Prop´ erades et PROPs
CHAPITRE 2. PROP ´ ERADES ET PROPS
1. LA CAT ´ EGORIE DES S -BIMODULES
D´emonstration. Pour ¯l et ¯k deux b-uplets tels que |¯l| =m et |k|¯ = N, on pose ¯l0 = (lτ−1(1), . . ., lτ−1(b)) et ¯k0 = (kτ−1(1), . . . , kτ−1(b)) qui v´erifient aussi |¯l0|=m et |k¯0|=N. De plus, toute permutation (¯k,)-connexe¯ σdonne par composition `a gauche avec une permutation par blocs du type τ¯k et `a droite par une permutation par blocs du typeν¯ une permutation (¯k0,¯0)-connexe.
En effet, les repr´esentations g´eom´etriques deσ∈SN et deτk¯σ ν¯ sont hom´eomorphes et on relie exactement les mˆemes points. En r´esum´e, siσ∈Sc¯k,¯on a encoreτ¯kσ ν¯∈Sck¯0,¯l0. Ce produit mono¨ıdal est d´efini ainsi pour correspondre `a la composition verticale de graphes connexes.
D´efinition (Graphes dirig´es). Ce que l’on appelle ici pargraphes dirig´es sont des graphes non planaires, dirig´es par un flot, dont les arˆetes entrant et sortant d’un noeud (ou sommet) sont indic´ees par des entiers{1, . . . , n}, tout comme le sont les entr´ees et sorties du graphe. On suppose de plus que chaque noeud admette au moins une entr´ee et une sortie.
D´efinition(Graphes connexes). On dit qu’un graphe estconnexe s’il est connexe en tant qu’es-pace topologique.
Pour d´ecrire le produit mono¨ıdalc, on se sert des graphes `a niveaux connexes , c’est-`a-dire des graphes dont les noeuds se r´epartissent sur des niveaux. La figure 1 repr´esente un graphe `a deux niveaux o`u les noeuds sont indic´es parνi.
Figure 1. Exemple de graphe connexe `a deux niveaux.
A l’aide des graphes connexes `a deux niveaux Gc2, on construit le produit mono¨ıdalGc sur lesS -bimodules. Pour un grapheg, on appelleN1l’ensemble des noeuds appartenant au premier niveau (en fonction de la direction donn´ee par le flot global) etN2l’ensemble des noeuds appartenant au second niveau. Pour un noeud ν, on consid`ere les deux ensemblesIn(ν) etOut(ν) compos´es des arˆetes entrant et sortant du noeud. On note |Out(ν)| et|In(ν)|les cardinaux de ces ensembles.
D´efinition(Produit mono¨ıdalGc). AQetP deuxS-bimodules, on associe leS-bimoduleQGcP
CHAPITRE 2. PROP ´ERADES ET PROPS
o`u la relation d’´equivalence≈est engendr´ee par
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Ceci qui revient `a indicer les sommets des graphes `a deux niveaux par des ´el´ements deQet deP, et `a relier les indices des sorties (resp. entr´ees) d’un sommet `a l’action de Sm `a gauche (resp.Sn
`
a droite) sur l’´el´ement correspondant.
Remarque : Par souci de concision, on omettra souvent dans la suite d’´ecrire la relation d’´ e-quivalence. Ainsi, lorsque l’on parlera de graphes indic´es par des S-bimodules, on quotientera implicitement par cette relation d’´equivalence.
Proposition 32. Pour tout couple (Q,P)deS-bimodules, les deux produitsQcP etQGc P sont naturellement isomorphes.
D´emonstration. A tout ´el´ement θ⊗q1⊗ · · · ⊗qb⊗σ⊗p1⊗ · · · ⊗pa⊗ω dek[Sm]⊗ Q(¯l,k)¯ ⊗ k[Sc¯k,¯]⊗ P(¯,¯ı)⊗k[Sn], on associe un graphe Ψ(θ⊗q1⊗ · · · ⊗qb⊗σ⊗p1⊗ · · · ⊗pa⊗ω) dont les noeuds sont indic´es par les qβ et les pα. Pour cela, on consid`ere une repr´esentation g´eom´etrique de σ. On regroupe et r´eindice les sorties en fonction de ¯k et les entr´ees en fonction de ¯. On indice les noeuds ainsi cr´e´es `a l’aide des qβ et pα. Puis pour chaque qβ on construit lβ arˆetes sortant que l’on indice par 1, . . . , lβ. On proc`ede de mˆeme avec pα et les entr´ees du graphe.
