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V.2.a Le théorème à connaître

Théorème I.57 (Critère spectral de stabilité)

Soitx∈Rdtel quef(x) = 0. On noteA=Dxf(x)la matrice jacobienne def enx.

1. Si toutes les valeurs propres deA sont de partie réellestrictement négative, alors x est un équilibre asymptotiquement stable de l’équationx0=f(x).

2. Si toutes les valeurs propres de Asont de partie réelle strictement positive, alorsx est un équilibre instable de l’équationx0=f(x).

3. SiAa toutes ses valeurs propres de partie réelle négative ou nulle et qu’au moins l’une d’entre elles est de partie réelle nulle, alors on ne peut pas conclure.

Preuve :

On commence par supposer quex= 0sans perte de généralité (on s’y ramène en changeantfenf−f(x)).

1. D’après l’hypothèse sur les valeurs propres deAet les calculs qu’on a effectués dans le cas linéaire, nous savons qu’il existeγ >0etC1>0tels que

ketAk ≤C1e−γt, ∀t≥0.

On pose maintenantg(x) :=f(x)−Ax. Par définition de la jacobienne en0, nous savons quelimx→0g(x)/kxk= 0. En particulier, il existeδ >0tel que

kg(x)k ≤ γ

2C1kxk, ∀x∈B¯(0, δ).

On pose alors

gδ(x) :=g(Pδx),

oùPδest la projection orthogonale surB(0, δ). Il est clair que¯ gδest globalement lipschitzienne et vérifie kgδ(x)k ≤ γ

2C1kxk, ∀x∈Rd.

On pose alorsfδ(x) :=Ax+gδ(x)qui est une fonction globalement lipschitzienne surRdet qui coïncide avecf surB(0, δ).¯

Soit maintenantxδla solution du systèmex0=fδ(x)pour une donnée initialex0fixée. On écrit l’équation sous la forme

x0δ=Axδ+gδ(xδ), et on utilise alors la formule de Duhamel pour écrire

xδ(t) =etAx0+ Z t

0

e(t−s)Agδ(xδ(s))ds, et en prenant la norme, pourt≥0,

kxδ(t)k ≤C1e−γtkx0k+C1 γ 2C1

Z t 0

e−γ(t−s)kxδ(s)kds.

Réécrivons cette inégalité comme suit

eγtkxδ(t)k ≤C1kx0k+γ 2

Z t 0

eγskxδ(s)kds, ∀t≥0,

ce qui permet d’appliquer le lemme de Gronwall à la fonctiont7→eγtkxδ(t)ket ainsi d’obtenir l’inégalité eγtkxδ(t)k ≤C1kx0keγt/2, ∀t≥0,

dont on déduit immédiatement

kxδ(t)k ≤C1kx0ke−γt/2.

— La première conséquence de cette inégalité est que

kxδ(t)k ≤C1kx0k, ∀t≥0, et donc que si on choisit des données initialesx0vérifiant

kx0k ≤ δ C1, alors la solutionxδdu système perturbé vérifie

kxδ(t)k ≤δ, ∀t≥0,

et donc, commefδ etf coïncident sur la boule centrée en zéro et de rayonδ, nous avons x0δ(t) =fδ(xδ(t)) =f(xδ(t)).

Ainsit∈[0,∞[7→xδ(t)n’est autre que l’unique solution maximale en temps positif du problème de Cauchy initialx0 =f(x). Ce qui prouve l’existence globale de ces solutions.

— Toujours pour des données initiales vérifiantkx0k ≤ Cδ1, nous avons finalement obtenut kx(t)k ≤C1kx0ke−γt/2,

et donc le fait que limt→∞x(t) = 0, ce qui prouve bien la stabilité asymptotique de l’équilibre0 pour le systèmex0=f(x).

On a montré en fait une propriété plus forte (la stabilité exponentielle) qui montre que le flotϕde l’équation vérifie, pour toutr >0assez petit,

ϕ(t, B(0, r))⊂e−γt/2B(0, rC1).

