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LE CANCER DU SEIN EN FRANCE

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. On estime à 53.000/an environ, les nouvelles patientes atteintes de cancer du sein invasif (2012).

En augmentation entre 1995 (81,6 pour 100 000 personnes années en 1995 et 90,5 en 2000), sa fréquence s’est stabilisée autour de 99,7 pour 100 000 personnes par an en 2011.

Il atteint un pic chez les femmes de 60-69 ans et dépasse chez elles les 320 pour 100 000 femmes par an.

Son taux de mortalité, stable entre 1984 et 98, a baissé régulièrement ces dernières années passant de 19,8 à 17,2 pour 100 000 personnes par an entre les périodes 1994-2008, soit une baisse de 13 %. La mortalité a été estimée en France à 11.289 en 2012. Cependant , le cancer du sein figure parmi les cancers dont le pronostic est le plus favorable avec une survie relative à 5 ans estimée à plus de 86%.

Cette véritable révolution du pronostic de cette maladie naguère de très grande gravité et surtout très mutilante, résulte des multiples progrès technologiques autant que du dépistage généralisé mis en œuvre chez toutes les femmes de plus de 50 ans, dans de nombreux pays et qui fait porter le diagnostic à un stade plus précoce de la maladie.

L'histoire non romancée de ces progrès mérite d'être rapportée sans entrer dans les trop nombreux détails . Les progrès essentiels réalisés dans le diagnostic de ce cancer seront les premiers décrits.

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.LES AVANCEES DE LA RADIOLOGIE

Elles ont été majeures et font en permanence l'objet de travaux associant ingénieurs et médecins. Toutes les sortes de radiations ont été exploitées pour déceler et caractériser ces tumeurs. Aujourd'hui on peut arriver à mettre en évidence un nodule de 3 millimètres et surtout grâce à l'IRM on peut éviter dans les cas de haut risque, l'exposition excessive aux rayons X.

Les mammographies

La première transformation est venue de la radiologie à rayons X. Alors que la glande mammaire ne semblait pas pouvoir bénéficier des progrès de la radiologie, certains

spécialistes, dont en France le docteur Willemin ont commencé à décrire des anomalies en particulier de la peau, en regard du nodule cancéreux.

Ils ont ensuite montré que les nodules, lorsqu'ils étaient visibles sur les clichés, avaient des prolongements en étoile, en spicules, qui évoquaient bien les pinces de crabe, comparaison classique avec les cancers. Parallèlement on a parfois observé sur les mêmes clichés des petites calcifications irrégulières situées dans un secteur et organisées d’une façon qui ne pouvaient pas être simplement due au hasard.

Enfin l'invention d'appareillages nouveaux réduisant notablement l'exposition aux rayons X (elle a été divisée par 10 !) et donnant des images encore plus nettes, a contribué a la diffusion de la mammographie.

Ainsi l'analyse très attentive des caractéristiques de l'image radiographique du nodule exige parce qu'elle a des conséquences très importantes, que celle-ci soit parfaite ! Elle est depuis quelques mois, facilitée par des progrès techniques de nature purement radiologique telle que la tomosynthèse qui procure une sorte d'image en 3 dimensions. Enfin des logiciels de plus en plus sophistiqués sont venus aider les médecin à porter leur attention sur des zones douteuses.

Cependant les améliorations radiographiques ne s’arrêtaient pas là, une autre découverte, majeure, a simplifié la vie des femmes sévèrement inquiétées par la palpation d'une boule dans leur sein.

L'échographie

Sa découverte, à elle seule, a fait basculer la médecine d'après 1960 dans un monde nouveau ! Cette technique s’est frayé un chemin de plus en plus large dans le traitement des maladies du sein.

Comme on pouvait le prévoir les radiologues purs et durs spécialisés dans l'analyse des mammographies ont commencé par se rire de ces misérables diagnostics réalisés par les échographistes. Puis ils se sont probablement dits qu’après tout il s'agissait aussi de rayons ou d’ondes. Cela restait dans leurs cordes et ils se sont intéressés aux images fournies par les ultra-sons et ont à leur tour enrichi les connaissances des médecins. Indéniablement la mammographie est bien plus utile mais l’écho n’est plus à dédaigner, tant s'en faut, car elle permet dans les bons cas de rassurer immédiatement la femme ! Trois signes se sont détachés :

- plus l'image est régulière, ronde ou elliptique et parallèle aux côtes et moins il y a de risques de cancer,

- A l'inverse, si l’on voit un cône d’ombre après l’image anormale, c'est à dire si le rayon ultrasonore est atténué par la lésion, si l’image sombre a des contours irréguliers et que l’ellipse est perpendiculaire aux côtes, le cancer est vraisemblable20.

