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Les études concernant le choix des horaires sont nombreuses par rapport à celles concernant le choix de mode et d’itinéraire. L’approche schedule delay do- mine les travaux sur cette question aussi bien pour le mode routier que le mode collectif. Nous séparons les deux modes dans l’analyse du choix des horaires puisque la logique n’est pas la même. En effet, avec les modes collectifs, les indivi- dus doivent choisir parmi un ensemble d’horaires proposé par les opérateurs de service, tandis que pour le mode routier, l’usager peut choisir son horaire comme il le souhaite.

3.3.1 Transport routier

La zone de San Francisco Bay est une des premières zones analysées sur les questions du choix d’horaire par Abkowitz (1981) et Small (1982). Cependant, ces deux auteurs n’introduisent pas de coût du transport dans leurs modèles. Par conséquent, il n’est pas possible de déterminer des valeurs monétaires. Ils dé- terminent tout de même les caractéristiques influençant le choix d’horaires des individus lors de déplacements en migrations alternantes, ainsi que les équiva- lences en temps de transport d’une arrivée en avance et en retard définies plus haut par les équations (11) et (12).

Abkowitz (1981) met en exergue l’importance de plusieurs facteurs socio-éco- nomiques sur le choix des horaires de départ influençant directement la proba- bilité d’arriver en avance ou en retard au travail. Tout d’abord, la flexibilité des horaires de travail joue un rôle important pour les individus prévoyant d’arri- ver à l’heure ou en retard sur leur lieu de travail. Les individus se déplaçant en voiture sont plus susceptibles d’arriver à l’heure que les usagers du bus. Ces der- niers ont tendance à choisir une heure de départ qui leur permet de ne pas arriver trop tôt sur leur lieu de travail. Les individus avec des salaires bas choisissent une heure de départ afin d’arriver à l’heure ou juste un peu avant le début officiel de

leur travail. En revanche, les individus plus âgés sont plus enclins à choisir une heure de départ leur permettant d’arriver en avance.

Quant à Small (1982), il détermine le coût d’une arrivée en avance et en retard sur son lieu de travail, ainsi qu’une pénalité de retard indépendante de la durée du retard. Une minute d’avance équivaut à 0,61 minute de temps de transport et une minute de retard équivaut à 2,4 minutes de temps de transport. Arriver en retard est plus coûteux pour les usagers que d’arriver en avance. La pénalité de retard est de 5,5 minutes de temps de parcours. Small (1982) met également en exergue certaines caractéristiques individuelles influençant les décisions. Les cols blancs sont moins hostiles à une arrivée en avance que les autres travailleurs0.0 Les individus ayant des horaires flexibles valorisent moins fortement une arrivée en retard comparé aux autres individus.

De Palma et Fontan (2001) effectuent le même type d’analyse que celle réa- lisée par Small (1982) pour les déplacements en Ile-de-France en utilisant les données issues de l’enquête globale de transport15 (EGT) et d’une enquête IN-

RETS16/RATP17réalisée par la Sofres18. Le coût relatif entre une minute de retard

et une minute d’avance est de 0,7 en moyenne. Selon les motifs de déplacement, les trajets écoles-études ont un coût relatif plus important de 0,82 par rapport au coût de 0,71 pour les déplacements domicile-travail. Le coût relatif le plus faible

15. Les enquêtes globales de transport (EGT) cherchent à répondre aux questions : Qui se dé- place ? Pourquoi ? Quand ? Où ? Comment ?. Les informations qu’elles apportent sont essentielles pour définir et prévoir les services et les infrastructures de transport, ainsi que pour planifier l’urbanisme de la région Ile-de-France. (Source : Direction Régionale et Interdépartementale de l’Équipement et de l’Aménagement d’Ile-de-France (DRIEA Ile-de-France).

16. L’INRETS est l’Institut National de Recherche sur les Transports crée en 1985 qui depuis le 1erjanvier 2011 a fusionné avec le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC) pour don-

ner naissance à l’Institut Français des Sciences et Technologies des Transports, de l’Aménagement et des Réseaux (IFSTTAR). L’IFSTTAR a pour missions de réaliser ou de faire réaliser, d’orienter, d’animer et d’évaluer des recherches, des développements et des innovations dans les domaines du génie urbain, du génie civil et des matériaux de construction, des risques naturels, de la mo- bilité des personnes et des biens, des systèmes et des moyens de transports et de leur sécurité, des infrastructures, de leurs usages et de leurs impacts, considérés des points de vue technique, économique, social, sanitaire, énergétique, environnemental et humain. (Source : www.ifsttar.fr).

17. La Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) est en charge de l’exploitation d’une partie des transports en commun de Paris et sa banlieue.

est pour les déplacements liés aux achats avec seulement 0,34. Les auteurs ex- pliquent que les valeurs de ces coûts relatifs sont contre intuitives puisqu’ils s’at- tendaient à avoir des valeurs supérieures à 1, ce qui traduiraient que les arrivées en retard sont plus coûteuses que les arrivées en avance.

Finalement, pour le transport routier dans le cadre des déplacements domicile- travail, le choix des usagers est fortement lié aux horaires qui leurs sont imposés par leurs employeurs. Comme pour les autres choix (i.e. mode et itinéraire), la flexibilité des horaires de travail joue un rôle important dans les valorisations de leur coût d’une arrivée en avance et en retard.

3.3.2 Transport collectif

Les études empiriques concernant le choix des horaires sont réalisées pour plusieurs modes de transport, à savoir le mode ferroviaire (Bates et al., 2001 ; Börjesson et Eliasson, 2011), le bus (Hollander, 2006) et le métro (Börjesson et al., 2012). Elles concernent principalement le choix de l’heure de départ pour des trajets domicile-travail.

