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2.1 Présentation des échantillons

2.1.3 Caractérisation structurale

Avant de discuter des propriétés optiques des microfils de GaN obtenus par SAG-HVPE, les analyses structurales réalisées sur des microfils de l'échantillon 1 par microscope électronique à transmission ou Transmission Electron Microscopy (TEM) et par attaque chimique vont être reportées.

2.1.3.1 Microscopie électronique à transmission

Les images MEB des échantillons étudiés (cf. Figure 2.4 et Figure 2.5) indiquent une forte dispersion des hauteurs et des largeurs des microfils. Pour comprendre l'origine de cette hétérogénéité, une étude par MEB et par TEM à haute résolution (HR-TEM) a été réalisée à l'Institut Néel par Catherine Bougerol pour observer l'interface entre un microfil et le substrat.

Comme l'indique la Figure 2.6, pour avoir une meilleure visibilité, l'analyse a été pratiquée dans une zone présentant une faible densité de microfils (cf. Figure 2.6 (a)).

Suivant la ligne rouge représentée sur la Figure 2.6 (a), une coupe par faisceau d'ions focalisé (FIB) a été réalisée : une pyramide amincie (légendée pyramide), une pyramide non amincie (pyramide non légendée) une zone vierge ainsi qu'un pilier sont observables sur la tranche sur la Figure 2.6 (b).

Si l'on considère uniquement le pilier, il est possible d'observer par HR-TEM son interface avec l'AlN (cf. Figure 2.6 (c)) : la croissance du microfil de GaN a lieu dans les ouvertures du masque mais aussi au delà, sur le SiO2. On constate aussi que l'AlN est plus fin dans les ouvertures qu'en dehors,

là où il est recouvert de SiO2.

Enfin, en considérant uniquement la partie représentée en pointillés sur la Figure 2.6 (c), on peut voir que l'AlN présente une structure colonnaire avec des désorientations par rapport à la direction de croissance (cf. Figure 2.6 (d)). La couche est très rugueuse et laisse apparaître des creux pouvant atteindre une profondeur de 20 nanomètres. Sur les premiers nanomètres du GaN épitaxié, on remarque la présence de nombreux défauts type dislocations et fautes d'empilement.

Les irrégularités de l'AlN pourraient être responsables des inhomogénéités en termes de formes synthétisées par HVPE (pyramide, pilier) et en termes de tailles des microfils si l'on ne considère que les piliers. [1]

Figure 2.6 - Analyse structurale d'un échantillon de microfils de GaN / AlN / Si.

Une zone très hétérogène de l'échantillon observée par MEB sur le dessus (a) et sur la tranche après une préparation selon la ligne rouge par coupe FIB (b). Des images réalisées par HR-TEM au niveau de l'interface entre un microfil de GaN et le substrat (c) et (d) indiquent une couche d'AlN avec une structure colonnaire, rugueuse et inhomogène en terme d'épaisseur.

GaN AlN Si GaN Si AlN SiO2 (a) (b) (c) (d)

2.1 Présentation des échantillons

Nous noterons que l'étude n'a été réalisée qu'à l'interface entre le pilier et le substrat. Une étude des dislocations et des fautes d'empilement le long du microfil est toujours en cours.

Néanmoins, d'après Vennéguès et al. [19], si une dislocation se rapproche d'une facette inclinée, elle tend à se courber au niveau des surfaces libres du matériau et ne se propage pas le long de l'axe de croissance. Ce mécanisme a été schématisé dans le cas de microfils épitaxiés par MOCVD par Pierre- Marie Coulon [20].Comme observé sur la Figure 2.7, il y a tout d’abord une nucléation des grains de GaN à la surface du substrat (cf. (a)) qui vont par la suite coalescer et engendrer une formation de dislocations (cf. (b)). Ces dernières peuvent se propager et devenir traversantes (cf. (c)). En arrivant vers une facette inclinée, certaines d'entres elles vont se courber vers les surfaces libres du microfil (cf. (d)). Nous noterons que lors de cette étape, de grands îlots peuvent se former par la coalescence de plus petits îlots ; des dislocations traversantes supplémentaires apparaissent alors. Aussi, certaines dislocations peuvent s'annihiler avec d'autres dislocations en formant des boucles de dislocations (cf. (e)). Enfin, les dislocations finissent par se propager sur les surfaces latérales du microfil (cf. (f)) après 100 - 200 nm. Il semblerait alors que, dans les microfils épitaxiés par MOCVD, les dislocations soient surtout présentes dans les premières centaines de nanomètres ; on peut s'attendre au même résultat par HVPE.

Figure 2.7 - Représentation schématique de la création, propagation et courbure de dislocations traversantes par MOCVD. Issue de [20]

La nucléation des grains de GaN à la surface du substrat (a) génère des dislocations aux joints de grains (b). Ces dernières se propagent (c) pour venir se courber au niveau des facettes inclinées (d). Certaines d'entres elles peuvent s'annihiler par formation de boucles de dislocations (e). Finalement, après quelques centaines de nanomètres, la totalité des dislocations va se propager vers la surface libre des microfils.

