• Aucun résultat trouvé

Le CLP, une méta-organisation destinée à fédérer des réseaux à une échelle large

Chapitre 4 : Démarche méthodologique

4.2. Le corridor logistico-portuaire : quelle réalité organisationnelle ?

4.2.1. Le CLP, une méta-organisation destinée à fédérer des réseaux à une échelle large

La notion de corridor logistico-portuaire aborde la notion de corridor en tant que réseau inter-organisationnel (Daudet & Alix, 2014). Toutefois, les réseaux inter-organisationnels pouvant présenter une multitude de formes et susciter de ce fait des analyses sous différents angles, il nous faut mener une discussion sur le type de réseau inter-organisationnel auquel correspond le corridor logistico-portuaire afin de pouvoir déterminer à que type de structure réticulaire il peut être rattaché.

Dans la section 1.2 du premier chapitre de ce travail, nous avons effectué une catégorisation des caractéristiques intrinsèques des différentes catégories de réseaux inter-organisationnels. Ainsi, nous avons comparé les districts, les clusters, les écosystèmes d’affaires, les réseaux territorialisés d’organisations et les méta-organisations. Nous allons maintenant essayer de positionner le corridor logistico-portuaire vis-à-vis de ces différentes catégories de réseaux inter-organisationnels, catégories dont nous rappelons brièvement les principales caractéristiques grâce au tableau ci-après.

128

Tableau 18: Résumé du comparatif des différentes formes de réseaux inter-organisationnels

Entité District Cluster RTO Ecosystème

d’affaires

Méta- organisation Constitution Emergente Emergente Emergente ou

délibérée Délibérée Délibérée Objectif Partage de compétenc es et de personnel, réduction des coûts Partage de ressources et de savoir- faire, réduction des coûts Promotion, partage de ressources et de savoir- faire, innover sur une thématique Diffusion d’une innovation, partage d’une ressource Promotion, réponse à un destin commun

Etendue Locale Locale Locale ou

régionale Globale, parfois locale Toute étendue Homogénéité des acteurs

Homogène Hétérogène Hétérogène Hétérogène Hétérogène Autonomie

des acteurs

Faible à modérée

Forte Forte Faible Forte

Public ou privé ?

Privé Privé Public et/ou

privé

Privé Public et/ou privé Concentratio n des ressources Diffuse, pas vraiment d’acteur à forte ressources Diffusées entre les acteurs, possibilité d’inégalité de répartition des ressources Diffuse, possibilité d’inégalité de répartition des ressources Concentratio n dans la firme focale Diffuse, possibilité d’inégalité de répartition entre acteurs Type de leadership Pas de firme focale Existence possible d’une ou plusieurs firmes focales Existence ou non de leaders

Firme focale La structure assure elle- même un leadership Modalités d’institutionn alisation Mimétisme institutionn el Mimétisme institutionnel Mimétisme institutionnel et innovation institutionnell e Mimétisme institutionnel Innovation institutionnelle Formalisatio n des relations de gouvernance Informelle s Le plus souvent informelles Formelles et/ou informelles Formelles Formelles et informelles

Statut légal Inexistant Inexistant ou contractuel Associatif ou contractuel ou inexistant Contractuel Associatif, GIE, GIP, fondation

129

Le corridor logistico-portuaire est un type de réseau inter-organisationnel apparaissant comme spécifique. En effet, il s’agit d’un type de réseau inter-organisationnel qui implique à différents degrés des acteurs très différents les uns des autres dans un enchevêtrement de relations complexe.

Dans un premier temps, nous allons commencer par analyser le corridor logistico-portuaire (CLP) au regard du filtre de classification qui nous a permis de classer les différentes formes réticulaires dans le premier chapitre, puis nous mettrons plus particulièrement en valeur les spécificités susceptibles de distinguer le CLP des formes de réseau inter-organisationnel connues.

