Chapitre 3 Croissance localisée de nanofils de ZnO sur couche d’amorce
3.3 Nucléation et croissance sur monocristaux de ZnO semipolaires
3.3.3 Caractérisations structurales et optiques
Les propriétés structurales et optiques des nanofils et nanostructures de ZnO formées sur
les monocristaux de ZnO semipolaires sont caractérisés par DRX et par spectroscopie de
diffusion Raman.
Des clichés DRX en haute résolution sont collectés sur les monocristaux de ZnO avant et
après le dépôt en bain chimique du ZnO. Pour cela, un diffractomètre RIGAKU Smartlab
équipé d’une source en cuivre à anode tournante est utilisé. Un miroir parabolique 1D, un
monochromateur de germanium (220) avec quatre réflexions et un masque de 2 mm avec
des rainures de 1,0 mm sont utilisés pour obtenir un faisceau monochromatique parallèle de
la radiation Cu Kα
1. La divergence du faisceau incident est inférieure à 0,004° dans la gamme
d’angles oméga (ω) de 0° à 45°. Deux fentes de 1,0 mm x 10,0 mm, des fentes de Soller à 2,5°,
un atténuateur automatique et un détecteur ponctuel à scintillation sont utilisés. Les
échantillons sont maintenus horizontaux pendant l’acquisition. Des scans en 2θ/ω ont été
effectués avec un pas de 0,0012° et une vitesse de 1,4°.min
-1, tandis que les scans en ω
(courbes d’oscillation) ont été effectués avec un pas de 0,0008° et une vitesse de 0,9°.min
-1.
2θ est l’angle formé entre le faisceau de rayons X incident et le détecteur, tandis que ω
correspond à l’angle entre le faisceau incident et l’échantillon. Les scans 2θ/ω permettent de
déterminer précisément l’angle de diffraction de Bragg. Les scans ω consistent à faire varier
l’angle d’inclinaison de l’échantillon autour de l’angle de diffraction de Bragg d’un plan
particulier (l’inclinaison de l’échantillon est fixée à l’angle de diffraction de Bragg tandis que
la position de la source de rayons X et du détecteur est variée au cours de l’acquisition). Cela
permet typiquement d’évaluer le degré de mosaïcité du plan de diffraction mesuré.
Des figures de pôle de rayons X ont ensuite été collectées à l’aide d’un diffractomètre
Siemens (BRUKER) D5000 en utilisant les radiations Cu Kα
1et Kα
2. Un goniomètre 4 cercles
avec un faisceau incident ponctuel de 1 mm de diamètre, des fentes de 0,6 mm, des fentes de
Soller de 2,5°, un filtre nickel K
β, des fentes de 0,2 mm et un détecteur à scintillation ponctuel
est utilisé. L’aire de surface de l’échantillon illuminée forme une ellipse d’environ 4 mm x 3
mm. Pour chaque figure de pôle, un scan complet en angle ϕ (angle de rotation dans le plan
de l’échantillon) de -180° à 180° est effectué pour différent angles χ (ange de bascule de
l’échantillon) de 0° à 90°. Le logiciel DiffracPlusTexEval 2.2 BRUCKER est utilisé pour tracer
les figures de pôle en configuration 2D et 3D. Les différentes mesures de DRX en haute
résolution et de figures de pôle de rayons X ont été effectuées avec l’aide d’Hervé Roussel
(LMGP).
Les spectres de diffusion Raman sont collectés sur les monocristaux de ZnO de plans
(101̅2) et (202̅1) après le dépôt en bain chimique des nanostructures de ZnO entre 50 cm
-1et 2000 cm
-1. Un spectromètre Horiba/Jobin Yvon Labram équipé d’un détecteur CCD
refroidit à l’azote liquide est utilisé. Un faisceau laser Ar
+incident d’une longueur d’onde de
488 nm est localisé sur la surface du substrat à l’aide d’un objectif à grossissement x 50 avec
une tache focale d’environ 1 µm
2et une puissance d’environ 0,4 mW. Les spectres sont
collectés à température ambiante en configuration rétrodiffusée avec le faisceau laser
incident perpendiculaire à la surface du monocristal de ZnO mesuré (voir Figure 3.28b). La
calibration est effectuée à l’aide d’un échantillon de silicium de référence, à température
ambiante, en fixant la position théorique du silicium à 520,7 cm
-1.