2. On note(t, x) 7→ϕ(t, x) = ϕ(t,0, x)le flot du système qui ne dépend que d’une seule variable de temps car le système est autonome (voir la remarqueI.36). On observe immédiatement queψ(t, x) = ϕ(−t, x)est le flot du système (en temps rétrograde)

y0=−f(y),

qui possède le même équilibrex. Par ailleurs on sait queψ(t,·) =ϕ(t,·)−1.

Comme la jacobienne de −f en x est égale à −A et que celle-ci a donc des valeurs propres de partie réelle strictement négative, nous savons quexest exponentiellement stable pour ce nouveau système et donc que, pour toutr >0assez petit on a

ψ(t, B(0, r))⊂e−γt/2B(0, rC1) =B

0, rC1e−γt/2 . En appliquantϕ(t, .)à cette formule on trouve

B(0, r)⊂ϕ t, B

0, rC1e−γt/2

, ∀t≥0.

On fixe maintenant unr >0pour lequel cette propriété est vraie et on se donne unδ >0quelconque. En posant tδ = 2

γlog rC1

δ

, on voit que l’inclusion précédente donne

B(0, r)⊂ϕ(tδ, B(0, δ)).

En particulier, pour toutxtel quekxk=r/2, il existex0tel quekx0k< δet tel que ϕ(tδ, x0) =x,

et donc en particulier

kϕ(tδ, x0)k=r/2,

Ceci prouve que, aussi petit que soitδ, on finit toujours par sortir de la boule de rayonr/2et donc le point d’équilibre ne saurait être stable.

On remarque bien sûr quetδ →+∞quandδ→0, autrement dit : plusδ >0est petit, plus on mettra du temps à sortir de la boule de rayonr/2, ce qui est naturel.

3. Un exemple très simple est le problème scalaire suivant : x0=αx3,

avecα∈ {−1,0,1}. Noter que cette équation peut se résoudre explicitement sans difficulté8mais que nous allons utiliser dans ce qui suit des arguments un peu plus génériques.

La “jacobienne” def est la dérivéef0(0) = 0qui est bien de partie réelle nulle.

— Pourα= 0, le système se réduit àx0= 0et la stabilité de l’équilibre est claire.

— Pourα= 1, on ax0 =x3. Six0>0,xreste positive et doncxest strictement croissante.

Tant que la solution existe, on a donc

x0(t)≥x30, ∀t≥0, t∈J, et ainsi

x(t)≥x0+x30t, ∀t≥0, t∈J.

Pour tout choix dex0>0, même très petit, nous avons lim

t→supJx(t) = +∞et donc l’équilibre est instable.

Pourx0<0on montre de manière similaire que lim

t→infJx(t) =−∞.

— Pourα=−1, on ax0 =−x3et cette fois six0 >0, la solution reste positive et décroissante. Par ailleurs, elle est minorée par0. Le théorème d’explosion en temps fini montre que cette solution est bien définie sur [0,+∞[et par les propriétés précédentes nous savons qu’il existex¯∈[0, x0[tel que lim

t→+∞x(t) = ¯x.

D’après l’équation différentielle nous avons donc

t→+∞lim x0(t) =−¯x3.

8. Le faire en exercice !

Si on utilise maintenant le lemmeI.58ci-dessous, nous déduisons

−x¯3= 0, et donc

¯ x= 0.

On a donc montré que, pour toute donnée initiale positive la solution converge vers le point d’équilibre0. On peut raisonner de façon similaire pour les données négatives et ainsi conclure à la stabilité asymptotique de cet équilibre.

Lemme I.58

Soitx: [0,+∞[→Rune fonction dérivable. Si lim

t→+∞x(t)et lim

t→+∞x0(t)existent, alors on a

t→+∞lim x0(t) = 0.

Remarque I.59

Si on ne suppose pas que la limite dex0existe le résultat est faux comme on le voit par exemple sur la fonction x(t) = sin(tt2).

Preuve :

On noteα= lim

t→+∞x0(t)et on suppose queα6= 0. Quitte à changerxen−xon peut toujours supposer queα >0.

