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Objectifs scientifiques de la thèse

3. Bioindicateurs et indices biotiques

- Le rapport isotopique de l’azote δ15N : de la même manière, le δ15N de la MOP va dépendre de la source d’azote lorsqu’elle est dominée par des organismes autotrophes (Aravena et al. 1993) (Figure 1.3). Le δ15N de la MOP a également tendance à augmenter lorsque la MOP est colonisée par des bactéries hétérotrophes ou lors de bloom de zooplancton (Kendall et al. 2008).

Figure 1.3 : Signature isotopique du δ15N lorsque la MOP est dominée par le phytoplancton Cependant, les rapport isotopiques de l’azote et du carbone de la MOP reflètent une composition moyenne entre les différentes sources qui peut rendre difficile l’interprétation des résultats en fonction des sources potentielles de MOP (Canuel 2001).

• des biomarqueurs :

Les biomarqueurs tels que les acides gras, les alcanes linéaires ou les acides aminés (Hedges et al. 1994, Galois et al. 1996, Canuel 2001, Hernandez et al. 2001, David et al. 2006) même s’ils ne reflètent pas l’intégralité des composants de la MOP, offrent certains avantages : ils sont sensibles (détectables à de faibles concentrations), et leur réactivité géochimiques permettant de connaitre à la fois leur origine et leur labilité donc leur biodisponibilité (Canuel 2001).

3. Bioindicateurs et indices biotiques

Des organismes vivants appartenant à une ou plusieurs populations peuvent être utilisés pour évaluer et surveiller la qualité des eaux d’un milieu. Les perturbations de type chimiques, physiologiques ou comportementales pour une espèce ou un groupe d’espèces indiquent une modification de la qualité des eaux au sein de leur écosystème : on parle de bioindicateurs (basée sur 1 espèce) ou d’indices biotiques (basés sur un groupe d’espèces). Ces indices peuvent être classés selon leur objectif :

Les indices d’évaluation de la qualité du substrat :

Ces indices sont basés sur la structure des peuplements des communautés benthiques (richesse spécifique, abondance, biomasse, appartenance à des groupes écologiques ou

34 trophiques…). De par la longévité, la sédentarité et la dynamique des populations des espèces, la macrofaune benthique intègre les variations à long terme liées à la perturbation anthropique des écosystèmes (Glemarec & Hily 1981). Ces indices ont été particulièrement développés en milieu côtier semi-fermé.

Les indices biotiques de la macrofaune benthique les plus classiquement utilisés sont : - L’IBGN (Indice Biologique Global Normalisé) issu des travaux de Verneaux (1982), il est basé sur l’inventaire des macro-invertébrés benthiques. Il regroupe des taxons bioindicateurs polluo-sensibles (Plécoptères), ou polluo-résistants (Chironomes). Utilisé depuis plus de 10 ans, il est parfaitement intégré au programme imposé par la DCE. Cependant, il ne contient qu’une information assez pauvre nécessitant d’être complétée (Roche et al. 2005).

- L’AMBI (Azti Marine Biotic Index, Borja (Borja et al. 2000, Borja et al. 2003), fondé sur la distribution de chaque espèce en 5 groupes : (i) groupe 1 : espèces sensibles à l’enrichissement en matière organique et à la présence de polluant (carnivores sélectifs et déposivores), (ii) groupe 2 : espèces indifférentes à l’enrichissement en MO, présentes en faibles densités (suspensivores, carnivores non sélectifs), (iii) groupe 3 : espèces tolérantes à un excès en MO (déposivores, spinoïdes), (iv) groupe 4 : espèces opportunistes présentes dans des conditions variables de l’environnement et (v) groupe 5 : espèces opportunistes présentes dans des conditions très variables de l’environnement. L’appartenance aux différentes classes est définie selon la liste proposée par l’Azti (institut espagnol équivalent à l’IFREMER). Un coefficient biotique (BC) est calculé à partir de la proportion des différents groupes dans un échantillon. Cet indice est compris entre 0 et 7 (0 : condition normale et 7 : condition très polluée);

- Le BENTIX (Biological Benthic Index, (Simboura & Zenetos 2002), il s’agit d’une version simplifiée de l’AMBI comprenant 2 classes (sensible ou tolérante) ;

- Le RBI (Relative Benthic Index) (Anderson et al. 2001), basé sur des catégories taxonomiques, crustacés, mollusques et des espèces négatives (tolérantes à une pollution) et positives (sensibles à une pollution) déduites des catégories de l’Azti ;

- Le BQI (Benthic Quality Index, (Rosenberg et al. 2004), cette méthode repose sur le calcul de la valeur de tolérance à une pollution de chaque espèce à partir d’un indice de diversité (ES51) qui représente la probabilité du nombre d’espèces dans un échantillon théorique de 50 individus ;

- Le BOPA (Benthic Opportunistic Polychaetes / Amphipods ratio) (Dauvin & Ruellet 2007). Il est basé sur la comparaison de la fréquence de polychètes dit opportunistes (base sur

35 la liste de l’Azti) par rapport à celle des amphipodes, sensibles à différentes pollutions (métaux, hydrocarbures, accroissement du taux de matière organique…).

