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Calibration numérique du suivi de potentiel électrique

I. Bibliographie

I.6. Suivi de la propagation de fissure par le potentiel électrique

I.6.4 Calibration numérique du suivi de potentiel électrique

La méthode de calibration que l’on retrouve communément dans la littérature est la calibration de type numérique. En effet, elle présente de nombreux avantages qui expliquent la prééminence du numérique par rapport aux autres techniques. Ainsi, elle peut s’appliquer à toutes les géométries d’éprouvettes contrairement aux méthodes analytiques qui sont limitées à quelques cas particuliers. D’autre part, la mise en œuvre d’une calibration numérique est relativement aisée et peu coûteuse comparée aux techniques analogiques évoquées précédemment.

I.6.4.1 Exemples de calibration numérique dans la littérature

Ritchie et Bath (Ritchie and Bathe, 1979) proposent une calibration numérique du suivi de potentiel électrique pour des géométries d’éprouvettes de type CT et SEN. Les deux types d’éprouvettes sont modélisés en 2D à l’aide d’éléments iso paramétriques à nombre de nœuds variables. Le nombre d’éléments est augmenté près des entailles afin d’améliorer la précision

57 des résultats pour les fissures courtes. Les auteurs comparent ensuite les solutions obtenues numériquement pour la CT et le SEN à des résultats issus de la littérature. Les solutions associées aux éprouvettes CT sont comparées à des calibrations expérimentales et celles associées aux éprouvettes SEN à des calibrations expérimentales, analogiques et analytiques. Dans les deux cas, la calibration numérique est en bon accord avec les autres types de calibration (figure I.32).

Figure I.32 – Comparaisons des résultats numériques aux résultats expérimentaux, analogiques et analytiques issus de la littérature (Ritchie and Bathe, 1979)

D’autres auteurs, Gandossi et al. (Gandossi et al., 2001), mettent également en œuvre une calibration numérique de la méthode DCPD. Dans leurs travaux, le choix d’une calibration numérique permet notamment de pallier les problèmes de géométries complexes des composants considérés (cylindre creux à parois épaisses et section de tube). L’outil numérique est par ailleurs utilisé afin d’optimiser la méthode de suivi du potentiel, notamment la position des sondes.

Le matériau étudié est un acier inoxydable austénitique de type 316L soumis à de la fatigue thermique et du fluage. L’étude est réalisée à partir de cylindres creux comportant une entaille externe centrale sur toute la circonférence. L’entaille a pour vocation d’engendrer l’amorçage de fissures. Des sondes de potentiel sont positionnées de part et d’autre de l’entaille tout autour du cylindre en respectant un espacement de 60° entre les sondes. Des modèles numériques 2D et 3D sont réalisés à l’aide du code de calcul Abaqus® afin d’établir des courbes de calibration de la méthode DCPD dans le cas du chargement en fatigue thermique. Les symétries du problème permettent de ne modéliser qu’un quart de la pièce. Des éléments linéaires à 4 et 8 nœuds associés aux calculs électrique et thermique (DC2-D4 et DC3-D8) sont utilisés respectivement pour les modèles 2D et 3D. Le nombre d’éléments est augmenté autour et dans le sillage de l’entaille (figure I.33).

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Figure I.33 – Illustration du modèle numérique 3D (Gandossi et al., 2001)

Pour le modèle 3D, des courbes de calibration sont réalisées en différents points sur la circonférence du quart de pièce modélisé. Pour chacune des calibrations, une vingtaine de calculs sont effectués en faisant varier la profondeur de fissure. Les résultats ainsi obtenus sont ensuite comparés à la courbe expérimentale construite à partir de plusieurs séries d’essais menées sur les pièces en 316L équipées des sondes de potentiel précédemment décrites. La comparaison entre les prédictions numériques et les données expérimentales est effectuée sur la figure I.34. Les données expérimentales corrèlent bien avec la courbe de calibration issue du modèle 3D. Par contre, la courbe associée au modèle numérique 2D surestime la profondeur de fissure de 15 à 30%. L’analogie électrique conduit également à une surestimation. L’auteur tente de plus une approche analytique basée sur la formule de Johnson (Johnson, 1965). Les résultats s’avèrent légèrement meilleurs que ceux obtenus à partir du modèle 2D, toutefois, la profondeur de fissure demeure surestimée.

59 La non correspondance des courbes de calibration peut avoir des origines multiples. Doremus (Doremus, 2014) a étudié finement les paramètres influant sur les résultats numériques. Les résultats de ses travaux sont décrits dans les sous chapitres suivants qui répertorient les paramètres en deux catégories : ceux ayant une influence faible à limitée et ceux ayant une forte influence.