Au vu de la littérature relative aux corridors, nous pouvons constater que les corridors logistico-portuaires sont constitués d'un ensemble de composantes matérielles et immatérielles (Comtois, 2012, Daudet & Alix, 2014, Oberg, 2014). Il semblerait que les corridors ne s'apparentent ni à un marché (il y a une forme de structuration qui dépasse l'auto-régulation par le marché) ni à une hiérarchie d'organisation complète (un corridor ne s'apparente pas à une organisation unique). En effet, le CLP possède des éléments à caractère structurant tels que les autorités portuaires, leurs groupements ou les gestionnaires d’infrastructures, qui participent autant à leur structuration matérielle qu’à leur structuration immatérielle (dimensions administratives et stratégiques de l’activité du corridor logistico-portuaire). Beziat & al. (2014), Daudet & Alix (2014) ainsi que Duszynski & Préterre (2012) remarquent que les CLP font l’objet d’une intégration opérationnelle, constituée notamment par une forme de coordination des activités logistiques (dernière couche du modèle de Notteboom, 2012). Cette intégration opérationnelle est parfois aussi liée à la nature même du territoire sur lequel se trouve le corridor. Les corridors font également l’objet d’une forme d’intégration organisationnelle, notamment sur le plan des projets de développement infrastructurels et superstructurels permettant la coopération entre ports et entreprises à l’échelle du corridor. Toutefois, il ne s’agit pas d’une structuration hiérarchique totale. En effet, les corridors logistico- portuaires ne forment pas une seule et même organisation, loin s’en faut (Beziat & al., 2014, Daudet & Alix, 2014). Cependant, dans certains cas, il arrive que la coordination et le lancement des projets s’effectue au sein du corridor sous l’effet de l’impulsion d’une politique publique, ce qui est une forme partielle de hiérarchie, qui ne constitue pas la fusion dans une organisation unique à proprement parler. Ainsi, nous pouvons bel et bien confirmer que le corridor logistico-portuaire est effectivement une forme réticulaire, à mi-chemin entre marché et hiérarchie. Ceci dit, il est fréquent que la structuration administrative d’un corridor logistico-portuaire aille plus loin que le réseau, formant une structuration en réseau de réseau (Assens & Lemeur, 2014).

Concernant le premier aspect de notre comparatif des formes organisationnelles, c’est-à-dire la genèse du réseau, il est nécessaire de déterminer dans le cas du CLP si elle est délibérée ou si elle

130

résulte d’un processus d’émergence. Autrement dit, il s’agit de savoir si la création du réseau inter- organisationnel qu’est le corridor logistico-portuaire résulte d’une volonté, d’une prise de décision ou si elle résulte d’un processus progressif d’auto-gestion des organisations concernées (comme c’est le cas pour les clusters ou les districts). Sur ce plan, en ce qui concerne le corridor logistico- portuaire, les deux positions sont défendables. En effet, le fait est qu’un corridor de transport, au sens strictement géographique du terme, existe souvent de lui-même, par émergence historique, au fil de l’installation de populations et d’industries dans un bassin versant et de la construction d’infrastructures requises pour assurer les transports au sein de cet espace géographique (Comtois, 2012). Toutefois, il s’agit ici de la considération géographique de la notion de corridor, et non de la considération du corridor comme objet de gestion qu’est le corridor logistico-portuaire. En effet, un corridor logistico-portuaire n’est pas seulement composé de continuums d’infrastructures juxtaposées : il est également constitué par des composantes non-physiques au cœur desquelles se trouvent les groupements d’autorités portuaires, qui constituent l’outil politique central d’organisation des corridors et la concrétisation administrative du corridor logistico-portuaire (Daudet & Alix, 2014, Beziat & al., 2014). Or, ces structures administratives sont le résultat d’une prise de décision et sont donc délibérées. A titre d’exemple, le GIE HAROPA a été créé en 2012 par la volonté de trois ports (Le Havre, Rouen et Paris) dans le cadre du Conseil de Coordination Interportuaire de la Seine, entité qui avait été créée par décret avec la réforme portuaire de 2008. L'agence de développement Medlink Ports a été créée en 2015 par la volonté du préfet coordinateur du bassin du Rhône, des ports du Rhône, de VNF et de la Compagnie Nationale du Rhône, bien que la marque Medlink et une coopération contractuelle préliminaire aient existé depuis 2008. Norlink Ports a été créée fin 2016 à l'initiative de la région des Hauts-de France, faisant suite à plusieurs GIE qui l'ont précédé, eux aussi résultats délibérés d'une prise de décision.