Enfin, on num´erote les sorties du graphe avec θ et les entr´ees avec ω. Par exemple, l’´el´ement (4123)⊗q1⊗q2⊗(1324)⊗p1⊗p2⊗(12435) donne le graphe repr´esent´e `a la figure 2. d’´equivalence ∼, elle correspond `a un r´earrangement (hom´eomorphe) dans l’espace du graphe engendr´e. Le graphe ainsi cr´e´e ´etant non-planaire, il est invariant sur les classes d’´equivalences pour la relation∼. On a finalement une applicationΨ dee QcPversQGcP. Comme tout graphe admet une repr´esentation de la formeθ⊗q1⊗ · · · ⊗qa⊗σ⊗p1⊗ · · · ⊗pb⊗ω, on peut exhiber une r´eciproque `aΨ. Ainsi, les deux produitse QcP etQGc P sont naturellement isomorphes et
repr´esentent la mˆeme information.
1. LA CAT ´EGORIE DESS-BIMODULES
Il reste `a d´efinir l’objet qui jouera le rˆole d’unit´e dans cette cat´egorie. On pose I=
I(1,1) =k,
I(m, n) = 0 sinon.
Proposition 33. La cat´egorie(S-biMod,c, I)est une cat´egorie mono¨ıdale.
D´emonstration. Pour montrer la relation d’unit´e surP cI(m, n), il faut ´etudier Sck,¯ ¯ pour correspondent aux graphes `a 3 niveaux indic´es par des ´el´ements de R,Q etP, soit
(La composition verticale de graphes connexes donne encore un graphe connexe).
1.4. Les sous-cat´egories mono¨ıdales (k-Mod, ⊗, k) et (S-Mod,◦, I). Les deux cat´ e-gories mono¨ıdalesk-Mod etS-Mod apparaissent comme des sous-cat´egories mono¨ıdales pleines de la cat´egories desS-bimodules avec le produitc d´efini pr´ec´edemment.
En ce qui concerne la cat´egorie des modules sur k munie du produit tensoriel classique, il suffit d’associer `a tout moduleV leS-bimodule suivant :
V(1,1) =V, V(j, i) = 0 sinon.
On retrouve alors le produit tensoriel surkcar pourV etW deux modules, on aV cW(1,1) = V ⊗kW et comme il n’existe pas de permutations connexes associ´ees `a desa, b-uplets de la forme (1, . . . ,1) (cf.proposition 30), on aV W(j, i) = 0 pour (j, i)6= (1,1). Et les morphismes entre deuxS-bimodules compos´es uniquement d’un (S1,S1)-module correspondent aux morphismes de k-modules.
La cat´egorie desS-bimodules contient aussi lesS-modules li´es aux op´erades. De la mˆeme mani`ere,
` o`u la relation d’´equivalence∼s’´ecrit ici
q⊗σν⊗p1⊗ · · · ⊗pN ∼q⊗σ⊗pν(1)⊗ · · · ⊗pν(N).
Cette relation revient `a prendre les coinvariants pour l’action deSN dans l’expressionQ(1, N)⊗k
P(1, i1)⊗k · · · ⊗kP(1, iN). On retombe bien sur le produit mono¨ıdal desS-modules (cf. [GK]
et J.-P. May [May]), que l’on connait plus sous la forme alg´ebrique suivante (en omettant les induites)
CHAPITRE 2. PROP ´ERADES ET PROPS
Remarquons qu’avec le produitGc, on retrouve la composition desS-modules ´ecrite `a l’aide des arbres (cf.[GK] et [L3]).
Quant `aQcP(j, i), pourj6= 1, cette composition correspond `a la juxtaposition d’arbres (forˆet) et repose donc sur des graphes non connexes. Ainsi,QcP(j, i) = 0, pourj6= 1.
1.5. Composition horizontale et verticale des S-bimodules. Afin de repr´esenter la concat´enation de deux op´erations, on introduit un produit mono¨ıdal⊗de la mani`ere suivante.
D´efinition (Produit de concat´enation⊗). Soient P, Qdeux S-bimodules. On d´efinit leproduit de concat´enation⊗par la formule suivante :
P ⊗ Q(m, n) = M
m0+m00=m n0+n00=n
P(m0, n0)⊗ Q(m00, n00),
o`u P(m, n)⊗ Q(m0, n0) =k[Sm+m0]⊗Sm×Sm0P(m, n)⊗kQ(m0, n0)⊗Sn×Sn0 k[Sn+n0].
Le produit ⊗ correspond `a la notion intuitive de concat´enation d’op´erations r´epr´esent´ee `a la figure 3. Pour ce produit on parle decomposition horizontale .
1
Figure 3. Composition horizontale de deux op´erations.