Concernant les fautes d'empilement basales, cette même étude a montré qu'elles sont présentes soit à la base du microfil soit à l'interface séparant une région dopée d'une région non intentionnellement dopée. Il est aussi mentionné que ces défauts pourraient être liés aux inversions de domaines de polarité. Il en serait de même pour les microfils de GaN épitaxiés par HVPE mais une analyse plus approfondie doit être réalisée.

2.1.3.2 Attaque chimique

L'existence de deux polarités différentes dans les nitrures (cf. paragraphe 1.2.1.1) influe fortement sur la morphologie du matériau [21]–[23]. Elle peut aussi impacter les densités de dislocations et le nombre d'impuretés chimiques [24]–[27]. Tout ceci va contribuer à une modification des propriétés optiques du matériau ; il est donc important de révéler les différents domaines. Une attaque chimique a ainsi été réalisée : les échantillons ont été plongés deux minutes dans une solution aqueuse d'hydroxyde de potassium (KOH) diluée à 35 % à une température de 40°C. Cette solution chimique est connue pour réagir de manière sélective avec les nitrures d'éléments III [28]. Si les facettes sont de polarité gallium, elles restent intactes puisqu'elles sont inertes chimiquement. Par contre, si elles sont de polarité azote, elles seront gravées chimiquement.

D'après la Figure 2.8, on constate que les microfils réalisés par SAG-HVPE présentent une double polarité. Il semblerait que les domaines de polarité métal se situent au centre des microfils tandis que les domaines de polarité azote se situent sur le pourtour. C'est tout le contraire de ce qui est habituellement observé en SAG-MOCVD : globalement c'est le cœur qui est de polarité N et le pourtour de polarité Ga [29], [30]. Des études montrent que la polarité du GaN est fortement dépendante de l'AlN : selon l'épaisseur et les conditions de croissance utilisées pour réaliser cette couche tampon, il est possible de contrôler les polarités [31], [32]. Dans notre cas, l'AlN est de polarité azote alors que le GaN au niveau des ouvertures semble être de polarité métal ; aucun microfil de polarité unique azote n'a en effet été observé. En fonction des particularités de chaque technique, la nucléation sur la couche d'AlN serait de polarité N en SAG-MOCVD et de polarité Ga en SAG-HVPE.

Figure 2.8 - Détermination des domaines de polarité de microfils GaN épitaxiés sur AlN /Si par SAG-HVPE. Les microfils de GaN ont été observés au MEB avant attaque chimique au KOH (a) puis après (b) et (c). Il semble que la polarité Ga (partie chimiquement stable et inerte) se trouve au centre des microfils tandis que la polarité N (partie gravée chimiquement) se situe sur leur pourtour.

(a) (b) (c)

2.1 Présentation des échantillons

Une inversion de domaine se produirait par la suite : dans notre cas, une inversion de la polarité Ga en polarité N est observable. Une étude systématique de la nucléation des microfils de GaN réalisés par SAG-HVPE, que ce soit au niveau de l'AlN ou du masque SiO2, serait alors intéressante et

permettrait de conclure quant aux différences de polarité observées. Toutefois, des éléments de réponse peuvent être apportés, ici encore, par l'étude de Pierre-Marie Coulon [20]. Les inversions de domaine présentes dans ses microfils trouvent leur origine durant les premiers stades de croissance et plus précisément durant les étapes de préparation de surface transformant le saphir en (Al,O)N. Elles se trouvent donc à l'interface entre le substrat et le microfil de GaN. Dans cette thèse [20], un modèle de formation d'inversion de polarité est présenté (cf. Figure 2.9). Durant les premiers stades de nucléation, il y a une nucléation de grains de différentes polarités à la surface du substrat saphir nitruré (cf. (a)). Par la suite, la coalescence de ces grains entraîne l’apparition d’un joint de grain et donc d'une frontière d'inversion de domaines appelée IDB (cf. (b)). Leur orientation dépendent de l’orientation du joint de coalescence ; elles se propageront donc suivant plusieurs directions (cf. (c)). Après 200 à 300 nm, les frontières se stabilisent dans le plan de croissance (10-10) (cf. (d)). Dans notre cas, on pourrait imaginer la croissance d'îlots de polarité gallium au niveau de certaines ouvertures de masque. Aux bords des ouvertures, une inversion de domaines pourrait s'opérer ou non : une frontière entre les domaines apparaitrait suivant différentes courbures et finirait par se propager verticalement. Cela expliquerait le fait que la croissance d'un microfil de polarité N n'a jamais été observée tandis que la présence d'un pourtour de polarité N des microfils de GaN est très souvent retrouvée.

Figure 2.9 - Représentation schématique de l'inversion de domaines de polarité dans des microfils de GaN obtenu par MOVPE sur substrat saphir. Issue de [20]

La nucléation des grains de GaN à la surface du substrat se fait selon les deux domaines de polarités (a). Leurs coalescences forment ensuite des frontières d'inversion de domaines notées IDB (b) qui se propagent suivant différentes configurations (c). Lorsque la croissance verticale est favorisée, ces frontières se courbent après quelques centaines de nanomètres pour se propager verticalement (d).