Au travers de cette réflexion, nous pouvons donc observer que les corridors logistico- portuaires résultent d’une prise de décision, issue soit des pouvoirs publics, soit des autorités portuaires, soit des deux à la fois, prise de décision qui a lieu à la suite d’une histoire marquée par un processus d’émergence infrastructurelle, géographique et matérielle. C’est pourquoi nous pouvons considérer le corridor logistico-portuaire comme se trouvant dans l’une des catégories de réseaux inter-organisationnels résultant d’un processus de genèse délibéré (écosystème d’affaires, RTO ou méta-organisation).

Sur le plan de l’objectif, le corridor logistico-portuaire a un objectif complexe. En effet, le rôle du corridor logistico-portuaire est de permettre aux grandes places portuaires qui se trouvent sur son territoire de faire face aux grands défis abordés à la section 4.1 que sont la mondialisation, les stratégies des armateurs et les mutations des chaînes logistiques. Il s’agit pour les corridors

131

logistico-portuaires de permettre le développement d’une offre compétitive de services de transport et de logistique leur permettant de maximiser l’attractivité de leurs ports (Debrie & Comtois, 2010, Alix & al., 2014, Beziat & al., 2014). Autrement dit, il s’agit de fournir à l’échelle de plusieurs places portuaires maritimes et intérieures une réponse à un destin commun. Cela implique de mettre en place des ressources nouvelles, tant infrastructurelles que superstructurelles et de développer et partager des compétences afin de permettre une meilleure valorisation du tissu économique du corridor.

Notons aussi que parallèlement au développement et au partage de ressources et de compétences, le corridor logistico-portuaire a pour objectif de permettre la valorisation et la promotion de ses ports et de ses entreprises, pour lesquelles effectuer des activités promotionnelles à l’échelle du corridor, échelle plus large, peut potentiellement permettre un gain en visibilité. Autrement dit, il a aussi une fonction de vitrine commerciale vis-à-vis de l’extérieur.

Un autre rôle du corridor logistico-portuaire est de canaliser les politiques de développement économique régional : le CLP est aussi un outil participant à la programmation des politiques territoriales, permettant de concentrer les investissements publics dans les infrastructures et les politiques environnementales. Ainsi, le CLP a aussi un rôle d’outil politique.

Pour résumer ces différents éléments, nous pouvons dire que le corridor logistico-portuaire est un type de réseau qui a pour objectif de permettre la promotion de son tissu organisationnel, le développement de ressources et compétences communes au sein de ce dernier et d’aider l’implémentation des politiques territoriales dans le but d’aborder un destin commun avec plus de confiance et de réussite. Ces différents aspects des objectifs du corridor logistico-portuaire, combinées à la genèse délibérée, inciteraient plutôt à classer le corridor logistico-portuaire dans une catégorie telle que la méta-organisation ou le réseau territorialisé d’organisations.

En termes d’étendue, l’étendue d’un corridor logistico-portuaire est également régionale ou interrégionale. En effet, la longueur sur laquelle peut s’étendre un corridor peut aller d’une centaine de kilomètres jusqu’à plus de 2000 km (cas observables dans des pays très étendus tels que le Canada ou les Etats-Unis par exemple). Parfois, il arrive aussi qu’un corridor logistico-portuaire s’étende sur plusieurs pays à la fois, les corridors étant des axes qui ne s’arrêtent pas aux frontières des Etats, des régions ou des municipalités. A titre d’exemple, Upper Rhine Ports (Ports du Rhin Supérieur) est un CLP qui se trouve à cheval sur la France, l’Allemagne et la Suisse.

Ainsi, l’échelle régionale ou interrégionale qu’adopte le plus souvent le corridor logistico- portuaire nous incite à le classer comme un réseau de type territorialisé, puisqu’il est ancré sur un territoire donné (même si, selon certains auteurs tels que Comtois (2012), les corridors peuvent

132

parfois modifier leur morphologie géographique au cours du temps en s’étendant ou en se réduisant).

Sur le plan de l’homogénéité des acteurs constituant le corridor logistico-portuaire, il apparaît clairement que les organisations constituant un corridor logistico-portuaire sont extrêmement diverses (cf. tableau) : autorités portuaires, transitaires, armateurs, transporteurs de tous modes, entreposeurs, gestionnaires de terminaux, gestionnaires d’infrastructure... Il s’agit d’entités très différentes les unes des autres, tant par leur secteur d’activité que par leur structure et leur taille. Par conséquent, nous ne pouvons ici qu’être incités à classer le CLP parmi les réseaux à constitution typiquement hétérogène. De plus, les acteurs prenant part au fonctionnement d’un CLP sont à la fois des acteurs de type public et de type privé.

