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Chapitre II. Caractérisation du milieu déchet

1. La caractérisation bio-hydro-mécanique du milieu déchet Propriétés physiques Propriétés physiques

1.1.2. Classifications de déchets

Position du problème

Le but de la classification est d’avoir une idée, à partir de caractéristiques de base d’un matériau (taille ou forme des particules, nature des composants…), de son comportement physique global. La classification de déchets est un problème complexe, et il n’existe pas encore de classification universelle.

Contrairement aux sols, il n’est en effet pas possible de dégager un critère pour caractériser les comportements mécanique, hydrologique et biologique des déchets. Typiquement, pour ces sols, le critère de la taille permet de dégager un comportement de type pulvérulent ou un comportement de type cohérent, ce qui permet à son tour d’en déduire des caractéristiques mécaniques et hydrologiques majeures.

Une telle équivalence entre taille des particules et comportement n’est pas valable pour les déchets. Nous allons ci-après voir quelles alternatives ont été proposées par différents auteurs ayant proposé des systèmes de classification.

Types de classification

Il existe un nombre important de classifications de déchets, qui sont pour la plupart orientées en fonction des usages finaux auxquelles elles sont dédiées (Dixon et Jones, 2005). Le nombre existant de classifications et le non recoupement de ces dernières en rend l’intercomparaison très difficile (Olivier, 2003). Selon Dixon et Jones (2005), les informations les plus importantes à considérer dans toute classification sont :

- la forme des particules (particules tridimensionnelles, de type granulaire, et particules bi- ou monodimensionnelles, et évolution possible de la forme des particules) ;

- la taille des particules (granulométrie) ;

- les groupes de matériaux (catégories de composants) ; - la biodégradabilité des particules et leur organicité.

Certaines classifications peuvent aussi se baser sur la densité des constituants, les propriétés hydriques ou mécaniques des déchets. Sans combiner tous les critères possibles de classification proposés ci-dessus, ici, nous ne proposons que quatre types de classifications, en fonction :

- de catégories de composants ;

- de la nature organique ou non des éléments (classification de biodégradabilité) ;

- de la déformabilité et de la biodégradabilité des éléments (classification bio-mécanique) et en fonction du comportement de type « sol » ou « non-sol » (classification comportementale) ; - de la combinaison des critères sus-nommés.

Cette revue ne se veut pas exhaustive, il s’agit des types de classifications généralement les plus utilisées, et elles seront illustrées par un ou deux exemples.

Classifications en fonction des catégories de composants

Il s’agit de la classification typique « composant par composant » que nous allons illustrer par la méthode MODECOM™, qui est de loin la plus utilisée en France (Ademe, 1993 ; 2009b). Cette dernière prévoit une séparation en 12 catégories de matériaux des déchets, en plus d’une 13ème catégorie constituée par les fines (Dmax < 20 mm).

La campagne de caractérisation MODECOM™ a permis ensuite de réaliser des classifications intermédiaires en fonction de l’origine des déchets (Province / Île-de-France et urbain / semi-urbain / rural), et a recensé différentes propriétés des déchets, notamment teneur en eau et différentes caractéristiques physico-chimiques (Ademe, 1993). Les catégories MODECOM™ ont leurs équivalents dans les autres pays européens, mais la comparaison entre Etats reste difficile. L’agence européenne de l’environnement a réalisé une étude proposant un nombre de catégories supérieur à celui de l’étude MODECOM™ afin de prendre en compte les différentes catégories des campagnes nationales (EEA, 2000b).

Cette « classification » est plutôt à classer parmi les inventaires ou campagnes de caractérisation, son intérêt principal étant de permettre de mieux connaître la production de déchets des français. La classification, elle, n’est que basée sur les catégories de composants et ne permet donc pas de dégager des sous-groupes d’un point de vue du comportement biochimique ou mécanique par exemple. Ces classifications sont présentées ci-après.

Tableau II-1 : classification MODECOM™ de l’Ademe (1993 ; 2009).

Numéro de catégorie Catégorie Sous-catégorie

1 Putrescibles - 2 Papiers Journaux Magazines Papiers d’emballage Autres papiers 3 Cartons - 4 Complexes -

5 Textiles Emballages en textiles

Autres textiles

6 Textiles sanitaires -

7 Plastiques Films polyoléfines

Bouteilles/Flacons polyoléfines Bouteilles/Emballages PVC Autres emballages PVC Autres déchets PVC Emballages PET Emballages polystyrène Autres déchets polystyrène Autres déchets plastiques

8 Combustibles non classés Emballages combustibles

Autres combustibles

9 Verre Emballages en verre vert

Emballages en verre blanc Emballages en verre brun Autres déchet en verre

10 Métaux Métaux ferreux d’emballages

Autres métaux ferreux Emballages en aluminium Autres déchets en aluminium

11 Incombustibles non classés -

12 Déchets ménagers spéciaux -

13 Eléments fins (Dmax < 20 mm) -

Classifications en fonction de la nature organique ou non des éléments

Des classifications simples pour dissocier les éléments organiques des éléments inorganiques ont été présentées par Landva et Clark (1990) et Tchobanoglous et al. (1993). Le principe est la division binaire de l’échantillon à analyser entre composants organiques et inorganiques (Tableau II-2).

Tableau II-2 : classification proposée pour les DND par Tchobanoglous et al. (1993).