L’analyse de Bates et al. (2001) porte sur le transport ferroviaire à Londres pour des déplacements personnels. Les auteurs déterminent les dispositions à payer des usagers pour réduire leur temps d’avance et de retard. Les usagers sont prêts à payer deux fois plus chers pour réduire le retard comparé aux avances. Un usager est prêt à payer 0,56 pence pour réduire son arrivée en avance d’une minute, tandis qu’il est prêt à payer 1,14 pence pour réduire son arrivée en retard d’une minute.

Ensuite, Börjesson et Eliasson (2011) et Börjesson et al. (2012) étudient le trans- port ferroviaire en Suède. Börjesson et Eliasson (2011) remettent en cause l’hypo- thèse selon laquelle la valeur du retard est proportionnelle au retard moyen et, en particulier, pour les modes de transport collectif où il faut respecter des ho- raires. D’une part, leurs évaluations monétaires sont réalisées en différenciant les

motifs de déplacements. D’autre part, ils les estiment pour différents niveaux de risque (i.e. de 2,5 % à 20 %) qui définit la probabilité d’avoir une heure de retard lors du déplacement. Les dispositions à payer pour éliminer une heure de retard sont comprises entre 58 SEK19 et 270 SEK, ce qui implique que la probabilité as-

sociée au retard joue un rôle important sur les évaluations monétaires. Ils mettent également en exergue le fait que le motif de déplacement est un facteur qui mo- difie le montant des dispositions à payer. En effet, les individus effectuant des trajets domicile-travail ont une disposition à payer quatre fois moins importantes que les usagers se déplaçant pour motifs professionnels afin d’éliminer un retard d’une heure avec une probabilité de 2,5 %. Ils montrent que les dispositions à payer augmentent avec l’augmentation du risque associé au retard, mais pas li- néairement. Finalement, Börjesson et Eliasson (2011) concluent que la valeur du retard n’est pas proportionnelle au risque de retard. Ainsi, réduire le retard de moitié ne va pas réduire la valeur monétaire du retard de moitié. Ils attirent l’at- tention sur le fait que les dispositions à payer et les ratios de fiabilité ne sont pas transférables d’un contexte à un autre. Ainsi, ils remettent implicitement en cause les rapports qui préconisent l’utilisation d’une valeur unique pour valoriser les gains liés à l’amélioration de la fiabilité du temps de transport.

Börjesson et al. (2012) étudient simultanément le transport ferroviaire et le métro en Suède durant les heures de pointe de matin et de fin d’après-midi. Ils ne trouvent pas de différences significatives entre ces deux périodes de la jour- née dans leur analyse. Par ailleurs, ils remarquent que le niveau de revenu des usagers joue un rôle important dans les choix. Les individus au revenus élevés vont atténuer les effets du coût de transport. Aussi, il n’existe pas de différence de genre.

D’après le tableau 2.3, nous avons inclus l’analyse de Hollander (2006) qui étu- die le comportement des usagers effectuant des déplacements en bus en Grande-

Tableau 2.3 – Valeurs monétaires pour le choix d’horaire des modes collectifs

Études V T T S V SDE V SDL

Bates et al. (2001) (Fer) – 55,22 e/h 112,03 e/h Hollander (2006) (Bus) – 4,65 e/h 12,87 e/h

Börjesson et Eliasson (2011) (Fer) – – [6,51 e/h ; 30,26 e/h] Börjesson et al. (2012) (Fer) 6 e/h – Moy-var : 45,1 e/h

– SD: 10,9 e/h

Pour Bates et al. (2001), les valeurs monétaires ont été converties en euro en appliquant le taux de change moyen pour l’année 2001, soit 1GBP = 1,643385 e.

Pour Hollander (2006), les valeurs monétaires ont été converties en euro en appliquant le taux de change moyen pour l’année 2006, soit 1GBP = 1,489203 e.

Pour toutes les études de Börjesson, les valeurs monétaires ont été converties en euro en appliquant le taux de change moyen pour l’année 2011, soit 1SEK = 0,112208 e.

Bretagne. Nous remarquons une certaine disparité des valeurs monétaires asso- ciées à la disposition à payer pour réduire le retard à l’arrivée d’une heure. Les résultats déterminés par Bates et al. (2001) sont beaucoup plus importants que pour les autres études.

4 Cadre théorique intégrant l’attitude à l’égard de la

fiabilité du temps de transport

Nous proposons un modèle théorique permettant de prendre en compte ex- plicitement la fiabilité du temps de transport dans le choix des individus. Nous exposons les hypothèses inhérentes à notre modèle qui respectent les fondements microéconomiques en économie des transports dans le cadre de l’utilité espérée. Nous définissons les préférences individuelles à l’égard de la fiabilité du temps de transport, ce qui se traduit par de l’aversion au risque sur le temps de trans- port, ou d’une manière équivalente, d’une préférence pour la fiabilité du temps de transport, et également la prudence. A l’issue de l’identification des différentes

préférences à l’égard de la fiabilité et de la prudence, nous revisitons le concept de V T T S avec la prise en compte de la fiabilité. Nous développons deux approches de valorisation de la fiabilité du temps de transport (i.e. la prime de fiabilité et la valeur de la fiabilité, V OR). Nous montrons les implications des préférences à l’égard de la fiabilité sur ces trois mesures (i.e. V T T S, prime de fiabilité et V OR). Finalement, nous discutons les formes fonctionnelles de l’utilité des individus afin de comprendre les hypothèses implicites formulées avec le choix d’une forme particulière.