20 Il existe différents types de cancers du sein, les adénocarcinomes étant les plus courants (95 %). Les cancers du sein se développent toujours à partir des canaux (cancers canalaires et lobulaires ces derniers tirant leur nom de leur ressemblance avec les lobules -qui sécrètent le lait après l'accouchement. Ils sont dits « in situ » lorsque les cellules cancéreuses sont

Dès lors que l’on avait bien étudié les images mammographiques et échographiques on pouvait classer les lésions par ordre de gravité croissante et décider dans quels cas il devenait licite d’en prélever une partie ou la totalité afin de rassurer complètement la patiente ou au contraire de ne pas laisser évoluer une lésion dangereuse.

Le dépistage (environ 60% des femmes françaises y participent) est devenu de plus en plus efficace. Mais les médecins ont été amenés, devant des images douteuses, à faire de plus en plus de biopsies et le nombre des biopsies négatives a atteint un niveau trop élevé. L'un des défis actuels est la recherche de critères de plus en plus performants de certitude - ou presque - permettant de déclarer que les lésions observées sont malignes ou bénignes. Sur ce point les ordinateurs ont apporté leur puissance de concentration, dans l’analyse des images, la même qui leur fait battre les plus grands champions d’échec.

Les biopsies et les méthodes de prélèvements

Une véritable floraison de techniques a vu le jour en peu d’années : - prélèvement de cellules par simple ponction du nodule à l'aiguille fine,

- microbiopsies avec une aiguille un peu plus grosse, sous repérage stéréotaxique quand la lésion est visible en échographie,

- macrobiopsies retirant une sorte de petite carotte, de réalisation plus compliquée mais procurant davantage d'informations. Le repérage cette fois est radiographique, exécuté surtout lorsqu'existent des microcalcifications non décelables par l'échographie ( la prise de plusieurs images avec des rayonnements X croisés, donnant la quasi certitude que la lésion observée serait dans le tissu prélevé).

Le choix de la méthode à appliquer dépendra autant des caractères du nodule que des habitudes du radiologue.

Ces biopsies permettront dans un nombre de cas non négligeable d’écarter le « spectre du cancer » ! D'un autre côté depuis longtemps les anatomopathologistes avaient décrit diverses sortes de lésions non cancéreuses du sein allant de la simple « mastose dite aujourd'hui mastopathie bénigne » très proche du sein normal, à des lésions complexes appelées, pour ceux qui tiennent au vocabulaire rigoureux, "'hyperplasies atypiques ". Ces lésions exigent une surveillance étroite afin de vérifier qu’elles ne sont pas en train de se transformer en cancer. Ces connaissances ont été alors très largement utilisées parce que souvent le diagnostic n'est ni tout blanc : aucun cancer, ni tout noir : cancer invasif !

ENCADRE

Les critères de gravité

Une fois qu'on lui a annoncé qu'elle souffre d'un cancer du sein, la première question posée par la patiente a toujours été : est-ce une forme grave de cancer ? Puis- je espérer vivre encore assez longtemps, par exemple pour élever mes enfants ou voir grandir mes petits-enfants?

Il est possible aujourd'hui de répondre à partir de bases solides. Car, en même temps que le diagnostic devenait plus rigoureux, des travaux scientifiques de pointe et des suivis de longue durée ont affiné le pronostic, bien que certains très mauvais pronostics se voient parfois heureusement démentis.

1) - Bien entendu plus la lésion était dépistée tôt, c'est à dire était de petite taille quand on en faisait l’ablation et moins on entendait parler de ce cancer dans les années suivantes,

confinées aux canaux et « infiltrants » lorsque les cellules cancéreuses ont envahi les tissus qui les entourent. Dans ce dernier cas, les cellules malignes se propagent éventuellement dans les ganglions situés sous les bras (ganglions axillaires) et dans l'organisme. Le cancer du sein peut survenir aussi chez l'homme, il est sévère, mais il est rare, environ 200 fois moins fréquent que chez la femme.

