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LA POLITIQUE EN FAVEUR DE L’EGALITE DE LA VILLE DE LYON

Historique et éléments de contexte et d’organisation de la politique :

En 2008 est créée une délégation « Egalité des femmes et temps de la ville ». Le 8 mars 2012, la Ville de Lyon a signé la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale. A cette occasion, la Ville de Lyon s’est dotée d’un plan d’actions conséquent, mobilisant plusieurs services et intégrant plusieurs politiques publiques. La Ville de Lyon est également cosignataire du Contrat Urbain de Cohésion sociale qui définit les objectifs et les modalités d’intervention en direction des territoires prioritaires dans le cadre de la politique de la ville. Ce contrat, dans lequel figure un volet transversal sur la prévention et la lutte contre les discriminations, a fait l’objet d’un avenant pour la période 2011-2014. Parmi les nouvelles orientations retenues pour cette période, la prise en compte de l’égalité entre les femmes et les hommes devra être renforcée.

Le Plan d’actions pour l’égalité femmes-hommes, « cultivons l’égalité femmes-hommes à Lyon » se divise en trois grandes parties : Lyon, ville apprenante et communicante ; Lyon, ville employeur ; Lyon, ville prestataire de services publics. Dans cette troisième partie, la fiche-action n° 15 « Développons l’égalité femmes-hommes dans les quartiers prioritaires » prévoit la réalisation d’une recherche-action sur les discriminations multifactorielles (genre/classe sociale/origine ethnique). Cette initiative vise à identifier les situations et besoins spécifiques des femmes des quartiers prioritaires afin de renforcer les actions spécifiques actuellement conduites et de développer de nouvelles approches.

A l‘intersection entre deux délégations, l’étude-action intervient dans un domaine au croisement de plusieurs logiques et politiques publiques : d’une part les inégalités de droits, et d’autre part les inégalités socio-économiques et territoriales qui sont généralement traitées distinctement mais leur cumul ou leurs interactions sont peu appréhendés. De plus, chaque critère reconnu par le droit comme discriminatoire est pris en compte soit individuellement, soit dans l’ensemble des discriminations comme atteinte aux droits fondamentaux, pouvant saper la cohésion sociale et l’idéal républicain. Mais la façon dont ces critères discriminatoires interagissent et se superposent pour modeler, voir déterminer les trajectoires des personnes, et tout particulièrement des femmes, est peu connue. D’où la difficulté à définir des moyens d’actions pour y répondre.

LA PRESTATION ATTENDUE ENJEUX ET OBJECTIFS :

Mieux connaitre la façon dont les discriminations se cumulent, infléchissent et déterminent les situations et les parcours des femmes issues des quartiers inscrits en politique de la ville.

Dégager de nouvelles pistes d’action pour mieux prendre en compte l’égalité entre les femmes et les hommes, et l’intrication de phénomènes discriminatoires sur ces territoires.

129 LIVRABLES ATTENDUS :

L’animation de plusieurs groupes de travail dans une démarche de réflexion participative. La production d’un rapport intermédiaire.

La production d’un rapport d’étude contenant les éléments qualitatifs et quantitatifs concluant sur la déclinaison de pistes d’intervention possibles pour la Ville de Lyon et ses partenaires.

La production d’éléments statistiques sur la situation comparée des femmes et des hommes dans les territoires prioritaires pourra être réalisée par les ressources en termes d’observation de la Direction du développement territorial.

METHODOLOGIE :

Il s’agit d’une étude-action. L’objectif est donc bien d’articuler un apport de connaissance sur un phénomène et la mise en dynamique de différents acteurs (acteurs « spécialisés » sur les questions discriminatoires et/ou sur les droits des femmes, acteurs « spécialisés » dans l’intervention sur les territoires prioritaires dans le cadre de la politique de la ville, acteurs institutionnels de la Ville de Lyon et de ses partenaires).

