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Classification des politiques monétaires des pays du groupe d’Agadir

CHAPITRE I : LE CHOIX D’UN RÉGIME MONÉTAIRE

2. Politiques monétaires des pays de l’accord d’Agadir

2.2. Classification des politiques monétaires des pays du groupe d’Agadir

Ancrage du taux de change nominal / USD Ancrage du taux de change nominal / panier monétaire Ancrage d’agrégat monétaire Égypte 1986-2002 et 2006 2003-2005 Jordanie 1996-2006 1986-1995 1986-1995 Maroc 1986-2006 Tunisie 1986-2004 1986-2006

Sources : FMI (2004 d, 2005 a, 2007 h et 2007 i), Stone et Bhundia (2004) et nos propres observations.

En Égypte, jusqu’à fin 2002, la cible intermédiaire de la politique monétaire était le taux de change nominal unilatéral par rapport au dollar (USD). Les classifications officielles du FMI (2004 d, 2005 a et 2006 g) stipulent qu’à l’aube de 2003, année officielle de l’introduction du flottement libre, implicitement, la politique monétaire cible des agrégats monétaires, et qu’elle est menée conjointement avec un régime de change à flottement géré (annexes 1 et 2). Toutefois, le régime de politique monétaire réellement pratiqué depuis 2003 est controversé. D’une part, nous remarquons sur le graphique 2 un retour à l’ancrage du taux de change nominal par rapport au USD à la fin de 2003, interrompu par une légère appréciation de la livre égyptienne en 2005. La persistance de l’ancrage du taux de change nominal par rapport au USD a également été soulignée dans la littérature {FMI (2006 g) et Fanizza et Söderling (2006)}. Les classifications des régimes de change de facto du FMI (2006 d et 2007 h) intègrent l’Égypte dans la catégorie d’ancrage du taux de change par rapport à une seule devise. D’autre part, Stone et Bhundia (2004) trouvent qu’en 2003, la politique monétaire de facto de l’Égypte repose sur un vague ciblage de l’inflation. En outre, les économistes du FMI (2005 b) soulignent que depuis la rupture officielle de l’ancrage du taux de change nominal, l’ancrage nominal de la politique monétaire égyptienne n’est pas clairement défini. Dans le même ordre d’idées, Al-Mashat et Billmeier

(2007) affirment qu’entre 2000 et 2005, les autorités monétaires égyptiennes ont été incapables d’annoncer explicitement l’ancrage nominal de la politique monétaire.

Graphique 233

-1.2

-1.0

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

0.0

0.2

86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06

DNERAEGY

Variation annuelle du taux de change nominal 1EGP/USD en Egypte

En Jordanie, entre 1986 et 1996, les autorités monétaires pratiquaient la politique monétaire

de jure d’ancrage de la masse monétaire, parallèlement au ciblage implicite du taux de change nominal multilatéral par rapport à un panier monétaire. Toutefois, en observant le graphique 3, il semblerait que durant toute la période de notre étude (1986-2006), implicitement ou explicitement, la politique monétaire jordanienne repose davantage sur

33 L’analyse menée dans le cadre de notre travail repose sur des graphiques présentant des variations

annuelles des variables à fréquence mensuelle. Dans le but de mieux capter les dynamiques des variables, nous étudions leurs mouvements avec un écart de 12 mois.

l’ancrage du taux de change nominal unilatéral par rapport au USD. L’évolution de l’ancrage nominal intermédiaire de la politique monétaire en Jordanie montre que durant la période 1986-1995, le taux de change effectif nominal affiche une volatilité modérée, mais de même ampleur que celle du taux de change nominal par rapport au USD (supposé flotter avec plus de flexibilité). Il apparaît donc que l’ancrage du taux de change effectif nominal n’était pas ferme. À partir d’octobre 1995, la tendance est inversée : suite à l’adoption du ciblage intermédiaire du taux de change nominal unilatéral par rapport au USD, on assiste à un ancrage ferme et clair de la nouvelle cible intermédiaire. Le taux de change nominal est solidement ancré au dollar et affiche une stabilité parfaite, alors que la volatilité du taux de change effectif nominal s’accroît.

