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Chapitre II - Méthodologie expérimentale de caractérisation de l’endommagement induit par

II.2. Dispositifs expérimentaux mis en œuvre

II.2.1. Techniques de caractérisation de la surface brute de découpe

II.2.1.2. Caractérisation structurale

Les mécanismes d’abrasion responsables de la découpe DW (Chapitre I) peuvent perturber la structure cristalline du silicium au niveau de la surface des tranches. Cette perturbation fait partie de l’endommagement induit par la découpe. Plusieurs techniques peuvent permettre de caractériser les déformations du réseau cristallin ainsi que les contraintes telles que : (i) la spectrométrie Raman ; (ii) la diffraction des rayons X (DRX) ; (iii) les techniques de diffraction en microscopie électronique (EBSD, TEM). Dans ce travail, dans une première étape, nous avons privilégié la spectrométrie Raman et la DRX qui ne nécessitent pas de préparation spécifique des échantillons. En complément nous avons testé l’EBSD et la TEM pour rechercher d’éventuelles déformations du réseau.

a. Spectrométrie Raman

Le phénomène physique intervenant en spectrométrie Raman est la diffusion inélastique de photons par la matière [63]. En contraste avec la diffusion Rayleigh où les photons incidents sont réémis à la même longueur d’onde, lors de la diffusion Raman les photons incidents interagissent avec les modes de vibration moléculaire ou du réseau et sont réémis à des longueurs d’onde différentes de celles du rayonnement incident. Ce changement de longueur d’onde, dit déplacement Raman, est caractéristique de la fréquence de vibration des liaisons chimiques présentes dans le matériau analysé.

La Figure 40 schématise le système (en configuration de microscopie de rétrodiffusion Raman) que nous avons utilisé. Ce système est constitué :

d’une source d’excitation de type laser dont le faisceau est focalisé sur l’échantillon par l’objectif d’un microscope ;

d’une optique de collection de la lumière rétrodiffusée par le même objectif;

d’un système de dispersion de la lumière collectée après réjection de la diffusion de Rayleigh

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d’une matrice de détecteurs (CCD9) permettant la mesure de l’intensité de la lumière en sortie du spectromètre dispersée sur une gamme spectrale spécifiée;

d’une électronique d’acquisition et de traitement des données spectrales.

De façon générale, les spectres Raman sont constitués de raies qui correspondent aux modes de vibration propres des liaisons chimiques présentes dans l’échantillon. La position spectrale de ces raies est exprimée en déplacement Raman par rapport à la longueur d’onde du laser d’excitation. L’unité de ce déplacement est le cm-1 car il est adapté au domaine spectral des vibrations moléculaires. Cette unité est analogue à l’unité du nombre d’onde en spectroscopie infra-rouge. La Figure 40.b présente

l’exemple de la raie typique du silicium cristallin correspondant à un déplacement Raman de 521 cm-1

. Le spectre Raman d’un échantillon est caractéristique de la nature chimique (états de liaisons) mais aussi de l’arrangement atomique dans le matériau. Ainsi, l’identification des phases cristallines présentes est possible comme avec les techniques de diffractions ou électroniques. L’intérêt de la spectrométrie Raman par rapport aux techniques de DRX réside dans la possibilité de faire des analyses locales sans préparation d’échantillon. Ainsi le choix d’une longueur d’onde d’excitation et d’un objectif de microscope adaptés peut limiter le volume d’analyse sur le silicium à 1 µm3

. Cela permet d’envisager d’effectuer des cartographies de spectres Raman à la surface des tranches de silicium.

(a) (b)

Figure 40 : Schéma de principe (a) du mode de microscopie de rétrodiffusion Raman (d’après [64]) et l’exemple d’un spectre Raman (b) du silicium cristallin (excitation laser 532 nm à 1 mW ; temps d’intégration = 0,2 s et nombre d’accumulations = 20).

De plus, le spectre Raman peut-être modifié de façon sensible par la présence de désordre dans l’arrangement atomique. Ainsi, un élargissement des raies peut être induit par une amorphisation et un décalage spectral des raies peut traduire la présence de contraintes.

