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Boule en mouvement uniforme dans un fluide

1.3 Exercices

2.2.2 Boule en mouvement uniforme dans un fluide

Il existe de nombreuses situations en hydrodynamique qui se ramènent à l’étude de fluides parfaits et incompressibles. Souvent l’écoulement est sta-tionnaire et irrotationnel, de sorte que le champ de vitesseu(r)est tel que

×u=0.

Il dérive donc d’un potentielφ, c’est-à-direu(r) =∇φ(r). L’équation tradui-sant l’incompressibilité du fluide,

·u(r) = 0, implique alors l’équation de Laplace

Δφ(r) = 0. (2.87)

Précisons les C.L. que φ(r)doit satisfaire à la frontière ∂D du domaine où se trouve le fluide. Une partie ∂DP de cette frontière, peut être constituée d’une paroi délimitant un matériau imperméable au fluide. Sur cette paroi, la vitesse u(r) est nécessairement tangente à la paroi, comme indiqué sur la figure 2.11, de sorte que les C.L. s’écrivent

n·u(r) = 0pourr∈∂DP

nest le vecteur normal à la paroi, orienté du fluide vers le matériau exté-rieur. En général, la paroi∂DP n’est pas fermée, comme par exemple pour le segment de tuyau représenté sur la figure 2.12. Il faut alors la compléter par une surface fictive∂DF, sur laquelle la composante normale de la vitesse doit être connue, de telle sorte que∂D=∂DP∪∂DF soit fermée. Le potentiel des vitessesφ(r)est alors la solution de l’équation de Laplace sans sources (2.87) avec des C.L. de type Neumann

n·∇φ(r) =N(r)pourr∈∂D. (2.88)

u n

∂DP

D

Fig.2.11 –La vitesseudu fluide est tangente à la paroi∂DP.

∂DP

∂DP

∂DF D ∂DF+

Fig.2.12 –Dans cet exemple d’écoulement dans un tuyau, la paroi cylindrique∂DP

est complétée par deux parois fictives ∂DF± de telle manière que la surface totale

∂D=∂DP∪∂DF+∪∂DF soit fermée.

La fonction de bord N(r), qui est une donnée du problème, satisfait à la

contrainte

D

dΣN(r) = 0, induite par la conservation de la matière.

Analogie avec la supraconductivité. La situation précédente est sem-blable à celle d’un matériau dans la phase supraconductrice, soumis à un champ magnétique de norme inférieure au champ critique. On observe alors l’effet Meissner, que nous pouvons résumer simplement de la façon suivante : les lignes de champ magnétique ne pénètrent pas dans le matériau, et le champ magnétique total y est identiquement nul 18. En vertu des conditions de rac-cordement du champ magnétique à la surface de séparation de deux milieux, la

18. Il apparaît donc un effet d’écran du champ magnétique, qu’on peut décrire phéno-ménologiquement en attribuant au supraconducteur une susceptibilité diamagnétique égale à −1. Nous renvoyons le lecteur aux ouvrages mentionnés dans les notes bibliographiques pour une description détaillée de la supraconductivité.

composante normale à la paroi supraconductrice est nulle. Les lignes de champ magnétique sont donc tangentes à la surface du supraconducteur. Le champ magnétiqueBà l’extérieur du supraconducteur satisfait les mêmes équations que le champ de vitesse u précédent, à savoir ·B = 0 et ×B =0 en supposant l’absence de densité de courant dans le domaine considéré. Les C.L.

sont de type Neumann homogène sur la paroi du supraconducteur.

Boule en mouvement uniforme. Nous allons étudier comme exemple une boule immergée dans un fluide parfait et incompressible. Supposons qu’un opérateur extérieur impose à la boule un mouvement rectiligne uniforme à la vitesse constante V. Ce mouvement induit un écoulement dans le fluide initialement au repos. Il est commode de raisonner dans le référentiel galiléen lié à la boule, car le champ de vitesse du fluide, qu’on notera toujoursu, y est stationnaire en régime irrotationnel (voir figure 2.13). Dans la pratique, pour un fluide réel, ce régime ne sera observé que si la vitesse Vest suffisamment faible, de sorte qu’aucune turbulence n’apparaisse dans le sillage de la boule.

