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Nous allons examiner ici les caractéristiques générales de jonctions à cassure fermées en aluminium.

3.2.1 Double saut en champ magnétique

Nous allons expliquer ici l’origine du double saut observé dans les caractéris-tiques en champ magnétique 3.5 et 3.4.

F. 3.6 – Caractéristiques d’une jonction à cassure en champ magnétique. Celle de gauche a été faite à l’état non étiré (1,1K), celle de droite, après avoir étiré légèrement la jonction (0,7K).

La première caractéristique de la figure 3.6 (en rouge) a été réalisée à 1,1K juste après le saut supraconducteur à 1,18K, avant même d’avoir étiré la jonction. La seconde (en vert), mesurée à 0,7K, a été réalisée après que l’on a eu légère-ment étiré la jonction. Les deux grandes différences entre ces deux caractéristiques concernent d’une part un déplacement du champ critique et d’autre part l’amplitude du deuxième saut (celui qui apparaît à plus haut champ). Le déplacement du champ critique est relié tout simplement à la température de mesure des caractéristiques:

plus la température de mesure est basse, plus le champ critique est grand. Nous associons la variation d’amplitude du dernier saut à l’état d’étirement de la jonc-tion. Ainsi le dernier saut correspond en général au pont suspendu de la jonction à cassure et le grand saut qui le précède correspond aux arrivées de courant en alu-minium. Les résistances respectives de ces deux parties distinctes de l’échantillon peuvent être lues sur la figure 3.6. La résistance de la partie centrale de la jonction était de 0,5 Ω avant d’être étirée et de 1,15 Ω après étirement. La résistance des arrivées de courant est de 5,5Ω.

Une dernière comparaison s’impose avec un contact avec peu de canaux, c’est-à-dire pour une jonction étirée. Dans les caractéristiques des figures 3.7 nous ne pouvons distinguer plus qu’un seul saut, attribué au pont suspendu de la jonction.

A B

F. 3.7 – Caractéristiques d’une jonction à cassure en champ magnétique. A A environ 11 G0. B A 2 G0. Comme la résistance des arrivées de courant ne dépasse jamais50 Ω, nous ne voyons plus que le saut correspondant à la partie centrale.

N.B.: Ce type de transition avec plusieurs sauts est aussi observé avec des morceaux d’aluminium polycristallin [Coch 56], eux aussi composés d’entités dis-tinctes.

3.2.2 Température critique

Lors de la détermination de la température critique, nous avons pu observer un léger effet d’hystérésis. Celui-ci était dû, en y regardant de plus près, à la vitesse de refroidissement du cryostat, vitesse beaucoup plus grande que celle du réchauff e-ment. Ainsi le thermomètre mesurait une température différente de celle présente

effectivement au niveau de l’échantillon12. Nous nous limiterons donc aux mesures effectuées lors du réchauffement du cryostat.

Certaines mesures de température nous ont cependant donné lors du réchauf-fement des résultats qualitativement très différents. Dans un premier cas, nous ob-servons un saut de résistance abrupt comme décrit dans la figure 3.8.

F. 3.8 – Pourcentage de la résistance finale en fonction de la température (jonc-tion non étirée) lors du saut supraconducteur en température. Deux mesures à vitesse de réchauffement moyenne pour le même échantillon.

Pourtant si l’on refait ces mesures en diminuant au maximum la vitesse de ré-chauffement, on observe une augmentation progressive de la résistance aux bornes de la jonction, comme décrit par la figure 3.9.

12. Ce décalage en température est relié au temps nécessaire afin de réaliser l’équilibre thermique du système. En effet, le thermomètre est en meilleur contact thermique avec le système que l’échan-tillon, qui lui est "suspendu" pour être déformé. La température du thermomètre est donc stabilisée plus rapidemment que celle de la jonction. Cas extrême: à température stable du thermomètre, pen-dant le refroidissement, le saut supraconducteur arrive environ avec une minute de retard.

F. 3.9 – Pourcentage de la résistance finale (jonction non étirée) en fonction de la température lors du saut supraconducteur en température. Deux mesures effectuées à des vitesses de réchauffement particulièrement lentes pour le même échantillon. Nous déterminons Tcà 50% du saut.

Sur la figure 3.9, on peut considérer que nous avons une augmentation conti-nuelle de la tension jusqu’à 1,182K, et un dernier saut à 1,191K. La structure re-prend probablement partie par partie ses propriétés normales, comme cela est aussi observé dans la section 3.2.1 pour le double saut en champ magnétique. Sachant que la température de transition dans les nanocristaux d’aluminium dépend forte-ment de la taille de ces derniers13(voir [Susu 74a], [Susu 74b] et [O A 69] pour les expériences), différentes tailles de structures pourraient présenter différentsTc. Enfin, nous trouvons dans [Land 90] six expériences avec des températures de transition de l’aluminium bulk allant de 1,175Kà 1,183K. Nos valeurs sont ainsi en accord avec celles reportées dans la littérature.

3.2.3 Saut en courant électrique

Qu’en est-il du courant critique ? Considérons la relation 3.1 qui décrit pour un contact SNS court, la façon dont varie le produitIcRN[Buck 04].

IcRn= 3π 2e ∆2 0(x=0) kBTc d/ξN sinh(d/ξN) (3.1) avecRN la résistance normale,Icle courant critique,dla longueur du domaine conducteur normal,∆0le gap à 0 K,ξNla longueur de cohérence dans le matériau normal.

Dans notre cas nous avons affaire à un contact SS. Cela nous mène à la relation 3.2. lim d→0IcRn= 3π 2e ∆2 0 kBTc (3.2)

Ainsi, en utilisantTc = 1,182 K et∆0 = 185 µeV, nous obtenons pour 3.2

IcRN '1,581·103V.

13. Cet effet est dû aux "nouveaux" modes phononiques prenant en compte la surface et augmentant ainsi le couplage électron-phonon. Pour plus d’informations sur la théorie voir [Leav 81].

F. 3.10 – Saut supraconducteur en courant d’une jonction non étirée. En rouge les courants positifs et en noir les courants négatifs. En vert, un zoom (axe des abscisses en haut) du saut en courant décroissant.

Si l’on applique cela au cas réel de notre échantillon de la figure 3.10 avec un

RN = 2 Ω, notre courant critique BCS devrait être de 0,794 mA. Nous sommes donc respectivement pour l’aller et le retour à 46% et 61% de la valeur théorique pour un supraconducteur de type purement BCS. Tinkham [Tink 96] écrit qu’il est tout à fait possible d’obtenir un courant critique de l’ordre de 10% du courant cri-tique théorique BCS. Notre cryostat nous permet de nous approcher très près de la valeur théorique.

De plus nous voyons une hystérésis pour le saut supraconducteur. Ce saut a lieu au-tour de 0,487 mA pour les courants croissants et auau-tour de 0,368 mA pour les cou-rants décroissants. Cet effet est dû à la température électronique qui est plus grande dans le métal conducteur normal que dans le métal supraconducteur [Cour 08].

Enfin, dans la partie droite de la figure 3.10, nous avons agrandi l’un de ces doubles sauts en courant. Nous pouvons voir ici une marche correspondant pro-bablement aux arrivées de courant, et une autre correspondant à la jonction elle-même, comme décrit en 3.2.1.