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CHAPITRE I PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE

1.4 Changement de paradigme et projet d'étude

de s'engager davantage en tourisme (Ramos et Prideaux, 2014 : 475).

1.4 Changement de paradigme et projet d'étude

La revue de littérature nous a permis d'identifier les lacunes des savoirs qui formulent notre problématique. Nous les classifions sous trois thèmes, soit les formes de participation, le degré de participation et les obstacles à la participation.

L'étude de la gouvernance dans le tourisme autochtone ignore souvent le fait que le pouvoir est inégalement distribué au sein de la même communauté. Les écrits consultés étudient souvent la communauté autochtone comme un groupe homogène sans prendre en compte la hiérarchisation du pouvoir et les différentes classes politiques et sociales qui se trouvent dans la même communauté. Certains groupes ou individus ont une plus grande influence puisqu'ils possèdent davantage d'expertise, des ressources financières, des relations publiques et des connaissances. Cette hiérarchisation du pouvoir est très critique, car elle peut limiter ou même entraver la participation politique des groupes marginalisés comme les femmes et les jeunes.

Notre recherche vient ainsi combler cette lacune des savoirs en analysant les formes de participation citoyenne côte à côte avec celles de la participation communautaire dans la gouvernance des territoires touristiques autochtones. À ce sujet, la participation citoyenne se définit comme un processus de redistribution du pouvoir qui permet aux citoyens marginalisés, actuellement exclus des processus politiques et économiques, d'être délibérément inclus dans le processus de prise de décision (Arnstein, 1969 : 216). Les dispositifs participatifs sont nombreux, tels que : les audiences publiques, les budgets participatifs, les assemblées citoyennes, les conférences de consensus, les forums ouverts et la sélection aléatoire (Bherer, 2006; Fung, 2006). Nous nous

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intéressons à la participation citoyenne, car elle offre, comme le note Fung (2006 : 72), des circonstances plus équitables d'influence politique et de représentation, surtout pour les groupes marginalisés. L'analyse des formes de la participation citoyenne dans la littérature ainsi que dans les documents officiels nous permettrait de repenser la gouvernance dans le tourisme autochtone selon une démocratie participative qui dépasse la participation des élites (démocratie représentative) pour impliquer les individus les plus marginalisés et les plus vulnérables de la communauté dans le processus de la gouvernance.

Au sujet du degré de la participation, rares sont les travaux qui essaient de mesurer le degré de la participation des autochtones dans la gouvernance de leurs territoires touristiques. Les écrits consultés n'essaient souvent pas d'identifier des indicateurs qui mesurent le degré de la participation des autochtones ou d'empowerment qui leur est attribué afin d'être capables de participer. On ne trouve qu’Eagles (2009 : 243), qui établit dix indicateurs de mesure de la performance de la participation politique des autochtones en tourisme. Ces indicateurs sont la participation du public, l'orientation de consensus (consensus orientation), la vision stratégique du développement, la réactivité (responsiveness) aux parties prenantes, l'efficacité, l'effectivité, la responsabilité envers le public et les acteurs institutionnels, la transparence, l'équité et la règle de loi (rule of law) (Eagles, 2009). De plus, Eagles (2009 : 242-243) établit une échelle de 5 (très fort) à 1 (très faible), de manière à ce que plus les chiffres donnés aux indicateurs sont élevés, plus la participation politique des autochtones est grande.

Par contre, Eagles (2009) n'essaie pas d'étudier l'influence des contextes politique et socioculturel sur le degré de la participation des autochtones à la gouvernance de leurs territoires touristiques. Nous cherchons, ainsi, à analyser l'influence de ces contextes à deux échelles : nationale et locale. Sur le plan national, les systèmes politique et socioculturel de l'État influencent le degré d'empowerment attribué aux autochtones et déterminent, par conséquent, leur type de participation à la prise de décision (Holmes,

2002; Bottazzi, 2006). Sur le plan local, les structures politique et socioculturelle dans la communauté autochtone formulent, en grande part, la hiérarchie du pouvoir dans cette communauté et influencent, plus ou moins, le degré de la participation de différents sous-groupes dans la même communauté (Hunt et Smith, 2007). Cela nous semble pertinent à la compréhension de la théorie de la gouvernance multiscalaire, qui constitue notre cadre théorique, en ajoutant à l'échelle locale plusieurs sous-couches autochtones, hiérarchisées en pouvoir et différentes dans le degré de la participation politique.

Quant aux obstacles à la participation, la majorité des travaux consultés n'étudient pas l'influence de la structure hiérarchique du pouvoir et la nature souvent patriarcale de la communauté autochtone sur la variété d'obstacles à la participation d'un groupe autochtone à l'autre. Par exemple, les travaux d’Altman et Finlayson (1993), de Butler et Hinch (2007a), de Hall (2007) et de Ramos et Prideaux (2014) se limitent à présenter une liste généralisée des obstacles comme le manque d'information, le manque d'accès au marché et les faibles ressources financières des autochtones, qui affaiblissent leur participation à la gouvernance du tourisme. Les écrits consultés étudient souvent la communauté autochtone comme un seul groupe homogène qui fait face aux mêmes obstacles avec le même degré. Or, dans une communauté patriarcale et conservatrice comme Siwa, les femmes pourraient faire face à des obstacles plus élevés que les hommes en raison des traditions socioculturelles qui limitent leur participation politique.

Nous cherchons ainsi à combler cette lacune des savoirs en analysant l'influence des contextes politique et socioculturel sur les formes et le degré des obstacles à la gouvernance dans les différents sous-groupes de la communauté autochtone. Cela nous semble pertinent pour nous permettre d'induire une meilleure compréhension de la participation citoyenne, surtout dans un domaine de recherche, le tourisme autochtone, où elle n'est pas profondément étudiée.

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C'est dans ce contexte que cette étude vise à comprendre comment les contextes politique et socioculturel influencent la gouvernance dans le tourisme autochtone, en mettant plus particulièrement l'accent sur les questions spécifiques suivantes :

Quelles sont les formes de la participation des autochtones existantes dans les contextes politique et socioculturel de leurs territoires touristiques?

Quel est le degré de la participation des autochtones dans la gouvernance de leur territoire?

Dans quelle mesure les obstacles à la participation, s'il y a lieu, diffèrent-ils selon les contextes politique et socioculturel du territoire touristique autochtone?

Quels sont les processus et les enjeux d'empowerment des autochtones dans la gouvernance du tourisme?