LÕexpression est de Pierre Larousse qui, dans la prface son Grand dictionnaire universel du XIXe sicle, feint de se demander sÕil tait
Ç besoin dÕune nouvelle encyclopdie, dans un sicle qui en a dj tant vu clore quÕon pourrait le surnommer le sicle des dictionnaires ? È (1866, GDU, prface, p. V).
Ce sicle en a, en effet, Ç vu clore È un grand nombre : 339 entre 1800 et 1899 (voir annexe 3). Le premier venu est le Dictionnaire universel de la langue franoise, extrait compar des dictionnaires anciens et modernes, ou manuel dÕortographe et de nologie, du grammairien Pierre-Claude-Victor Boiste (1765-1824). Ce modeste ouvrage oblong sera constamment rdit jusquÕen 1866, sous des titres divers (aprs correction de la curieuse graphie de la couverture de la premire dition : lÕorthographe rcuprera vite son th canonique), dans des formats moins insolites, jusquÕen 1866. Il continuera de porter le nom de son auteur dÕorigine, mais le contenu, refait plus que revu par Charles Nodier et Louis Barr, puis par Pierre-Victor Verger, nÕaura, au fil des rditions, presque plus rien voir avec celui de la premire dition.
D-1 : novateurs, successeurs ou pigones ?
Les dictionnaires du sicle prcdent continuent sur leur lance, remis au got du jour, avec rfrence rituelle aux dictionnaires de lÕAcadmie. Il sÕagit dÕabord de celui de 1798 que dÕaucuns vouent aux gmonies, comme le fait Pierre Larousse :
Ç Un dcret de la Convention ordonna que lÕexemplaire [de 1762, sur lequel avait travaill
Marmontel] charg de notes marginales et interlinaires serait remis aux libraires Smith, Maradan et compagnie pour tre par eux rendu public aprs son entier achvement, et enjoignit aux dits libraires de prendre avec les gens de lettres de leur choix les arrangements
ncessaires pour que ce travail ft continu et achev sans dlai. La Convention avait parl, il fallait obir ; les libraires nÕeurent pas de peine trouver des littrateurs qui se chargrent dÕachever lÕÏuvre commence par dÕAlembert et Marmontel ; mais ce que lÕAcadmie aurait fait en un demi-sicle, peut-tre, fut bcl en quatre ans, et le nouveau Dictionnaire fut imprim en lÕan VII (1798). On conoit que lÕAcadmie franaise, lorsquÕelle fut reconstitue, nÕait pas voulu reconnatre un travail auquel elle avait eu si peu de part : il ne faut donc tenir aucun compte de cette dition de 1798. È (1866, GDU, prface, p. VI).
LÕdition de 1835, la flatteuse rputation, servira de modle (sinon toujours suivi, du moins toujours voqu comme indpassable) pendant presque un demi-sicle, aucune nouvelle version nÕayant paru avant 1878. On ne peut se passer du patronage de lÕAcadmie, on sÕen rclame donc, quitte sÕen dmarquer ensuite. On publie lÕenvi, comme la famille Wailly, des abrgs, des dictionnaires, des petits dictionnaires, des vocabulaires rdigs dÕaprs le dictionnaire de lÕAcadmieÉ Comme si cette garantie ne suffisait pas, il arrive quÕon en ajoute ; en 1823, le Dictionnaire universel de Pierre-Victor Verger, sÕil est bien Ç rdig dÕaprs le Òdictionnaire de lÕAcadmieÒ È, lÕest aussi dÕaprs Ç ceux de Laveaux, Gattel, Boiste, Mayeux, Wailly, Cormon, etc. È qui, eux-mmes, renvoient au glorieux modle. Ce qui ne diversifie pas vraiment les sources. Rares sont les auteurs qui sÕaffranchissent du recours, au moins formel, lÕautorit de lÕillustre compagnie.
D-2 : un dbut de renouveau
Cette production plthorique nÕa pas pour caractristique lÕoriginalit, tous les lexicographes se croyant obligs de se couler dans le mme moule. Pour se distinguer, faute de pouvoir (ou de vouloir) faire autrement, on peut faire davantage ; faute de choisir avec discernement les mots dfinir, on peut entasser un nombre impressionnant de mots dans des listes interminables.
Ç Une srie de dictionnaires que lÕon qualifiera par la suite dÕ Òaccumulateurs de motsÒ sÕinstalle progressivement sur le march. È (2002, J. Pruvost, Les dictionnaires de langue franaise, p.
46).