2) - D’autre part quand les cellules en division étaient rares, on pouvait en conclure à une faible agressivité du cancer. A l’inverse, si la lésion sortait de sa capsule ou si l’on voyait des cellules cancéreuses dans les vaisseaux voisins, on pouvait craindre que cette présence n’annonce la migration de ces cellules malignes dans un autre organe : le squelette , le cerveau le foie, par exemple.

3) - Mais d’autres critères plus élaborés se sont aussi manifestés au fur et à mesure des années. L’un d’entre s’est révélé très fiable : la présence de ce qu’on appelle les récepteurs hormonaux. Le sein, plus personne ne l’ignore? répond aux hormones. Il le fait grâce à ces récepteurs qui permettent aux cellules de recevoir le message véhiculé par l’hormone (on parle volontiers de « messager hormonal »). Si les cellules cancéreuses ont conservé leurs récepteurs c’est qu’elles ne se sont pas trop écartées des cellules normales et qu'elles n'ont pas subi une trop sévère dégénérescence. Et il se trouve en effet qu’un des meilleurs facteurs de bon pronostic d’un cancer du sein est la présence de récepteurs hormonaux en particulier de récepteurs de la progestérone. Peut-être aussi parce que dans ces cas on peut donner à la femme des antihormones qui vont contrarier le développement du cancer.

4) - Enfin un autre marqueur de gravité est plus difficile à expliquer aux non-biologistes: Il y a des gènes qui ont un effet protecteur et d’autres des effets aggravants. Si un gène méchant s’exprime trop fortement c’est le cas d’un gêne appelé ErbB2 ou HER2, le cancer sera plus agressif. De même, si un gêne bienfaisant est affaibli, la protection contre le cancer sera moindre et l’évolution pourrait en être aggravée.

A la fin de ce bilan très complet on peut donc considérer avec une grande vraisemblance que le pronostic est bon ou plus réservé. A ce point, il faut rappeler le chiffre donné par l’Institut du Cancer. Après 5 ans toutes formes confondues, la survie globale des femmes ayant été traitées pour un cancer du sein est de 89,9%. On en conclut facilement que lorsque tous les critères sont favorables la survie est franchment plus longue.

La signification des ganglions dans l'aisselle

On sait depuis des années que les résultats de la chirurgie sont bien meilleurs en termes de survie lorsque le chirurgien, en plus de la lésion située dans le sein, retire tous les ganglions de l’aisselle s'ils sont envahis par le cancer.

Mais cette opération a un prix lourd !

La circulation se fait alors mal dans les vaisseaux lymphatiques du bras qui gonfle pendant des mois sinon des années et reste moins maniable. Or à force d’analyses de dossiers on avait pu remarquer que si les ganglions les plus proches de la lésion, en bas de l'aisselle étaient indemnes, les autres l’étaient aussi et qu’il était alors inutile de pratiquer ce fameux curage axillaire. D'autre part, l'envahissement des ganglions de l'aisselle par de cellules cancéreuses est le facteur le plus important qui implique le recours à la chimiothérapie.

En France à l'occasion du dépistage radiographique proposé gratuitement à toutes les femmes de 50 à 74 ans , la découverte d'un nodule dans le sein peut inciter à étudier par échographie les ganglions dans l'aisselle du même côté.

Cependant dans la majorité des cas, une méthode plus compliquée mais d'une immense utilité, est désormais mise en œuvre pour connaitre l’état des ganglions. On l'a dénommée la

technique du ganglion sentinelle. Elle n'est pas simple à vulgariser mais le sujet est assez important pour tenter de la décrire.

Le principe de cet examen consiste dans l’injection dans le sein, en regard de la tumeur d'un colorant (le bleu patenté) et d'une substance radioactive, cette double injection ayant pour objectif de réduire le risque de faux négatif. Ces substances s’écouleront dans les vaisseaux lymphatiques qui se dirigent vers les ganglions axillaires les plus proches du cancer c'est à dire les plus bas de l'aisselle en général. Ceux-ci seront localisés à l'aide d'un compteur Geiger par exemple. Ce compteur sera à nouveau utilisé en cours d'intervention pour une localisation

fine des ganglions et en fin d'opération afin d'acquérir la certitude qu'ils ont bien été retirés (absence de toute radioactivité après leur ablation). Si une étude histologique faite sur le champ, montre qu'ils sont indemnes, aucun geste complémentaire ne sera effectué et la patiente échappera sans risque à la cascade de soucis décrite plus haut. S’ils contiennent des cellules malignes, le curage retirant tous les ganglions sera réalisé.