Par définition de la limite, il existe unA≥0tel que x0(t)≥ α

2, ∀t≥A.

Par intégration entreAett≥A, nous obtenons

x(t)−x(A)≥α

2(t−A), ∀t≥A, et donc

x(t)≥x(A) +α

2(t−A)−−−−→t→+∞ +∞, ce qui implique que lim

t→+∞x(t) = +∞. C’est une contradiction avec les hypothèses du lemme.

V.2.b Un théorème plus précis mais hors programme

Le théorème de la section précédente ne permet de conclure que si les parties réelles des valeurs propres de la ja-cobienne sont toutes strictement positives ou bien toutes strictement négatives. Evidemment cela ne permet pas de com-prendre le comportement des solutions dans beaucoup de cas. Le théorème suivant permet de comcom-prendre ce comporte-ment dans un cas plus général (mais pas encore dans tous les cas).

Théorème I.60 (Hartmann-Grobman)

Soitx0 =f(x)un système différentiel autonome dont0est un équilibre. On introduit la jacobienneA=Df(0).

On suppose que0est un équilibrehyperbolique(ce qui signifie que toutes les valeurs propres deAsont de partie réellenon nulle).

Alors, au voisinage de0, le flotϕde l’équation est conjugué à celui (notéψ) du système linéairey0 =Ay.

Cela signifie qu’il existeδ >0et deux ouvertsU, V ⊂Rdcontenant0, et un homéomorphismeh:U →V tel que

∀t∈]−δ, δ[, ϕ(t, .) =h−1◦ψ(t, .)◦h, dansU . Autrement dit,

∀t∈]−δ, δ[,∀x∈U, ϕ(t, x) =h−1(etAh(x)).

En particulier, pour un tel équilibre hyperbolique, il suffit qu’au moins une des valeurs propres ait une partie réelle strictement positive pour que l’équilibre soit instable, ce qui est plus précis que le second point énoncé dans le théorème I.57.

A noter que ce résultat ne dit toujours rien sur le cas où certaines valeurs propres ont une partie réelle nulle et, de fait, le théorème est faux dans ce cas comme on l’a vu précédemment sur le systèmex0 =αx3. Dans ce cas, le système linéarisé esty0 = 0dont les solutions sont toutes constantes. Si le flot (trivial) associéψétait conjugué au flotϕde l’équation non linéaire, on en déduirait que, au voisinage de0, toutes les solutions de l’équation non linéaire sont constantes, ce qui n’est manifestement pas le cas.

Pour aller plus loin, de nouveaux outils sont nécessaires comme la notion de variété centrale (resp. stable, instable), ou la notion de forme normale d’un système au voisinage d’un équilibre. Cela sort totalement du programme de ce cours mais il est bon de savoir, en cas de besoin, que cette théorie existe et a été très développée.

V.2.c Intégrales premières. Ensembles invariants Définition I.61

Une fonction dérivableE: Ω→Rest appeléeintégrale premièredu champ de vecteursf siEest constante le long de toutes les trajectoires du système :

d

dtE(ϕ(t, x)) = 0, ∀t∈I,∀x∈Ω.

Lemme I.62

La fonctionEest une intégrale première def si et seulement si on a (f· ∇E)(x) = 0, ∀x∈Ω,

autrement dit si, en tout point, le vecteurf(x)et le gradient deEsont orthogonaux.

Définition I.63

Pour toute fonctionE : Ω → R et toute valeurα, on appelleensemble de niveau de E pour le niveauα l’ensembleEαdéfini par

Eα:={x∈Ω, E(x) =α}=E−1({α}).

On appellesous-ensemble de niveau(resp.sous-ensemble de niveau strict) deEpour le niveauα, l’ensemble E≤α(resp.E) défini par

E≤α:={x∈Ω, E(x)≤α}=E−1(]− ∞, α]), E:={x∈Ω, E(x)< α}=E−1(]− ∞, α[).

Si une telle fonction existe, on en déduit que toute trajectoire est complètement contenue dans l’ensemble de niveau Eα.