Ces acteurs jouissent d’une autonomie plutôt importante : ils ne sont pas réellement contraints par une autorité formelle et surplombante, bien que les autorités portuaires et les groupements d’autorités portuaires centrent le réseau et agissent comme animateur du réseau et catalyseur des initiatives avec les syndicats patronaux (Daudet & Alix, 2014, Beziat & al., 2014). Il faudrait donc classer le CLP dans une catégorie de réseau où les acteurs sont plutôt autonomes et restent largement indépendants les uns des autres.

Toutefois, les CLP ont une forme de leadership. Ce leadership est assuré (a priori) par les autorités portuaires et leurs groupements (Beziat & al., 2014, Debrie & Comtois, 2010) qui, respectivement à l’échelle des ports et à l’échelle du corridor, effectuent une forme de leadership. Ainsi, les CLP apparaissent comme des réseaux de type semi-centré. Cela correspond bien aux notions de cluster, RTO et méta-organisation. Plus particulièrement, on se rapproche ici nettement de la méta-organisation en raison de l’existence d’une structure de groupement d’autorités portuaires, qui possède un aspect statutaire.

Sur le plan de la concentration des ressources, nous observons aussi une similitude entre le CLP et la méta-organisation : les ressources essentielles, permettant de faire fonctionner le réseau, ne sont pas possédées par le centre du réseau mais elles sont possédées par les organisations diverses constituant le réseau. Les ressources ne sont pas concentrées par les acteurs centraux.

Concernant les modalités d’institutionnalisation du réseau, dans le cas des CLP, il apparaît qu’elle se fait par innovation institutionnelle, autrement dit par la création de nouvelles institutions. Cela se voit notamment avec la création des groupements d’autorités portuaires, qui, en tant que nouvelles structures, constituent une forme d’innovation institutionnelle. Ce genre d’institutionnalisation est essentiellement observable dans les RTO ainsi que dans les méta- organisations. Plus particulièrement, dans les RTO, lorsqu’il y a innovation institutionnelle, c’est

133

souvent lorsqu’apparaît une méta-organisation. Ainsi, nous pouvons rapprocher de plus en plus la notion de CLP de celle de la méta-organisation.

Concernant la formalisation des relations de gouvernance, il apparaît au premier abord que, dans le cas des CLP, les relations de gouvernance sont partiellement formalisées. Toutefois, il semblerait que cette gouvernance se fasse d’une manière fortement basée sur les outils indicatifs et approximatifs (HAROPA, 2012, Medlink Ports, 2015). Cela signifie que les organisations présentes dans un CLP ne sont pas vraiment contraintes par une autorité totalement hiérarchique, mais plutôt par un « droit mou » qui fournit des indications et des orientations globales mais sans imposer, sans ordonner la réalisation d’actions précises (Beziat & al., 2014, Medlink Ports, 2015, HAROPA, 2012, Debrie & Comtois, 2010, Daudet & Alix, 2012). Ceci est en accord avec le fait que les ressources clés du corridor sont plutôt dispersées entre les membres, tout du moins en ce qui concerne la superstructure. Cela rend le semi-centre (i.e. le groupement d’autorités portuaires) dépendant des organisations constituant le réseau. Ceci est un phénomène qui est typiquement observable dans les méta-organisations (Ahrne & Brunsson, 2008, 2010, Gadille & al., 2013, Berkowitz & Dumez, 2017).

Enfin, concernant le statut légal, la méta-organisation a une forte particularité par rapport aux autres réseaux : elle est dotée d'un véritable statut légal qui la dote de la personnalité morale, élément que l'on ne trouve pas nécessairement dans le RTO (et que l'on y trouve surtout lorsqu'il met en jeu une méta-organisation) et encore moins dans les autres catégories de réseaux. Ainsi, comme une organisation constituée d'individus, la méta-organisation est dotée d’une constitution statutaire qui lui confère une certaine autonomie. Or, les groupements d’autorités portuaires qui incarnent les CLP ont un statut légal précis (groupement d’intérêt économique, groupement d’intérêt public, association), qui donnent un statut au CLP. Par exemple, HAROPA est un GIE, les agences Medlink et Norlink sont des associations de droit français et Upper Rhine Ports est une association de droit européen.

