Prop´ erades et PROPs diff´ erentiels
CHAPITRE 3. PROP ´ ERADES ET PROPS DIFF ´ ERENTIELS
1. LA CAT ´ EGORIE DES S -BIMODULES DIFF ´ ERENTIELS GRADU ´ ES
Sur les parties connexes, on vient de pr´eciser les r`egles de signes, les relations d’´equivalences `a consid´erer et les diff´erentielles. On d´efinit les mˆemes notions pour le produiten g´en´eralisant les r`egles de Koszul-Quillen du produit tensoriel⊗k au produit⊗.
Soient P et Q deux S-bimodules diff´erentiels gradu´es. Pour p⊗q appartenant `a Pd(m, n)⊗ Qe(m0, n0), on pose
δ(p⊗q) =δ(p)⊗q+ (−1)dp⊗δ(q).
Les isomorphismes de sym`etrie s’´ecrivent ici
τp, q : p⊗q7→(−1)deq⊗p.
Avec ces r`egles de signes, on d´efinit une diff´erentielle naturelle sur le produitQP.
Proposition 63. Le bifoncteur de la cat´egorie des S-bimodules s’´etend `a la cat´egorie des S -bimodules diff´erentiels gradu´es.
Comme dans le cas connexe, on peut ´etendre aux dg-S-bimodules la proposition 38.
Proposition 64. Le produit QP est isomorphe, en tant que dg-S-bimodule, `a M
((Π0 1,...,Π0
a),(Π1,...,Πb))∈Θ0
|¯k|=|¯|
k[Sm]⊗S¯lQ(¯l,k)¯ ⊗S¯kk[S|¯k|]⊗S¯P(¯,¯ı)⊗S¯ık[Sn].
1.2. Structure diff´erentielle des produits de dg-S-bimodules. On ´etudie ici l’homolo-gie des produits de deuxS-bimodules diff´erentiels.
Remarquons d’abord que le complexe (QcP, δ) correspond au complexe total d’un bicomplexe.
En effet, on d´efinit le bidegr´e d’un ´el´ement
(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa) de Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
par (|q1|+· · ·+|qb|,|p1|+· · ·+|pa|). Et, la diff´erentielle horizontaleδh : QcP → QcP est induite par celle de Q. Quant `a la diff´erentielle verticaleδv : QcP → QcP, elle est induite par celle deP. De mani`ere explicite, on a
δh (q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)
=
b
X
β=1
(−1)|q1|+···+|qβ−1|(q1, . . . , δ(qβ), . . . , qb)σ(p1, . . . , pa) et δv (q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)
=
a
X
α=1
(−1)|q1|+···+|qb|+|p1|+···+|pα−1|(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , δ(pα), . . . , pa).
On voit clairement queδ=δh+δv etδh◦δv =−δv◦δh.
Comme tout bicomplexe, celui-ci donne naissance `a deux suites spectralesIr(QcP) etIIr(QcP) qui convergent vers l’homologie totaleH∗(QcP, δ) (cf.Conventions). Rappelons que ces derni`eres v´erifient
I1(QcP) =H∗(QcP, δv), I2(QcP) =H∗(H∗(QcP, δv), δh) et II1(QcP) =H∗(QcP, δh), II2(QcP) =H∗(H∗(QcP, δh), δv).
Grˆace `a la proposition 62, on sait que produit mono¨ıdalQcP s’´ecrit `a l’aide de la somme directe M
Θ
Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı).
Cette d´ecomposition est compatible avec la structure de bicomplexe. Ainsi, les suites spectrales se d´ecomposent de la mˆeme mani`ere
Ir(QcP) =M
Θ
Ir
Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı) et IIr(QcP) =M
Θ
IIr
Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı) 53
CHAPITRE 3. PROP ´ERADES ET PROPS DIFF ´ERENTIELS
On a imm´ediatement les deux expressions suivantes.
Proposition 65. Si Q(¯l,¯k)⊗Sk¯k[Sc¯k,¯] est unk[S¯]-module projectif (`a droite), alors on a I1
Q(¯l,k)¯ ⊗S¯kk[Sck,¯ ¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯H∗(P(¯,¯ı)). Et si,k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)est un k[Sk¯]-module projectif (`a gauche), alors on a
II1 Q(¯l,¯k)⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=H∗ Q(¯l,¯k)
⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı).
Corollaire66. Sik est un corps de caract´eristique nulle, on a toujours I1
Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯H∗(P(¯,¯ı)) et II1
Q(¯l,k)¯ ⊗S¯kk[Sck,¯ ¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=H∗ Q(¯l,k)¯
⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı).
D´emonstration. Par le th´eor`eme de Maschke, on sait que tous les anneaux k[S¯] sont
semi-simples. Ainsi, toutk[S¯]-module est projectif.