Matre en la matire, Napolon Landais donne en 1834 son Dictionnaire gnral et grammatical des dictionnaires franais, en deux volumes,
Ç modle de compilation et de surenchre dans la nomenclature, perceptible ds la lecture du titre. È (2002, J. Pruvost, op. cit., p, 46).
Bien que Pierre Larousse le juge Ç dpourvu de sens critique È, lÕouvrage aura du succs et sera rdit pendant plus de vingt ans.
Les progrs de la philologie et de ce quÕon nÕappelle pas encore Ç sciences du langage È permettront lÕmergence dÕune srie de dictionnaires de langue mieux structurs, moins anarchiquement prolifiques. LÕapptit des dicomaniaques et dicophages semble insatiable. Entre 1830 et 1860, 173 ouvrages, de tout format, en un seul ou plusieurs volumes, sont offerts au public. La plupart sont aujourdÕhui totalement oublis. NÕmergent de cette profusion, outre le Dictionnaire de lÕAcadmie franaise de 1835, et le Dictionnaire gnral et grammatical de Landais, dj nomm, que le Dictionnaire national de Bescherelle et les Ïuvres encyclopdiques de Jean-Franois Marie Bertet-Dupiney de Vorepierre (Dictionnaire
franais illustr et encyclopdie universelle) et Maurice Lachtre (Dictionnaire universel. panthon littraire et encyclopdie illustre)
Le premier ouvrage, qui ne se distingue pas de ses concurrents sur le plan du traitement de la langue, est illustr dÕexcellentes gravures sur acier (certaines sont signes [Angle] Blaise), si remarquables quÕelles ont t achetes par Camille Flammarion pour son Dictionnaire encyclopdique universel (1894). Quant Lachtre, tenant de lÕcole socitaire (Ç SOCITAIRE, adj, et s. [É] cole socitaire,
cole phalanstrienne. È [1881, M. Lachtre, Nouveau dictionnaire universel, tome 2, p. 1337]), il produit une Ïuvre atypique. La macrostructure Ð prsence de mots invents par divers courants de la gauche socialiste Ð et la microstructure Ð traitement des entres Ç mots de la langue È et Ç noms propres È Ð tmoignent de ses convictions.
Le vocabulaire fouririste y a droit de cit. Si le garantisme ainsi dfini
Ç GARANTISME, s. m. Dans le langage de lÕcole fouririste, Systme de fodalit industrielle qui doit suivre notre anarchie et prcder lÕassociation dfinitive. È (1881, Nouveau dictionnaire universel, tome 2, p. 44),
nÕest ignor ni de Louis Nicolas Bescherelle, ni dÕmile Littr, ni de Pierre Larousse, les Ç trois passions distributives È de la pense phalanstrienne (cabaliste, composite et papillonne) ne figurent au complet que chez Larousse, Littr se contentant de dfinir la composite. Voici, titre dÕexemple, la dfinition dÕune de ces passions par Lachtre :
Ç PAPILLON, ONNE, adj. [É] Philos. La passion papillonne et substantiv., la papillonne. Dans la thorie de Fourier, ce terme est employ pour indiquer lÕamour du changement. Fourier range la papillonne parmi les passions de lÕhomme appeles distributives ou mcanisantes. È (1881, Nouveau dictionnaire universel, tome 2, p. 967).
La microstructure nÕest pas plus neutre que la macrostructure. Fourier a droit une hagiographie :
Ç Fourier apparatra, aux yeux des gnrations reconnaissantes, comme une des gloires le plus pures de la France et de lÕhumanit, comme le premier gnie des temps modernes. È (1881, Nouveau dictionnaire universel, tome 1, p. 1603).
Et la monarchie est descendue en flammes :
Ç SÕil y a eu des rois que la tradition qualifie de pres du peuple, ce fut une figure de mots laquelle la raret des exemples donna un certain clat par le contraste. È (1881, Nouveau dictionnaire universel, tome 2, p. 749).
Sur le plan graphique, le Dictionnaire franais illustrÉ de Dupiney de Vorepierre se montre pionnier.
Ç Ce livre contient deux parties trs-distinctes, la partie lexicographique et la partie encyclopdique, la premire ressemblant aux dictionnaires ordinaires de la langue, la seconde donnant des notions sur les diverses branches des connaissances humaines. Cette division, que nous avons adopte lÕexemple de M. Dupiney, offre lÕavantage de sparer, par la diffrence des caractres typographiques, deux ordres trs-diffrents de recherches. È (1866, P. Larousse, prface au GDU, p. XVI).