Si la fonctionEest constante, ceci ne nous apprend rien mais si elle a de bonnes propriétés, l’ensembleEαest une hypersurface (i.e. une surface en dimensiond = 3, une courbe en dimensiond = 2) cela peut donner de précieuses informations. Considérons deux exemples :

— L’équation du pendule :

On considère l’équation du pendule (avec des constantes physiques égales à1) : θ00+ sin(θ) = 0,

et on constate que la quantité (positive)

E(θ, θ0) = 1

2(θ0)2+ (1−cos(θ)),

est conservée au cours du temps, c’est donc bien une intégrale première de ce système.

Par ailleurs, pourα ∈ [0,2[les courbes de niveauEα sont des unions de courbes fermées. Les trajectoires du système correspondant à une donnée de Cauchy vérifiant E(θ0, θ00) < 2sont donc contenues dans l’une de ces courbes.

— Lotka-Voltera : il s’agit d’un modèle de dynamique des populations qui prend la forme suivante (x0 =ax−bxy,

y0 =−cy+dxy, (I.21)

où les constantesa, b, cetdsont strictement positives.

Ce système a été introduit pour modéliser l’évolution des effectifs de population de proies (disons des sardines, dont la population à l’instanttestx(t)) et de prédateurs (disons des requins, dont la population à l’instanttesty(t)). Le nombrea >0représente le taux de croissance des sardines (elles disposent de ressources infinies, le plancton), le nombre−c < 0est le taux de disparition des requins en l’absence de tout apport de nourriture. Les termes−bxy etdxyreprésentent l’impact des rencontres requins/sardines sur les populations : les requins mangent les sardines donc le nombre de sardine diminuent et les requins se refont une santé, se reproduisent, etc ...

On peut montrer que ce système est globalement bien posé pour toutes données initiales positivesx0, y0 (voir la sectionVIpour une étude détaillée d’un exemple similaire).

On constate par ailleurs qu’il y a un unique point d’équilibre dans la zone d’intérêt qui est donné parx =c/det y=a/b. Du reste, on peut vérifier que le système possède une intégrale première donnée par

E(x, y) =by+dx−alogy−clogx.

Une étude élémentaire montre que les lignes de niveau deEsont des courbes fermées que l’on peut tracer aisément et ainsi obtenir un portrait de phases du système

1 2 3 4

1 2 3

<

>

<

>

<

>

<

>

c

da b

x y

FIGUREI.10 – Portrait de phase pour le modèle de Lotka-Volterra

Il peut arriver que, même si la fonction E n’est pas constante sur les trajectoires du système, on puisse tirer des informations intéressantes sur ces trajectoires par l’argument suivant.

Proposition I.64 (Sous-ensembles de niveau invariants) SoitEune fonction de classeC1etα∈Rdonné.

On suppose que

∀x∈Eα, (f · ∇E)(x)<0,

alors le sous-ensemble de niveau strictEest invariant par le flot (en temps positif), c’est-à-dire que Φ(t)(E)⊂E, ∀t≥0.

Exemple I.65

On considère le système suivant en dimension2

(x0=x(1−ax2−by2), y0=y(1−cx2−dy2), aveca, b, c, d >0. On considèreE(x, y) =x2+y2.

Un calcul élémentaire nous donne

(f· ∇E)(x, y) = 2x2(1−ax2−by2) + 2y2(1−cx2−dy2).

Par ailleurs, il existeα0>0assez grand tel que

x2+y20⇒ax2+by2>1, x2+y20⇒cx2+dy2>1.

Pour toute valeur deα≥α0, nous avons bien(f · ∇E)<0surEα. Ainsi les sous-ensembles de niveauE

(qui ne sont autres que des boules ouvertes suffisamment grandes) sont invariants par le flot. On en déduit en particulier que toutes les solutions maximales du système restent bornées et sont donc bien définies sur[0,+∞[, par le théorème d’explosion en temps fini.

Remarquons malgré tout que, d’après le critère spectral (ThéorèmeI.57), l’origine est un point d’équilibre in-stable pour ce système.

