• Aucun résultat trouvé

PARTIE 2 : CADRE CONCEPTUEL ET OBJECTIFS DE RECHERCHE

1. LA PSYCHOLOGIE COMMUNAUTAIRE

1.2 Champs d’application de la psychologie communautaire

L’ancrage de ce travail dans le cadre de la psychologie communautaire trouve sa justification dans les cinq concepts-clés qui fondent cette discipline : (1) la notion de communauté ; (2) la conception positive de la santé ; (3) le modèle écologique de Bronfenbrenner ; (4) l’empowerment et (5) la participation communautaire. Saïas (2009a) rappelle que la définition du champ d’application de la psychologie communautaire ne peut se faire que par la prise en compte de deux notions qui lui sont constitutives, à savoir (1) la notion de besoin en santé mentale et (2) la

de quelles façons ces deux notions se déclinent dans le cadre spécifique de notre recherche, avant de développer en contexte les concepts-clés de la discipline, résolument tournés vers un paradigme de reconnaissance de l’individu comme pleinement acteur de ses choix et engagé dans la vie de la cité.

1.2.1 La notion de besoin en santé mentale

Bien que les troubles du spectre de l’autisme ne soient pas considérés comme relevant d’un trouble de santé mentale, leur diagnostic doit être posé par un psychiatre, après une évaluation pluridisciplinaire de la personne, qu’elle soit enfant, adolescente ou adulte. Les critères utilisés pour diagnostiquer les TSA sont ceux définis par le DSM- 5 au niveau international ou la CIM-11, de façon moins fréquente. Selon le niveau de soutien requis, la personne présentant un TSA peut se voir proposer des services relevant des institutions hospitalières et du domaine du soin. Notre position, vis-à-vis des adolescents présentant un TSA sans déficience intellectuelle, souhaite s’extraire du versant uniquement médical, tout en reconnaissant l’importance d’un travail collaboratif entre professionnels de la santé, psychologues, familles et professionnels de l’éducation pour permettre un accompagnement au plus près des besoins individuels du jeune. Dans le domaine de la santé mentale, le besoin d’un individu est défini en fonction du seuil au-delà duquel il requiert l’intervention de professionnels et ce seuil varie selon qu’on se place du point de vue du chercheur, du clinicien ou de l’individu (Shankand, Saiäs, & Friboulet, 2009). Le chercheur en psychologie communautaire, dans une perspective positive de promotion de la santé, joue un rôle de catalyseur des compétences afin d’anticiper les besoins et d’accompagner les individus de manière plus ergonomique et individualisée. Recenser les besoins exprimés par les participants et les stratégies qu’ils ont mis en place au fur et à mesure de leur parcours apparaît pertinent dans un contexte francophone où les recherches ne se sont pas intéressées à la prise en compte des attentes et du point de vue du jeune sur l’accompagnement qui lui est proposé – voire imposé. Selon lui, ses besoins sont-ils efficacement comblés par les services dont il bénéficie ? A-t-il été consulté sur le choix des services, en fonction de ses besoins et des aspects sur

lesquels il souhaite être soutenu, à ce moment-là de son parcours ? Ce travail s’inscrit donc dans une visée de développement des ressources communautaires basé sur le témoignage des individus pour lesquels elles sont pensées, afin d’accompagner les futurs élèves de secondaire vers un développement de leur plein potentiel.

1.2.2 La reconnaissance de l’expertise de l’usager

“We cannot move theory into action unless we can find it in the eccentric and

wandering ways of our daily life... stories give theory flesh and breath”

(Pratt, 1995, p. 22). La seconde notion que questionnent les chercheurs en psychologie communautaire est celle de l’expertise en santé mentale. La reconnaissance de l’usager comme collaborateur et partenaire actif de la recherche constitue l’une des clés de l’intervention communautaire, en permettant à l’individu une participation active aux débats le concernant. Dans notre travail, nous reconnaissons les adolescents ayant un TSA comme des acteurs clés dans l’équipe école inclusive (Saggers, Hwang & Mercer, 2011) et nous nous positionnons dans une optique similaire à celle de Davidson (2010), en mettant l’accent sur l’intérêt de comprendre « ce que ça fait » d’avoir des TSA plutôt que sur « à quoi cela ressemble » pour l’observateur extérieur (Davidson, 2010, p. 311). De par leurs capacités intellectuelles dans la norme ou supérieures, ces adolescents sont en mesure de donner leur point de vue et d’exprimer leurs ressentis, positifs ou négatifs, ainsi que leurs attentes et leurs appréhensions. Plusieurs auteurs se sont questionnés sur la fiabilité du témoignage des adolescents, typiquement développés ou présentant des particularités de fonctionnement, dont le TSA (Herjanic, Herjanic, Brown, & Wheatt 1975 ; Kamp-Becker, Schröder, Remschmidt, & Bachmann, 2010). Les résultats montrent généralement que les réponses des jeunes ayant un TSA sont concordantes avec celles de leurs parents ou de leurs enseignants (Fortuna, 2014), même si leurs opinions peuvent différer sur les conseils à donner ou les attentes sociales (O’Hagan et Hebron, 2017 ; Tobias, 2009). Toutefois, au-delà de la fiabilité, la question de la légitimité doit être posée. En effet,

comme l’écrivent Ferguson, Ferguson et Taylor, il y a une nécessité à donner la parole à ces adolescents, « souvent étudiés mais rarement entendus » (p. 94, 1992). Plusieurs récentes études, majoritairement anglophones, abondent en ce sens et insistent sur la pertinence de recueillir la parole des adolescents avec TSA et de s’appuyer sur leurs expériences pour formuler des recommandations à destination des politiques en matière de santé et d’éducation (Fortuna, 2014 ; Hill, 2014 ; Humphrey et Lewis, 2008 ; McLaughlin et Rafferty, 2011 ; Saggers, Hwang, & Mercer, 2011). Enfin, interroger directement les jeunes et leurs parents sur leur vécu permet qu’ils se sentent valorisés et écoutés (Tobias, 2009), aspects trop fréquemment négligés dans des recherches conçues « pour eux » et non pas « avec eux ».