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Mise en valeur et développement durable

1. Les valeurs positives du patrimoine

1.2. La cohésion sociale

Témoin du passé, le patrimoine bâti apparaît comme le principal révélateur de l’identité d’une ville. Il est une trace privilégiée de l’histoire, des coutumes et pratiques ainsi que le symbole du dynamisme et des activités actuelles. La valeur sociale du patrimoine se trouve dans cette fonction de témoignage. En effet, le patrimoine représente une identité autour de laquelle les habitants peuvent se fédérer. En se reconnaissant dans les monuments et dans la culture qui les entourent, les résidents vont s’approprier des particularités identitaires qui leur permettront de se différencier. De ce processus naît un fort sentiment d’appartenance dont les habitants vont tirer une grande fierté, notamment lorsqu’ils seront confrontés à des groupes extérieurs. Ainsi, la population est amenée à s’investir et à participer activement à la vie de la cité. À l’heure des problèmes récurrents des quartiers dits « sensibles », du chômage et de la fracture sociale, la valeur de cohésion sociale contenue en partie dans le patrimoine n’est sans doute pas à négliger par les institutions.

Ce lien social initié par ces mécanismes peut également se révéler très utile pour les associations de défense d’un quartier ou d’un monument qui, en jouant sur la corde sensible de la sauvegarde du patrimoine, peuvent espérer rassembler de nombreux habitants autour d’une même cause. Cependant, ce scénario idyllique est mis à mal par la mobilité croissante des personnes. En effet, les habitants ont de moins en moins d’attaches avec le territoire qu’ils occupent, soit parce qu’ils n’y sont pas nés, soit par qu’ils n’y ont aucune racine familiale, soit parce qu’ils n’y restent que le temps des loisirs, du repos ou du travail, ce dernier nécessitant en outre beaucoup de mobilité. Les espaces de référence ainsi multipliés, la plupart des gens connaissent peu ou mal l’histoire, les coutumes et les pratiques des lieux qu’ils fréquentent. En conséquence les acteurs, institutionnels ou non, qui souhaitent développer l’aspect cohésion sociale du patrimoine doivent avant tout informer et

former la population résidente. Pour ne pas se noyer dans le flot d’informations auquel les habitants ont accès, il devient primordial que le message proposé par les acteurs soit parfaitement ciblé. Cela nécessite un travail de recherches réalisé en amont autour de l’histoire, de la culture, des pratiques et des coutumes des populations et du territoire concernés. Les monuments deviennent alors l’outil privilégié de cette communication : ils accueillent manifestations, fêtes, foires, séminaires, ou prêtent leur image pour attirer l’attention dans les différents médias utilisés (reportages télévisés, sites Internet, tracts, affiches…). Si le message est correctement passé et compris, alors la population visée dispose de tous les moyens, peut être pas des plus objectifs et des plus scientifiquement exacts, pour appréhender le cadre dans lequel elle vit et s’intéresser à la vie de la cité. Cette nécessité de formation constitue un élément incontournable de la participation des citoyens. En effet, il est difficile de concevoir qu’une personne s’investisse dans un quelconque projet touchant son territoire, sans en connaître l’histoire, les activités, les pratiques ou la culture. La formation des habitants a été, par exemple, un élément primordial dans l’établissement de la ZPPAUP des Pentes de la Croix-Rousse à Lyon.

Le patrimoine peut donc être porteur d’une certaine cohésion sociale, à condition que les acteurs souhaitent mettre en valeur cet atout. Ce lien entre les habitants et le rassemblement autour d’une identité est important et ce, d’autant plus s’il est accompagné de l’amélioration du cadre de vie et du développement des activités touristiques. Ces deux dernières valeurs inhérentes au patrimoine, synonymes de richesse et de qualité de vie, sont en effet incontournables. La bonne cohésion sociale est même intimement liée à ces deux derniers points. Sans l’accroissement des ressources économiques et sans l’amélioration du cadre de vie, il paraît difficile pour n’importe quel acteur de fédérer les habitants autour d’un projet.

« Le premier regard porté aujourd’hui au patrimoine des villes consiste à le considérer comme une source de revenus et d’emplois […] le développement du

tourisme culturel-urbain apparaît susceptible de créer des miracles1 ». Cette

dynamique repose essentiellement sur quatre facteurs sociaux :

augmentation du revenu moyen,

émergence de la société de loisirs,

hausse globale du niveau d’éducation,

besoin de connaître ses racines.