L’objectif n’est pas celui d’une clarification conceptuelle. Certes, la notion de discrimination multifactorielle est assez peu connue, peu étudiée, insuffisamment définie : on parle aussi de discriminations plurielles, intersectorielles… De plus, une confusion persiste dans l’usage du terme « discrimination » employé tantôt dans son sens juridique, tantôt dans un sens sociétal. L’objectif de l’étude-action n’est pas de parvenir à une clarification conceptuelle de ces notions au-delà d’une définition pratique. Le prestataire devra s’accommoder de cette relative indéfinition conceptuelle puisqu’il est d’abord attendu que l’étude-action puisse dégager des pistes d’intervention pour l’action publique et la mobilisation des acteurs locaux.

D’autre part, si le cœur du sujet porte bien sur les femmes et les discriminations multiples qu’elles rencontrent, c’est bien la comparaison avec les discriminations subies par les hommes qui permettra de la faire apparaitre et d’éviter certaines distorsions dans la compréhension de ce qui peut être attribué au sexe.

Démarche :

La méthodologie employée devra mettre en œuvre une démarche répondant à plusieurs attentes : Une enquête de terrain pour mieux comprendre…

… comment les acteurs locaux appréhendent et traitent les discriminations multifactorielles ? … quel est le sens vécu par les personnes qui subissent ces discriminations multifactorielles ?

Une démarche qui anime et génère de la réflexion au niveau des acteurs des territoires visés (associations, équipes territoriales, représentants institutionnels).

Une démarche qui mobilise pour une meilleure prise en compte des problématiques discriminatoires en montrant l’importance de leur effet sur le vécu des habitants des territoires CUCS.

Une démarche qui produise des orientations pour intervenir concrètement sur les problèmes soulevés.

Périmètre :

Trois territoires sont plus particulièrement pressentis pour faire l’objet d’une étude de terrain et d’un travail avec les acteurs locaux :

- La Duchère (9ème arrondissement) - Mermoz (8ème arrondissement), - Vergoin (9ème arrondissement).

130 PROBLEMATISATION :

Comprendre : Les discriminations multifactorielles où l’enchevêtrement de processus complexes Dans l’intrication des facteurs et des causes qui orientent les parcours des femmes issues de l’immigration résidant en quartier populaire, quelle est la part prise par la discrimination soutenue par les préjugés et stéréotype sexistes, racistes ou ethniques et celle liée à l’image dégradée de ces quartiers interprétée d’abord à travers le prisme de la relégation urbaine ?

Quelles sont les logiques à l’œuvre de l’assignation identitaire à la stigmatisation de cette identité ? Quelles récurrences des difficultés vécues selon l’âge ? Comment plusieurs logiques entrent en synergie négative pour surdéterminer des parcours par plusieurs formes de domination, d’assignation, de réduction des personnes ? La situation des femmes peut-elle être différenciée en raison de leur origine ethnique ou l’appartenance au quartier constitue-t-elle un déterminant prépondérant ?

Par ailleurs, les relations entre sexes font l’objet d’un questionnement récurrent chez les acteurs des quartiers, surtout concernant les adolescents. Entre la construction d’images stéréotypées de l’autre sexe, la définition et l’affirmation de son propre sexe, voire de sa sexualité, les questions de genre reviennent fréquemment comme étant l’objet de tensions dans les relations entre filles et garçons. C’est pourquoi il paraît nécessaire d’explorer plus finement les ressorts de la construction d’une identité de genre chez les jeunes qui fait l’objet de discours alarmistes qui appellent une objectivation.

Parmi les différents secteurs de la vie sociale (scolarité, formation, emploi, logement santé, famille…) deux domaines devront faire l’objet d’une attention spécifique : la place des femmes sur l’espace public et leur participation à l’offre de loisir (sportive, culturelle…) et socio-éducative lyonnaise. Ces deux domaines interrogent plus particulièrement la collectivité qui porte une attention spécifique au vivre ensemble et à l’offre de service qu’elle met en œuvre ou soutient.

Un objectif global de cette étude est bien d’identifier pour les soutenir certains vecteurs d’émancipation des femmes. Ceux-ci peuvent être différents selon l’âge et porter sur différents domaines : la santé, la scolarité, le formation, l’emploi, etc. Mais tous les champs possibles ne pourront être pris en compte dans l’étude-action dont le champ d’investigation devra porter sur deux domaines : la place des femmes dans l’espace public et leur participation aux activités sportives, culturelles, socio-éducatives, familiales…

1) La place des femmes dans l’espace public.

