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des collectivités fait craindre aux élus municipaux de voir disparaître leurs communes, ces dernières étant en concurrence avec les EPCI à fiscalité propre devenues collectivités

territoriales. En effet, comme le dit G. LONGUET, « lorsque vous nous proposez d'instaurer

une intercommunalité avec un statut constitutionnel, vous ne nous dites pas, en définitive, si

vous souhaitez créer deux ou quatre niveaux. Or la question se poserait si nous adoptions ce

sous-amendement. (…) Mais il me semble, monsieur Mauroy, que votre intention n'est pas de

faire disparaître les communes rurales. En tout état de cause, nous n'en prendrions pas la

responsabilité publiquement ! Pourquoi alors entretenir une ambiguïté en créant un quatrième

échelon qui réduirait les maires à n'être que des exécutants des règlements de police, alors que

le pouvoir se concentrerait au niveau de l'intercommunalité »

268

. Tous les amendements relatifs

aux changements de statut des groupements à fiscalité propre seront écartés sur le fondement

de ce raisonnement. Mais cette position nette pose problème quant à la reconnaissance

constitutionnelle de l’intercommunalité. En effet, le Constituant souhaite que les structures

juridiques de coopération entre collectivités puissent être reconnues en raison de leur réussite,

de leur efficacité et de leur réalité institutionnelle dans le cadre de la décentralisation. Or, le

sous-amendement 245 fait référence à un amendement, adopté, de la commission des lois

ajoutant à la liste des collectivités territoriales, les collectivités à statut particulier. Et cette liste

limitée s’identifie uniquement aux structures de la décentralisation territoriale. De ce fait, on ne

peut qu’en conclure à l’exclusion des groupements du cercle de la décentralisation réalisée par

les collectivités territoriales. Force est constater que ces structures de coopération de

collectivités territoriales relèvent toujours du champ de la décentralisation. Le fait qu’elles

émanent, non exclusivement, des collectivités territoriales prouve qu’elles sont un

prolongement institutionnel de la décentralisation territoriale.

Dès lors, la notion constitutionnelle de groupements de collectivités territoriales fait

partie du champ de la décentralisation. L’amendement de repli de D. HOEFFEL, considéré

comme dénaturé par P. MAUROY, conforte cette logique. Cet amendement ajoutant le terme

groupement à la Constitution a pour objet : « les groupements de collectivités territoriales

représentent une structure complémentaire des collectivités et leur existence doit être affirmée

sans équivoque »

269

. Cette existence démontre bien que la coopération locale se trouve

consacrée par le truchement des institutions représentatives de la coopération institutionnelle,

268 Sénat, Débats, Ibid., p.5

269 Amendement de MM. HOEFFEL, GAUDIN, DARNICHE, LORRAIN, HYEST et MERCIER, n°41 rectifié bis en date du 30 octobre 2002

c’est-à-dire le groupement de collectivités territoriales. La complémentarité évoquée nous laisse

à penser que les collectivités territoriales associées s’expriment au sein du groupement et

qu’elles participent au moins à leur fonctionnement, si ce n’est à la création de l’institution de

coopération. La volonté étatique n’est pas non plus absente, elle a même eu tendance à vouloir

s’imposer par rapport à celles des collectivités membres de la structure de coopération. Les

premiers textes législatifs relatifs à l’intercommunalité montrent cette prédominance de la

volonté étatique au détriment de celles des communes. Le statut des communautés urbaines, né

en 1966, sont l’expression de la volonté étatique de mettre en œuvre sur le territoire ce modèle

de coopération imposé ou ce prêt-à-porter institutionnel urbain. Cette antériorité de ces

structures apparaît dans les débats constitutionnels et induit G. LONGUET à hiérarchiser les

différents groupements. Il précise ainsi que « A l'autre extrémité, se trouvent (…) les

communautés urbaines, qui sont au nombre de quatorze en France. Le fait de leur conférer un

statut constitutionnel, tout en sachant que les trois autres niveaux ont des assemblées

délibératives élues au suffrage universel direct, nous conduira inévitablement à nous interroger

sur la nature, l'organisation et le mode de scrutin que nous retiendrons pour les

intercommunalités urbaines. Quelle place accorder à ces collectivités par rapport au

département et à la région ? »

270

. Une réponse partielle a été apportée à cette question

prémonitoire par la loi du 16 décembre 2010 avec la création des métropoles. On remarque

aussi que cette question s’articule autour de la répartition des compétences entre les différents

conseils élus et relève par définition de la décentralisation. La loi sur l’affirmation des

métropoles interroge aussi sur cette articulation entre l’existence d’un groupement sur un

territoire donné et sa coexistence avec d’autres collectivités de niveau différent (département et

région). Nous sommes donc en présence d’une structure avancée avec les communautés

urbaines. Au-delà de cette filiation historique, l’aspect complémentaire des collectivités et des

groupements peut se comprendre que dans le cadre de la décentralisation. Écarté du champ de

la décentralisation territoriale constitutionnelle, le groupement n’a vocation qu’à permettre un

meilleur exercice des compétences, des tâches qui incombent aux collectivités territoriales.

Cependant, l’inscription constitutionnelle du groupement interviendra d’abord dans le

seul cas de l’expérimentation. Ceci est confirmée par P. DEVEDJIAN qui indique que « Dans

la suite du débat, le Gouvernement se montrera favorable à ce que ces groupements puissent

bénéficier du droit à l'expérimentation. Ils entreront de cette manière dans la Constitution.

L'accord qui vous a été donné par le Premier ministre sera ainsi respecté par le

Gouvernement »

271

. Le bénéfice de cette inscription ne s’arrêtera pas là puis qu’ils auront

également la possibilité d’être chef de file. Ces deux procédures vont notamment marquer la

genèse de la notion constitutionnelle de groupements de collectivités territoriales, ce qu’il

convient maintenant d’étudier.

TITRE 2 : L'émergence

constitutionnelle des groupements de

collectivités territoriales

Lorsque l'on évoque l'article 72 C, on pense immédiatement aux collectivités