Les difficultés économiques actuelles, la forte concurrence entre les collectivités territoriales font que les villes ne peuvent faire l’impasse sur le potentiel patrimoine. Les vieilles cités industrielles voient là l’occasion de relancer l’économie et les autres villes, un bon moyen de diversifier leurs sources de revenus.

Le patrimoine constitue la matière première du tourisme. Mais pour qu’un bien patrimonial attire les visiteurs, il faut d’abord qu’il soit facile à reconnaître et à délimiter. Il faut donc se préoccuper de sa mise en scène et de son image. Cela passe en premier lieu par une intense communication et valorisation au niveau national et international, afin de faire connaître le patrimoine, la culture et la tradition du site et de donner envie aux touristes de venir sur place. Pour atteindre cet objectif les possibilités sont multiples. Il est aujourd’hui aisé d’émettre des messages à portée internationale et de toucher un grand nombre de personnes par le biais de médias toujours plus nombreux et efficaces. Il existe également pléthore d’actions à mener pour promouvoir un patrimoine et attirer les touristes. La plus prestigieuse d’entre elles, et certainement celle qui a le plus grand retentissement, est l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Toutefois, si valoriser les qualités patrimoniales auprès de touristes potentiels apparaît comme nécessaire, il est encore plus important de mener une politique de valorisation auprès des habitants. L’intégration, la participation ou la coopération à l’activité touristique de ces derniers sont en effet nécessaire et constituent le deuxième pôle de valorisation économique. L’authenticité du patrimoine offert aux touristes est en jeu. Le patrimoine appartient en premier lieu aux habitants qui vivent dans le site et le font vivre. Il semble alors évident que la population participe au développement du tourisme. L’exemple du choix des monuments et du patrimoine

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présentés aux visiteurs montre parfaitement bien cette nécessité de prise en compte des habitants. À quoi bon mettre en avant des biens à l’autre bout du monde grâce à l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO par exemple, si ceux-ci ne sont sur place ni connus ni appréciés par les habitants. Il s’agit d’être honnête envers les citoyens, pour transmettre de manière fidèle leur culture aux étrangers et aux touristes, pour leur offrir un patrimoine et des monuments authentiques.

Mener une politique de valorisation au niveau local peut conduire les habitants à se reconnaître dans les biens proposés aux visiteurs. Cela passe, bien sûr, par une campagne publicitaire intense, mais surtout par de nombreuses actions sur le terrain, afin que l’on bascule d’un espace perçu à un espace vécu. Ce rassemblement de la population autour d’un patrimoine commun ne peut en outre qu’être bénéfique, puisque les habitants sont les premiers ambassadeurs de leur ville.

Enfin, le développement du tourisme dans un bien ou dans un centre historique doit se manifester par des actes beaucoup plus concrets sur le terrain. Cette étape intervient après la reconnaissance du patrimoine à toutes les échelles. La mise en valeur prend alors un côté pratique, puisqu’il s’agit de permettre aux visiteurs, même locaux, de profiter des qualités patrimoniales de la ville dans les meilleures conditions possibles. Les collectivités locales sont à la fois les décideurs et les financeurs de cette politique de valorisation du territoire en vue d’accueillir comme il se doit les touristes. Différents moyens sont utilisés : panneaux de signalisation, plaquettes d’information, intervention de l’office du tourisme, entretien des rues, des monuments, réhabilitation… Néanmoins, une fois encore, les habitants ont un rôle prépondérant dans le bon développement de l’activité touristique. Ils en sont même la cheville ouvrière lorsqu’ils sont commerçants, hôteliers ou qu’ils interviennent dans le secteur des services aux touristes (transports, office du tourisme etc.) sur le site concerné. Sans leur implication, le tourisme ne peut se développer avec la même ampleur. Les collectivités locales ont tout intérêt à mener une politique d’encouragement des activités, même si pour certains cela paraît secondaire. Néanmoins, si une ville prétend attirer les visiteurs et développer le tourisme encore faut-il que ces touristes soient satisfaits de leur séjour et ne se sentent pas floués. Satisfaire pleinement un touriste ne peut être que positif, d’abord parce qu’il aura envie de revenir et, ensuite, parce qu’il louera les mérites de l’accueil de la ville et de son patrimoine dans son entourage.

une communication au niveau national et international pour faire connaître le patrimoine,

la participation et l’intégration des habitants pour un développement

touristique authentique et viable,

l’aménagement du territoire pour permettre un accueil de qualité.

Ces trois points, notamment l’implication des citoyens, sont des conditions sine qua non du développement touristique et économique lié au patrimoine. La prise en compte du cadre de vie des autochtones est également importante.