Les indices d’évaluation du statut trophique de l’eau (évaluation de l’eutrophisation du système) :

Ces indices sont focalisés pour la plupart sur le compartiment phytoplanctonique des eaux. Comme les conditions physiques ne permettent pas le développement d’une production phytoplanctonique en hiver, ces indices sont utilisés en période « productive » puisque le phytoplancton peut se développer. Les pressions anthropiques sur le milieu et leurs conséquences peuvent alors être évaluées à cette période (Daniel 2004).Ils peuvent être basés soit :

(i) sur la biomasse phytoplanctonique au travers de la concentration en chlorophylle a en calculant la moyenne, la médiane ou le percentile 90 (P90 prenant en compte les valeurs de concentrations moyennes en chlorophylle a exceptées les valeurs extrêmes) sur la période productive (Daniel 2004)

(ii) sur des taxa. Les diatomées étant considérées comme les algues les plus sensibles à l’état trophique de l’eau, de nombreux indicateurs ont été construits sur leur recensement que ce soit en milieu marin (Indicateur rapport (non-diatomées/diatomées) ou indicateur rapport (dinoflagellés/diatomée)(Daniel 2004) ou en eau douce (Indice Biologique Diatomée IBD)(Coste et al. 2009). L’IBD, utilisé dans le cadre du Seq-Bio (cf Introduction), est uniquement basé sur les communautés de diatomées et définit des classes de qualité selon l’assemblage des différentes espèces et leur sensibilité aux pollutions (Coste et al. 2009). (iii) sur la fréquence des blooms. Un bloom est défini comme une efflorescence dont la concentration est supérieure à 105 cellules/l (Daniel 2004). Les indices proposés sont définis comme étant le nombre de bloom supérieur à 105 cellules/l en fonction de la fréquence d’échantillonnage (Daniel 2004). Ils sont basés soit sur les concentrations en chlorophylle, soit sur l’abondance des espèces.

Les indices hydroclimatiques :

Ces indices sont basés sur les organismes planctoniques car ils intègrent rapidement les perturbations du milieu de par leur cycle de vie court (Beaugrand 2005).

36 - Indices basés sur l’abondance d’une espèce : ces indices sont basés sur l’abondance d’une espèce caractéristique de conditions particulières du milieu. Par exemple, en mer Baltique, les forçages climatiques dus à l’état de l’oscillation Nord Atlantique impactent la production du copépode Calanus finmarchicus (Beaugrand 2005)

- Indice basés sur des attributs fonctionnels d’une ou plusieurs espèces selon les variations hydroclimatiques du milieu :

(i) Par exemple, en mer Baltique, à partir des années 80, une augmentation de la diversité des copépodes Calanoïdes coïncidant avec une diminution de la taille des femelles Calanoïdes a été observée. Ces observations ont été mises en relation avec des épisodes de grand froid entre 1978 et 1982 (Edwards et al. 2002) suggérant un changement de régime dans la mer du Nord pouvant affecter la structure de l’écosystème.

(ii) De récents travaux sur les groupes fonctionnels des dinoflagellés et des diatomées proposent de regrouper les espèces phytoplanctoniques en trois stratégies (C-S-R, Figure 1.4) (Smayda & Reynolds 2001) définies grâce à deux attributs fonctionnels : le ratio Surface/Volume (S/V) et la dimension linéaire maximale des cellules. Les espèces à stratégies C seraient de petite taille et à croissance rapide et domineraient dans les milieux stratifiés à fortes concentrations en nutriments. Les stratégies R seraient caractérisées par un fort ratio S/V leur permettant de se développer dans un milieu turbulent à fortes concentrations en nutriments. Enfin, les stratégies S seraient représentées par des espèces de grande taille à croissance lente pouvant survivre dans des eaux oligotrophes. Ces dernières développeraient la mixotrophie ou des migrations verticales pour subvenir à leurs besoins nutritifs. Le diagramme C-R-S a été appliqué sur les dinoflagellés marins (Smayda & Reynolds 2001, 2003), les diatomées marines et d’eau douce (Kruk et al. 2002, Reynolds et al. 2002, Alves-de-Souza et al. 2008) et sur les communautés phytoplanctoniques d’eau douce (Kruk et al. 2002). Leurs conclusions montrent que les dinoflagellés se répartissent le long de ces trois stratégies, alors que les diatomées sont inféodées à la stratégie R. Le modèle C-R-S a permis de définir des schémas d’habitat selon un gradient onshore-offshore et la latitude en milieu marin (Smayda & Reynolds 2001) et des schémas d’habitat selon la profondeur, la quantité de nutriment (eutrophe, mésotrophe et oligotrophe), la saison et la latitude en lac (Reynolds et al. 2002). Ainsi, Smayda et Reynolds (Smayda & Reynolds 2001) expliquent les successions des communautés phytoplanctoniques dans les lacs tempérés (mise en place de la stratification verticale, diminution des nutriments en été…) grâce à ces schémas.