Cette disposition si pratique pour le lecteur a t mise au point en 1847 pour la premire dition (non arrive son terme) de cet ouvrage ; Maurice Lachtre la reprendra son compte en 1852.
D-3 : mile Littr et Pierre Larousse
Point nÕest besoin de prsenter ces deux auteurs, dont les noms propres sont presque devenus des mots de la langue. Contentons-nous de reprendre les malicieux propos dÕAlain Rey, dans sa prface au catalogue de lÕexposition Le sicle des dictionnaires (1986) : Ç Resserr, minutieux [...], mathmaticien des lettres È,
mile Littr offre au public la premire livraison de son Dictionnaire de la langue franaise en fvrier 1863 ; le 27 dcembre de la mme anne, Pierre Larousse, Ç naf, gentiment mgalomane [...], polmique et populaire, anecdotier et encyclopdique, srieux jusqu'au pdantisme, mais [dont la] bonne humeur n'ignore pas le royaume farfelu È publie le premier fascicule de son Grand dictionnaire universel du XIXe sicle, dont lÕdition relie sÕchelonnera de 1866 1876.
a : le lexicographe et lÕencyclopdiste
Ports, lÕun par la puissance financire et commerciale de la maison Hachette, lÕautre par lÕenthousiasme et la force de travail de lÕ Ç instituteur de la nation È (selon le joli mot de Mona Ozouf) qui possdait sa propre entreprise dÕdition, le Littr et le Larousse ont domin le march pendant une petite centaine dÕannes.
Le Dictionnaire de la langue franaise, Ç par M. Littr de lÕInstitut È, est analys avec perfidie par Pierre Larousse dans sa prface au GDU :
Ç Le dictionnaire de M. Littr donne, ou, pour mieux dire, a la prtention de donner la nomenclature complte des mots franais, les idiotismes, des remarques critiques sur les irrgularits et les difficults de la langue ; les diverses acceptions des mots rangs dans un ordre logique ; la prononciation, lÕtymologie, et un historique de tous les termes de la langue franaise, dans leur ordre chronologique, depuis son origine jusquÕau XVIe sicle. Voil le cadre ; voyons comment il a t rempli. È (op. cit., p. IX)
Jusque-l, part le fielleux Ç a la prtention de donner È, rien de trs mchant. Mais cela se gte.
Ç LÕhistorique des mots est parfaitement expos. [É] Cette sorte de philologie archologique peut plaire aux savants et aux linguistes ; mais elle nÕoffre quÕun mdiocre intrt pour les gens du monde, qui veulent connatre avant tout la langue telle quÕelle existe aujourdÕhui. Et cependant, ce nÕest quÕen cela que consiste, vrai dire, lÕoriginalit du travail de M. Littr. È (op.
cit., p. IX).
Et cela ne sÕamliore pas. La terminologie est juge lacunaire ; la phontique reoit un loge ironique :
Ç La prononciation laisse peu de prise la critique. M. Littr a lÕoreille dlicate, minemment franaise ; on sÕaperoit souvent quÕil sÕest mis en rapport avec les personnes les plus comptentes, et que sa place doit tre marque aux fauteuils de notre Thtre-Franais. È (op.
cit., p. IX).
LÕtymologie suscite de vives critiques :
Ç Tout est emprunt la langue latine et la langue grecque. [É] M. Littr refait nouveau le travail si incomplet de Mnage. A peine parle-t-il du celtique. Quant au sanscrit, il nÕen est nullement question ; les Vdas, le Zend-Avesta, le Ramayana et dÕautres ouvrages persans et indiens ne semblent pas exister pour lui. Dans une partie aussi importante, on avait le droit dÕexiger davantage de sa comptence inconteste. È (op. cit., p. IX).
Et la prsentation fait lÕobjet dÕun commentaire indign :
Ç Nous en sommes encore nous demander comment un homme tel que M. Littr, et comment surtout une maison aussi habile que celle dont le nom figure au bas du titre, ont pu condamner le lecteur un tel imbroglio et ngliger ce point un accessoire si essentiel dans un livre de recherches : presque point dÕalinas ; certains paragraphes ont jusquÕ deux, trois, quatre et mme cinq cents lignes ; les exemples nÕont rien qui les distingue du texte de la dfinition ; les vers revtent la forme et le caractre de la prose. È (op. cit., p. IX).
Violente, cette dernire critique est pertinente ; elle sera reprise au sicle suivant.
