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Caractérisation de la prolifération des précurseurs adipeux dans un

6. Complexité des préadipocytes

6.2. Caractérisation de la prolifération des précurseurs adipeux dans un

6.2.1. Des précurseurs adipeux rapidement activés suite à un signal nutritionnel

Dans l’hypothèse traditionnelle, des conditions obésogènes mènent à des adipocytes hypertrophiés qui, une fois leur taille maximale atteinte, émettent un signal appelant les précurseurs adipeux à se multiplier afin de faire face à la demande croissante de stockage de triglycérides. Bien que la nature de ce potentiel mécanisme régulateur ne soit pas connue, il a été montré que les facteurs sécrétés par des adipocytes matures peuvent affecter l’adipogenèse [142, 452]. Cependant, le groupe de Rodeheffer évoque une autre hypothèse pour expliquer l’expansion obésogénique. À l’aide de plusieurs expériences, ils sont arrivés à la conclusion que, dans des souris mâles, le pic de prolifération de précurseurs adipeux apparait dans le TAB

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viscéral après 3 jours seulement de régime riche en graisse donc bien avant l’hyperplasie des adipocytes; un autre mécanisme est ainsi soulevé. Afin de caractériser la prolifération des précurseurs adipeux (PA), ils se sont appuyés sur plusieurs résultats [475]. Parmi les modèles utilisés on peut citer un système permettant de tracer les nouveaux adipocytes qui apparaissent grâce à des couleurs de membrane différentes (Ad-cre- ER ;mT/mG), des analyses de cytométrie de flux permettant de suivre l’incorporation de BrdU dans les populations de précurseurs adipeux LIN- CD29+ CD34+ SCA-1+ CD24+/-, un modèle de souris PdgfRα-H2B- GFP afin de suivre in vivo la prolifération des précurseurs adipeux par GFP quantifié par microscopie confocale, et enfin la quantification de l’incorporation de BrdU dans les adipocytes à partir de deux méthodes à savoir la digestion à la collagénase-cytométrie et l’immunohistochimie. L’ensemble mène à la conclusion que, suivant un régime riche en graisse, la prolifération des précurseurs adipeux chez les souris mâles apparaît dans le TAB viscéral après seulement 24 heures, avec un pic à 3 jours, et prend fin une semaine après (la prolifération des précurseurs CD24+ commençant quelques heures avant les CD24-). Ces précurseurs adipeux ne finissent leur différenciation en adipocytes matures que quelques semaines après, laissant supposer une évolution potentielle de ces cellules par différents stades. Cette prolifération ne semble donc pas être dépendante d’un signal provenant d’adipocytes hypertrophiés, puisqu’elle est initiée bien avant. Cela suggère que c’est l’état nutritionnel per se qui est rapidement reconnu par les cellules souches afin d’initier leur prolifération. Or comme précédemment cité, le signal PI3K-AKT2, une des voies impliquées dans la détection des nutriments, a été explorée. Elle se compose d’AKT2 dont la phosphorylation maximale est détectée 3 jours après un régime riche en graisse dans le TAB viscéral ce qui correspond à la prolifération des précurseurs adipeux. De plus l’inhibition de cette voie de manière pharmacologique ou génétique réduit la prolifération des précurseurs adipeux comme observé par incorporation de BrdU suite à un régime riche en graisse mais aussi dans un cas de déficience à la leptine (ob/ob) [475, 685]. Ainsi ces résultats montrent bien que la prolifération des précurseurs intervenant dans l’adipogenèse obésogène peut s’opérer rapidement après induction adipogénique, suite à l’activation de la voie PI3K-AKT2, puis se poursuit sur plusieurs semaines avant d’aboutir à l’adipocyte mature.

6.2.2. Des précurseurs adipeux différemment activés, suite à un signal nutritionnel, selon le dépôt et le genre

La distribution des tissus adipeux et leur régulation sont des éléments à ne pas négliger dans l’expansion du tissu adipeux en contexte obésogène. Différents facteurs comme le sexe et l’âge influencent également cette expansion et sont aussi dépendants d’une régulation fine de divers mécanismes. Parmi ces mécanismes la régulation des précurseurs adipeux pourrait être une étape importante.

Le modèle utilisé dans l’étude de Vishvanath et collaborateurs marque au GFP les cellules sous le promoteur Zfp423, un marqueur préadipocytaire afin d’étudier leur prolifération chez l’adulte dans un contexte

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d’hyperplasie et dépendant du dépôt [612]. Ces cellules ZFP423-GFP+ sont identifiées PDGFRβ+, expriment

PPARγ et les marqueurs SCA1+, CD34+, Pdgfrα+, CD24- et la fréquence de ces précurseurs adipeux

augmente après un régime riche en graisse confirmant ainsi leur identité préadipocytaire. Ce modèle montre que la fréquence des cellules précurseurs ZFP423-GFP+/PDGFRβ+ est plus élevée dans le tissu adipeux viscéral des souris mâles, en basal mais aussi après un régime riche en graisse, ce qui corrobore avec la donnée d’hyperplasie associée au dépôt viscéral mâle dans la littérature [407]. Cette caractéristique n’est pas retrouvée chez les femelles puisque la fréquence des cellules précurseurs est identique entre le tissu adipeux gonadal et inguinal, aussi bien en basal qu’après un régime riche en graisse. L’étude des précurseurs adipeux chez l’adulte à partir du modèle ZFP423-GFP+/PDGFRβ montre que leur prolifération est dépôt, diète et genre dépendante [612]. Ainsi, les hormones sexuelles sembleraient participer à l’activation spécifique des précurseurs adipeux.

