• Aucun résultat trouvé

1.4 Transport optimal d’une onde de matière

1.4.2 Calcul quantique du transport

Hypothèses. Nous considérons dans la suite une particule unique de masse m, piégée dans un potentiel harmonique à une dimension de pulsation ω0, dont le centre xcest déplacé au cours du temps. Les résultats obtenus seront donc applicable à un condensat sans interaction, où tous les atomes par-tagent la même fonction d’onde. En revanche, le cas d’un condensat dans le

z b A b B d t ˙xc T /2 T 0 2T0 4T0 0.1 T A/d (a) (b)

Figure 1.15 – Transport optimal dans le cas d’un aller simple. (a) À gauche :

profils de vitesse ; à droite : amplitude d’oscillations correspondantes. Le profil en pointillé est le profil de Blackman-Haris. (b) Visualisation du mouvement d’une particule dans l’espace des phases lié au centre du piège, dans le cas d’un transport optimal en deux périodes d’oscillation T0 avec le profil en triangle.

régime de Thomas-Fermi n’est pas contenu dans notre traitement, et néces-sitera l’utilisation d’un formalisme plus élaboré comme par exemple celui de l’équation de Gross-Pitaevskii dépendant du temps [48].

Le hamiltonien du système s’écrit : ˆ

H(t) = 2mˆp2 +122

0[ˆx − xc(t)]2 , (1.31) où ˆx et ˆp sont les opérateurs position et impulsion de la particule. On no-tera |ϕni les états propres du hamiltonien de l’oscillateur harmonique fixe

ˆ

H0 = ˆp2/2m + mω2

0ˆx2/2. Le problème consiste donc à résoudre l’équation de Schrödinger suivante :

i~Ψ(x, t)

∂t = ˆH(t)Ψ(x, t) . (1.32)

Une telle équation n’est en général pas soluble analytiquement. Nous présen-tons ici une méthode originale qui permet de la résoudre pour notre problème particulier ; nous démontrons par là même que l’oscillateur harmonique forcé en mécanique quantique est soluble exactement !

Solution exacte. Pour l’établir, nous allons effectuer un changement de référentiel quantique, en nous plaçant dans le référentiel de la particule clas-sique soumise au même hamiltonien. En notant ˜x(t) la position de cette particule classique, ce changement consiste à utiliser la fonction d’onde sui-vante :

Φ(X, t) = Ψ(x, t)e−i

~mX ˙˜x , (1.33)

où X = x − ˜x est la coordonnée relative à la particule classique et où on a opéré une translation de la quantité de mouvement classique m ˙˜x. On établit alors l’équation vérifiée par Φ(X, t) :

i~Φ ∂t = − ~2m2 2Φ ∂X2 +122 0X2Φ + " −m˙˜x2 2 +1202(˜x − xc)2 # Φ . (1.34)

Le dernier terme peut être éliminé au moyen du changement de variable suivant :

˜Φ(X, t) = Φ(x, t)e−i ~

´t

0dt0L(t0) , (1.35) où l’on a introduit le lagrangien classique :

L(t) = 12m ˙˜x21

202(˜x − xc)2 . (1.36) Finalement, on obtient que la fonction d’onde ˜Φ évolue sous l’effet du ha-miltonien indépendant du temps de l’oscillateur harmonique ˆH0, et que la solution de l’équation (1.32) s’écrit :

Ψ(x, t) = ˜Φ(X, t)ei ~mX ˙˜xei

~

´t

Application au transport optimal. On suppose maintenant que la par-ticule est initialement dans l’état fondamental du hamiltonien ˆH0 :

Ψ(x, 0) = ˜Φ(X, 0) = ϕ0(X) . (1.38) L’évolution de ˜Φ en fonction du temps est triviale et s’écrit :

˜Φ(X, t) = ϕ0(X)e−i

~E0t , (1.39)

où E0 est l’énergie du fondamental de ˆH0. L’état final du système après un déplacement du piège d’une manière arbitraire en un temps T s’écrit :

Ψ(x, T ) = eiχ(T )ei

~˜pT(x−˜xT)ϕ

0(x − ˜xT) , (1.40) où ˜xT et ˜pT sont la position et l’impulsion finale de la particule classique ayant subi le même mouvement, et où la fonction χ(T ) est définie par :

χ(T ) = −E0T ~ +1

~ ˆ T

0 dt0L(t0) . (1.41) On remarque donc qu’un transport optimal au sens classique, tel que ˜xT = xc(T ) et ˜pT = 0, est aussi optimal au sens quantique : une particule initiale-ment dans l’état fondainitiale-mental du piège termine son mouveinitiale-ment dans l’état fondamental du piège déplacé !

Conclusion

Nous avons montré dans ce chapitre qu’il nous est possible de manipuler un gaz d’atomes froids avec une pince optique dérivée d’un laser fibré émet-tant un rayonnement de longueur d’onde 1,072 µm. Nous avons constaté la présence de pertes inélastiques à deux corps assistées par la lumière, heu-reusement relativement peu importantes (la durée de vie est d’une seconde lorsque I ∼ 2 MW/cm2 et n0∼1012at/cm3).

