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2. É TAT DES CONNAISSANCES

2.1 Collaboration entre les entreprises et les organismes scolaires en FP

2.1.1 Collaboration en formation initiale et continue

En Australie, le modèle du « Vocationnal education and training (VET) partnership » constitue une forme de mécanisme de collaboration entre le milieu scolaire et les entreprises et une recherche à son sujet indique que, le partenariat en VET s’appuie sur une collaboration étroite entre les deux acteurs (Bolli, Marie Caves, Renold et Buergi, 2018). Cette recherche dont l’objectif est de développer un outil permettant de mesurer la présence d’un lien entre l’éducation et le marché du travail, plus précisément au travers de questionnaires auprès des acteurs impliqués, se concentrant sur leur participation à la collaboration, souligne que les deux milieux doivent travailler ensemble pour favoriser l’atteinte des résultats de formation (Bolli et al., 2018). En effet, le milieu scolaire doit prendre en considération les besoins du marché du travail, lesquels nécessitent des compétences spécialisées souvent acquises dans un cadre académique. Un programme de VET combinant des cours académiques et des apprentissages en milieu de travail obtient le score d’implication le plus élevé des acteurs du milieu scolaire et de l’emploi (Bolli et al., 2018). Selon une recherche faite par Polesel et ses collaborateurs (2017), ayant comme objectif d’explorer la perception des directions d’établissements scolaires envers leur collaboration avec les entreprises, les résultats rapportent que les directions voient cette collaboration positivement, en plus de reconnaitre son efficacité (Polesel, Klatt, Blake et Starr, 2017). Les entreprises sont considérées comme des partenaires importants dans la communauté. Dans le cadre du VET, la

collaboration entre le milieu scolaire et les entreprises peut prendre diverses formes, comme l’organisation de journée carrière permettant aux élèves de rencontrer des employeurs de la région (Klatt et al., 2017).

En ce qui concerne le Québec, il existe peu de publications sur des études sur la collaboration entre les entreprises et les centres de services scolaires ou les centres de formation professionnelle (CFP) qui en font partie. Néanmoins, Mazalon s’intéresse dans ses recherches à l’alternance travail-études (ATE) et à l’encadrement des stagiaires en formation professionnelle dans les milieux de travail. Plus précisément, elle aborde les pratiques d’encadrement des personnes superviseures travaillant dans les entreprises participant au programme d’ATE en formation professionnelle (Mazalon, Gagnon et Roy, 2012). Cette enquête faite avec des questionnaires téléphoniques ou en ligne auprès de 137 personnes superviseures provenant de tous secteurs confondus de la FP soulève quelques éléments pertinents sur la collaboration entre les employeurs et les CSS. En effet, 68 % des personnes superviseures interrogées disent que leur entreprise collabore avec le CSS de leur région depuis au moins quatre ans. De plus, 90 % des personnes superviseures sont satisfaites du soutien offert par le centre de formation professionnelle (Mazalon et al., 2012). Ainsi, on constate que la collaboration entre les entreprises et les CSS est reconnue positivement par les acteurs en ce qui concerne l’alternance études-travail en formation professionnelle. Bien qu’il n’y ait pas d’écrit du même type abordant la RAC en entreprise au Québec, il est possible de considérer qu’une collaboration du même type est perçue de la même manière.

2.1.2 Collaboration dans des dispositifs apparentés à la RAC

En France, on observe que le dispositif apparenté à la RAC, la validation des acquis de l’expérience (VAE), est mobilisé en entreprise, en collaboration avec des organisations du marché du travail, principalement des employeurs et des syndicats. Une recherche française faite auprès de 15 entreprises provenant de divers secteurs, et abordant l’implantation et les répercussions de la VAE, souligne l’importance d’une collaboration entre les organismes de certification et les entreprises dans le déploiement du dispositif de VAE en France (Combes, Quintero, Bureau, Tuchszirer, Grimault, et Lochard, 2008). Les employés affirment apprécier la présence de ce partenariat entre les deux parties, puisqu’ils se sentent plus soutenus dans leur démarche de VAE.