Comparativement aux hommes, comment l’espace public est-il appréhendé et vécu par les femmes ? L’espace public étant entendu dans une triple acception :

1a) celui de la proximité et du quotidien. Comment sont gérés et investis les lieux du quotidien ? Dans le quartier, quelle est la réalité de cette domination genrée qui ferait nécessairement des hommes les « faiseurs de règle » ?

Les femmes sont-elles plus exposées à l’intérieur du quartier au sens où elles seraient la cible d’une réaffirmation de valeurs communautaires ou culturelles en partie idéalisées ? Sont-elles effectivement victimes de bricolages identitaires, d’un rapport complexe à une culture d’origine, d’une « culture de banlieue » exacerbant un certain machisme ?

1b) celui de la ville et du centre-ville. Le quartier est-il définit comme un espace « à part », marginalisé par rapport au reste de la ville et sa population ? Quels usages et représentations du centre-ville : est-ce un ailleurs étranger et hostile par rapport au quartier où l’on a ses marques ou

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alors un lieu d’émancipation, une échappatoire à un quartier sous surveillance et étouffant par ses codes ?

1c) l’espace public comme espace d’expression et de prise de responsabilité. Quelle présence des femmes dans les conseils d’administration des structures locales ? Des associations ou initiatives féminines émergent-elles ? quels sont les freins et les facteurs à l’émancipation de l’expression des femmes ?

2) La participation des femmes à l’offre de loisir et socio-éducative lyonnaise

Plusieurs retours font état de difficultés à maintenir les adolescentes dans les activités de loisir. Les interprétations supposent qu’elles sont retenues à la maison pour s’occuper de leurs frères et sœurs. Devenues adultes, c’est aussi aux pesanteurs liées à la distribution sociale des rôles dans l’espace domestique que l’on attribue leur moindre participation. Qu’en est-il réellement, et comment expliquer cette moindre participation ?

Les femmes ne participeraient-elles qu’à certaines activités, mises en place justement pour les attirer ? Ne seraient-elles sensibles qu’à certains sujets auxquels on suppose qu’elles s’intéresseront : l’éducation, la santé… ? Leur participation à des activités contribue-t-elle à une émancipation ou entretient-elle un entre-soi, une focalisation sur certaines pratiques ou centres d’intérêt qui peuvent être enfermant ? Au-delà de l’emploi qui peut être un facteur d’émancipation, ne serait-ce que pour le gain économique qu’il procure, qu’est-ce qui finalement pousse les femmes à participer à des activités sociales ?

Par ailleurs, il convient de s’interroger sur ce que cache cette absence ou cette moindre participation. Est-ce là un facteur de déséquilibre par rapport aux hommes ? L’une des causes d’une acquisition de compétences sociales différenciées dans leur nature comme dans leurs modalités d’apprentissage ? Les femmes disposent-elles d’autres espaces où se confronter à d’autres, où échanger, où s’affirmer où acquérir ou renouveler certaines compétences sociales ? Comment l’âge influe-t-il sur le besoin comme la nature d’espaces de socialisation ?

Enfin, l’étude-action devra questionner la construction des relations de genre entre filles et garçons et la façon dont les activités proposées par les acteurs contribuent à les façonner. Il s’agit de comprendre qu’elle est actuellement la contribution de ces activités à la construction de relations de genre ? Est-ce une approche développée ou prise en compte par les acteurs qui portent ces actions ? Comment et à travers quelles activités ?

C’est cet ensemble de questionnements que devra aborder l’étude action. Mobiliser

Les discriminations souffrent globalement d’un déni qui peut être attribué à différentes causes : - relativisation de la souffrance des personnes (ne serait-ce pas de la victimisation ?),

- sentiment que ces problématiques sont « naturellement » traitées par les opérateurs du fait de leur implantation ou de la diversité de la fréquentation de leur structure (« effet M. Jourdain »),

- refus d’un traitement préférentiel qui serait contraire aux règles de la méritocratie, - invisibilité du phénomène faute de chercher à le faire émerger, etc.

Plusieurs diagnostics territoriaux fondés sur une analyse du discours des acteurs locaux viennent étayer cette difficulté à appréhender les discriminations comme une problématique à part entière et appelant un traitement spécifique.