Dans son référentiel, la boule est au repos, et elle voit un écoulement dont la vitesse est −Và l’infini. Notons que ce problème est semblable à celui d’une sphère supraconductrice soumise à un champ magnétique extérieur uniforme.

Étude et résolution

La paroi est ici formée par la sphère SR = ∂DP de rayon R. Elle est complétée par une très grande sphère dont on fera tendre le rayon vers l’infini, et nous noterons dans cette limite S =∂DF. La frontière du domaine est donc ici ∂D = SR∪S. Compte tenu de la géométrie du problème, nous utilisons les coordonnées sphériques indiquées sur la figure 2.13. Les C.L. de Neumann (2.88) s’écrivent alors

n·φ= 0 sur SR et n·φ=−V cosθ sur S. Pour la suite, il est judicieux de décomposer φ(r)comme

φ(r) =−V rcosθ+ψ(r),

où le premier terme donne le champ de vitesse constantu0(r) =−Vde l’écou-lement en l’absence de boule. Le champ ψ(r) satisfait également l’équation de Laplace

Δψ(r) = 0, avec les C.L. de Neumann

n·∇ψ=−V cosθ sur SR et n·∇ψ= 0 sur S. (2.89) Passons à la détermination de ψ(r). Comme expliqué dans la première partie de ce chapitre, il n’existe pas de fonction de Green de Neumann ho-mogène du Laplacien. Plutôt que d’introduire les fonctions de Green de Neu-mann spéciales, qui ne sont de toute façon pas aisément accessibles, il est bien

plus efficace de travailler avec l’équation intégrale (2.40), p. 82, pour ψ(r), construite avec la fonction de Green G du système infini. Ici, comme au-cune sourceρn’est présente, les seules intégrales à considérer sont à prendre sur les surfaces SR et S. En fait, le champ ψ(r)décroissant à l’infini suffi-samment rapidement, ce qui sera vérifié a posteriori, la contribution de S est nulle. Il vient alors, en tenant compte de la condition de bord surSR,

ψ(r) =−V

SR

G(|rr|) cosθ+

SR

ψ(r)n·rG(|rr|), (2.90) avecG(|rr|) = 1/(4π|rr|). Nous allons résoudre cette équation intégrale en utilisant la décomposition de 1/|rr| en polynômes de Legendre, et en exploitant l’indépendance deψ(r) =ψ(r, θ)dans l’angleϕ, conséquence de la symétrie cylindrique du système.

Calcul des intégrales de surface. Considérons la première intégrale dans l’expression (2.90), analogue au potentiel électrostatique créé par une distri-bution de charge surfacique, et qu’on note dorénavant ψc(r). Introduisons la décomposition

1

|rr| = 1 r

+

n=0

R r

n

Pn(cosθ)Pn(cosθ) + 2

n m=1

(n−m)!

(n+m)!Pnm(cosθ)Pnm(cosθ) cos(m(ϕ−ϕ))

(2.91)

S

SR

θ n

V

z

Fig.2.13 –Boule de rayonR(délimitée par la sphèreSR) se déplaçant à la vitesse constante V selon l’axe desz dans un fluide. La surface S est une paroi fictive sphérique à l’infini.

pour r ∈SR, où Pn sont les polynômes de Legendre et Pnm les fonctions de donne zéro. Par ailleurs, comme cosθ = P1(cosθ), l’intégration en cosθ sur [−1,1] est immé-diate en vertu de l’othogonalité deP1 etPn pourn= 1.

Commentaire 2.2.2. La rela-tion (2.91) provient de la décomposi-tion de la foncdécomposi-tion de GreenG(|r r) = 1/(4π|rr|) en harmoniques sphériques, avecr=R < r. Elle peut être facilement obtenue à partir du ré-sultat (2.128), p. 132 de l’exercice 2.8.

Par ailleurs, l’annexe G contient des rappels sur les polynômes de Legendre.