Nous avons ainsi pu réaliser des expériences de transport de paquets d’atomes, et montré comment il était possible de déplacer de manière opti-male un nuage confiné dans un piège harmonique sur des durées de l’ordre de la période d’oscillation. Nous avons également vérifié que la durée de vie est meilleure dans la chambre annexe, hors du flux d’atomes chauds. La stratégie consistant à capturer les atomes puis les transporter dans la chambre annexe (après un pré-refroidissement et une recompression) semble donc prometteuse pour bénéficier d’un accès optique et mécanique excellent et atteindre le régime de dégénérescence quantique.

Il est aussi possible en principe de transporter de manière optimale un condensat de Bose-Einstein ; toutefois, un tel objet est extrêmement sen-sible aux perturbations, et son transport nécessite des précautions impor-tantes (en particulier pour éviter les vibrations), contrairement au transport

d’atomes chauds [41]. Par ailleurs, nous avons vérifié que les nuages obtenus après transport sont compatibles avec la réalisation de condensat de Bose-Einstein, en utilisant un second faisceau dipolaire croisé au niveau du col du premier (cf chapitre2). Transporter le nuage thermique avant refroidis-sement paraît donc être la meilleure stratégie pour obtenir des condensats avec un grand nombre d’atomes.

En revanche, l’utilisation d’un faisceau unique ne nous a pas permis d’atteindre le régime de dégénérescence quantique. Après évaporation, nous avons pu obtenir des nuages dont la densité dans l’espace des phases s’ap-proche de 10−3, et comportant environ 106 atomes à 2 µK. Nous pouvons par contre atteindre des densités élevées, de l’ordre de 2×1013at/cm3, en recomprimant les nuages après un pré-refroidissement : cette pince optique constitue donc a priori un outil très intéressant pour l’étude de la diffusion multiple de photons dans une vapeur atomique, comme celle effectuée au sein du groupe atomes froids de l’institut non-linéaire de Nice14, qui né-cessite des densités supérieures à λ−30 ' 2×1012cm−3, avec λ0 la longueur d’onde des photons, soit 780 nm dans le cas du87Rb.

Réalisation d’un condensat

de Bose-Einstein avec un

piège dipolaire croisé

Le dispositif expérimental présenté au chapitre 1, très simple à mettre en œuvre, puisqu’il ne nécessite qu’un seul faisceau intense pour réaliser le piège dipolaire, nous a permis de préparer des paquets d’atomes à des tem-pératures de l’ordre du microkelvin. Cependant, il présente une limitation importante : nous n’avons pas réussi à atteindre le régime de dégénérescence quantique par ce biais, en raison de la faible fréquence de piégeage longi-tudinale (cf §1.2.6). Pour contourner le problème, il faut donc fournir un meilleur confinement longitudinal. Plusieurs stratégies sont envisageables :

• l’utilisation d’une longueur d’onde plus grande pour le faisceau dipo-laire, avec par exemple un laser à CO2 [49]. En effet, la fréquence de piégeage longitudinale est proportionnelle à la longueur d’onde, et celle-ci est dix fois plus grande pour un laser à CO2 que pour notre la-ser à ytterbium. Cependant, cette méthode aurait nécessité une refonte totale de notre dispositif ;

• l’utilisation de bobines pour produire un champ magnétique créant un potentiel confinant dans la direction longitudinale. On peut par exemple utiliser deux bobines en configuration anti-Helmholtz, dont l’axe est colinéaire au faisceau de piégeage, pour créer un tel potentiel au voisinage du centre du système. La simplicité de cette configura-tion la rend attractive, mais elle présente l’inconvénient de ne piéger qu’une espèce Zeeman (mF = +1 pour cette configuration de champ magnétique) ;

• l’utilisation d’un deuxième faisceau de piégeage croisé avec le pre-mier [26, 49, 50, 51, 52, 53, 54]. C’est cette méthode que nous avons retenue. Elle présente l’avantage de piéger toutes les espèces Zeeman, et de conserver le champ magnétique comme un moyen de contrôle

sup-Figure 2.1 – Vue d’ensemble du dispositif expérimental.

plémentaire, ce qui s’avèrera très utile pour contrôler l’état interne des condensats (cf chapitre3) et pour extraire des lasers à atomes guidés (cf chapitre4). Pour des raisons techniques, nos faisceaux sont croisés à 45° dans un plan vertical, l’un des deux faisceaux étant horizontal (voir figure2.1).

Dans ce chapitre, après avoir rappelé quelques résultats concernant la transition de Bose-Einstein et déterminé les caractéristiques théoriques de notre piège dipolaire croisé, nous donnerons les détails du dispositif expéri-mental puis nous présenterons les caractéristiques des condensats que nous avons obtenus.

2.1 Considérations théoriques préliminaires

Avant de détailler le dispositif expérimental et les méthodes employées pour réaliser un condensat de Bose-Einstein, il convient de rappeler quelques résultats théoriques préliminaires. Nous donnerons quelques précisions sur la transition de Bose-Einstein, puis nous caractériserons le piège constitué de deux faisceaux dipolaires croisés à 45° ; enfin, nous présenterons un modèle simplifié de refroidissement évaporatif dans un piège dipolaire.