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1.4 Indicateurs globaux et modalités d’observation de la fonction cardiaque

1.4.3 Cartographie Electro-Anatomique

L’asynchronisme électrique reste défini par la seule analyse de l’ECG de surface. Cepen-dant pour un même trouble de conduction intraventriculaire défini par l’ECG, il peut exister des schémas d’activation électrique très différents. Ces schémas d’activation pourraient être déterminant dans la réponse d’un patient à la thérapie de resynchronisation. Ces données jus-tifient une analyse précise, dans le cadre de ce travail, de l’activation électrique du VG par les techniques de cartographies tridimensionnelles décrites ici.

Les cartographies tridimensionnelles de l’activité électrique cardiaque sont une représenta-tion d’une informareprésenta-tion foncreprésenta-tionnelle électrique localisée dans un espace tridimensionnel anato-mique cardiaque (cf. figure 1.19).

Figure 1.19 – Exemple de cartographie électroanatomique.

1.4.3.1 Principe et acquisition

Les systèmes de cartographie endocavitaire sont composés de : – deux sondes enregistrant des potentiels électrophysiologiques :

∗ une sonde de référence fixe, placée dans une cavité (ventricule ou oreillette droite dans le cas d’une acquisition sur le ventricule gauche),

∗ une sonde mesurant les potentiels électrophysiologiques de la surface endocavitaire analysée,

– un système de localisation spatiale, – une console de visualisation.

Les sondes sont montées sur cathéters par voies fémorales et aortiques. Le système de lo-calisation spatiale est composé de trois sources émettrices de champs magnétiques de faible puissance placées sur la table d’examen et fixées au patient. Le champ magnétique de chaque source est mesuré par des capteurs de position montés au bout des sondes d’enregistrement. L’amplitude des champs magnétiques étant inversement proportionnelle à la distance de l’émet-teur, nous obtenons les trois distances séparant les trois sources de la sonde. Par triangulation, la position de la sonde est alors repérée dans l’espace (cf. figure 1.20). La console permet de visualiser la progression de l’acquisition (déplacement des sondes, mesures effectuées, surface relevée, signaux enregistrés).

Une cartographie électroanatomique de l’activité cardiaque électrique comporte trois types de données que l’on peut considérer comme trois étapes de l’acquisition : une surface anato-mique reconstruite, des amers anatoanato-miques et les mesures électriques ou électrogrammes intra-cardiaques (EGM) desquels des informations sont extraites (par exemple les délais d’activation électrique). Toute l’acquisition durant, l’ECG est relevé. Le schéma global de l’acquisition est illustré à la figure 1.21 et détaillé ci-dessous.

1.4.3.2 Surface anatomique reconstruite

La cavité analysée est balayée par la sonde mobile en essayant de “peindre” son ensemble. Compte tenu des trabécules du VG, la zone apicale, la partie septale, tout comme la région derrière la valve mitrale peuvent être difficiles à atteindre. En enregistrant chacune des positions de passage du cathéter, une surface de l’endocarde est peu à peu reconstruite. La visualisation au cours du processus permet de compléter la géométrie de la cavité si des zones ou parois sont

Figure 1.20 – Illustration du procédé de triangulation à partir de trois sources de champs magnétiques pour le repérage dans l’espace des sondes de mesures en cartographie endocavitaire.

Figure 1.21 – Schéma d’une acquisition de cartographie électroanatomique dans le cas où les données fonction-nelles sont les délais électriques d’activation.

omises ou nécessitent plus de précision.

Certains systèmes de cartographie permettent de contourner cette étape en affichant une surface préalablement segmentée [Ector et al., 2005]. Ceci augmente la précision anatomique de l’acquisition mais entraîne inévitablement une étape supplémentaire de recalage pour placer la surface segmentée dans le repère de l’examen.

Ce procédé d’obtention de la surface anatomique endocavitaire par parcours de la sonde d’acquisition fournit une surface ne comportant qu’un nombre limité de points répartis de façon non homogène donc certaines zones sont moins détaillées. De plus, les différences d’impédances des tissus du corps humain créent des distorsions dans la localisation des sondes. La surface est également acquise alors que le cœur est en mouvement et sans synchronisation, la sonde n’est pas forcément en contact avec l’endocarde lorsqu’un point est incorporé à la surface anatomique. In fine, les surfaces présentent des imprécisions anatomiques (cf. figure 1.19) qui encouragent le marquage d’amers anatomiques pour faciliter un repérage post-examen.

1.4.3.3 Amers anatomiques

Lors de l’acquisition, le clinicien peut décider d’annoter les positions de la sonde afin de donner des amers anatomiques facilitant l’orientation de la surface analysée pour une étude ultérieure. Une fois la surface anatomique acquise, la sonde peut être placée en des zones particulières de la cavité pour créer ces amers. En particulier, sur des acquisitions du ventricule gauche, on retrouve souvent les amers permettant de localiser l’aorte (ou la chambre aortique), l’apex, et au moins une des parois (par exemple septale), permettant l’orientation, dans l’espace 3D, de la cartographie.

Même s’ils sont définis par un point unique, les amers sont annotés pour repérer une région.