V.2.d Quelques mots sur la théorie de Liapounov

On considère un champ de vecteursf : Ω→Rdlocalement lipschitzien.

SoitV : Ω→Rune fonction de classeC1qui vérifie les propriétés suivantes9:

— Monotonie/dissipation relativement àf :

f(x)· ∇V(x)≤0, ∀x∈Ω,

— Structure des points critiques deV relativement àf : On note

C:={x∈Ω t.q.f(x)· ∇V(x) = 0},

l’ensemble des points critiques deV relativement àf. On suppose que pour toutα∈R, l’intersection deCavec la ligne de niveauαdeV définie par

Cα:=C∩Vα, est localement finie.

— Compacité :

Les sous-ensembles de niveauV≤αont des composantes connexes compactes.

Théorème I.66 (de Liapounov)

Sous les hypothèses précédentes, pour toute donnée initialex0, la solution associéet7→ϕ(t, x0)converge quand t→+∞vers un point d’équilibre du système.

En particulier, toutes les composantes connexes desV≤αcontiennent un point d’équilibre.

En pratique, on utilise souvent ce théorème à travers le corollaire suivant qui se déduit immédiatement.

Corollaire I.67

Soitxun point d’équilibre du système. S’il existeα > V(x)tel quexest l’unique point d’équilibre du système dans sa composante connexe deV≤αalorsxest asymptotiquement stable.

En particulier, tout minimum local strict deV est un point d’équilibre asymptotiquement stable du systèmex0= f(x).

9. d’autres jeux d’hypothèses sont envisageables mais on ne prétend pas ici à un résultat optimal

Preuve (du ThéorèmeI.66):

On note(t, x)7→ϕ(t, x)le flot du système (qui ne dépend que d’une variable de temps car il est autonome).

— Etape 1 :Compacité des trajectoires.

Par hypothèse nous avons, pour toutx∈Ω, d

dtV(ϕ(t, x)) =∂tϕ(t, x)· ∇V(ϕ(t, x)) = (f· ∇V)(ϕ(t, x))≤0.

Ainsi la fonctionV décroît le long des trajectoires, en particulierϕ(t, x0)appartient au sous-ensemble de niveau V≤α0 avecα0 :=V(x0)pour toutt≥0pour lequel la solution est définie. Comme la trajectoire dépend continû-ment du temps, elle est même contenue dans une composante connexe deV≤α0.

Comme cette composante connexe est compacte par hypothèse, le théorème de sortie de tout compact prouve que la solution en question est définie sur tout[0,+∞[, et ce pour toute donnée initiale.

Par ailleurs la demi-trajectoire(ϕ(t, x0))t≥0étant contenue dans un compact, elle admet des valeurs d’adhérence.

On va montrer par la suite qu’elle n’en possède qu’une et qu’elle converge vers i-celle.

— Etape 2 :Caractérisation des valeurs d’adhérence.

Soita= limn→∞ϕ(tn, x0)une telle valeur d’adhérence, avectn → ∞. Par monotonie et continuité, on obtient que

V(ϕ(tn, x0))−−−−→n→∞ V(a), en décroissant.

Commet7→V(ϕ(t, x0))est une fonction numérique décroissante qui admet une valeur d’adhérence, elle converge vers celle-ci. Autrement dit nous avons obtenu que

t→∞lim V(ϕ(t, x0)) =V(a). (I.22)

Pour touts≥0, nous avons par la propriété de groupe du flot et la continuité de celui-ci et deV V(ϕ(tn+s, x0)) =V(ϕ(s, ϕ(tn, x0)))−−−−→n→∞ V(ϕ(s, a)), et donc, en comparant à (I.22), on déduit

V(ϕ(s, a)) =V(a), pour touts.

La trajectoires 7→ ϕ(s, a)est donc contenue dans l’ensemble de niveauVα, pour α := V(a). Par ailleurs, en dérivant par rapport àscette égalité, on obtient queϕ(s, a)∈C, pour touts. On a donc

ϕ(s, a)∈Cα, ∀s≥0.