9 Détecteur CCD : « Charge Coupled Device » en anglais, détecteur à transfert de charges qui assure la conversion d'un signal lumineux en un signal électrique

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Figure 41 : Exemple d’un spectre Raman sur du silicium montrant la phase amorphe (a-Si) avec la phase cristalline (c-Si). Conditions d’acquisition : laser 532 nm à 1 mW, temps d’intégration = 0,2 s et nombre d’accumulations = 20.

Dans l’étude de l’endommagement induit par la découpe au fil diamanté, nous nous sommes appuyés sur les mesures par spectrométrie Raman pour :

Étudier l’amorphisation des tranches de silicium par la découpe DW ; les spectres Raman

sont exploités pour donner un indicateur r de l’épaisseur de la couche amorphisée ; cette quantification est basée sur un modèle proposé par J. Yan et al. [65] et que nous résumons en Annexe 1 ;

Évaluer les contraintes mécaniques comme nous allons le présenter dans le § II.2.1.4 de ce

chapitre.

Le spectroscope Raman utilisé est du type « Alpha300 » commercialisé par « WITec ». Il est équipé de deux sources Laser de longueurs d’onde 532 nm et 785 nm. Pour favoriser l’analyse de la surface et la résolution latérale, nous avons utilisé le laser de 532 nm de longueur d’onde. L’analyse spectrale du signal Raman peut être obtenue soit avec un réseau 600 traits/mm et une résolution

spectrale limitée à ~5 cm-1, soit avec un réseau 1800 traits/mm et une résolution spectrale inférieure à

2 cm-1. La résolution spectrale conditionne la sensibilité de la mesure à la position spectrale des raies

pour la mesure des contraintes locales comme nous le verrons plus loin (§ II.2.1.4). La représentativité des résultats de l’analyse des spectres locaux est consolidée par l’acquisition de cartographies de

quelques mm2 en différents points de la surface des tranches.

b. Diffraction des rayons X (DRX)

La diffraction de rayons X permet de caractériser les déformations du réseau d’un matériau cristallin comme le silicium [66]. La Figure 42 illustre le principe de la DRX. Un réseau cristallin est un agencement d’atomes, d’ions ou de molécules avec un motif se répétant périodiquement dans les trois dimensions. Les distances interatomiques sont de l’ordre de l’angström, du même ordre de grandeur que les longueurs d’onde des rayons , un cristal constitue donc un réseau 3D qui peut diffracter les rayons X (Figure 42.a). La condition de diffraction doit satisfaire la condition de Bragg :

2 sind   m (2.1)

d est la distance inter-réticulaire entre deux plans diffractant, est l’angle d’incidence, m est un entier appelé l’ordre de diffraction et  est la longueur d’onde.

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Ainsi en faisant varier l’angle , (voir Figure 42.b) nous obtenons un diagramme de diffraction. Le diagramme est composé de pics localisés aux angles pour lesquels la condition de Bragg (2.1) est satisfaite. La position angulaire est caractéristique de l’agencement atomique dans l’échantillon.

(a) (b)

Figure 42 : Illustration de la DRX (a) deux rayons X, A et B, en incidence sur un cristal, (b) géométrie de diffraction.

La Figure 43.a montre un diagramme de diffraction standard pour une structure cristalline parfaite. La présence de défauts induit une distorsion du réseau cristallin qui conduit à un élargissement et à un déplacement des pics de diffraction, comme ceci est montré par la Figure 43.b. L’analyse des diagrammes de diffraction de rayons permet donc d’évaluer la qualité cristalline du silicium.

(a) (b)

Figure 43 : Diagrammes de DRX (a) pour un cristal parfait, (b) pour un cristal avec déformations.

Le diffractomètre utilisé est de type « Discover » commercialisé par « Bruker ». Il possède un goniomètre 4 cercles, c’est-à-dire qu’il permet de faire varier quatre angles définissant la géométrie de diffraction (, 2, , ). Les rayons X sont produits à l’aide d’une cathode en cobalt générant deux

longueurs d’ondes k1= 0,178897 nm et k2= 0,179285 nm. En incidence normale l’empreinte du

faisceau est d’environ 1 mm². L’appareil est muni d’un détecteur à scintillation. Le mode de mesure DRX utilisé est le mode classique -2 où le tube est fixe, l’échantillon tourne de  et le détecteur tourne de 2. Nous avons utilisé un logiciel de type « TOPAS » commercialisé par « Bruker »pour traiter les diagrammes (décomposition, ajustement, indexation…).

c. Diffraction des électrons (EBSD)

La technique EBSD est aujourd’hui classiquement utilisée pour réaliser des cartographies d’orientations cristallines des grains ou de définir les plans des joints de grains (et des sous-joints) dans les matériaux polycristallins avec une résolution angulaire de 0,5 ° [43]. La résolution spatiale

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peut atteindre quelques dizaines de nanomètres selon le matériau. Récemment, cette technique a été adaptée pour caractériser des déformations locales à une échelle submicronique.

