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Chapitre 5 : Synthèse des résultats et discussion

5.1. Synthèse des résultats des articles

5.1.2. La communication et la collaboration

Selon Tariman & Szubski (2015), les infirmières font parties intégrantes de l’équipe multidisciplinaire en oncologie et participent aux discussions de cas, partagent leurs points de vue sur les problèmes cliniques auxquels les patients sont confrontés et contribuent à la prise de décision en matière de traitement par le biais de réunions multidisciplinaires, ceci est éclairé par le concept « expérience de dignité et de respect » selon Ruland & Moore (1998) qui indique qu’il faut inclure le patient et ses proches dans la prise de décision mais également que l’infirmière peut jouer le rôle d’avocate entre les décisions du médecin et celles du patient. Cependant, dans l’étude d’Anderson et al. (2016), 60% des infirmières ayant participées à l’étude mentionnent que les médecins ne leur demandent pas leurs points de vue alors que les infirmières

en unité de soins intensifs perçoivent qu’elles jouent un rôle important dans la communication sur les soins palliatifs. Il ressort de l’étude de Muller Juge et al. (2013) que les médecins d’un service de médecine souhaitent une participation plus active des infirmières durant le processus de prise de décision. Les médecins souhaitent que les infirmières aient une meilleure compréhension de la situation, anticipent les problèmes, vérifient les décisions médicales et échangent davantage des informations. Dans le contexte des soins palliatifs, les infirmières sont essentielles pour fournir des informations sur la symptomatologie et la trajectoire de la maladie, les trois principaux besoins d’informations des patients étant liés au pronostic, au diagnostic et au traitement (Tariman & Szubski, 2015). C’est ce qui est également soutenu dans Blondon et al., (2017), qui dans cette étude, démontrent que les infirmières ont contribué au processus de gestion du patient par l’anticipation, les suggestions et les réponses critiques aux ordres médicaux, en s’appuyant sur des données fondées sur des symptômes ou sur des pratiques habituelles.

Selon l’étude de Festic, Wilson, Gajic, Divertie, & Rabatin (2012) qui visait à explorer les différences entre les médecins et les infirmières sur les soins de vie en soins intensifs, il a été démontré que malgré un certain nombre d’accords entre les médecins et les infirmières, beaucoup de domaines de désaccords existent. Les infirmières se sentent incapables de faire part de leurs préoccupations concernant les politiques et pratiques de soins de fin de vie par peur de recevoir des critiques sévères du médecin ou encore en raison du

sentiment que leur opinion ne compte ni pour les médecins, ni pour la famille. Par contre, presqu’aucun médecin ou infirmière pensent que la mort d’un patient reflète d’une erreur médicale. Matziou et al. (2014) - dont le but était d’examiner les perceptions des médecins et des infirmières concernant la communication et la collaboration - estiment que la grande majorité des infirmières se sentent reconnues et respectées par le personnel médical. Cependant, pour une partie des infirmières, la forme actuelle de la collaboration avec les médecins ne les fait pas se sentir appréciées pour leurs compétences et elles ne sont pas traitées comme des membres égaux de l’équipe interprofessionnelle. De plus, les infirmières travaillant dans des cliniques plus petites ont mentionné que de bonnes relations assuraient la collaboration et que les médecins acceptaient plus facilement leur jugement sur la prise de décision. Vice-versa, les médecins qui travaillent dans de plus grandes structures ont déclaré qu’ils n’approuvaient guère les jugements des infirmières concernant le traitement ou la prise de décision. Les auteurs appuient également le fait que les tensions non résolues influencent la dynamique du travail d’équipe et leur collaboration en raison de relations de pouvoir historiques et d’interactions interpersonnelles. Une étude qualitative suggère que lorsque la collaboration mène à un désaccord, les médecins et les infirmières préfèrent ignorer le conflit plutôt que de s’y engager. De plus, les conflits entre les médecins et les infirmières sont souvent le résultat d’attentes différentes selon lesquelles les infirmières se concentrent sur le travail d’équipe et souhaitent appliquer leurs connaissances directement aux soins des

patients, tandis que les médecins se considèrent comme les principaux dispensateurs de soins avec la perception que la fonction principale des soins infirmiers consiste à exécuter des ordres. Selon Skorshammer (2013), les infirmières ont signalé que le manque de respect, la tonalité de la voix, le refus des médecins de répondre à leurs questions, les appels répétés, les critiques, le racisme, le stress et les conflits de la part des médecins interféraient avec la collaboration. Selon les médecins, les compétences médiocres des infirmières, la communication insatisfaisante, l’exécution tardive de leurs ordres, les appels téléphoniques entre 23h et 7h ou en fin de semaine sont les principales raisons de leur mauvais comportement envers les infirmières. Aussi, le niveau de collaboration interpersonnelle peut être influencé par des facteurs sociaux, culturels et éducatifs qui déterminent les rôles et les modèles sociaux (Matziou et al., 2014). Pour les infirmières, une mauvaise coopération avec les médecins est une cause principale de retraite anticipée et affecte négativement sur l’estime de soi (Casanova et al., 2007, Ho et al., 2005), Moser et Armer, 2000).

Selon Blondon et al. (2017), les infirmières doivent sans cesse utiliser des mots-clés pour faire venir le médecin interne de toute urgence. Les médecins comptent sur l’évaluation de l’infirmière pour se faire une idée de la situation. Pour les infirmières, les ordres médicaux manquent souvent de précisions ce qui les incitent à faire des suggestions sur la gestion des patients et/ou à anticiper l’intervention de l’interne ce qui est éclairé par le concept « intuition »

de la théorie de Benner et al. (2011) qui se caractérise comme la compréhension directe du sens et des particularités des situations sans réflexion consciente ou articulation et dont le but est de saisir intuitivement une situation. D’après Reeves et al. (2008), la clé d’une véritable collaboration interprofessionnelle semble être la négociation interprofessionnelle continue entre les infirmières et les médecins et les autres professionnels de la santé (Matziou et al., 2014). Dans la même approche, l’étude de Neville et al. (2015) montre que le pronostic est amélioré lorsque les médecins et les infirmières s’entendent sur l’évaluation d’un traitement, ce qui laisse croire qu’une collaboration interprofessionnelle accrue pourrait améliorer les soins aux patients.

D’après Anderson et al. (2016), une détresse morale - qui est définie comme un déséquilibre psychologique et un sentiment négatif lorsqu’une personne, ici le médecin, prend une décision morale mais n’effectue pas un comportement en lien avec cette décision - est vécue par les infirmières (Neville et al., 2015). Cependant, selon Smith et al. (2009), les professionnels du service d’urgence ont trouvé que les discussions liées aux objectifs de soins de fin de vie avec les patients et leur famille étaient difficiles, principalement parce qu’ils n’avaient aucune relation établie avec ces patients.