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CHAPITRE 4 Résultats des analyses

4.2 Que font les enseignants quand ils évaluent? Et comment l’explicitent-ils?

4.2.1 Cohésion

Rappelons que la cohésion désigne l'ensemble des moyens linguistiques qui assurent les liens dans le texte. Il s’agit d’un effet de continuité et de progression sémantique et référentielle produit dans un texte par un dispositif linguistique.

Concernant ce volet de la textualité argumentative, nous avons observé l’évaluation des enseignants sous un angle précis. Notre préoccupation était de voir s’ils prennent en compte les éléments qui constituent la cohésion dans un texte, s’ils s’assurent que les élèves passent bien d’une phrase à l’autre en montrant ce qu’elles ont en commun ou alors ce qui les oppose, s’ils tiennent compte des temps verbaux et des indices de temps.

4.2.1.1 Anaphore

Aucun enseignant n’a corrigé une faute qui a un lien avec l’anaphore, pourtant l’analyse des copies des travaux des élèves permet de constater des erreurs à propos de la dimension textuelle.

Copie 2 : « Au terme de notre analyse, il s’agissait de montrer les influences positives et négatives. L’influence positive est la plus connu pour les jeunes. »

L’enseignant aurait pu indiquer à l’élève que le même groupe de mots a été répété au début de la phrase suivante et lui signaler qu’il a fait une utilisation de l’anaphore.

Copie 7 : « Dans la vie d’aujourd’hui les appareils tel que la télévision, la radio et le cinéma sont très importants pour la vie d’un jeune sur plusieurs plans :

Sur le plan de conesance, la télévision la radio et le cinémas aide les jeunes a conetre la vie… »

154 À ce niveau, on remarque que l’élève se répète et que l’enseignant n’a pas pris la peine de corriger la reprise et de lui signifier l’utilisation de l’anaphore dans le texte.

Copie 9 : « depuis quelques années l’évolution de la technologie dans les domaines du cinéma, de la radio et de la télévision connaissent une très grande évolution. »

Dans ce cas, l’enseignant a encerclé les deux mots mis en gras et n’a pas spécifié la nature des erreurs commises. Aussi, un élève insouciant ou discret ne s’attardera pas nécessairement sur la marque laissée. Il aurait pu écrire à côté « anaphore » ou alors suggérer un mot qui éviterait la répétition.

4.2.1.2 Connecteurs ou organisateurs textuels

Les connecteurs sont des unités qui appartiennent à la phrase, mais dont le rôle est interphrastique (ils concernent la relation entre deux phrases, ils fonctionnent au niveau de la micro-organisation textuelle). Du point de vue sémantique ou énonciatif, les connecteurs servent à indiquer explicitement des rapports entre les contenus posés ou présupposés de deux phrases.

Bien que certains élèves utilisent des connecteurs lorsqu’ils rédigent leur texte argumentatif, les enseignants n’y prêtent pas attention. Lors de l’évaluation, ils doivent certes corriger les erreurs, mais nous pensons qu’il est aussi nécessaire d’encourager les élèves en indiquant leurs succès.

Copie 1 : « Au terme de notre analyse, il s’agissait de montrer les influences positive et négative…»

Copie 6 : « Cependant, ils ne presentent pas que les éléments positifs. Ils présentent aussi les éléments négatifs…»

Copie 15 : « Malgré les influences positives, nous remarquons qu’ils jouent aussi un rôle très néfaste sur les jeunes.»

155 Copie 28 : « Par contre, pour les enfants qui ont recus une meilleur éducation tout cela aura des conséquences positives dans la mesure où l’enfant sera amenée à voir la télé pour peut être developpé son esprit…»

Copie 41 : « En somme, il faut savoir comment gerer sa vie a travers le cinema, la television et la radio pour ne pas gacher sa jeunesse et son avenir.

4.2.1.3 Paragraphes

Un paragraphe est un ensemble de phrases qui gravitent toutes autour d'une idée commune. Il se caractérise par son unité de sens et a tendance à subdiviser les idées ou les parties du texte. Par ailleurs, son utilisation structure le texte.

Seulement trois enseignants sur un total de quatorze se sont attardés à l’organisation des paragraphes dans les textes des élèves. Le développement d’un texte argumentatif doit contenir les paragraphes argumentatifs regroupant les différents arguments. Le développement sera plus convaincant si l’organisation en paragraphes et l’ordre des arguments sont présentés clairement. Il se peut que les enseignants connaissent l’importance du paragraphe dans un texte argumentatif, cependant ils ne s’attardent pas à cet aspect textuel.

Colpro 6 : « Non maîtrise de la méthodologie. À quoi nous sert cet élément? Vous organisez très mal vos idées et il vous manque des exemples pour soutenir vos arguments. Vous racontez n’importe quoi. »

L’enseignant Colpro 6 par exemple, ne parle pas de paragraphe dans le commentaire qu’il fait sur la copie. Par contre, lors de l’entrevue d’explicitation, il a indiqué que l’élève ne respecte pas la notion de paragraphe et qu’il se contente de développer plusieurs idées dans le même îlot textuel. Il note que le travail n’est pas divisé en parties et que les arguments sont dispersés. Par ailleurs, il a souligné que la notion de paragraphe n’était pas prise en compte tout au long de sa rédaction. Il veut attirer l’attention de l’élève sur le fait qu’à chaque idée correspond un paragraphe. Toutefois, il ressort des remarques de l’enseignant que celles- ci sont peu précises et n’indique pas à l’élève qu’il doit structurer son texte en paragraphes.

