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III) Fatima-Zahra Chakrama, Stéphanie Seguin-Py, Jaclyn Nicole Le Grand, Annick

3 LES CANCERS DU SEIN

3.1 Epidémiologie

Le cancer du sein est le cancer féminin le plus fréquent à travers le monde avec environ 1,3 millions de nouveaux cas détectés chaque année dont 50 000 estimés en France depuis une décennie. L’incidence du cancer du sein augmente de façon importante depuis 25 ans en Europe (Botha et al., 2003) et ce type de cancer représentait 13,3% des cas de cancer en 2004 et est à l’origine d’environ 20% des décès par cancer chez la femme (Belot et al., 2008 ; Boyle and Ferlay, 2005 ; Ferlay et al., 2007).

3.2 Facteurs de risque

Plusieurs facteurs de risque, environnementaux, génétiques et comportementaux, sont connus comme favorisant l’émergence des cancers du sein (Clamp et al., 2003 ; Falkenberry and Legare, 2002 ; Korde et al., 2004). Le cancer du sein concerne majoritairement les femmes puisque seulement 1% des hommes présentent cette pathologie. Pour autant, le pronostic vital leur est plus défavorable, le diagnostic étant établi plus tardivement. Le vieillissement est fortement lié à l’apparition du cancer du sein. En effet, il est rare avant 40 ans (10%) mais beaucoup plus fréquent à partir de 50 ans (75%). Parmi les cancers du sein, seulement 5 à 10% sont associés à des facteurs d’origine génétique ; on parle de formes héréditaires ou familiales opposées aux formes sporadiques ou non familiales beaucoup plus répandues. Cette prédisposition génétique est principalement due à des mutations, en particulier des gènes BRCA1, BRCA2 et p53 augmentant considérablement le risque de

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développement d’un cancer du sein (Wooster et al., 1994). Néanmoins, ces mutations sont rares et ne représentent qu’une faible partie de l’ensemble de mortalité par cancer du sein. Les femmes ayant subi une exposition prolongée à des estrogènes d’origine endogène, suite à une puberté précoce (avant 12 ans), une ménopause tardive (après 55 ans) ou une première grossesse tardive (après 30 ans) ou d’origine exogène suite à l’utilisation de contraceptifs oraux ou d’un traitement hormonal substitutif présentent également un risque plus élevé. Parmi ces nombreux facteurs, figurent également des facteurs environnementaux comme les polluants et les perturbateurs endocriniens ainsi que des facteurs comportementaux tels que l’obésité et la consommation excessive d’alcool ou de tabac (Danaei et al., 2005 ; Diamanti- Kandarakis et al., 2009). Enfin, des mastopathies, terme faisant référence à des anomalies du sein souvent bénignes, peuvent accroître le risque de développer un cancer du sein.

3.3 Origine cellulaire des tumeurs

La grande majorité des cancers du sein (95%) sont des adénocarcinomes se développant à partir des cellules épithéliales des canaux et lobules de la glande mammaire, au niveau des Unités Terminales Ductulo-Lobulaires. En fonction de la topographie de la tumeur, on distingue ainsi des cancers canalaires, représentant 80% des tumeurs, et des cancers lobulaires qui prennent naissance à partir des canaux et des lobules respectivement. Lorsque les cellules tumorales restent confinées à l’intérieur d’un canal ou d’un lobule, la lésion est qualifiée d’in

situ (Burstein et al., 2004). En revanche, lorsqu’elles s’infiltrent, à un stade plus avancé, au-

delà du canal ou du lobule par rupture de leur membrane basale, la lésion est qualifiée d’invasive ou infiltrante. Dans ce cas, les cellules tumorales peuvent alors gagner les vaisseaux lymphatiques et sanguins entraînant, par conséquent, la formation de métastases dans différents organes tels que le foie, les poumons, les os ou le cerveau (Polyak, 2007). Les ganglions du lymphocentre axillaire, localisés au niveau de l’aisselle, sont responsables du drainage de 75% de la lymphe du sein. Parmi les carcinomes infiltrants, de nombreux types, autres que les carcinomes lobulaires ou canalaires, existent tels que les carcinomes mucineux, médullaires ou papillaires qui présentent des caractéristiques spécifiques. De plus, la maladie de Paget du mamelon est une forme particulière de cancer du sein caractérisée par une ulcération du mamelon généralement associée à un carcinome mammaire sous-jacent pouvant être de type infiltrant ou canalaire in situ.

D’autres tumeurs beaucoup moins fréquentes (5%), telles que la tumeur phyllode ou le fibroadénome prennent naissance au niveau du tissu conjonctif intralobulaire.

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3.4 Classification

3.4.1 Classification histologique

La classification histologique des cancers du sein a été effectuée en 1981, puis a été mise à jour en 2003, par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (Bocker, 2002 ; Dupont and Page, 1985). En réalité, deux types de classification histologique sont actuellement en vigueur et ne se différencient que par l’appellation des lésions pré-invasives et carcinomes in situ. La classification traditionnelle, encore beaucoup utilisée par les anatomopathologistes, est basée sur la distinction de trois types de lésions, les hyperplasies (simples et atypiques), les carcinomes in situ et les carcinomes infiltrants ou invasifs, évoluant selon un continuum (Polyak, 2007) (Figure 23). Cette « théorie de progression linéaire » est actuellement controversée du fait de la grande hétérogénéité histologique et moléculaire des cancers du sein. Plusieurs études supportent en effet l’existence d’une seconde théorie selon laquelle les carcinomes canalaires in situ de bas grade évolueraient directement en carcinomes canalaires infiltrants de bas grade et les carcinomes in situ de haut grade en carcinomes canalaires infiltrants de haut grade (Wiechmann and Kuerer, 2008).

Figure 23 : Modèle hypothétique de la tumorigenèse mammaire. Les différentes étapes de la progression d’un carcinome canalaire de sein sont représentées. Les canaux normaux sont composés d’une membrane basale et d’une couche de cellules luminales et myoépithéliales. Les cellules du stroma regroupent des leucocytes, des fibroblastes, des myofibroblastes et des cellules endothéliales. Dans le cas de carcinomes in situ, les cellules myoépithéliales sont altérées au niveau génétique et épigéntique et leur nombre décroît. En même temps, le nombre de fibroblastes, de myofibroblastes, de leucocytes et de cellules endothéliales augmente. La diminution du nombre de cellules myoépithéliales et la rupture de la membrane basale sont caractéristiques du carcinome invasif. Dans ce cas, les cellules tumorales peuvent envahir les tissus voisins et peuvent migrer au niveau d’organes plus distants pour former des métastases. Modifié d’après Polyak et collaborateurs (2007).

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Dans la nouvelle terminologie, dite LIN (Lobular Intraepithelial Neoplasia) /DIN (Ductal Intraepithelial Neoplasia), les lésions lobulaires sont divisées en trois grades LIN et les hyperplasies canalaires atypiques et les carcinomes canalaires in situ sont regroupés en trois grades DIN. Les carcinomes infiltrants conservent leur appellation et de nombreux types existent en fonction de leur aspect cytologique. Ainsi, les proliférations épithéliales canalaires sont divisées en six catégories et les proliférations lobulaires en quatre catégories (Tableau III, Tableau IV).

TERMINOLOGIE TRADITIONNELLE NEOPLASIE INTRA-EPITHELIALE DE TYPE