Il vient finalement

ψc(r) =−V R3

3r2 cosθ. (2.92)

Pour effectuer simplement la seconde intégrale, notée désormais ψd(r), remarquons que celle-ci est analogue au potentiel électrostatique créé par une distribution surfacique de dipôle, comme déjà commenté dans la sec-tion 2.1.3. Il est alors particulièrement avantageux de concevoir chaque dipôle élémentaire strictement localisé comme la limite d’un dipôle étendu suivantn, constitué de deux charges superficielles opposées,i.e.:

n ·rG(|rr|) = lim

δ0+(2δ)1

G(|rr+δn|)−G(|rr−δn|) . En insérant cette identité dans l’expression de ψd(r), nous obtenons

ψd(r) =R2 lim Chacune de ces intégrales, pour une valeur finie de δ, est du même type que celle définissantψc(r), et elle est donc aisément calculée par la même méthode basée sur la décomposition (2.91). Après passage à la limite δ → 0+, nous trouvons

Résolution de l’équation intégrale. En remplaçant ψc(r) et ψd(r) par les formules respectives (2.92) et (2.93) dans

ψ(r) =ψc(r) +ψd(r),

nous obtenons une expression valable de ψ(r) en tout point r du domaine, qui ne dépend que de ψ(R,cosθ)sur la surface SR. Nous en déduisons une expression analogue pour ∇ψ. Son insertion dans la condition de bord n·

ψ=−V cosθ enr=R, permet de déterminer la décomposition unique de ψ(R,cosθ) sur la base orthogonale des Pn(cosθ). En utilisant de nouveau P1(cosθ) = cosθ, nous trouvons

ψ(R,cosθ) =−V R 2 cosθ .

La formule (2.93) de ψd(r)ne contient alors plus que le terme n= 1, ce qui donne en définitive

ψ(r, θ) =−V R3cosθ

2r2 . (2.94)

Nous vérifions que le potentielψ(r)décroît bien suffisamment vite à l’infini, ce qui justifiea posterioril’omission de la contribution de la surface fictiveS dans la formule (2.90). Notons queψ(r)présente une structure dipolaire ana-logue à celle du potentiel électrostatique créé par une distribution de charge localisée de type dipôle.

Le champ de vitesse dans le référentiel lié à la boule est finalement obtenu en injectant la formule (2.94) dans

u(r) =V+ψ(r).

Il est représenté sur la figure 2.14. Pour la sphère supraconductrice soumise à l’application d’un faible champ magnétique homogène, on retrouve les lignes de champ magnétique caractéristiques de l’effet Meissner.

Interprétation

Cet exemple illustre bien l’intérêt de la fonction de Green du système infini pour la résolution de problèmes avec des bord. Comme cette fonction de Green est proportionnelle au potentiel de Coulomb créé par une charge ponctuelle dans le vide, les contributions surfaciques admettent des interpré-tations électrostatiques très fructueuses. Cela dit, dans le cas présent sans source ρ(r) = 0, une résolution directe de l’équation de Laplace, sans utili-ser des fonctions de Green, est également possible comme brièvement décrit ci-dessous.

Fig.2.14 –Champ de vitesse du fluide dans le référentiel lié à la boule.

Résolution par décomposition en harmoniques sphériques. Le champψ(r), solution de l’équation de Laplace, est une fonction harmonique.

De plus, il ne dépend que deret deθ, par suite de la symétrie cylindrique du problème. Sa forme la plus générale peut donc s’écrire comme une combinaison linéaire infinie d’harmoniques sphériques19

ψ(r, θ) =

+

l=0

(Alrl+Blrl1)Pl(cosθ).

La condition de bord à l’infini impose Al = 0 pour tout l = 0. Comme la vitesse est le gradient de ψ, nous pouvons fixer la constante A0 = 0. La condition de bord surSR s’écrit alors

l

(l+ 1)BlRl2Pl(cosθ) =−V cosθ .

Comme les Pl forment une base orthogonale, et comme P1(cosθ) = cosθ, il vient Bl = 0 pour tout l = 1 et B1 = −V R3/2. On retrouve alors bien l’expression (2.94) de ψ(r) obtenue précédemment. Dans les deux méthodes présentées, les propriétés des polynômes de Legendre Pl(cosθ)constituent la clé de la résolution explicite du problème.

2.2.3 Densité d’états d’une particule quantique