Ç Ë lÕintrieur de chaque article, les citations suivent immdiatement la dfinition, dans les mmes lettres, sans rien qui permette de distinguer dans lÕarticle ou le sous-article, la part du lexicographe-commentateur de celle de lÕauteur-illustrateur. Ajoutez cela quÕune proportion importante de ces citations-illustrations est tire dÕÏuvres potiques ; et que le vers, compos
tout la suite de la dfinition, en est proprement mconnaissable. La plus grande part de la trs relle beaut littraire du Dictionnaire nous chappe donc pour des raisons matrielles, et contingentes. È (1995, J. Cellard, postface .Littr Ç Comment jÕai fait mon dictionnaire È, p.
104).
Cela ne semble pas avoir nui au succs de lÕouvrage, vite devenu la rfrence en ce domaine. Mais cette suprmatie a fini par ne plus tre quÕintellectuelle. Sophie Littr, unique hritire de son pre, sollicite par Hachette pour autoriser une actualisation du dictionnaire, rpond le 6 dcembre 1918 :
Ç Je dsire que le Dictionnaire Littr reste intact comme un monument de l'histoire de la langue franaise et qu'il n'en soit fait aucun usage È.
Interdiction durement ritre le 9 juin 1922 :
Ç Je ne veux pas (cÕest nous qui soulignons) vous donner l'autorisation de vous servir de l'Ïuvre et du nom de mon pre. Je tiens absolument ce que le Dictionnaire Littr reste tout fait indpendant de tout dictionnaire nouveau È.
Cette brutale fin de non-recevoir frappe ipso facto dÕune obsolescence mortelle une Ïuvre fondamentale, au prestige incomparable. Un acteur majeur disparat ainsi du secteur, aprs une carrire qui, dfaut dÕavoir t clatante, avait t plus quÕhonorable ; la vente en Ç livraisons È avait t mdiocre, mais
Ç elle se dveloppa, et la dernire rimpression faite en 1935 porta le total des exemplaires vendus 39 140 pour les quatre volumes du Dictionnaire et 45 660 pour le supplment. È (1964, J. Mistler, La librairie Hachette de 1826 nos jours, p. 179).
Quant au Larousse, ds le milieu du XIXe sicle, on ne peut en parler au singulier. En 1856, Pierre Larousse donne son Nouveau dictionnaire de la langue franaise, firement sous-titr Quatre dictionnaires en un seul. Il rassemble en effet, comme le souligne la prface, un dictionnaire de mots (ou dictionnaire de langue), un dictionnaire de noms propres, des Ç notes tymologiques, scientifiques, historiques et littraires È et un rpertoire de locutions latines. CÕest lÕanctre du Petit Larousse.
Et le Grand dictionnaire universel est lÕorigine des encyclopdies et des dictionnaires encyclopdiques publis par les ditions Larousse au XXe sicle.
b : une production foisonnante
Le prestige du Littr et du Larousse a rejet dans lÕombre leurs concurrents, dont certains ont t clbres en leur temps. Le Nouveau dictionnaire portatif de la langue franoise de Cl.-M. Gattel, paru en 1797, et bien accueilli, sera rdit jusquÕen 1854.
J.-Ch. Thibault de Laveaux, aprs avoir donn en 1802, une nime dition du Dictionnaire de lÕAcadmie franoise, fort augmente naturellement, et tablie partir de lÕdition de 1762, publie, en 1820, un Nouveau dictionnaire de la langue franaise, plus personnel, qui, malgr ses qualits (Pierre Larousse le couvre de fleurs), ne se maintiendra pas dix ans. Le sort ne sera gure plus favorable au N o u v e a u dictionnaire de la langue franaise, contenant la dfinition de tous les mots en usage, leur tymologie, leur emploi par poques, leur classification par radicaux et drivsÉ (titre abrg) de L. Dochez (1859-1860). LÕabondance et la pertinence des citations
taient apprcies de Littr, et faisaient lÕadmiration de Larousse :
Ç LÕauteur a dpouill lui-mme tous ceux de nos chefs-dÕÏuvre qui devaient lui fournir des exemples pour appuyer ses acceptions, et, dans cette galerie, le XIXe sicle nÕa pas t oubli.
[Suit une longue liste dÕcrivains.] Ces noms sont une preuve des soins que lÕauteur a apports
la composition de son dictionnaire. È (op. cit., p. IX).