3.3.3.1 Diffraction des rayons X
Les scans en 2θ/ω, ω et les figures de pôle de rayons X sont collectés afin de confirmer la
croissance homoépitaxiale des nanofils et nanostructures de ZnO selon l’axe c sur les surfaces
de plans (101̅2) et (202̅1) des monocristaux de ZnO correspondants.
DRX en haute résolution
Les scans en 2θ/ω collectés sur les monocristaux de ZnO de plans (101̅2) et (202̅1) avant
le dépôt des nanostructures en bain chimique, présentés Figure 3.25a et d, respectivement,
révèlent des pics de diffraction de forte intensité centrés respectivement à 47,554° et 69,066°.
Ces positions sont en très bon accord avec les pics de diffraction des plans (101̅2) et (202̅1)
du ZnO en phase wurtzite rapportées à 47,539° et 69,100°, respectivement, d’après la fiche
ICDD N°00-036-1451. Les pics sont très fins dans les deux cas, avec une largeur à mi-hauteur
(LMH) d’environ 50 arcsec et 83 arcsec pour le monocristal de plan (101̅2) et (202̅1),
respectivement, ce qui indique la très bonne qualité cristalline de ces derniers.
Figure 3.25 (a-c) Clichés de DRX en haute résolution collectés sur le monocristal de ZnO de plan
(101̅2) (traits pointillés verts) et sur les nanofils de ZnO formés sur le monocristal de ZnO de plan
(101̅2) (traits continus bleus). (d-f) Clichés de DRX en haute résolution collectés sur le monocristal de ZnO de plan (202̅1) (traits pointillés violets) et sur les nanofils de ZnO formés sur le monocristal de ZnO de plan (202̅1) (traits continus rouges). (a, d) Scans 2θ/ω collectés autour du pic de diffraction
(101̅2) et (202̅1), respectivement. (b, c, e, f) Scans ω collectés autour du pic de diffraction (101̅2),
Le scan 2θ/ω collecté sur le monocristal de ZnO de plan (101̅2) après la croissance des
nanofils (Figure 3.25a) ne révèle pas de changement significatif de position du pic, mesuré à
47,535°, et de sa LMH mesuré à 36 arcsec, suggérant ainsi l’homoépitaxie des nanofils. Un
élargissement du pic à sa base est observé, probablement en raison des faibles dimensions
des nanofils. De la même manière, le scan 2θ/ω, collecté sur la couche nanostructurée formée
sur le monocristal de plan (202̅1), ne révèle pas de changements significatifs avec un pic de
diffraction positionné à 69,083° et une LMH correspondante de 65 arcsec, suggérant sa
bonne qualité cristalline avec une croissance homoépitaxialle.
Les scans en ω collectés sur les pics de diffraction (101̅2) et (0002) des nanofils de ZnO
formés sur le monocristal de plan (101̅2) sont présentés Figure 3.25b et c, respectivement.
Une faible LMH de 18 et de 65 arcsec est obtenue pour les pic des diffraction (101̅2) et
(0002), respectivement. Cela est très proche des valeurs respectives de la LMH de 25 arcsec
et de 29 arcsec mesurées sur le monocristal de plan (101̅2) avant le dépôt en bain chimique
des nanofils. Un élargissement du scan en ω est notable à la base des pics pour les clichés
collectés après la croissance des nanofils, indiquant que l’orientation des plans cristallins
(101̅2) et (0002) des nanofils est légèrement plus dispersée que ceux du monocristal utilisé
comme substrat.
De manière similaire, les scans ω collectés sur les pics de diffraction (202̅1) et (0002) de
la couche nanostructurée formée sur le monocristal de plan (202̅1), présentés Figure 3.25e
et f, révèlent dans les deux cas une faible LMH de 32 arcsec, qui est très proche de la LMH
d’environ 43 arcsec mesurée sur le monocristal de plan (202̅1) avant la croissance.
Par conséquent, les mesures de DRX en haute résolution mettent en évidence l’excellente
uniformité structurale des nanofils et nanostructures de ZnO en matière d’orientation
cristalline et donc de leur direction de croissance, suggérant ainsi leur croissance
homoépitaxialle sur les monocristaux de plans (101̅2) et (202̅1).