Graphique 3

-.8

-.6

-.4

-.2

.0

.2

86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06

DNEERAJOR DNERAJOR

Variation annuelle du taux de change effectif nominal et du taux de change nominal 1JRD/USD en Jordanie

Tout au long de notre période d’étude. Le Maroc persiste à pratiquer le régime conventionnel d’ancrage du taux de change nominal multilatéral par rapport à un panier monétaire. Cependant, en réalité, cet ancrage ne semble pas ferme dans la mesure où il est contenu au sein d’une bande (graphique 4). L’existence de cette bande implicite est également soulignée par les économistes du FMI (2007 g). Neaime (2007) affirme que dans une perspective de passage au régime de ciblage de l’inflation, les autorités monétaires marocaines pratiquent d’ores et déjà une politique monétaire de facto de ciblage de l’inflation. Graphique 4

-.20

-.15

-.10

-.05

.00

.05

.10

86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06

DNEERAMAR

En Tunisie, les autorités monétaires poursuivent une politique d’ancrage monétaire de M2 conjointement avec l’ancrage implicite du taux de change nominal multilatéral de 1986 à fin 2004 (FMI, 2004 d et 2005 a). Il est important de noter que l’ancrage du taux de change nominal est un semi-ancrage souple et modéré. À partir de 2005, l’ancrage parallèle du taux de change a été abandonné en faveur d’un régime de change plus flexible (annexes 1, 2 et 3). Fanizza et Söderling (2006) mettent en exergue l’absence en pratique du ciblage de l’ancrage nominal intermédiaire (officiellement la croissance de l’agrégat M2) en Tunisie depuis le début des années 90. Selon ces auteurs, la politique monétaire de facto serait basée sur une cible opérationnelle : le taux d’intérêt nominal à court terme. Neaime (2007) soutient qu’implicitement, la politique de ciblage de l’inflation est déjà adoptée par la BCT.

Graphique 5

-.4

-.3

-.2

-.1

.0

.1

.2

.3

86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06

DNEERATUN DM2ATUN

Variation annuelle du double ancrage du taux de change effectif nominal et de la cible monétaire M2 en Tunisie

Nous avons présenté la classification des différents types de régimes de politique monétaire dans les quatre pays d’Agadir. Le type de régime monétaire informe sur la cible intermédiaire de la politique monétaire. Or une présentation complète d’une politique monétaire s’articule autour des fondements de la politique monétaire, à savoir : les instruments opérationnels, les cibles intermédiaires et les objectifs finaux. C’est pour cette raison qu’une présentation de fond des politiques monétaires menées dans les quatre pays de l’accord d’Agadir est exposée dans la section qui suit. De même, le mécanisme de transmission de la politique monétaire est brièvement traité.

Le mécanisme de transmission de la politique monétaire peut être défini comme le processus qui permet de transmettre les changements de la politique monétaire aux variables économiques fondamentales : l’inflation et la croissance (Taylor, 1995). Les changements non anticipés de la politique monétaire constituent des chocs de politique monétaire. Les travaux économétriques portant sur les mécanismes de transmission de la politique monétaire ont mis l’accent sur deux cibles opérationnelles de la politique monétaire : le taux d’intérêt à court terme et la base monétaire. Les mouvements de ces variables reflètent les changements de la politique monétaire.

La littérature dénombre essentiellement trois types de canaux de transmission : le canal monétaire, le canal crédit et le taux de change34. Le canal monétaire est mis en exergue par l’école monétariste. Le courant Keynésien privilégie le canal crédit et le canal taux de change. Le taux de change est considéré par la littérature comme le canal de transmission dominant dans les économies émergentes (Dabla-Norris et Floerkemeier, 2006)35. Son

pouvoir de transmission dépend essentiellement du degré d’ouverture des économies36.

34 La littérature traitant du mécanisme de transmission de la politique monétaire et ses canaux est très dense.

Une classification plus détaillée des canaux de transmission de la politique monétaire distingue plusieurs canaux : le taux d’intérêt, le canal monétaire, le canal crédit, la balance des paiements, les prix des actifs, le taux de change et les anticipations.

35 Notamment les économies qui pratiquent des rattachements fixes du taux de change tels que la dollarisation

et le «currency board».

36

Contrairement au canal crédit bancaire qui ne peut être efficace dans la transmission de la politique monétaire que sous deux conditions : 1) les autorités monétaires doivent être capables d’influencer les liquidités des banques via les opérations d’«open market» ou d’autres instruments monétaires et 2) l’inexistence de substituts parfaits aux crédits accordés par les banques. Par conséquent, la performance de ce canal nécessite des conditions particulières de structure, de maturité et de régulation des marchés financiers.

2.3. Description des politiques monétaires des pays du groupe d’Agadir