La réponse proliférative des précurseurs adipeux associée au tissu adipeux sous-cutané femelle serait due au niveau d’oestrogène observé chez ces dernières [159]. L’étude des précurseurs adipeux selon le dépôt et le sexe a d’abord été suivie in vivo avec le modèle sous le promoteur adiponectine dépendant du tamoxifène et couplé au système mTomato/mGFP (Ad-creER; mTmG). Cette mesure affirme une fois de plus qu’après 8 semaines de régime riche en graisse, les souris mâles montrent de l’adipogenèse dans le tissu adipeux viscéral exclusivement alors que chez les femelles les deux dépôts en présentent. Un résultat qui est retrouvé au niveau de la prolifération des précurseurs adipeux par mesure d’incorporation de BrdU par cytométrie de flux, 1 semaine après traitement et régime.

Puis à partir des mêmes méthodes, l’influence des oestrogènes sur l’activation des précurseurs adipeux du TAB sous-cutané en réponse à un régime riche en graisse a aussi été étudiée. L’ovarectomie entraîne chez les femelles une réduction de la capacité proliférative des précurseurs adipeux dans le TAB sous-cutané et inversement l’injection d’œstrogènes aux mâles induit leur prolifération dans ce même dépôt, ce qui confirme la participation des oestrogènes à ce mécanisme dans ces conditions.

Afin d’approfondir les mécanismes régulant l'activation des précurseurs adipeux spécifiques au dépôt et au sexe, des expériences de transplantations ont été réalisées. Des précurseurs adipeux sont isolés de dépôts de souris tdtomato+ et leur activité est suivie chez les receveurs par incorporation de BrdU après 1 semaine de régime normal ou riche en graisse. Après différentes combinaisons de transplantation, à savoir les précurseurs adipeux isolés du dépôt sous-cutané ou viscéral de mâle tdtomato+ greffés en position sous- cutanée ou viscérale de mâle receveur, les cellules répondent comme le dépôt receveur et non le donneur. Ces résultats indiquent que n’importe quels précurseurs implantés dans un TAB viscéral de souris mâle, sous régime riche en graisse, entreprennent une prolifération. De même, si les précurseurs adipeux isolés du dépôt sous-cutané mâle tdtomato+ sont greffés en position sous-cutanée de femelles receveurs, ceux-ci prolifèrent. Ce résultat montre une influence de l’environnement sur la prolifération des précurseurs indépendamment de

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leur origine. Puis, d’autres expériences complémentent l’analyse en évaluant si la différenciation des précurseurs est aussi dépendante de l’environnement. Elle est réalisée avec des précurseurs adipeux isolés de souris (Leptin-luciferase; mT/mG) dont l’activité luciférase est suivie en basal et après 8 semaines de régime riche en graisse afin de tracer a posteriori les précurseurs initialement transférés. L’apparition d’adipocytes tdtomato+ double confirme le résultat. Ainsi des greffes de précurseurs de TAB sous-cutané mâle luciférase-tdtomato en position TAB sous-cutané ou viscéral de mâle, montre un signal positif (luciférase positif ou adipocytes tdtomato+) en position viscérale uniquement. L’induction de la différenciation est donc elle aussi dépendante de l’environnement [159, 686].

En conclusion, la prolifération des précurseurs adipeux en réponse à un régime riche en graisse est régulée par des facteurs cellulaires extrinsèques présents dans le microenvironnement du dépôt. On peut noter dans le TAB sous-cutané que les niveaux d'œstrogènes influencent la réponse. De plus, le fait que les précurseurs adipeux de différents dépôts soient fonctionnellement interchangeables in vivo suggère que leur destinée définie lors du développement ne détermine pas de manière irréversible leur comportement. Ces cellules restent fonctionnellement plastiques et influencées par leur contexte physiologique. Par conséquence, le lien évident qui existe entre l’adipogenèse dépendant du dépôt, du genre et l’activation des précurseurs adipeux montre l’importance du rôle de la régulation de l’adipogenèse des précurseurs adipeux dans l’expansion obésogénique. Ainsi, des études visant à définir ces signaux régulateurs pourraient amener de nouvelles approches pour contrôler la distribution du tissu adipeux afin de favoriser la croissance du TAB sous-cutané métaboliquement bénéfique au détriment du viscéral nuisible.

6.3. Des différences spatiales pour les précurseurs adipeux