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III. Délimitation et spécificités du périmètre d’étude

1. Choix du périmètre d’étude

1.1. Contexte initial de la recherche

Dans le cadre de cette thèse, j’ai été amenée à travailler pendant γ ans au sein de la Chambre

de Commerce et Industrie Tarbes et Hautes-Pyrénées, tout en bénéficiant d’une bourse du

Fond d’Innovation et Recherche du Conseil Départemental des Hautes-Pyrénées. Cette

première immersion sur le territoire a été le point de départ de ma réflexion. En effet, en

collaborant quotidiennement avec les forces vives du département, qui œuvrent en faveur de

son développement, dans la recherche d’une attractivité toujours renforcée, j’ai pu

commencer à en cerner les enjeux en matière de développement territorial, et notamment ceux

soulevés par le phénomène de métropolisation grandissant. Ces enjeux n’en sont que plus

essentiels, dans la mesure où ce département fait partie, de ce que l’on pourrait qualifier,

l’espace extra-métropolitain de la région, et se trouve parmi les plus éloignés de la métropole.

Le territoire des Hautes-Pyrénées se caractérise par une topographie hétérogène, à savoir les

montagnes et leurs vallées, les coteaux et les plaines. Le territoire de montagne représente la

moitié de la surface du département, ce qui influence son activité économique, mais aussi la

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Vanier, ε. (β008). δe Pouvoir des territoires. Essai sur l’interterritorialité. Paris: Economica. Anthropos,

répartition démographique en son sein, et forme une frontière naturelle entre la France et

l’Espagne.

Le département ne compte pas moins de 15 bassins de vie ruraux (au sens de l’INSEE), et qui

intègrent pour certains des communes des départements limitrophes que sont le Gers, les

Pyrénées-Atlantiques et la Haute-Garonne. Le bassin de vie de Tarbes est le plus vaste et le

plus peuplé. Lourdes, Bagnères- de –Bigorre et Lannemezan sont les 3 autres bassins de vie

significatifs et structurants du territoire, les autres étant peu peuplés et plutôt ruraux. Il

convient de préciser que l’influence des départements limitrophes est conséquente,

notamment à l’ouest vers les Pyrénées-Atlantiques et la ville de Pau, grâce à l’autoroute, et à

l’est vers le Comminges et la ville de Saint-Gaudens. La géographie, la mobilité et les

transports sont dès lors des éléments essentiels dans la structuration des flux et des bassins de

vie et d’emploi.

Avec une densité de 51 habitants/km², le département des Hautes-Pyrénées est un territoire

faiblement peuplé, mais ce chiffre cache de nombreuses disparités dans la répartition des

populations au sein du territoire. La partie sud du département qui est la partie montagneuse

est la moins peuplée, tandis que le nord du département est très clairement le moteur

démographique du territoire avec la communauté d’agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées

qui regroupe à elle seule 55% de la population du département.

La répartition démographique du département des Hautes-Pyrénées depuis 1975 montre une

augmentation continue de la population âgée de 40 ans et plus. Cette tendance est

particulièrement marquée dans la tranche d’âge des 75 ans et plus. En effet, ils représentaient

6% de la population du département en 1975, une proportion qui a évolué jusqu’à atteindre

14% en β015. δes prévisions de l’INSEE à horizon β0γ0 semblent confirmer cette tendance

puisque cette catégorie devrait atteindre les 16% dans les 15 ans à venir.

Les retraités représentent près des trois quarts de la population de plus de 60 ans, et un peu

plus de 20% de la population du département des Hautes-Pyrénées, une part croissante. Si la

répartition des retraités sur le territoire est inégale, et relativement concentrée dans la zone

nord du département, il convient de tenir compte de ce facteur grandissant dans la prise en

compte des besoins futurs en services, notamment sanitaires et sociaux.

Le département des Hautes-Pyrénées présente donc des caractéristiques partagées par d’autres

éloignement de la métropole, une densité de population relativement faible, la présence d’un

pôle urbain majeur structurant et de pôles secondaires, une population vieillissante accentuée

par des migrations des jeunes actifs vers la métropole, mais aussi des spécificités industrielles

fortes, des compétences et des savoir-faire reconnus qui permettent le travail en réseau avec

les entreprises régionales et les grands donneurs d’ordre. Cette immersion territoriale m’a

également permis de saisir autant l’importance des réseaux professionnels et industriels, que

les difficultés d’appariement sur le marché du travail, et la « fuite des cerveaux » vers la

métropole. Ce constat des avantages propres à ces territoires non métropolitains, mais

également de leurs difficultés, m’a encouragée à aborder cette problématique de la

métropolisation sous un angle territorialisé.

De plus, la région Midi-Pyrénées représentait un territoire d’étude pertinent, dans la mesure

où les disparités interrégionales sont importantes, et où la métropole toulousaine, qui a connu

un dynamisme et une croissance remarquables ces dernières décennies, offrait les

caractéristiques nécessaires pour cerner le phénomène métropolitain. En effet, ce dynamisme

de la métropole toulousaine repose sur un tissu économique « relativement diversifié,

constitué de grands groupes industriels opérant dans des secteurs technologiques, de centres

de recherche scientifiques de premier plan, et de petites et moyennes entreprises (PME)

sécrétées par le milieu local » (Leriche, 199867).Toulouse représente une bonne illustration

du phénomène métropolitain dans la mesure où ses capacités productives reposent en grande

partie sur des activités à haute valeur ajoutée qui font appel à un capital humain qualifié. De

plus, la présence de grands groupes en son sein a des retombées sur l’ensemble du territoire :

création d’emplois, dynamisme du réseau de sous-traitance… Ainsi, il y a plus de β0 ans déjà,

Jalabert (1995)68 soulignait le phénomène de métropolisation en place sur le territoire

toulousain et écrivait : « Toulouse est entrée depuis trente ans dans un cycle d’ouverture à

certaines formes contemporaines de la fonction métropolitaine qui l’insèrent peu à peu dans

les processus d’échanges internationaux et modifient son image de simple capitale

provinciale ».