La collaboration de l’organisme certificateur avec les entreprises peut se faire sous diverses formes, notamment par la mise à disposition de matériel de papeterie, l’organisation de l’espace, donner du temps de travail aux employés pour assister aux séances d’information sur le fonctionnement de la démarche de reconnaissance des compétences, ou bien la désignation d’une personne-ressource en lien direct avec l’organisme scolaire pouvant aider les participants avec leurs documentations pendant la démarche de VAE (Combes et al., 2008).

Par ailleurs, des auteurs rapportent que les employeurs sont favorables à collaborer pour l’intégration d’une forme de reconnaissance des compétences de leurs salariés. Un article français, abordant le déploiement de la VAE dans le pays, soutient que cette démarche de reconnaissance des compétences est un outil pour la gestion des ressources humaines dans les entreprises (Ballet, 2009). D’ailleurs, des entreprises ayant vécu une expérience positive avec un processus comparable à la RAC, la Recognition of prior learning (RPL), en Australie, soutiennent son

développement et souhaitent publiciser davantage la démarche auprès des employés (Blom, Clayten, Bateman, Berggod et Hughes, 2004). Elles souhaitent rejoindre un plus grand nombre de leurs salariés pour leur faire part de la possibilité de faire reconnaitre officiellement, par un établissement scolaire, leurs compétences. En outre, une étude faite par le gouvernement français sous forme de sondage auprès d’entreprises de divers secteurs rapporte que l’opinion de celles-ci est très positive envers le dispositif de VAE (Chastel, Menant, Le Pivert, Santana et Sultan, 2016).

En effet, 82 % des employeurs soutiennent leurs employés dans une démarche de reconnaissance des compétences, 87 % des entreprises ayant eu recours à la VAE recommandent celle-ci aux autres entreprises et 76 % des dirigeants considèrent la VAE utile pour les entreprises (Chastel et al., 2016). Donc, les entreprises ayant eu recours à un dispositif de reconnaissance des compétences, du même domaine que la RAC, montrent une bonne satisfaction quant à son utilisation. L’expérience positive des employeurs amène ceux-ci à voir la pertinence de reconnaitre les compétences de leurs employés et de collaborer avec le milieu scolaire pour y parvenir.

Toutefois, malgré une collaboration existante et reconnue dans différents pays, certains employeurs ont des réticences à faire appel, dans leur organisation, à un dispositif du domaine de la RAC. En fait, ceux-ci craignent que la reconnaissance officielle des compétences de leurs employés incite à leur départ (Berglund et Andersson, 2012). En outre, des entreprises mentionnent comme frein les coûts que peut générer une diplomation de leurs employés. Des employeurs croient que leurs salariés exigeront une augmentation salariale s’ils obtiennent un nouveau diplôme (Kis et Cationa Windish, 2018). Dans un document sur divers mécanismes de pays membres de l’OCDE en reconnaissance officielle des compétences acquises en milieu de travail et sur les moyens pour favoriser le développement de ces mécanismes (Kis et Cationa Windish, 2018), on

affirme que ces dispositifs peuvent être bénéfiques pour les employeurs, les individus et la société en général. Enfin, les auteurs concluent que les dirigeants d’entreprises peuvent représenter une barrière aux employés désirant développer leurs compétences par une démarche comme la RAC.

En fait, si l’employeur décide de ne pas s’impliquer, cela peut avoir une influence sur la motivation de l’employé de s’impliquer dans une démarche comme la RAC. Certains individus pensent qu’ils ne recevront pas le support de leurs employeurs s’ils manifestent leur intention de s’engager dans une démarche de RAC (Kis et Cationa Windish, 2018). De plus, l’étude gouvernementale sur l’intégration de la VAE en France dans les entreprises, mentionnée dans le paragraphe précédent, rapporte que 64 % des dirigeants d’entreprises considèrent que la démarche de VAE est complexe (Chastel, et al., 2016). On constate également que les deux tiers des employeurs sondés connaissent l’existence de la VAE et que 51 % d’entre eux se considèrent suffisamment informés sur le fonctionnement du dispositif pour l’intégrer dans leur entreprise.

En somme, il semble y avoir des appréhensions des employeurs à promouvoir et collaborer à une démarche de reconnaissance des compétences des individus dans leur entreprise. Il est possible que le manque d’information sur les motivations et les effets constatés pour les entreprises nourrissent la méfiance de certains.