Proposition 67. Si kest de caract´eristique nulle, alors on a I2
Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=II2
Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
= H∗Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯H∗P(¯,¯ı).
D´emonstration. Comme toutk[S¯k]-module est projectif, on a imm´editatement I2
Q(¯l,¯k)⊗Sk¯k[Sc¯k,¯]⊗S¯P(¯,¯ı)
=H∗ Q(¯l,k)¯
⊗S¯kk[Sck,¯ ¯]⊗S¯H∗(P(¯,¯ı)). Et on conclut avec la formule de K¨unneth
H∗ Q(¯l,k)¯
= H∗(Q(l1, k1)⊗ · · · ⊗ Q(la, ka)) =
H∗Q(l1, k1)⊗ · · · ⊗H∗Q(la, ka) =H∗Q(¯l,¯k).
Remarque : Soient Φ : M → M0 et Ψ : N → N0 deux morphismes de dg-S-bimodules.
Alors le morphisme ΦcΨ : M c N → M0 N0 est un morphisme de bicomplexes. Ainsi, il induit des morphismes de suites spectrales Ir(Φc Ψ) : Ir(M c N) → Ir(M0 cN0) et IIr(ΦcΨ) : IIr(McN)→IIr(M0cN0).
De mani`ere g´en´erale, on a la proposition suivante.
Proposition 68. Lorsque le corpsk est de caract´eristique nulle, on a toujours H∗(QcP)(m, n) =M
Θ
H∗Q(¯l,k)¯ ⊗Sk¯k[Sck,¯ ¯]⊗S¯H∗P(¯,¯ı).
C’est-`a-dire,H∗(QcP) = (H∗Q)c(H∗P).
D´emonstration. C’est une application directe des th´eor`emes de Mashke (pour les coinvariants)
et de K¨unneth (pour les produits tensoriels).
On peut reprendre les mˆemes raisonnements dans le cas du produit.
Le complexe (QP, δ) est encore le complexe total d’un bicomplexe. Les ´el´ements deQfournissent la graduation et la diff´erentielle horizontales et ceux dePla graduation et la diff´erentielle verticales.
En ce qui concerne les signes, il faut faire attention aux composantes connexes. Par exemple, pour un objet
(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)⊗(q01, . . . , qb00)σ(p01, . . . , p0a0) deQcP ⊗ QcP, on a
1. LA CAT ´EGORIE DESS-BIMODULES DIFF ´ERENTIELS GRADU ´ES
δh((q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)⊗(q10, . . . , q0b0)σ(p01, . . . , p0a0)) =
b
X
β=1
(−1)|q1|+···+|qβ−1|(q1, . . . , δ(qβ), . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)
⊗(q10, . . . , q0b0)σ(p01, . . . , p0a0) +
b0
X
β=1
(−1)|q1|+···+|qb|+|p1|+···+|pa|+|q10|+···+|q0β−1|(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)
⊗(q10, . . . , δ(q0β), . . . , q0b0)σ(p01, . . . , p0a0) et
δv((q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)⊗(q10, . . . , q0b0)σ(p01, . . . , p0a0)) =
a
X
α=1
(−1)|q1|+···+|qb|+|p1|+···+|pα−1|(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , δ(pα), . . . , pa)
⊗(q01, . . . , qb00)σ(p01, . . . , p0a0) +
b0
X
β=1
(−1)|q1|+···+|qb|+|p1|+···+|pa|+|q10|+···+|q0b0|+|p01|+···+|p0α−1|
(q1, . . . , qb)σ(p1, . . . , pa)⊗(q01, . . . , qb00)σ(p01, . . . , δ(p0α), . . . , p0a0).
On a alors les mˆemes r´esultats que dans le cas connexe.
Proposition 69. Si kest un corps de caract´eristique nulle, on a les ´egalit´es I1 Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[SN]⊗S¯P(¯,¯ı)
=Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[SN]⊗S¯H∗(P(¯,¯ı)) et II1 Q(¯l,¯k)⊗Sk¯k[SN]⊗S¯P(¯,¯ı)
=H∗ Q(¯l,k)¯
⊗S¯kk[SN]⊗S¯P(¯,¯ı).
Proposition 70. Si kest de caract´eristique nulle, alors on a I2 Q(¯l,k)¯ ⊗S¯kk[SN]⊗S¯P(¯,¯ı)
=II2 Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[SN]⊗S¯P(¯,¯ı)
= H∗Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[SN]⊗S¯H∗P(¯,¯ı).
Proposition 71. Lorsque le corpsk est de caract´eristique nulle, on a H∗(QP) = (H∗Q)(H∗P).
Corollaire72. SoientQet P deux dg-S-bimodules. On a la relation H∗(QP) =S⊗(H∗(QcP)).
