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1.2 Présentation du site

1.2.2.3 Bilan historiographique

L’ancienne église de Saint-André-des-Eaux a retenu l’attention des érudits locaux depuis le milieu du XIXe siècle. Deux points forts ressortent de ces travaux : le caractère relativement ancien de l’édifice et

l’intérêt qu’offrent ses décors peints.

Le site est mentionné dans le dictionnaire de J. Ogée en 185396. Cet auteur date les baies hautes de

l’église du XIIIe siècle et donne la transcription de l’inscription épigraphique du porche. L’église apparaît

ensuite dans l’ouvrage que Benjamin Jollivet consacre à la description historique et géographique du département97. Celui-ci reprend les informations de J. Ogée et date également l’édifice du XIIIe siècle.

L’église est ensuite citée par Joachim Gaultier du Mottay, dans un article consacré au répertoire archéologique du département des Côtes-du-Nord. Pour ce dernier, l’ensemble de l’édifice accuse une « haute antiquité », sans que l’auteur apporte plus de précisions98.

Le vicomte H. Frotier de la Messelière réalisa, à partir de 1913, un travail plus important sur l’édifice, publié en 1924 dans la revue La Bretagne Touristique99. Son article s’accompagne d’une série de dessin à

l’encre, de sa main, représentant différentes vues de l’église avant et après son abandon, ainsi que des détails de ses peintures murales (fig. 7-9). Le vicomte s’attarde sur la description des décorations peintes et souligne l’importance d’une Crucifixion qui figurait alors encore au sud de l’arc triomphal. Il attribue cette œuvre à un primitif qui selon lui aurait fait école en Bretagne, « au moins jusqu’au XVe

siècle »

100.

Parallèlement aux recherches du vicomte de la Messelière, le musée des Monuments français fait exécuter en 1916 des copies aquarellées de cette Crucifixion et d’autres éléments des décors peints, ainsi qu’une série de photographies et un plan (fig. 10-15, 18-19, 22-24).

En 1939, R. Couffon propose une datation de la fin du XIe siècle pour l’église de Saint-André-des-

Eaux101. Cette datation haute est encore reculée en 1958 par R. Grand, qui consacre une notice au site

dans son ouvrage de synthèse sur l’art roman de la péninsule102. En effet, selon lui : « L’aspect général du

monument, son appareil, le détail de ses baies, l’absence de contreforts, le soin apporté à sa confection,

le caractère de sa première décoration intérieure, tout porte à attribuer sa construction à une date qui ne

peut être postérieure au X

e

siècle »

103. Cet auteur revient également sur la description des décorations

peintes. Il distingue à cet effet quatre enduits successifs, dont le premier, sur lequel figure un décor géométrique, serait, selon lui, carolingien et le troisième, où apparaît la Crucifixion, datable des Xe - XIe

siècles.

Au-delà des études strictement régionales, l’église a le mérite d’être signalée en 1945 dans l’enquête que Camille Duprat consacre à la peinture murale romane104, puis en 1951 dans l’ouvrage de

95 Voir Dossier relatif au classement de l’ancienne église de Saint-André-des-Eaux, DRAC Bretagne. 96 Ogée 1853, 2, p. 696-697, article « Saint-André-des-Eaux ».

97 Jollivet 1859, p. 163. 98 Gaultier du Mottay 1884, p. 415. 99 Frotier de la Messelière 1924. 100Ibid. 101 Couffon 1939, p. 226-227. 102 Grand 1958, p. 423. 103Ibid. 104 Duprat1945, p. 150.

33 P. Deschamps et M. Thibout sur la peinture romane en France105. L’ancienne église de Saint-André-des-

Eaux est également évoquée en 1970 dans l’ouvrage de référence d’Otto Demus,

La peinture murale

romane

106. Le monument est alors systématiquement mentionné pour la

Crucifixion. C. Duprat la

rattache à « la grande famille des peintures romanes de l’Ouest ». Pour P. Deschamps et M. Thibout, il s’agit d’une œuvre singulière, n’offrant aucune comparaison et qu’ils estiment devoir attribuer au XIIe

siècle, sans certitude, tandis qu’O. Demus, lui trouve un caractère « ancien et primitif ». Paul Thoby, dans son ouvrage sur le Crucifix des origines au concile de Trente, attribue également la Crucifixion au XIIe siècle107.

Bien qu’il fasse parti des « monuments non retenus », l’édifice est tout de même brièvement mentionné en 1987 par Ph. Guigon dans

Le paysage monumental de la France autour de l’an mil

108,

puis, en 1993, dans son ouvrage sur l’architecture préromane en Bretagne109. Cet auteur date l’église du

milieu du XIe siècle au plus haut.

Une étude plus exhaustive est due à M. Déceneux, dont les recherches sur Saint-André-des-Eaux sont exposées dans son livre sur l’art roman en Bretagne110 et ont fait l’objet d’un article paru dans la revue Ar

Men en 2001

111. L’auteur dresse un plan plus précis de l’édifice et revient longuement sur ses

caractéristiques architecturales et ses décorations peintes. Il propose également un essai de reconstitution de certaines parties du premier décor. Selon lui, la construction de l’église et ses premiers revêtements muraux dateraient de la fin de la première moitié du XIe siècle. M. Déceneux est le premier à

véritablement argumenter sa proposition de datation. En effet, il pose la comparaison avec les églises de Tréfumel et du Quiou et propose d’inscrire leur édification dans un vaste mouvement d’équipement religieux du nord de la paroisse primitive de Plouasne, dont font alors partie ces trois communes et dont l’initiative pourrait revenir, selon lui, à Guirmharoc, le seigneur du lieu, dont on sait qu’il établi un prieuré à Saint-Pern vers 1050. Cette datation est confortée selon l’auteur par l’analyse de ce qu’il considère être le premier décor mural de l’église, dont les procédés décoratifs renverraient aux appareillages archaïques du premier art roman. De plus, il estime que la précision du plan et la rigueur dans l’exécution des maçonneries seraient redevables à l’intervention d’opérateurs confirmés, laissant entrevoir une action monastique. M. Déceneux revoit également la datation de la

Crucifixion, qu’il

propose de placer à la fin du XIIe siècle ou au début du XIIIe siècle, par analogie avec d’autres œuvres du

même type (crucifixions de Saint-Jacques-des-Guérets dans le Loir-et-Cher et de Notre-Dame de Montmorillon dans la Vienne).

105 Deschamps & Thibout 1951, p. 132. 106 Demus 1970, p. 69.

107 Thoby 1959, p. 117-118.

108 Barral i Altet dir.1987, p. 243-244. 109 Guigon 1993, p. 13-14.

110 Déceneux1998, p. 47-48, 117 et 119. 111 Déceneux 2001.

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RÉSULTATS DE LOPÉRATION