Proposition 34. Le produit ⊗ d´efinit un produit mono¨ıdal sym´etrique dans la cat´egorie des S -bimodules. L’unit´e est donn´ee par le S-bimodule kd´efini par
k(0,0) =k,
k(m, n) = 0 sinon.
D´emonstration. La relation d’unit´e vient de l’´egalit´e
P ⊗k(m, n) =k[Sm]⊗SmP(m, n)⊗kk⊗Snk[Sn] =P(m, n).
Et l’associativit´e vient de la relation P(m, n)⊗ Q(m0, n0)
⊗R(m00, n00) =P(m, n)⊗ Q(m0, n0)⊗R(m00, n00)
=
k[Sm+m0+m00]⊗Sm×Sm0×Sm00P(m, n)⊗kQ(m0, n0)⊗kR(m00, n00)⊗Sn×Sn0×Sn00k[Sn+n0+n00].
L’isomorphisme de sym´etrie est donn´e par
P(m, n)⊗ Q(m0, n0)−→τ (1,2)m, m0 P(m, n)⊗ Q(m0, n0)
(1,2)n, n0 =Q(m0, n0)⊗ P(m, n).
Remarque :Ce produit mono¨ıdal est bilin´eaire.
En mimant ce que l’on a fait dans les parties pr´ec´edentes, on peut d´efinir un produit qui repr´esente les compositions verticales d’op´erations mais suivant des sch´emas non n´ecessairement connexes.
D´efinition(Produit de composition). SoientQ,P deuxS-bimodules. On d´efinit leproduit de compositionQP par o`u la relation d’´equivalence∼est la mˆeme que dans le cas connexe.
1. LA CAT ´EGORIE DESS-BIMODULES
A la diff´erence du produit⊗, le produitrepr´esente lescompositions verticales d’op´erations.
Comme dans le cas connexe, on a une autre ´ecriture de ce produit en terme de graphes dirig´es, `a la diff´erence pr`es qu’ici les graphes ne seront pas suppos´es connexes.
On consid`ere l’ensembleG2 des graphes dirig´es `a deux niveaux non n´ecessairement connexes. On d´efinit alors le produit bas´e sur de tels graphes.
D´efinition (Produit de compositionG). SoientQ, P deuxS-bimodules. On d´efinit le produit QGP par
QGP=
M
g∈G2
O
ν∈N2
Q(|Out(ν)|,|In(ν)|)⊗ O
ν∈N1
P(|Out(ν)|,|In(ν)|)
,
≈
, o`u la relation d’´equivalence≈est la mˆeme que dans le cas connexe.
Comme dans le cas connexe, ces deux d´efinitions sont ´equivalentes.
Proposition35. Pour tout couple(Q,P)deS-bimodules, les deux produits de compositionQP etQGP sont naturellement isomorphes.
D´emonstration. La d´emonstration est identique. On introduit le mˆeme type d’isomorphismeΨe
entreQP etQGP.
Par la suite, nous aurons besoin de consid´erer l’ensemble des concat´enations possibles d’op´erations deP.
D´efinition (LesS-bimodulesT⊗(P) etS⊗(P)). Comme le produit mono¨ıdal deS-bimodules⊗ est bilin´eaire, le mono¨ıde libre surP pour la concat´enation est donn´e par
T⊗(P) =M
n∈N
P⊗n.
CommeP ⊗ Qest isomorphe `aQ ⊗ P et que l’on on aura `a consid´erer un morphisme commutatif surP ⊗ Qpar la suite, on introduit l’alg`ebre sym´etrique libre tronqu´ee surP.
S⊗(P) = M
n∈N∗
(P⊗n)Sn.
Remarque : On a exclut l’op´eration scalaire k(0,0) de la d´efinition de l’alg`ebre sym´etrique consid´er´ee.
Le foncteurS⊗ permet de relier les deux produits de compositionc et . Proposition 36. SoientQ etP deux S-bimodules. On a l’´egalit´e
S⊗(QcP) =QP.
D´emonstration. Le r´esultat repose sur le fait que tout graphe de G2 peut se d´ecomposer en produit de graphes connexes appartenant `a G2c et que l’on ne tient pas compte ici de l’ordre
suivant lequel sont concat´en´es ces graphes connexes.
Comme le produit mono¨ıdal ⊗est bien connu, par exemple du point de vue homologique, pour
´
etudier le produit, il suffira de faire l’´etude sur c et de passer `a la concat´enation `a la fin. Ce sera par exemple le cas des diff´erents complexes de chaˆınes introduits dans la suite de cette th`ese (bar constructions, complexes de Koszul) dont les diff´erentielles se font composante connexe par composante connexe.