37 Figure 1.4 : Distribution du phytoplancton selon les stratégies C-R-S. La partie gauche montre la répartition des espèces selon le ratio S/V et le produit de la dimension linéaire maximale et du S/V. Les liens pointillés indiquent les limites entre les trois stratégies. La partie droite est une échelle graphique représentant les diatomées formant un gradient croissant des dimensions cellulaires et décroissant du ratio S/V dans la partie R. D’après Alves-de-Souza (Alves-de-Souza et al. 2008)

Les indices du fonctionnement du réseau trophique planctonique en milieu côtier

Tous les écosystèmes sont caractérisés par une production primaire et un transfert de matière organique des organismes autotrophes vers les organismes hétérotrophes dépendant des paramètres environnementaux et notamment de la nature des eaux. A la base du réseau trophique pélagique, le plancton et les flux de matière existants entre les compartiments planctoniques vont conditionner en grande partie le fonctionnement de l’écosystème : source de production primaire, exportation vers le benthos ou les écosystèmes connexes, efficacité trophique vers les maillons supérieurs (Legendre & Rassoulzadegan 1995, Dupuy 1999, Sintes et al. 2004, Leguerrier 2005, Marquis et al. 2007). Des indices du fonctionnement du réseau trophique planctonique peuvent ainsi donner une idée des propriétés émergentes d’un écosystème (efficacité écotrophique, exportation, recyclage…).

En milieu marin et côtier, deux modèles opposés de transferts de matière organique ont été mis en évidence au niveau du plancton (Figure 1.5):

(1) la chaîne herbivore (Cushing, 1989) où la production primaire est caractérisée par du phytoplancton de grande taille (> 5µm) favorisant le développement de consommateurs primaires zooplanctoniques de grande taille à leur tour consommés par des juvéniles de poissons. La chaine herbivore implique donc 3 maillons trophiques et donc une forte efficacité

38 écotrophique (peu de maillon trophique donc faible perte de matière et d’énergie par la respiration), mais aussi une forte exportation de matière due à la forte production phytoplanctonique de grande taille.

(2) La boucle microbienne (Rassoulzadegan 1993) où la production primaire est caractérisée par du phytoplancton de petite taille (< 5µm) consommé par du zooplancton de petite taille (flagellés). Ces microorganismes relarguent de la matière organique dissoute et de l’ammonium exploités par les bactéries. Ces bactéries sont consommées également par le microzooplancton, à son tour consommé par le zooplancton de grande taille, lui-même exploité par les juvéniles de poisson. Dans ce système presque clos, le phytoplancton et les bactéries rentrent en compétition pour l’utilisation de l’ammonium. La boucle microbienne implique donc au minimum 5 maillons trophiques. Le nombre de maillon trophique de la boucle microbienne étant plus important que celui de la chaîne herbivore, ce réseau trophique a une efficacité écotrophique faible pour une même production de base. En revanche, le recyclage de la matière y est plus important.

Figure 1.5 : Les deux types de réseau trophique en milieu côtier : chaîne herbivore (1) et boucle microbienne (2)

Par comparaison avec une chaine herbivore (conditions non limitantes), la boucle microbienne mis en place en conditions limitantes (sels nutritifs limitant) est caractérisée par une reminéralisation plus importante dans la colonne d’eau (MOD et ammonium réexploités par les microorganismes) (Michaels & Silver 1988) et donc une exportation plus faible, et une

39 efficacité écotrophique inférieure (multiplicité des maillons trophiques et perte de matière et d’énergie à chaque niveau).

Dans les écosystèmes marins, Legendre et Rassoulzadegan (1995) ont défini un continuum de 4 types de réseaux trophiques avec deux situations intermédiaires stables (réseaux multivore et microbien) entre ces deux systèmes instables (chaîne herbivore et boucle microbienne) (Figure 6). Le réseau multivore met en avant un fonctionnement mixte entre chaîne herbivore et boucle microbienne, enclenchée par la reminéralisation de l’ammonium excrété par le zooplancton dans une chaîne herbivore. Le réseau microbien présente un fonctionnement comparable à la boucle microbienne mais avec des apports d’azote organique dissous (due principalement à l’excrétion du phytoplancton) utilisés par les bactéries réduisant la compétition bactéries-phytoplancton pour l’ammonium.

Figure 1.6 : Le continuum de réseaux trophiques planctoniques définis par Legendre et Rassoulzadegan (1995) : Chaîne herbivore (A), Réseau multivore (B), Réseau microbien (C) et boucle microbienne (D)

Six rapports interconnectés ont été définis comme reflétant le statut du type de réseau trophique planctonique en place dans un écosystème : la valeur de ces rapports serait minimale pour une chaîne herbivore et maximale pour une boucle microbienne.

• Ammonium / Nitrate dans l’environnement

(A)

(B)

(D)