156 Il serait important que l’enseignant soit beaucoup plus explicite afin que les élèves puissent comprendre la signification exacte des commentaires.

« AB. On note un léger déséquilibre au niveau du développement des idées. Sujet pourtant très bien compris et le style est assez bon. Vous auriez pu séparer les idées en paragraphes distincts. » Colmaz 10

« Insuf. Sujet quelque peu compris. Attention à l’expression. Rédigez entièrement votre devoir. Revoyez le paragraphe argumentatif, l’introduction et même la conclusion. » Lycla 10

Ces deux enseignants, contrairement au premier, sont beaucoup plus directs dans leurs commentaires dans la mesure où ils signalent clairement aux élèves que la mise en paragraphes fait problème dans le texte. Nous constatons qu’ils demandent aux élèves de revoir l’organisation en paragraphes. Le premier fait allusion à un déséquilibre au niveau du développement des idées devant l’alternance des paragraphes longs et courts. Le second, réfère au fait que l’élève ne tient pas compte de la notion de paragraphe dans son texte argumentatif. L’enseignant doit montrer à l’élève, à travers son évaluation, qu’un texte réussi est organisé en paragraphes distinctifs qui se suivent selon une logique.

En plus de tenir compte du paragraphe dans la correction d’un texte, il est aussi important de tenir compte de la séquence microtextuelle et des dispositions textuelles lors des évaluations. Pour ce qui est du premier élément, tout texte doit, d’un bout à l’autre, présenter des énoncés bien formés et bien agencés. Par ailleurs, tout texte argumentatif doit être composé d’une introduction, d’un corps du devoir et d’une conclusion.

4.2.1.4 Séquence microtextuelle et organisation macrotextuelle

Il faut se rappeler que la séquence microtextuelle renvoie à la succession des énoncés alors que l’organisation macrotextuelle renvoie à la composition d’ensemble du texte en différentes parties. L’organisation macrotextuelle qui renvoie à la réalisation de la superstructure du texte sollicité (description, narration, argumentation), semble être le point focal de l’évaluation des enseignants. Cette organisation semble se réduire, selon tous les enseignants, à un dispositif textuel composé de trois parties que sont l’introduction, le corps du texte et la conclusion. Les enseignants insistent beaucoup sur ce dispositif textuel donnant

157 l’impression que l’organisation macrostructurelle du texte argumentatif est définie et fondée sur ce dispositif. Nous retrouvons là une façon rudimentaire de juger l’organisation d’ensemble du texte argumentatif.

De plus, les données issues des entretiens avec les enseignants ont aussi montré que la conclusion retient beaucoup leur attention puisque c’est à partir de celle-ci que l’impression finale est communiquée au lecteur. Elle contient le résumé des grandes idées développées dans le corps de la dissertation et le bilan des conclusions partielles de chaque partie du plan. De manière générale, la conclusion renferme deux sections : la synthèse, qui effectue un retour sur la thèse de départ, les arguments, qui la soutiennent principalement, et l'ouverture, qui est la partie finale de la conclusion et qui doit laisser le lecteur sur une réflexion, une projection dans le futur, une information nouvelle. Pour ces enseignants, le rédacteur met fin à la discussion en apportant des éléments de réponse aux questions posées dans l’énoncé du sujet, suivis de sa réflexion personnelle concernant le sujet.

Tous les enseignants, lors des entretiens d’explicitation, disent avoir tenu compte de ces différents aspects qui, selon eux, sont très importants dans l’évaluation. Malheureusement, cela ne transparaît pas dans les corrections effectives.

Au moment de l’explicitation de leur évaluation, tous les enseignants ont mis l’accent sur la particularité et la nécessité du paragraphe et sur les différentes parties importantes dans un texte argumentatif. Ils désignent d’ailleurs par « méthodologie » les trois aspects du texte cités plus haut (introduction, corps du devoir et conclusion). Seulement deux enseignants ont signifié l’importance des éléments de transition (Lymar 2) ou de répétition (Lycla 13) dans un texte argumentatif.

En ce qui concerne l’évaluation de la cohésion, on retient qu’aucun enseignant n’a tenu compte des différents éléments qui la constituent. Les fautes qui concernent l’anaphore, les déterminants, les temps verbaux, les connecteurs, les conjonctions ne sont pas prises en compte dans l’évaluation. Par contre, ils tiennent compte des fautes de séquences microtextuelles (liaison entre les phrases) et de macrostructures textuelles.

158 Dans l’ensemble, au niveau des faits linguistiques, on constate que les enseignants ne semblent pas s’attarder sur les éléments qui permettent la cohésion dans un texte: la construction en paragraphes, l’utilisation des connecteurs, le système des temps verbaux, l’utilisation des chaînes substitutives, la progression thématique (pour l’identification sans ambiguïté du thème du discours) et la progression de l’information. Les enseignants doivent comprendre que l’utilisation des dispositifs de cohésion sert à faire transiter l’information entre les phrases, entre les paragraphes et pour tout le texte. L’élève devrait retenir des corrections qui ont été faites que la bonne textualité de son argumentation nécessite que des liens soient établis entre les phrases et parties du texte par des marqueurs de relation (connecteurs et des organisateurs textuels).