• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I : LE CHOIX D’UN RÉGIME MONÉTAIRE

2. Politiques monétaires des pays de l’accord d’Agadir

2.1. Accord d’Agadir et Présentation générale des pays signataires

L’accord d’Agadir crée une zone de libre-échange entre quatre pays classés en tant qu’économies émergentes (FMI, 2008 c) : le Maroc, la Tunisie, l’Égypte et la Jordanie. Il s’agit d’un prélude à la future zone euro-méditerranéenne de libre-échange. Cette initiative a été soutenue par la Commission européenne, aussi bien sur le plan politique que sur le plan financier28.

À date, l’accord d’Agadir porte principalement sur les échanges commerciaux. Néanmoins, dans l’avenir, le projet d’extension de cet accord aux aspects monétaires et de change n’est pas exclu. Dans le contexte de la création de la zone de libre-échange euro- méditerranéenne, une harmonisation des politiques monétaires et de change dans le bassin méditerranéen est une condition sine qua non de la réaffirmation de la présence des pays du Sud et de l’Est de la méditerranée (PSEM) sur la scène économique internationale. En effet, à l’heure de l’intégration et de la globalisation, le réalisme conduit à la synchronisation des politiques monétaires et à la coordination des régimes de change entre les pays du pourtour méditerranéen.

Paraphé le 8 mai 2001, signé le 25 février 2004 et ratifié le 11 juillet 2006, la route vers l’application effective de l’accord a été truffée d’obstacles. En particulier, un défaut d’harmonisation des clauses de l’accord entre les différents pays membres a persisté29. C’est alors depuis le 27 mars 2007 que l’accord est entré en vigueur.

Certes, l’Égypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie représentent des pays divergents en termes de taille, de population, de croissance et d’ouverture (tableaux 2 et 3). La Tunisie a suivi une croissance élevée et régulière, notamment depuis le début des années 90, tandis que la Jordanie a connu des reculs de son PIB per capita. Le Maroc et l’Égypte se sont établis sur des régimes de croissance lents. Toutefois, depuis 2006, une nouvelle

28 Grâce à un programme de 4 millions d’euros.

29 Concrètement, c’est le volet agricole qui est à l’origine du retard en raison des différents accords des pays

dynamique de croissance réelle a émergé au sein du groupe d’Agadir : la Tunisie est dépassée par les autres membres, notamment par l’Égypte et la Jordanie (graphique 1).

Tableau 2. Données générales relatives à l’année 2006

Égypte Jordanie Maroc Tunisie

Population en million 74,13 5,70 31,48 10,20

PIB per capita en USD 1268,93 2223,82 1803,50 2938,24

Croissance réelle (variation

annuelle en pourcentage) 6,8 6 7,4 5,5

Degré d'ouverture30 64,98 112,35 78,93 98,63

Sources : Statistiques financières Internationales, Fonds Monétaire International, Mars 2007. Institut National des Statistiques pour la Tunisie, FMI (2008 a).

Tableau 3. Variables macroéconomiques clés en pourcentage (1986-2006)

Données Obs Moyenne Écart-type Inflation annuelle (IPC) Égypte 1986:1-2006:12 252 10,67 7,67 Inflation annuelle (IPC) Jordanie 1986:1-2006:11 251 4,89 6,97 Inflation annuelle (IPC) Maroc 1986:1-2006:12 252 3,52 2,68 Inflation annuelle (IPC) Tunisie 1986:2-2006:12 251 4,51 1,98

Croissance réelle Égypte31 1986:1-2006:1 21 3,43 3,59

Croissance réelle Jordanie 1986:1-2003:1 18 2,55 7,43

Croissance réelle Maroc 1986:1-2006:1 21 3,04 4,71

Croissance réelle Tunisie 1986:1-2004:1 20 3,76 2,66

Taux d'intérêt à court terme Égypte 1985:1-2006:12 264 12,79 1,97 Taux d'intérêt à court terme Jordanie 1985:1-2006:12 264 6,77 1,89 Taux d'intérêt à court terme Maroc 1985:1-2006:12 264 7,37 3,15 Taux d'intérêt à court terme Tunisie 1985:1-2006:12 264 8,11 2,35 Taux de change effectif nominal Égypte

(variation annuelle) 1986:1-2006:12 252 -11,58 22,52

Taux de change effectif nominal Jordanie

(variation annuelle) 1986:1-2006:12 252 -3,86 13,91

Taux de change effectif nominal Maroc

(variation annuelle) 1986:1-2006:12 250 1,12 3,87

Taux de change effectif nominal Tunisie

(variation annuelle) 1986:1-2006:12 252 -3,49 6,13

Sources : Statistiques financières Internationales (FMI) et Banques Centrales des pays du groupe d’Agadir.

30 Le taux d’ouverture est obtenu par le rapport de la somme des exportations et des importations au PIB. 31

Graphique 132

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

99

00

01

02

03

04

05

06

07

CREGY CRJOR CRMAR CRTUN

Croissance réelle dans les pays du groupe d'Agadir

Aux premiers abords, trois caractéristiques actuelles communes ressortent pour les quatre pays du groupe d’Agadir. En premier lieu, contrairement aux autres PSEM, leurs ressources pétrolières sont limitées ou nulles. En deuxième lieu, les transferts financiers des émigrés jouent un rôle majeur dans la réduction de la pauvreté, particulièrement en Égypte, en Jordanie et au Maroc. En troisième lieu, la structure de l’activité économique est similaire, notamment pour l’Égypte, le Maroc et la Tunisie. Seule la Jordanie se démarque du groupe par une forte dominance des services et une contribution dérisoire de l’agriculture dans le PIB (tableau 4).

32

Tableau 4. Structure de la production dans les pays d’Agadir (% du PIB, année 2003)

Agriculture Industrie Services

Égypte 17 32 51

Jordanie 2 26 72

Maroc 16 31 53

Tunisie 12 29 59

Source : Berument et Ceylan (2004).

Sur le plan monétaire, une similarité apparaît entre les pays du groupe d’Agadir : en dépit de la divergence de leurs régimes monétaires de facto, ils envisagent la transition vers une politique de ciblage de l’inflation. Les périodes de transition estimées par le FMI (2006 b) sont résumées dans l’encadré suivant.

Encadré 1. Candidats pour le ciblage de l’inflation au sein du groupe d’Agadir

Court terme (1-2 ans) : Égypte. Moyen terme (3-5 ans) : Maroc.

Long terme (supérieur à 5 ans) : Tunisie.

Source : FMI (2006 b).

Seule la Jordanie ne figure pas encore en tant que candidat potentiel à l’implantation d’une politique monétaire de ciblage de l’inflation. Cette question suscite la controverse. D’une part, en se référant aux conditions requises pour le passage à une politique monétaire de ciblage de l’inflation, Jbili et Kramarenko (2003) soulignent que la Tunisie et la Jordanie sont sur le point de satisfaire à certaines d’entre elles. D’autre part, non seulement, la Jordanie est le membre du groupe d’Agadir qui pratique le régime d’ancrage du taux de change fixe le plus ferme, mais aussi, à date, la Banque Centrale de la Jordanie ne bénéficie pas d’un statut autonome et indépendant (Neaime, 2007).

Dans les deux sections suivantes, les politiques monétaires des pays membres de l’accord d’Agadir sont étudiées.

2.2. Classification des politiques monétaires des pays du groupe d’Agadir