Figures de pôle de rayons X
La figure de pôle de rayons X selon le pic de diffraction (0002) et collectée sur les nanofils
de ZnO formés sur le monocristal de plan (101̅2), présentée Figure 3.26a et b, révèle un
unique pic de diffraction de très forte intensité positionné à χ = 42,9°. Cette position du pic
de diffraction (0002) correspond à la position attendue dans le cas d’une orientation (101̅2)
du substrat et des nanofils de ZnO. Trois pics additionnels de très faible intensité positionnés
à χ = 70,1°, 47,0°, et 70,0°, correspondent aux réflexions (011̅0), (101̅0), et (11̅00),
respectivement. Les conditions de diffraction de ces plans sont relativement proches de
celles des plans (0002). Leur présence s’explique en raison de la limite de résolution de la
source de rayons X et possiblement par de faibles erreurs d’alignement de l’échantillon
conduisant à des déviations par rapport aux conditions de diffraction du plan (0002). La
figure de pôle collectée sur le pic de diffraction (101̅2), présentée Figure 3.26c et d, met en
évidence un pic de forte intensité en son centre, signature des plans (101̅2) du substrat et
des nanofils. Quatre réflexions équivalentes de plus faible intensité sont identifiées à χ =
39,9° et 72,3°.
Ainsi, pour chaque figure de pôle, les seuls pics de diffraction observés sont ceux
correspondant à l’orientation (101̅2) du substrat. L’absence de pic de diffraction significatif,
signature d’une autre orientation cristalline, suggère fortement que les nanofils de ZnO
présents sur la surface du monocristal de ZnO sont formés de façon homoepitaxiale.
Figure 3.26 Figures de pôle de rayons X (a, c) 2D et (b, d) 3D des nanofils de ZnO formés sur le
monocristal de ZnO de plan (101̅2) et collectées autour du pic de diffraction (a, b)(0002) et (b, c)
(101̅2) du ZnO.
De manière similaire, les figures de pôle de rayons X selon les pics de diffraction (0002)
et (202̅1), et collectées sur les nanostructures de ZnO formées sur le monocristal de plan
(202̅1), sont présentées Figure 3.27(a,b) et (c,d), respectivement. La figure de pôle (0002)
révèle un pic de diffraction à χ = 74,8° qui correspond à la position du pic (0002) attendue
pour un monocristal de ZnO de plan (202̅1). Des pics de diffractions mineurs correspondant
une nouvelle fois à la famille de plans {101̅0} sont observés à χ = 15,5° et 61,2° en raison de
déviations des conditions de diffraction. La figure de pôle (202̅1) révèle également un pic de
diffraction dominant au centre. Des pics de diffraction de plus faible intensité, correspondant
à des réflexions équivalentes des plans (202̅1), sont observées à χ = 30,5°, 57,6° et 66,7°. Des
pics de diffraction mineurs de la famille de plans {112̅2} sont observés à χ = 32,0° et χ = 55,5°
en raison de déviations par rapport aux conditions de diffraction.
Figure 3.27 Figures de pôle de rayons X (a, c) 2D et (b, d) 3D des nanostructures de ZnO formées sur
le monocristal de ZnO de plan (202̅1) et collectées autour du pic de diffraction (a, b)(0002) et (b, c)
Ces figures de pôles révèlent ainsi que les nanostructures de ZnO présentent une
orientation cristalline identique à celle du substrat.
3.3.3.2 Spectroscopie de diffusion Raman
Les spectres de diffusion Raman collectés sur les nanofils et nanostructures de ZnO
formées sur les monocristaux de ZnO sont présentés Figure 3.28a. Les raies observées à 100
cm
-1, 332 cm
-1, 410 cm
-1, et 438 cm
-1sont assignées aux modes E
2low, E
2high-E
2low, E
1(TO) et
E
2high, respectivement [232]. Des modes du second ordre sont également identifiés à 205 cm
-1(2TA, 2E
2low), 540 cm
-1(2B
1low, 2LA), et 664 cm
-1(TA+LO) [232].
Figure 3.28 (a) Spectres de diffusion Raman des nanofils et nanostructures de ZnO formées sur les
monocristaux de ZnO de plan (101̅2) (en bleu) et de plan (202̅1) (en rouge). (b) Illustration de la configuration de la mesure de spectroscopie de diffusion Raman dans le cas de nanofils de ZnO formés le long de la direction c sur une surface de ZnO semipolaire.