Toujours sur le plan statutaire et structurel, la méta-organisation se caractérise par la présence d'une structure dite de "secrétariat" (Ahrne & Brunsson, 2008), qui va de pair avec l'existence d'un statut légal précis, qui inclut des personnes et, parfois, des ressources dédiées (certaines méta-organisations ont leur propre budget par exemple). Par exemple, le GIE HAROPA est doté d'un conseil d'administration, constitué des présidents de directoires des trois autorités portuaires, avec une présidence tournante, et des salariés des trois ports sont affectés au GIE. Cet ensemble forme une structure de secrétariat, terme employé pour signifier qu'il n'existe pas une véritable hiérarchie de subordination entre méta-organisation et membres.

134

Ces divers éléments, résumés dans le tableau 17, nous incitent à considérer le CLP comme une méta-organisation territorialisée, autrement dit comme un RTO animé par une méta- organisation. Toutefois, dans le cas des CLP, le plus souvent, la structure de groupement interportuaire n’implique pas de manière directe l’ensemble des acteurs : souvent, seules les autorités portuaires et, dans certains cas, les gestionnaires d’infrastructures fluviales ou ferroviaires sont réellement et administrativement liés à la structure de secrétariat interportuaire. Ainsi, les entreprises et autres organisations concernées sont nettement moins liées à la structure de gouvernance interportuaire, le lien n’étant pas directement administratif. Toutefois, ces organisations ou leurs syndicats sont parfois représentées au sein de certaines instances de gouvernance des ports (ceci varie fortement d’un CLP à l’autre), avec un rôle plus ou moins consultatif selon le cas. De plus, l’implication des entreprises et administrations périphériques telles que la douane dans les projets menés par les groupements portuaires constituent un lien non négligeable entre ces dernières et le groupement portuaire (méta-organisation du CLP). Nous observons ici une certaine forme de membership partiel.

En outre, il est très important de remarquer que la méta-organisation de CLP (le groupement interportuaire) est un type de méta-organisation territorialisée particulier en cela qu’elle agit comme le fédérateur de plusieurs réseaux différents. En effet, la littérature ne manque pas de références assimilant un port à un réseau territorialisé d’organisations (Desplebin, 2015). En particulier, Desplebin (2015) montre que la place portuaire est un réseau territorialisé d’organisations quasi- centré, au sein duquel l’autorité portuaire agit comme un agent animateur mais avec un pouvoir limité, et constitue donc un quasi-centre du réseau. Guérin (2000) va aussi dans ce sens en assimilant les places portuaires à des « quasi-organisations ». Or, les corridors logistico-portuaires, à travers leurs méta-organisations groupant les autorités portuaires d’un même corridor, constituent une forme de mise en lien de plusieurs réseaux territorialisés d’organisations préexistants. Ainsi, les CLP forment un réseau de réseaux, ce qui en fait un type de méta-organisation particulièrement complexe, fédérant différents réseaux par l’intermédiaire de leur quasi-centre. Cette conjugaison de la méta-organisation du CLP avec des réseaux portuaires locaux constitue un facteur de complexité de gouvernance qui renforce la particularité des CLP et l’intérêt d’y étudier la construction du fait organisationnel. En effet, ici, nous ne sommes pas dans le cas d’une méta-organisation ordinaire ayant uniquement des membres administratifs, mais en présence d’une méta-organisation tentant de faire fonctionner ensemble plusieurs réseaux territorialisés différents à une échelle qui dépasse les compétences de chacun d’entre eux, et nous ne sommes pas non plus exactement dans le cas de la méta-méta-organisation (méta-organisation regroupant administrativement plusieurs méta- organisations) : c’est un type de dynamique très particulier, dont la complexité ne peut qu’intéresser qui se penche sur les domaines des méta-organisations et des RTO.

135

Nous pourrions résumer ces propos en identifiant le corridor logistico-portuaire comme une méta-organisation territorialisée à ramifications et membership multiples, qui constitue un type de méta-organisation spécifique et complexe, et par conséquent pertinent vis-à-vis de notre champ