Remarque :Le produit de compositionn’est pas un produit mono¨ıdal. L’associativit´e ne fait aucun doute. Par contre, la relation d’unit´e fait d´efaut. On a
PI=S⊗(P).
Or, en g´en´eral,P est diff´erent deS⊗(P).
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CHAPITRE 2. PROP ´ERADES ET PROPS
1.6. Repr´esentation des ´el´ements deQcP et deQP. Les produitsQcP etQP sont d´efinis comme des quotients par la relation d’´equivalence∼qui permute l’ordre des ´el´ements deQet deP. Afin notamment de pouvoir ´etudier le comportement homologique de ces produits, on cherche des repr´esentants naturels des classes d’´equivalence pour la relation∼.
Pour cela on consid`ere les couples de partitions ordonn´ees de ([m],[n]).
D´efinition(Partition ordonn´ee de [n]). Unepartition ordonn´eede [n] est une suite (Π1, . . . ,Πk) d’ensembles qui forment une partition, au sens usuel du terme, de [n] ={1, . . . , n}.
Parmi les partitions ordonn´ees de [n], on choisit celles qui sontcroissantes, c’est-`a-dire qui v´erifient min(Π1)<min(Π2)<· · ·< min(Πk).
Soit Θ(m, n) l’ensemble des couples (Π01, . . . ,Π0b),(Π1, . . . ,Πa)
de partitions ordonn´ees crois-santes de ([m],[n]).
Lorsqu’il n’y a pas d’ambigu¨ıt´e sur les entiersmetn, on note cet ensemble Θ.
Proposition 37. Le produit QcP(m, n)est isomorphe, en tant que(Sm,Sn)-bimodule, `a M
((Π01,...,Π0
b),(Π1,...,Πa))∈Θ(m, n)
|¯k|=|¯|
k[Sm]⊗S¯lQ(¯l,k)¯ ⊗S¯kk[Sk,c¯ ¯]⊗S¯P(¯,¯ı)⊗S¯ık[Sn],
o`ulβ est ´egal au cardinal de l’ensembleΠ0β etiα `a celui deΠα.
Dit autrement, tout ´el´ement deQcP peut se repr´esenter sous la forme qΠ
0 1
1 ⊗ · · · ⊗qΠ
0 b
b ⊗σ⊗pΠ11⊗ · · · ⊗pΠaa = (qΠ
0 1
1 , . . . , qΠ
0 b
b )σ(pΠ11, . . . , pΠaa), avec ((Π01, . . . ,Π0b),(Π1, . . . ,Πa))∈Θ.
L’action deSm`a gauche sur ce module revient `a permuter les entiers d’une partition (Π01, . . . ,Π0b).
Et s’il faut permuter des Π0β pour retomber sur une partition ordonn´ee, on permute de la mˆeme mani`ere les ´el´ementsqβ correspondant.
D´emonstration. On utilise la description du produitcen termes de graphes dont les entr´ees et les sorties sont indic´ees par des entiers de{1, . . . , n} et{1, . . . , m}respectivement. Les partitions (Π1, . . . , Πa) repr´esentent les entr´ees des op´erations (p1, . . . , pa) et les partitions (Π01, . . . , Π0b) repr´esentent les sorties des op´erations (q1, . . . , qb).
Cette ´ecriture nous permettra de montrer que le produit mono¨ıdalc v´erifie certaines propri´et´es homologiques (cf.chapitre 3 section 1.2).
Remarque : La premi`ere op´eration p1 sur la ligne des pest celle qui re¸coit l’entr´ee indic´ee par 1. Il en va de mˆeme pourq1 avec la sortie indic´ee par 1. Cette propri´et´e permet notamment de diff´erencier sur chaque ligne une op´eration des autres. Ceci nous permettra de construire des ho-motopies sur les bar et cobar constructions augment´ees (cf.chapitre 4 section 3).
On a le mˆeme r´esultat pour le produit.
Proposition 38. Le produit QP(m, n)est isomorphe, en tant que(Sm, Sn)-bimodule, `a M
((Π01,...,Π0
b),(Π1,...,Πa))∈Θ(m, n)
|¯k|=|¯|
k[Sm]⊗Sl¯Q(¯l,¯k)⊗S¯kk[S|k|¯]⊗S¯P(¯,¯ı)⊗S¯ık[Sn].
2. Bifoncteurs de Schur
A tout S-bimodule P, on peut associer un bifoncteur dit de Schur. La composition de tels bi-foncteurs est li´ee au produit mono¨ıdalc. Les bifoncteurs introduits ici g´en´eralisent la notion de foncteur de Schur des op´erades.