Composants organiques Composants inorganiques

- déchets alimentaires - papier - carton - plastiques - textiles - caoutchouc - cuir - déchets de jardin - bois - divers - verre - fer - aluminium - autres métaux - cendres, poussières

Une telle classification peut se faire en complément par exemple de la classification par type de composants, comme la classification MODECOM™. Elle permet un premier « tri » entre éléments susceptibles de se dégrader ou non, mais ne propose pas de sous catégories en fonction de la biodégradabilité des éléments, ce que propose la classification suivante.

La classification proposée par Aguilar-Juarez (2000) permet une distinction plus fines entre différents composants en les classant en fonction de leur degré de biodégradabilité (Tableau II-3). L’idée ici était de prédire en fonction des composants du déchet la biodégradabilité globale du déchet en fonction de différentes cinétiques de biodégradation d’un groupe d’éléments : éléments rapidement, moyennement, lentement biodégradables et inertes.

Tableau II-3 : classification proposée pour les DND par Aguilar-Juarez (2000).

Fraction du déchet solide Eléments constitutifs

Rapidement biodégradable

Déchets alimentaires Déchets verts Boues

Moyennement biodégradable Papiers, cartons

Lentement biodégradable Textiles

Déchets ligneux, bois

Inerte (« non » biodégradable)

Matière minérale (gravats…) Métaux

Plastiques

Classifications bio-mécaniques comportementales

La nécessité de prendre en compte à la fois la déformabilité et la biodégradabilité des éléments a permis l’émergence de premières classifications multi-critères, dont la plus citée est sans doute celle de Grisolia et al. (1995). Cette classification permet de placer sur un diagramme ternaire un déchet en

Grisolia et al. (1995) étudient 83 types de déchets entre 1960 et 1995 et les placent sur un diagramme ternaire. Ils mettent en évidence des « zones » en fonction de l’origine géographique des déchets (Figure II-4).

Ce classement a pour principal intérêt de rendre plus visuelle une classification de déchets. Ce classement, fréquemment cité comme une référence, commence toutefois à dater et il n’est pas si certain que les divisions géographiques soient encore si nettes aujourd’hui, en raison d’une forte évolution de la production et de la qualité de déchets. Il serait intéressant d’étudier notamment l’évolution de la position d’un déchet en fonction de sa biodégradation, ce dernier évoluant, vers une part inerte croissante (le déchet s’inertant avec le temps), et une part de composants fortement déformables plus importante (Olivier, 2003).

Toutefois, Dixon et Langer (2006) ont critiqué ce classement, car certains éléments pourraient a priori être classés dans plusieurs catégories, comme les déchets putrescibles, qui entreraient tout autant dans la catégorie des déchets fortement biodégradables et déformables.

Tableau II-4 : classification proposée pour les DND par Grisolia et al. (1995).

Classe ‘A’ Inertes Classe ‘B’ Biodégradables Classe ‘C’ Déformables - sols - métaux - verre - porcelaine - déchets de construction - cendres - bois - papiers - cartons - textiles - cuir - plastique et caoutchouc - textiles sanitaires - pneumatiques - déchets alimentaires - déchets de jardin - déchets animaux - fines (Dmax < 20 mm)

Figure II-5 : classification en fonction du comportement de type sol ou non-sol (Nousheen-Arif, 2010).

Dans le même type de classifications comportementales, on peut souligner une approche en fonction du caractère de type « sol » ou « non-sol » des constituants. Celle-ci a été proposée par Thomas et al. (1999) et reprise par Nousheen-Arif (Figure II-5). Dans cette classification, si les plastiques et les métaux ont un comportement de type « sol » durant l’évolution temporelle du déchet, à l’inverse, les inertes minéraux et le verre ont toujours un comportement de type non-sol, et tous les autres composants évoluent avec le temps. Le problème de cette classification simple est toutefois qu’elle semble plutôt qualitative, et ne permet pas de déduire un comportement bio-hydro-mécanique global.

Proposition d’une classification multi-critères

Au-delà des classifications bio-mécaniques, déjà multi-critères, nous citerons une classification plus complexe proposée par Dixon et Langer (2006). Leur classification intègre les différents critères que nous avons vus auparavant :

- une première étape consiste à classer les différents composants par catégories ;

- la deuxième étape consiste à classer les composants en fonction du comportement mécanique (compressible, incompressible, renforçant) ;

- ensuite, ces étapes sont répétées pour chaque classe de taille des matériaux ;

- enfin, la biodégradabilité des différents matériaux est évaluée pour chaque groupe de matériaux.

La Figure II-6 présente une classification type pour les composants compressibles. On peut bien évidemment reprocher à ce type de classification sa complexité, puisque pour un seul déchet, plusieurs graphiques de la sorte doivent être réalisés, ce qui empêche d’avoir une vision d’ensemble.

L’exercice reste néanmoins intéressant, et montre la difficulté de classifier ce matériau « déchet », qui se distingue assez nettement d’un sol d’un point de vue bio-hydro-mécanique. En France, mais aussi dans de nombreux autres pays, les opérateurs tout comme la plupart des études ne mentionnent que la classification par composant, de type MODECOM™ ou équivalent.

Plastiques/Métaux Papiers Bois Textiles Inertes minéraux Verre Evolution temporelle

Comportement de type non-sol Comportement de type sol

Figure II-6 : classification multi-critères (Dixon et Langer, 2006).