Ce pangyrique permet notre encyclopdiste de lancer une nouvelle pique Littr :
Ç Il [Dochez] donne, comme M. Littr, et par ordre chronologique, une srie dÕexemples qui montrent les diffrentes physionomies que nos vocables ont revtues aux priodes successives de notre histoire littraire, et le dictionnaire Dochez a prcd de plusieurs annes le dictionnaire Littr. Est-ce dire que ce dernier sÕest inspir du plan de son devancier ? Nous ne le pensons pas. Les tudes de M. Littr ce sujet rvlent trop de savoir et de comptence pour quÕon admette un seul instant cette supposition. È (op. cit., p. VIII).
Ë lÕvidence, cette supposition, il lÕadmet.
Quoi quÕil en soit, la valeur du Dochez nÕa pas assur son succs : il nÕa pas t
rdit.
Il est impossible de sÕtendre sur les autres dictionnaires et encyclopdies du Ç sicle des dictionnaires È : on en compte plusieurs centaines. Nous reviendrons ultrieurement sur les ouvrages vise pdagogique, assez nombreux aprs 1840.
Et nous faisons une fois encore appel Pierre Larousse pour Ç le mot de la fin È :
Ç Parlerons-nous maintenant de cette foule de dictionnaires qui, depuis vingt ans [en 1866], se sont chapps de nos grandes boutiques de librairie, pour sÕabattre comme des nues de sauterelles dans nos bibliothques et dans nos coles : Wailly, Chapsal, Napolon Landais, Bescherelle, La Chtre, Poitevin, etc., etc. ? Sauf ce dernier, o lÕon rencontre des phrases empruntes aux crivains de notre poque, on les dirait tous sortis du mme moule. Ce sont de pures spculations de librairie, o la langue et la littrature nÕont absolument rien voir. È (op.
cit., p. X).
Svre ? Certes. Partisan ? Srement (Bescherelle et Lachtre ne mritent pas cette vole de bois vert). Faux ? Pas totalement.
D-4 : un vide lexicographique
Nous reprenons ici lÕexpression dÕAlain Rey, titre de son article Ë propos dÕun Ç vide lexicographique È et de lÕencyclopdisme dans les dictionnaires franais entre le Ç Dictionnaire gnral È et le Ç Robert È (1900-1960), in Travaux de linguistique et de philologie, tome XXVI (1988), pour lÕappliquer une autre priode de temps, la fin du XIXe sicle et le dbut du XXe.
a : les dictionnaires de langue
Les linguistes rendent hommage au Dictionnaire national de L.-N. Bescherelle (1845) ; pour les annes suivantes, aprs 1872 (date de la dernire Ç livraison È du Littr) et 1876 (date dÕachvement du grand Larousse), ils ne prennent gure en compte que le Dictionnaire gnral dÕHatzfeld, Darmesteter et Thomas, dont les deux imposants volumes ont paru chez Delagrave entre 1890 et 1900. Pourtant, des
diteurs qui n'taient ni Larousse ni Delagrave (Hachette disparat du march la suite de lÕobstruction de Sophie Littr) ont dit des dictionnaires, et beaucoup, jusqu' la veille de la Deuxime Guerre mondiale. En donner la liste nÕaurait gure de sens, la plupart des dictionnaires de langue ne se signalant par aucun mrite particulier.
b : dictionnaires encyclopdiques, dictionnaires militants
Les dictionnaires encyclopdiques et les dictionnaires militants sont nombreux partir de 1830, et les deux catgories se recouvrent souvent.
b-1 : dictionnaires et encyclopdies
Entre 1887 et 1889 paraissent chez Chamerot (un des deux premiers employs de Louis Hachette, embauch en 1827 et tabli son compte dix ans plus tard) les trois gros volumes du Dictionnaire franais illustr des mots et des choses, ou dictionnaire encyclopdique des coles, des mtiers et de la vie pratique, lÕusage des matres, des familles et des gens du monde, de Larive et Fleury. Justement qualifi de Ç clbre È par B. Quemada, en tout point remarquable, y compris sur le plan de l'illustration, cet ouvrage a eu de nombreuses ditions, abrges ou non, chez
Entre 1887 et 1889 paraissent chez Chamerot (un des deux premiers employs de Louis Hachette, embauch en 1827 et tabli son compte dix ans plus tard) les trois gros volumes du Dictionnaire franais illustr des mots et des choses, ou dictionnaire encyclopdique des coles, des mtiers et de la vie pratique, lÕusage des matres, des familles et des gens du monde, de Larive et Fleury. Justement qualifi de Ç clbre È par B. Quemada, en tout point remarquable, y compris sur le plan de l'illustration, cet ouvrage a eu de nombreuses ditions, abrges ou non, chez