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Leriche, F. (1998). Acteurs publics, localisation des activités de polynucléarisation des espaces urbains: l'exemple de Toulouse. Sud-Ouest Européen, 2(1), 7-17.

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1.2. Contexte politique : élargissement des régions et renforcement des métropoles

La Réforme Territoriale de 2014 a, à la fois élargi le périmètre des régions, et affirmé le rôle

des métropoles et leurs compétences, en faisant l’échelon structurant du développement. Ce

contexte politique m’a amenée à m’interroger sur la question des territoires pertinents de

l’action publique et sur la coordination entre les différents échelons.

Par ailleurs, j’ai également pu constater, à l’heure de la Réforme Territoriale, l’inquiétude

croissante des chefs d’entreprise, déjà fragilisés par la distance qui les éloigne du centre

métropolitain, face à l’élargissement des régions. C’est ce contexte politique, qui a été en toile

de fond de ma réflexion et l’a encouragée.

Les différentes réformes territoriales ont mis en lumière deux échelons pertinents en matière

d’aménagement du territoire et de développement économique : les intercommunalités et les

régions. Le couple région-EPCI semble, à mon avis, être la structuration politique la plus

efficace pour œuvrer en faveur du développement territorial.

δa Région est l’échelon le plus approprié pour mener une stratégie territoriale homogène. δa

Région se doit d’assurer la coordination entre les différents acteurs locaux, et de jouer le rôle

de chef de file. La loi NOTRe du 7 août 2015 a renforcé les compétences économiques des

régions. Ces nouvelles compétences doivent leur permettre d’œuvrer en coopération avec

l’échelon intercommunal pour limiter les inégalités entre les espaces métropolitains et les

territoires peu denses. δe rôle des Régions va devenir central, d’autant plus dans le cadre de

l’élargissement des régions qui en font des territoires encore plus vastes et plus hétérogènes.

Les intercommunalités, quant à elles, représentent un échelon pertinent de proximité en

matière de développement et d’aménagement, et ce d’autant plus que les départements ont

perdu leur compétence économique. Les dernières réformes sur les intercommunalités en ont

redéfini les seuils et permis de rebâtir une carte au niveau national. δe nombre d’EPCI à

fiscalité propre est alors passé de 2611 en 2010 à 1266 en 2016. Cette réforme a surtout

concerné les intercommunalités, notamment rurales, plus que les communautés

d’agglomérations ou les grandes aires urbaines. Le regroupement des communes en

intercommunalités, associé à l’élargissement du périmètre de ces dernières, a permis aux

EPCI d’atteindre des tailles critiques plus importantes, en population et en nombre de

autonome. Par ailleurs, ce regroupement contribue également à leur offrir une certaine

univocité, nécessaire pour faire entendre leur voix, et pour peser face à la métropole.

δa montée en compétences des intercommunalités s’inscrit dans une volonté accrue de

prendre en compte les spécificités de chaque territoire, les territoires vécus, les bassins de vie

et d’emploi, au-delà des limites géographiques statiques de la ville. δ’enjeu pour ces

intercommunalités est désormais de réussir à assurer un certain équilibre dans la répartition

des services et des infrastructures, et un maillage dense et cohérent avec les réalités

économiques et sociales.

δ’avenir de notre pays se doit de reposer sur un développement polycentrique, le plus

homogènement réparti à travers le territoire national, au-delà des seules métropoles et grands

pôles urbains. Ce développement devra s’appuyer sur des pôles secondaires et des petits

pôles, véritables relais de la croissance locale, mais aussi sur des mécanismes de

redistribution efficaces entre les territoires.

Si l’affirmation des compétences des régions et des intercommunalités en matière de

développement économique a été un premier axe de réflexion, le deuxième a bien été initié

par l’élargissement des régions. En effet, la région εidi-Pyrénées est ainsi devenue la région

Occitanie en fusionnant avec la région Languedoc-Roussillon. Depuis le 1er janvier 2016,

cette nouvelle région Occitanie couvre désormais 13 départements et plus de 4500 communes

ainsi que deux métropoles : Toulouse et Montpellier. Cette union en fait la deuxième plus

grande région en France métropolitaine par sa superficie (72 724 km²) et la cinquième plus

peuplée (5 7γ0 75γ habitants d’après les estimations de l’INSEE au 1er janvier 2014).

Pour certains territoires, comme les Hautes-Pyrénées par exemple, cette union a été ressentie

comme un mariage forcé. En effet, partageant un bassin d’emplois et de vie avec la ville de

Pau, et des flux de mobilités importants avec le département des Pyrénées-Atlantiques,

l’envie et la réalité économique semblaient davantage pousser ce département vers

l’Aquitaine. De la même manière, des départements tels que le Gard auraient souhaité se lier

avec la région Provence-Alpes-Côte-D’azur avec qui ils partagent la façade méditerranéenne.

Cette inquiétude de l’élargissement est ainsi, légitimement, davantage présente au sein des

territoires déjà excentrés des métropoles, et qui subissent déjà le poids de la distance. Cet

élargissement est alors perçu comme une double peine pour ces territoires. En effet, s’ils se

jugeaient déjà trop éloignés de la métropole toulousaine pour en tirer pleinement profit, le fait

inquiétude grandissante, et interroge ces territoires sur leur avenir au sein de la nouvelle

région, ainsi que sur leur capacité à exister face à désormais deux métropoles.