Le prestataire devra permettre d’une part de rendre la question des discriminations multifactorielles préhensible par tous et d’autre part de dépasser certaines représentations pour mettre plusieurs

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acteurs en posture de débattre et d’alimenter le travail d’étude-action. En effet, la mobilisation des acteurs et partenaires suppose de dépasser plusieurs obstacles.

Tout d’abord, au sein des phénomènes discriminatoires largement relativisés, la défense du droit à l’égalité des femmes est particulièrement minorée. Les discriminations sont d’abord perçues à travers le prisme ethno-racial ou religieux. Un sondage réalisé par la Ville de Lyon en 2009, montrait que les discriminations liées à la grossesse sont relativement acceptées et ne font qu’assez peu appel à un sentiment d’interdit, et ne sont pas considérées comme illégales. De plus, si certaines discriminations sont considérées comme une affaire de spécialistes, sur les rapports entre sexe, tout le monde a une opinion.

Par ailleurs, il paraît opportun de faire s’exprimer les acteurs locaux et les institutions sur les discriminations faites aux femmes sans les réduire à celles liées aux voiles islamiques. C’est plutôt l’importance réelle ou relative des débats et questionnement autour du port des voiles islamiques qu’il s’agira de saisir.

L’étude-action devra permettre d’appréhender comment les acteurs utilisent les catégories (jeune, maghrébine, femme, africain-e, etc.) relatives aux discriminations ? Font-ils référence au genre ? A quel propos ? Quelles sont les lignes de fracture entre opérateurs lorsqu’ils évoquent la situation des femmes ?

Au-delà de l’identification et des freins et leviers chez les opérateurs, il s’agit d’animer un espace où les débats puissent s’exprimer et où puissent être abordées les discriminations multifactorielles, souvent passées sous silence car difficiles à saisir et complexes à circonscrire.

Agir

Face aux phénomènes discriminatoires et leur complexité, souvent s’exprime un aveu d’impuissance. Ou alors, on assiste à un affrontement des cadres interprétatifs guère moins stérile. C’est pourquoi il paraît nécessaire de construire une approche fondée sur une observation in situ fine et rigoureuse quitte à réduire le périmètre de l’étude-action à quelques quartiers lyonnais. Quatre niveaux de questionnement devront tout particulièrement être traités pour renforcer la capacité d’intervention de la Ville :

- La cohérence de l’intervention publique devra être questionnée lorsqu’elle peut avoir elle-même tendance à mettre en concurrence les rapports sociaux de domination (« sexe », « origine ethnique », « classe ») sous lesquels appréhender la situation des « femmes issues de l’immigration » ou des femmes des quartiers.

- Lorsqu’il s’agit de la traduire en actes, souvent la question de l’égalité des femmes est appréhendée sous l’angle de la mixité ou d’un équilibre dans la fréquentation d’une structure. La recherche de la mixité contribue-t-elle à l’égalité ou, au contraire, le fait de pouvoir montrer une fréquentation paritaire ne vient-il pas masquer des discriminations « genrées » ?

- Les quartiers classés en territoires prioritaires sont plutôt nombreux à Lyon et relativement divers. Cette diversité justifie-t-elle une pluralité d’approches territorialisées ou doit-on considérer que l’on a affaire à des tendances lourdes, systémiques et finalement uniformes dans leurs manifestations ? - Enfin, le terrain n’est pas vierge et plusieurs initiatives sont autant d’expériences intéressantes. Comment capitaliser ces expériences, les transmettre, les décliner, les faire partager ? Quelles initiatives peuvent constituer des jalons pour structurer une intervention publique ?

133 LE DEROULEMENT DE L’INTERVENTION

Pilotage

Le pilotage de l’étude-action sera assuré par un comité de pilotage auquel participeront deux adjoints au Maire (déléguée aux droits des femmes et délégué à la politique de la ville).

Le prestataire devra fournir au comité de pilotage la matière à ses réflexions et décisions. L’interlocuteur du prestataire sera le référent de la Mission égalité.

Durée de la mission

Cette mission devra être réalisée autant que possible d’ici la fin de l’année 2012. Modalités de réponse au cahier des charges146

146 Retiré par nos soins

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Annexe 2 : Tableau récapitulatif de l’ensemble des structures et associations mobilisées