Remarque : Toutes ces propositions sont des g´en´eralisations des r´esultats de B. Fresse sur le produit de composition◦ des op´erades aux produitsc et des prop´erades et des PROPs (cf.
[Fr] 2.3.).
1.3. Prop´erades et PROPs diff´erentiels. On peut donner une version diff´erentielle `a la notion de prop´erade et de PROP.
D´efinition(Prop´erades diff´erentielles). On appelleprop´erade diff´erentielle un mono¨ıde (P, µ, η) dans la cat´egorie (dg-S-biMod,c, I).
Cela signifie qu’en plus de la donn´ee d’une prop´erade lin´eaire, le morphisme de compositionµest un morphisme de dg-modules de degr´e 0 pr´eservant les actions deSmetSn. Ainsi, on a la relation
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CHAPITRE 3. PROP ´ERADES ET PROPS DIFF ´ERENTIELS
du type d´erivation :
δ(µ((p1, . . . , pb)σ(p01, . . . , p0a))) =
b
X
β=1
(−1)|p1|+···+|pβ−1|µ((p1, . . . , δ(pβ), . . . , pb)σ(p01, . . . , p0a)) +
a
X
α=1
(−1)|p1|+···+|pb|+|p01|+···+|p0α−1|µ((p1, . . . , pb)σ(p01, . . . , δ(p0α), . . . , p0a)).
La proposition 68 donne la propri´et´e suivante.
Proposition73. Lorsque le corpskest de caract´eristique nulle, pour toute prop´erade diff´erentielle (P, µ, η), l’homologie de cette prop´erade(H∗(P), H∗(µ), H∗(η))est une prop´erade gradu´ee.
D´efinition (S-bimodules diff´erentiels gradu´es par un poids). On appelle S-bimodule diff´erentiel gradu´e par un poids toute somme directe surρ∈NdeS-bimodules diff´erentielsM =L
ρ∈NM(ρ). Les morphismes de S-bimodules diff´erentiels gradu´es par un poids sont les morphismes de S -bimodules diff´erentiels qui pr´eservent cette d´ecomposition. L’ensemble desS-bimodules diff´erentiels gradu´es par un poids, muni des morphismes correspondant, forme une cat´egorie que l’on note gr-dg-S-biMod.
Remarquons que la graduation est une information suppl´ementaire ind´ependante du degr´e homo-logique.
Proposition 74. Soitf =L∞
n=0f(n) un foncteur analytique dans la cat´egorie des S-bimodules.
SoitM =L
ρ∈NM(ρ) unS-bimodule gradu´e par un poids. Alors leS-bimodulef(M)est bigradu´e, d’une part avec la graduation venant du foncteur analytique, d’autre part avec la graduation totale venant du poids.
D´emonstration. Posonsf(n)=fn◦∆n o`u fn est une applicationn-lin´eaire. La premi`ere gra-duation s’´ecritf(M)(n)=fn(M, . . . , M). La deuxi`eme correspond `a
f(M)(ρ)= X
i1+···+in=ρ
fn(M(i1), . . . , M(in)).
Corollaire75. Toute prop´erade libre (respectivement PROP libre) sur unS-bimoduleM gradu´e par un poids est bigradu´e.
D´emonstration. Le foncteur F (respectivement S⊗(F)) est un foncteur analytique dont les degr´es sont donn´es par le nombre de sommets des graphes. La premi`ere graduation est donc donn´ee par le nombre d’op´erations de M qui servent `a repr´esenter un ´el´ement de F(M). La deuxi`eme graduation est ´egale `a la somme des poids de ces op´erations.
D´efinition(Prop´erades diff´erentielle gradu´ees par un poids). Uneprop´erade diff´erentielle gradu´ee par un poids (P, µ, η) est un mono¨ıde dans la cat´egorie (gr-dg-S-biMod,c, I).
Une telle prop´erade sera diteconnexe si de plusP(0)=I.
Remarque : Duallement, on a la notion de coprop´erade diff´erentielle (et diff´erentielle gradu´ee par un poids). Une coprop´erade diff´erentielle correspond `a une coprop´erade dont le coproduit est un morphisme de dg-S-bimodules, c’est-`a-dire v´erifie une relation du type cod´erivation.
De la mˆeme mani`ere, on peut consid´erer des PROPs diff´erentiels.
D´efinition (PROPs diff´erentiels). On appelle PROP diff´erentiel la donn´ee d’une structure de PROP (P,µ, conc, η) dans la cat´e egorie (dg-S-biMod,, ⊗).
On exige donc en plus que les morphismes de compositions eµet conc soient des morphismes de degr´e 0 de S-bimodules diff´erentiels, c’est-`a-dire qu’ils v´erifient des relations du type d´erivation.
Par exemple, pour la composition horizontale, on a
δ(conc(p⊗q)) =conc(δ(p)⊗q) + (−1)|p|conc(p⊗δ(q)).