I.6.4.2 Paramètres présentant une influence limitée

Le maillage peut légèrement affecter la différence de potentiel estimée. En effet, la taille des éléments en pointe de fissure a une influence, mais dans le cas étudié par Doremus, une taille d’éléments (DC3D4E) de 0,4 mm en pointe de fissure semble suffisante pour atteindre une stabilisation. L’auteur considère le résultat comme stable quand la différence entre les mesures n’excède pas 1,5%. Par ailleurs, la taille des éléments au niveau des « sondes » n’influence pas particulièrement la mesure de potentiel, ainsi, une maille grossière de 1 mm à cet endroit est suffisante.

La surface des points de mesure (estimée à 100 µm de rayon par Doremus, ce qui correspond à deux fois le rayon des fils de potentiel qu’il a utilisés) n’a que peu d’impact puisqu’une variation de ce rayon de 100 à 800 µm n’entraine qu’une variation de 2% sur la mesure du potentiel. L’influence de la forme de la surface de mesure n’a cependant pas été étudiée. En effet, elle est considérée circulaire alors que dans la réalité, l’écrasement du fil donne plutôt lieu à des formes de type elliptique.

Enfin, la position des points d’introduction du courant peut également affecter la mesure de potentiel. C’est pourquoi ces derniers doivent être suffisamment éloignés du plan de propagation afin de ne pas perturber le potentiel dans cette zone. Dans le cadre de la configuration de Doremus, une distance de 6 mm est suffisante. Cette distance dépend néanmoins de la taille de la zone d’introduction du courant, plus cette dernière est importante plus elle aura de l’influence et par conséquent plus les points d’introduction du courant devront être éloignés (figure I.35).

60 I.6.4.3 Paramètres considérés comme influents

La géométrie de l’éprouvette peut affecter significativement la mesure du potentiel électrique. Par ailleurs, les anomalies de surface modifient sensiblement le potentiel de référence et par conséquent la courbe de calibration associée. Selon certains travaux (Ritchie and Bathe, 1979), la modélisation de l’anomalie par une simple fissure de profondeur équivalente ne conduit pas aux bons résultats il y a donc une nécessité de modéliser la géométrie réelle du défaut.

La position des points de mesure joue également un rôle important sur la sensibilité de la mesure. Un positionnement idéal des sondes de potentiel doit allier une sensibilité maximale à une bonne précision et reproductibilité. Doremus (Doremus et al., 2015), a étudié l’influence de la position des points de mesure et a montré que la sensibilité est accrue lorsque l’on rapproche les points de mesure de la fissure (figure I.36). Toutefois un léger décalage vertical (diminution ou augmentation de la distance entre les points de mesure) peut aussi engendrer une erreur non négligeable, 15% sur des fissures longues (> 3 mm) dans le cas d’un décalage de l’ordre de 100 µm (Doremus et al., 2015). Gandossi (Gandossi et al., 2001) évalue également l’influence d’un décalage de la position des sondes sur la prédiction de la profondeur de fissure. Il montre, dans sa configuration d’étude, qu’une déviation de plus ou moins 1 mm de la position des sondes par rapport à l’écartement de référence de 10 mm entraine au maximum une erreur légèrement inférieure à 10%. Notons par ailleurs que la dissymétrie de positionnement des sondes ainsi que leur décalage horizontal ne modifient que très peu la mesure.

Figure I.36 – Influence de la position des points de mesure et de la forme du front de fissure (Doremus et al., 2015)

D’autre part, la forme du front de fissure peut revêtir une influence significative sur l’évolution du potentiel. Pour une même profondeur, des rapports c/a différents (c étant le demi grand axe de l’ellipse formée par le front de fissure et a la profondeur de cette dernière – cf. Figure I.36) donneront lieu à des potentiels différents. Plus la surface fissurée est élevée, plus elle occasionne une grande différence de potentiel. Pour une même surface fissurée, ce sont les rapports c/a les plus faibles (profondeur>demi-longueur) qui engendrent les plus grandes différences de potentiel.

61 Le tableau I.4 récapitule le rôle des différents paramètres influençant la mesure de potentiel :

Paramètres Influence

Position des points de mesure Importante

Géométrie de l’éprouvette Forte

Forme du front de fissure Moyenne

Maillage Faible

Surface des points de mesure Faible

Points d’introduction du courant Faible

Dissymétrie des points de mesure Négligeable

Tableau I.4 – Récapitulatif de l’influence de paramètres clés sur le suivi de potentiel électrique