Comme on a supposé queCαest localement fini, on obtient queϕ(s, a) =apour touts, autrement dit queaest un équilibre du système, i.e.f(a) = 0.

— Etape 3 :Convergence vers la valeur d’adhérenceaet conclusion.

On va raisonner par l’absurde en supposant queϕ(t, x0)ne converge pas versaquandt→ ∞. Cela signifie qu’il existeε0>0et une suite strictement croissante(τn)ntendant vers l’infini telle que

kϕ(τn, x0)−ak ≥ε0. Quitte à extraire des sous-suites convenables, on peut supposer que

kϕ(tn, x0)−ak ≤ε0/2, et

tn< τn< tn+1, ∀n≥0.

On fixeε0/2< ε < ε0. Par construction on a

kϕ(tn, x0)−ak< ε <kϕ(τn, x0)−ak, ∀n≥0.

Par le théorème des valeurs intermédiaires, on en déduit qu’il existesn∈]tn, τn[vérifiant kϕ(sn, x0)−ak=ε.

La suite(ϕ(sn, x0))n est dans un compact, elle admet donc une valeur d’adhérence, notéecε, qui est donc par le raisonnement ci-dessus un point deCαet qui, par ailleurs, vérifieka−cεk =ε. Ceci étant vrai pour toutε, cela contredit le fait queCαest localement fini et conclut le raisonnement par l’absurde. On a donc bien convergence de toute la trajectoire versa. La preuve est complète.

Par la méthode Liapounov, on peut retrouver le critère linéaire de stabilité asymptotique donné dans la première partie du ThéorèmeI.57que l’on présente à nouveau ici sous la forme d’un corollaire, à noter que la méthode de Liapounov est un peu plus précise puisqu’elle peut permettre d’évaluer la taille du voisinage de l’équilibre à partir duquel les solutions vont converger vers celui-ci. Dans certains cas, elle permet même de prouver la stabilité asymptotique globale d’un équilibre (i.e. : pour toute donnée initiale la solution converge versx), ce que ne permettra jamais un critère de nature linéaire qui ne voit que ce qui se passe près du point d’équilibre.

Corollaire I.68

Soitx un point d’équilibre du systèmex0 = f(x)etAla matrice jacobienne def au pointx. SiAa toutes ses valeurs propres de partie réelle strictement négative alors il existeR >0tel que que le système admette une fonction de Liapounov sur la bouleΩ =B(0, R)et en particulier cet équilibre est asymptotiquement stable.

Preuve :

On a déjà vu que, sous les hypothèses du théorème, il existeC, γ >0tels que ketAk ≤Ce−tγ, ∀t≥0.

On va donc définir à bon droit la fonction suivante V(x) =

Cela montre la monotonie relativement àfdeV, que l’ensemble des points critiques deV relativement àfest simplement constitué du point0et, par construction deV, les sous-ensembles de niveau deV sont contenues dans des boules et donc compacts.

Le théorème de Liapounov s’applique alors dans le domaine Ωet montre que0est un équilibre asymptotiquement stable.

A noter que l’inégalité ci-dessus, avec les propriétés deV (I.23), peut se préciser en (f· ∇V)(x)≤ −1

2kxk2≤ − 1 2αmin

V(x).

Ceci va impliquer queV, le long des trajectoires, va vérifier d

dtV(ϕ(t, x))≤ − 1

minV(ϕ(t, x)),

et donc par le lemme de comparaison sur les inégalités différentiellesI.22, on en déduit V(ϕ(t, x))≤V(x)e2αmin1 t, ∀t≥0, et donc on retrouve la convergence exponentielle des trajectoires grâce à (I.23).

Donnons deux exemples.

1. Flot de gradient :

Le premier cas de système pour lequel l’existence d’une fonction de Liapounov est claire et le cas desflots de gradients. On se donne une fonctionV : Ω→Rde classeC2et on considère le système différentiel

x0=−∇V(x).

Autrement dit, le champ de vecteurs qui définit le problème est exactement l’opposée du gradient d’unpotentielV. Ce type de systèmes intervient souvent en physique.