Pour introduire le principe de cette technique, des détails sont donnés dans le livre de Schwartz [67]. La technique utilise un microscope électronique à balayage (MEB), ce qui offre l’avantage de pouvoir visualiser la microstructure et sélectionner ainsi des zones d’intérêt telles que des grains ou des phases particulières, une proximité par rapport à une fissure… Par comparaison à la DR , un faisceau d’électrons est utilisé en EBSD pour irradier le matériau cristallin. Des cônes de diffraction donnent lieu à ce qu’on appelle des bandes de Kikuchi. Ces bandes, visualisées à l’aide d’une caméra placée à côté de l’échantillon, sont traitées pour caractériser les orientations du cristal. Des cartographies d’angles de diffraction peuvent ainsi être extraites.

Dans le contexte de ce travail, nous avons mis en œuvre la technique EBSD pour détecter d’éventuelles déformations du réseau cristallin du silicium au voisinage de la surface engendrée par la découpe DW. La résolution spatiale, de cette technique permet d’analyser les échantillons de silicium sur une coupe transversale. Des étapes de préparation des échantillons sont ainsi nécessaires et comportent :

La découpe d’échantillons de taille de 10×10 mm² ;

Un rodage qui définit la géométrie de la coupe : des tapis abrasifs de différentes tailles de grains sont utilisés pour ébaucher progressivement la coupe transversale (1 mm, 820 µm, 125 µm (sur polisseuse automatique));

Un polissage mécanique de la coupe ainsi définie : des tapis polymères incrustés de diamants

sont utilisés avec une taille de grain décroissante (3 µm, 1 µm puis 0,25 µm (sur polisseuse automatique) ;

Un polissage mécano-chimique de finition à la silice colloïdale (sur polisseuse vibrante) pour

obtenir un état de surface de qualité suffisante pour une analyse EBSD.

Le MEB utilisé est un « ZEISS Merlin » équipé d’un détecteur EBSD comportant une caméra CCD commercialisée par « Brucker » et du logiciel d’acquisition « Esprit » commercialisé par « Bruker ». Le paramètre de maille du réseau cristallin du silicium est ainsi cartographié en fonction de la profondeur.

d. Microscopie électronique en transmission (TEM)

La microscopie électronique en transmission (ou TEM) est une technique de microscopie où un faisceau parallèle d'électrons est transmis à travers un échantillon aminci pour le rendre transparent aux électrons. Les images qui sont obtenues résultent de la diffraction des électrons par l’arrangement périodique des atomes du matériau cristallin. Les défauts cristallins présents dans l’échantillon induisent un contraste qui permet de les analyser [68]. Dans notre étude, l’intérêt des observations TEM est de caractériser les dislocations qui pourraient être présentes près de la surface dans les tranches de silicium découpées DW. L’équipement TEM est d’un modèle « FEI Osiris ».

La préparation des échantillons en TEM est une étape cruciale car la qualité de l’échantillon est toujours déterminante pour obtenir un résultat probant. Pour avoir des échantillons transparents aux

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électrons, des lames extrêmement minces (<200 nm) sont préparées à l’aide d’une sonde ionique focalisée « FIB » [68]. Pratiquement, une colonne ionique est montée dans le microscope électronique

à balayage (MEB) pour fournir un faisceau d’ions focalisé. Le MEB utilisé est de type « Zeiss »,il est

équipé d’une colonne qui fournit un faisceau ionique d’ions gallium. Le faisceau d’ions permet d’une part de graver l’échantillon et d’autre part de faire une image soit électronique, soit ionique, selon les détecteurs à disposition pour contrôler la gravure. Avec une énergie de 30 kV, ce faisceau permet l’abrasion du silicium avec une résolution nanométrique.