Les avancées technologiques dans la recherchte des cancers du sein.

Personne, à part les médecins les plus spécialisés, ne peut imaginer avec quelle ténacité les chercheurs s'impliquent tous les jours dans l'invention de méthodes de diagnostic des maladies du sein. Dès avant les années 2000, les ingénieurs et les médecins de culture scientifique se sont acharnés sans réserve à mettre au point de nouvelles méthodes permettant de distinguer entre nodules bénins et malins. Un nombre impressionnant d'études sont menées dans le monde pour apprécier l'efficacité de techniques capables de découvrir des nodules ou des microcalcifications. Et les avancées les plus spectaculaires se font vers l'utilisation de 2 ou 3 méthodes couplées.

On commence, grâce à la tomosynthèse à analyser les avantages de la mammographie 3D.

L'échographie a également été réalisée en cours d'intervention, la sonde étant appliquée au contact même de la tumeur. Cette méthode semble avoir le gros avantage de préciser les limites exactes du nodule, ce qui permet à la fois d'éviter les ré-opérations, nécessaires dans les cas où une partie de la tumeur avait été laissée en place, et en même temps de réduire le volume du tissu retiré.

L'échographie a également été couplée à l'ordinateur pour donner des images de

"tomographie à ultrasons". D'autre part, mettant en application les constatations faites depuis des années par les gynécologues, ils ont associé aux ultrasons des pressions bien définies sur le sein au niveau du nodule. Ainsi l'élastographie objective les caractères des nodules

cancéreux : ceux-ci sont durs et adhèrent aux tissus voisins. Si, en écrasant sous échographie, le nodule on observe qu'il ne se déforme que modérément et qu'il se déplace peu parce qu'attaché aux tissus qui l'entourent, le diagnostic penche vers le cancer.

Les descriptions suivantes n'ont de chances d'être comprises que par des ingénieurs ou des passionnés de physique, elles ne seront pas du tout détaillées :

- en associant plusieurs méthodes mises en œuvre par le même appareil par exemple ultrasons et rayons lumineux, ou ultrasons et chaleur émise, ou captation de produits radioactifs

témoignant d'une forte activité cellulaire, on accroit la fiabilité des résultats.

- Le PET (Positron Emission Tomography) scan décèle des lésions métastatiques qu'aucune autre méthode ne met en évidence.

- L'injection de Tc MIBI couplée à la mammographie fait passer le taux de détection des cancers de 27 à 90%.

La liste des méthodes utilisées s'allonge tous les ans et on pourra peut-être un jour acquérir une certitude sur la bénignité ou la /malignité de la lésion avant d'avoir passé le bistouri sur le sein malade. Déjà en 2014 on commence à reconnaitre les cellules malignes dans un

prélèvement de sang circulant et à partir de ces cellules connaitre le génome du cancer sans avoir besoin de le biopsier !

Mais si ces méthode appartiennent encore au domaine de la recherche, on peut affirmer que l'Imagerie par Résonance Magnétique du sein a fait des progrès foudroyants. Une injection de substance de contraste qui sera captée par la tumeur permet de juger de sa vascularisation, c'est-à-dire, selon la vitesse de sa captation et de son élimination, de la rapidité de la

multiplication des cellules tumorales. L'IRM a ainsi pris en quelques années une place de tout premier plan grâce à la possibilité qu'elle offre, sans risques d' irradiation X, de découvrir des nodules invisibles à la mammographie et évidemment non palpables.

En partie grâce à ces travaux et en partie à des études purement cliniques et microscopiques, un sérieux problème a été résolu, (quoiqu'il persiste encore des zones de doute), c'est celui de la conduite à tenir devant les nodules et microcalcifications décelées par la mammographie.

Toutefois une notion assez préoccupante pour le budget de la sécurité sociale car l'IRM est coûteuse, est aujourd'hui indiscutable : c'est qu'il peut être dangereux de se rassurer devant la négativité de l'association classique mammographie + échographie, car il n'est pas rare que l'IRM en particulier ainsi que d'autres explorations, mettent en évidence un cancer qui avait été méconnu par le doublet !