1.4.3.4 Mesures électriques

Les mesures électriques sont effectuées par la sonde mobile qui relève les potentiels élec-trophysiologiques endocavitaires ou électrogrammes intracardiaques (EGM). La localisation de la sonde permet donc d’établir une correspondance anatomique aux EGMs. Les EGMs sont enregistrés sur une seconde. Sur le même temps d’enregistrement, un autre électrogramme est enregistré en tant que signal de référence (horloge). L’ECG de surface peut être utilisé comme signal de référence, mais le plus souvent, la sonde de référence est placée dans une cavité (dans l’oreillette ou plus fréquemment le ventricule droit) afin d’avoir un signal plus localisé et tem-porellement plus précis.

Deux types d’informations sont principalement extraites à partir des EGMs enregistrés : des délais ou des amplitudes. Pour le calcul de délais, on utilise le signal de référence pour la synchronisation et le choix du début de la base de temps. La référence peut être synchronisée sur le pic du signal, sur le maximum de variation ou l’annulation de la dérivée. On crée ainsi par exemple une cartographie des délais d’activation électrique locaux entre le pic du signal de référence et le pic de l’EGM (cf. figure 1.19). Pour le deuxième type de mesure, la synchro-nisation n’est pas nécessaire, il s’agit de cartographier le maximum d’amplitude du signal de dépolarisation parcourant la surface endocavitaire. Ce type de cartographie porte le nom de “carte de voltage”. Ces cartographies, une fois l’indicateur extrait des EGMs, ne dépendent plus du temps.

Il est à noter que le placement de la sonde de référence peut être déterminant sur la qualité de la cartographie. En effet, si le signal relevé n’est pas de forte puissance, un signal parasite de plus forte amplitude peut être relevé, conduisant à une erreur de référence temporelle sur cer-tains points de mesure. La référence est souvent prise près du sinus coronaire (partie moyenne

ou proximale) car l’amplitude de l’EGM à ce niveau (près du nœud atrio-ventriculaire) est équi-valente ou même plus élevée que l’amplitude d’un EGM de l’oreillette [Bhakta et Miller, 2008].

1.4.3.5 Système avec ou sans contact

On distingue deux systèmes de cartographie, avec ou sans contacts selon le type de la sonde de mesure.

Système avec contacts. La sonde mobile est déplacée de point en point dans la cavité ana-lysée et amenée en contact de l’endocarde. Elle fournit des mesures d’activation électrique en chaque point de mesure de la surface endocardique (système Ensite NavX™ pour le construc-teur St. Jude Medical). Une acquisition (d’une durée d’une seconde environ) est effectuée en chaque point de mesure. Nous obtenons des mesures localisées, mais éparses qu’il est nécessaire d’interpoler pour constituer les cartographies. Selon le nombre de points de mesure effectués, le temps de l’acquisition d’une cartographie est d’une vingtaine de minutes, ce à quoi il faut ajou-ter le temps d’acquisition de la surface reconstruite et la calibration des appareils. Si plusieurs cartographies sont acquises, la durée d’un examen peut s’étendre à quelques heures.

Système sans contact. La sonde de mesure est un cathéter “ballon” de forme ovoïde (cf. figure 1.22) comportant une centaine d’électrodes et qui fournit des mesures d’activation élec-trique en un battement de cœur sans contact avec l’endocarde (système EnSite Array™ pour le constructeur St. Jude Medical). Le champ électrique acquis par le capteur ovoïde permet, par résolution du problème inverse, une projection de l’activité électrique sur la surface endo-cardique relevée. On obtient directement une carte d’activation dont la précision spatiale n’est pas optimale mais ce défaut est certainement compensé par une acquisition simultanée dans l’ensemble de la cavité. Ce type de capteur est parfois intégré à un outil de fusion du construc-teur reposant sur un recalage (élastique) manuel d’une surface préalablement segmentée (issue d’acquisition scanner CT par exemple). Le temps d’acquisition d’une carte est réduit à quelques secondes. L’examen est moins lourd pour le patient et une multitude de cartes peut être relevée. Cependant, le cathéter “ballon” peut induire une gêne plus importante lors de sa pose car il est bien plus large que pour un système avec contact et n’assure pas une haute précision des mesures.

Figure 1.22 – Sonde du système de cartographie sans contact montée sur son cathéter. La sonde est de forme “ovoïde” et comporte une centaine d’électrodes. D’après [Schilling et al., 1999].

Nous remarquerons que dans les deux cas, les cartes ainsi créées disposent de la géométrie approximative de l’endocarde (détaillée ci-dessus) relevée par l’examen EAM.

Les cartographies électroanatomiques sont des examens invasifs et leur acquisition présente des risques pour le patient en plus de la gêne occasionnée par la durée d’une acquisition. Les données de cartographie donnent néanmoins accès à l’information électrique locale de manière précise et directe (sans estimation) d’où leur intérêt dans le but d’étudier les effets de la CRT sur la propagation électrique cardiaque. Ces acquisitions ne sont que rarement effectuées en routines cliniques mais font partie des protocoles d’acquisition des projets IMOP et euHeart. Elles sont effectuées après implantation du stimulateur biventriculaire, sous différents modes de stimulations (spontanée, ventriculaire droit uniquement, ventriculaire gauche uniquement et biventriculaire).