On vérifie aisément que siV est coercif avec un nombre fini de points critiques, alors c’est une fonction de Liapou-nov et les équilibres stables du système sont ceux qui sont des minimas locaux deV.

2. Système du pendule amorti : On considère l’équation

θ00+µθ0+ sinθ= 0,

qui modélise l’évolution d’un pendule amorti (θest l’angle que fait le pendule avec la verticale), dans lequel le coefficientµ >0mesure l’amortissement lié, par exemple, aux frottements qui s’exercent sur le système au niveau du point d’attache du pendule.

On peut montrer que tous les équilibres de la forme(θ, θ0) = (2kπ,0)sont des équilibres asymptotiquement stables par analyse spectrale de la jacobienne.

On peut être plus précis en considérant une fonction de Liapounov qui n’est autre que la fonctionnelle d’énergie du système

V(θ, θ0) = 1

2|θ0|2+ (1−cosθ).

Son évolution au cours du temps, le long des solutions vérifie d

dtV(θ, θ0) =−µ|θ0|2,

ce qui prouve la monotonie deV relativement au champ de vecteurs du pendule amorti.

Par ailleurs, les points critiques relatifs deV sont exactement les points du plan de phase vérifiantθ0 = 0, c’est-à-dire les points de la forme(θ,0). Pour toutα∈Rl’intersection de cet ensemble avec la ligne de niveau{V =α} est un ensemble discret (c’est l’ensemble des (θ,0) avec cos(θ) = 1−α) donc la propriété de structure des points critiques deV relativement au champ énoncée plus haut est bien érifiée. Enfin, la propriété de compacité des composantes connexes des sous-ensembles de niveau{V ≤α}est bien vérifiée (au moins pourαstrictement plus petit que2).

On déduit de tout cela que les points d’équilibres de la forme Xk = (2kπ,0), qui vérifient V(Xk) = 0 sont asymptotiquement stables et que pour toute donnée initiale vérifiant V(θ0, θ00) < 2, la solution du système va converger vers l’unique point d’équilibre appartenant à la même composante connexe des sous-ensembles de niveau deV. Les autres équilibresYk = ((2k+ 1)π,0)vérifientV(Yk) = 2et rentrent donc pas dans l’étude précédente et de fait, on observe que la jacobienne du champ en ces points est

A=

0 1 1 −µ

,

qui a deux valeurs propres réelles de signe opposé, et en particulier, l’une d’entre elles est strictement positive ce qui montre la non stabilité de cet équilibre.

V.2.e Barrières

Concluons cette discussion par un outil qui peut être utile pour décrire un peu plus précisément le comportement des solutions d’un système différentielscalaire. Il s’agit d’un résultat permettant de comparer des fonctions vérifiant certaines

inégalités différentielles. On peut le voir comme une généralisation de la propositionI.22qui traitait le cas linéaire.

Théorème I.69

Soitf :I×R→Run champ de vecteurs continu, localement lipschitzien. On se donne deux fonctions dérivables α, β:J →R, avecJ ⊂Iet qui vérifient

β0(t)≥f(t, β(t)), ∀t∈J, α0(t)≤f(t, α(t)), ∀t∈J.

Soitt0∈J, on a les propriétés suivantes

α(t0)≤β(t0) =⇒α(t)≤β(t), ∀t∈J, t≥t0, α(t0)≥β(t0) =⇒α(t)≥β(t), ∀t∈J, t≤t0.

Preuve :

— Si l’une des deux inégalités de l’hypothèse est stricte alors la preuve du résultat est plus simple. En effet, dans ce cas nous avons en toutt∈J

β0(t)−α0(t)> f(t, β(t))−f(t, α(t)), et donc en tout pointtoùαetβcoïncident, nous savons que(β−α)0(t)>0.

Commençons par prouver qu’il existeε >0tel queα < βsur]t0, t0+ε[:

— Siβ(t0)> α(t0)le résultat est clair par continuité de ces deux fonctions.

— Siβ(t0)> α(t0)le résultat est clair par continuité de ces deux fonctions.