Deux autres raies Raman dont la position dépend du monocristal de ZnO considéré sont
observées. Pour le monocristal de ZnO de plan (101̅2), une raie chevauchant le mode E
1(TO)
est observée à 397 cm
-1, et une seconde raie est observée à 583 cm
-1. La position de ces raies,
autour de 381 cm
-1et 588 cm
-1, est légèrement différente pour le monocristal de ZnO de plan
(202̅1). Pour les deux monocristaux, la première raie est située entre la position usuelle du
mode A
1(TO) et du mode E
1(TO), tandis que le seconde raie est située entre la position
usuelle du mode A
1(LO) et du mode E
1(LO) [232]. La position de ces deux modes, en fonction
de l’orientation cristalline du substrat de ZnO, peut être interprétée dans le cadre du modèle
de Loudon pour les cristaux uniaxiaux [217].
Ce modèle prédit l’apparition de modes de symétrie mixte entre les modes A
1et E
1sous
certaines conditions de propagation et de polarisation [217, 221, 227, 229]. Dans le cas
standard d’un vecteur d’onde des phonons parallèle ou perpendiculaire à l’axe c, seuls les
modes de symétrie « pure » A
1et E
1sont observés. En revanche, lorsque le vecteur d’onde des
phonons est dans une direction intermédiaire entre ces deux cas, des modes de symétrie
mixte, appelés quasi-modes, sont observés. Ces modes, quasi-TO (qTO) et quasi-LO (qLO),
sont situés respectivement entre les modes A
1(TO) et E
1(TO) d’une part, et entre les modes
A
1(LO) et E
1(LO) d’autre part. Leur position est donnée par les équations suivantes [217] :
𝜔
𝑞𝑇𝑂2= 𝜔
𝐸21(𝑇𝑂)cos
2(𝜃) + 𝜔
𝐴21(𝑇𝑂)sin
2(𝜃) (3.6)
𝜔
𝑞𝐿𝑂2= 𝜔
𝐴21(𝐿𝑂)cos
2(𝜃) + 𝜔
𝐸21(𝐿𝑂)sin
2(𝜃) (3.7)
avec 𝜃 l’angle formé entre le vecteur d’onde des phonons et l’axe c, 𝜔
𝐴1(𝑇𝑂),
𝜔
𝐸1(𝑇𝑂), 𝜔
𝐴1(𝐿𝑂)et 𝜔
𝐸1(𝐿𝑂), les positions des modes A
1(TO), E
1(TO), A
1(LO), et E
1(LO) du ZnO.
Dans le cas des nanofils et nanostructures de ZnO formées sur les monocristaux de plans
(101̅2) et (202̅1), l’axe c est incliné par rapport à la direction de propagation du faisceau
laser incident d’un angle 𝜃 de 42,77° et de 74,88°, respectivement. La géométrie
correspondante à la mesure de spectroscopie de diffusion Raman effectuée dans ces
conditions est illustrée schématiquement Figure 3.28b. Les positions expérimentales des
modes qTO et qLO sont comparées avec les positions calculées à l’aide des équations (3.6)
et (3.7), respectivement, dans le Tableau 3.1 pour les nanofils et nanostructures de ZnO
formés sur les deux monocristaux de ZnO. Les valeurs expérimentales des modes qTO et
qLO sont bien en accord avec les valeurs calculées à partir du modèle de Loudon, ce qui
confirme l’orientation des nanofils et nanostructures par rapport à l’axe c. Les différences
maximales de 2 cm
-1, observées entre les valeurs expérimentales et les valeurs calculées,
peuvent être associées aux erreurs expérimentales et éventuellement à des erreurs
d’alignement de l’échantillon lors de la mesure.
Plan du monocristal de ZnO
Angle entre le plan c et la surface semipolaire (°)
qTO (cm-1) qLO (cm-1)
Calculé Expérimental Calculé Expérimental
(101̅2) 42,77 396 397 581 583
(202̅1) 74,88 380 381 589 588
Tableau 3.1 Comparaison entre les positions expérimentales et calculées des modes qTO et qLO. Les
positions expérimentales sont mesurées en spectroscopie de diffusion Raman sur les nanofils et nanostructures de ZnO formés sur les monocristaux de ZnO de plans (101̅2) et(202̅1). Les positions calculées sont déterminées avec le modèle de Loudon en utilisant la position des modes de symétrie pure mesurées par Cuscó et al. [232] pour des monocristaux de ZnO.