aux positions affirmées par les autres parties prenantes de l’entreprise et se prononcer avec

pertinence sur des options stratégiques. Dialoguer suppose d’abord de pouvoir se

comprendre »

214

.

129. Au contraire, vouloir transformer le sens de l’action publique pour en faire une

entreprise ordinaire n’a pas grande pertinence dans la mesure où sa finalité est (ou devrait être)

l’intérêt général. À cet égard, nous rejoignons la recommandation contenue dans le Rapport de

Monsieur Denoix de Saint Marc qui invitait à « éviter deux écueils : les agents ne doivent pas

être déchargés des devoirs inhérents au service public par des dispositions abusivement

protectrices ; ils ne doivent pas non plus être conduits à négliger ces devoirs par des

212 Cons. Conc., avis n° 96-A-10 du 25 juin 1996 relatif à une demande d’avis de l’Association française des banques concernant le fonctionnement des services financiers de La Poste au regard du droit de la concurrence, p. 15.

213 On peut cependant renvoyer aux travaux de la doctrine relative à la motivation des agents publics : cf. sur ce sujet Y. Emery, « La diversité des motivations des employés publics. Recherche exploiratoire dans un contexte post-bureaucratique en Suisse », RFAP, 2012/2, n° 142, p. 491, et les auteurs – principalement américains – cité par le Professeur.

214 J.-M. Clément et Ph. Houillon, La transparence de la gouvernance des grandes entreprises, Rapport d’information n° 737, Paris, Assemblée nationale, XIVe législature, 20 février 2013, p. 60 : c’est pourquoi le rapport préconise « d’ajouter le bénéfice d’une formation économique spécifique destinée aux délégués du personnel, aux membres du comité d’entreprise et aux administrateurs représentant les salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance ».

mécanismes d’intéressement qui les conduiraient à prendre exclusivement en considération les

objectifs commerciaux de l’exploitant. Les méthodes d’évaluation et d’incitation doivent être

conçues en tenant le plus grand compte des tâches d’intérêt général assumées par chaque

catégorie de personnel »

215

.

130. L’emploi public peut également être vécu pour les prestataires publics comme un frein

à la mise en œuvre de leurs objectifs. Les contraintes budgétaires réduisent les marges de

manœuvre de l’administration d’autant plus fortement que la masse du personnel est

importante. Or, pour les anciens monopoles publics transformés en établissements publics

industriels et commerciaux, le problème se pose de manière accrue. Ainsi, EDF s’est

régulièrement plaint de sa difficulté à gérer la masse du personnel hérité du passé. L’autorité de

la concurrence rappelle d’ailleurs que l’établissement public s’en servait de justification à ses

demandes de diversification de ses activités

216

. Plus largement, c’est la question de la

connaissance précise des besoins en emploi et compétence qui est posée. À cet égard, on

constate que la mise en place de dispositifs de gestion prévisionnelle des emplois et des

compétences est peu développée au sein des collectivités territoriales et dans les établissements

publics

217

. Cette lacune est regrettable car de tels dispositifs permettraient d’anticiper les

besoins de recrutement à venir et de mettre en place des mécanismes de formation interne à

l’administration afin de pourvoir les besoins en emplois et compétences.

131. On peut d’ailleurs regretter que la réforme territoriale n’entraîne pas une réflexion plus

approfondie sur la question de la gestion des ressources humaines : les profondes mutations

territoriales qu’impliquent le développement de l’intercommunalité et donc le renforcement des

215 R. Denoix de Saint Marc (dir.), Le service public, Rapport au Premier ministre, Paris, La doc. fr., 1996, p. 66.

216 Ainsi, le Conseil de la concurrence rappelle que « la diversification est également considérée comme la ‘‘contrepartie’’ normale de l’ouverture à la concurrence : ‘‘Dans tous les cas, une évolution qui conduirait EDF à être soumis à la concurrence en matière de production ou de distribution ou à accorder un droit d’accès des tiers au réseau devrait, selon l’établissement, avoir pour contrepartie de permettre à EDF de se diversifier’’ (avis 94-A-15). Lorsqu’une entreprise publique se trouve confrontée à des surcapacités où à des sureffectifs, qui sont hérités du passé et ne sont pas nécessairement liés à la libéralisation du secteur, il peut lui apparaître optimal d’utiliser ses capacités de production disponibles (capital et travail) au lieu de les laisser inemployées. En 1988, la direction d’EDF annonça, pour la première fois, une stratégie de diversification. Depuis cette date, cinq types de motivations ont pu être avancés : le ralentissement de la croissance de la consommation d’électricité en France rend nécessaire le redéploiement du personnel de l’entreprise ; l’excès de capacité de production pousse l’établissement à valoriser ses surplus ; la demande de la clientèle pour des services plus élaborés oblige EDF à adapter son offre ; le partenariat imposé avec les collectivités locales ouvre des marchés voisins de l’activité principale ; l’éventuelle ouverture à d’autres opérateurs des marchés captifs d’EDF incite à développer, dès aujourd’hui, un esprit de concurrence au sein de l’établissement public » : inLes monopoles publics dans le jeu concurrentiel, Rapport public, études thématiques, 2003, p. 104.

217 Cf. not. Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, Ministère de la décentralisation et de la fonction publique, éd. 2014, p. 21 et s.

mécanismes de mutualisation

218

et de coopération risquent d’entraîner des difficultés qui n’ont

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