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LA CONSTRUCTION DU CONCEPT DE BAIN D’INFORMATION

4- Le dirigeant, comme chef et comme homme

5.1 CE QUE SONT LES BIAIS

5.1.1 L’analyse de la rationalité limitée

5.1.1.1. S’arrêter à la première solution satisfaisante

5.1.1.1.1 Une situation objective trop complexe

Selon la théorie de la rationalité limitée, la situation objective est beaucoup trop complexe pour être saisie dans tous ses détails par un individu. Alors, chacun ne recherche pas la solution optimale, comme le prétend la théorie de la rationalité totale, mais s’arrête à la première solution satisfaisante qui cadre avec un schéma de référence. Ainsi le milieu organisationnel et social dans lequel se trouve la personne qui prend une décision, détermine les conséquences auxquels elle s’attendra, celle à laquelle elle ne s’attendra pas, les

possibilités de choix qu’elle prendra en considération, et celles qu’elle laissera de côté (Simon, March, 1958).

Selon les théoriciens de la rationalité limitée, cela implique des caractéristiques fondamentales du comportement.

D’une part, l’individu construit un schéma de la situation réelle, appelé définition de la situation. Le choix est toujours exercé au regard de ce schéma simplifié, limité et approximatif de la situation réelle.

D’autre part, les éléments de la définition ne sont pas des données mais le produit de

processus psychologique et sociologique, comprenant les activités propres de son milieu et

celles des autres dans son milieu.

5.1.1.1.2 La boite à outil cognitive

Les théoriciens de la rationalité limitée construisent un modèle qui part des principes posés par la théorie du traitement de l’information, c’est-à-dire la découverte que l’individu ne dispose que d’une capacité de mémoire limitée pour traiter des informations nouvelles.

Les théoriciens de la rationalité limitée mettent en œuvre également les découvertes de la psychologie, et le rôle des croyances. Le cerveau posséderait ainsi une boîte à outils de stratégies cognitives mettant en relation le monde extérieur et des modèles internes, qui donne une valeur à des critères et la multiplie par l’importance accordée à cette valeur. Ce qui signifie que le cerveau dispose d’un nombre limité de mécanismes d’appropriation (Berthoz, 2004).

5.1.1.2 Le rôle du schéma de référence

5.1.1.2.1 Au centre de la théorie : le schéma de référence

Au centre de la théorie de la rationalité limitée, dans notre perspective d’appropriation de l’information par les dirigeants, se trouve un postulat : le dirigeant, comme tous les individus, ne dispose que d’une capacité limitée à traiter l’information, d’autant plus qu’il est confronté

à de très nombreux stimuli, produits tout à la fois, comme nous l’avons vu, par le sous– système d’acquisition de l’information organisationnelle et par le sous-système personnel d’acquisition de l’information. D’autant plus qu’il est confronté à des informations multiples, contradictoires et détenues par de nombreux acteurs. Les dirigeants, encore plus que les autres individus, ne peuvent traiter cette masse considérable d’informations. Aussi, ils ne recherchent pas la solution optimale et s’arrêtent à la première solution satisfaisante qui cadre avec leurs schémas de référence. Toute la question réside donc dans la définition et le rôle du schéma de référence.

5.1.1.2.2 Définition du schéma de référence

Le schéma de référence d’un individu – et donc d’un dirigeant – est défini par le comportement interne de cet individu et par les influences externes qu’ils reçoit (March, Simon, 1958). Ces influences sont appelés des biais cognitifs. Ils définissent le processus d’appropriation d’information par un dirigeant. En effet, on peut se demander si le dirigeant ne construit pas parfois son agenda décisionnel dans le but d’accorder plus ou moins d’importance et d’attention à certaines préoccupations. Ils géreraient ainsi leurs priorités en fonction des biais cognitifs (Drucker-Godard, 1998).

5.1.2 Que sont les biais ?

5.1.2.1 Les biais sont issus de facteurs personnels et organisationnels

5.1.2.1.1 L’interaction des facteurs personnels et organisationnels

Les biais cognitifs sont les facteurs qui influencent les représentations mentales, et donc le traitement de l’information (Calori, 1993). Ce sont des facteurs personnels : les acquis physiologiques, l’expérience individuelle et la formation, le style cognitif de l’individu, le système de valeurs personnelles. Ils interagissent avec des facteurs issus de l’entreprise.

La coalition dominante : formée autour du dirigeant, à partir le plus souvent d’une formation

ou d’une expérience commune, la coalition dominante peut avoir développé un paradigme qui influence l’interprétation d’environnement.

La taille de l’entreprise : plus les champs d’entreprise sont étendus plus ils complexifient les

représentations mentales du dirigeant.

Le degré de complexité intrinsèque de l’environnement : il influence la structure cognitive

des dirigeants d’entreprise.

5.1.2.1.2 Les principaux biais

Quels sont les principaux biais qui influent sur l’appropriation d’information par un dirigeant ? Le décideur peut être victime de multiples billets cognitifs qui conduisent à des fautes de raisonnement, notamment en situation de changements rapides. Ainsi, un dirigeant est attaché au jugement initial. Il est peu sensible à l’information ouverte et divergente. Il généralise abusivement à partir de situations passées, d’essais et d’expérience. Il ne va pas utiliser toute l’information disponible. Les signes de bouleversements imminents sont minimisés voire ignorés (Bescos, 1999).

5.1.2.2 les effets des biais

5.1.2.2.1 Les effets du groupe

Pour un dirigeant, les principaux effets des biais émanent des pressions des sous-groupes sociaux ou professionnels et affectent les objectifs des individus qui s’identifient au groupe (March, Simon, 1958).

ƒ Plus l’identification au groupe est forte, plus forte est la pression du groupe.

ƒ La force des pressions du groupe augmente en même temps qu’augmente l’uniformité de l’opinion du groupe.

ƒ Force des pressions du groupe augmente lorsque augmente le niveau de contrôle du groupe sur l’environnement de l’individu.

ƒ Plus grande sera la cohésion du groupe plus grande sera l’uniformité de l’opinion.

ƒ Une augmentation de l’uniformité de l’opinion a pour résultat une augmentation de la cohésion du groupe, c’est-à-dire l’identification au groupe.

ƒ L’identification d’autres personnes avec le groupe affecte la force de la pression du groupe sur l’individu.

ƒ Plus forte est l’identification de l’individu au groupe, plus il est vraisemblable que ses objectifs se conformeront à sa perception des normes du groupe.

ƒ Plus grand sera le prestige perçu du groupe plus forte sera la tendance d’un individu à s’identifier à lui

ƒ Plus large sont les limites dans lesquelles les objectifs sont perçus comme partagés par les membres d’un groupe plus forte sera la tendance de l’individu à s’identifier au groupe.

ƒ Plus fréquente sera l’interaction entre un individu et les membres d’un groupe plus forte sera la tendance de l’individu à s’identifier au groupe ƒ Plus forte est l’identification, plus grande est l’interaction

ƒ Plus grand sera le nombre des besoins individuels satisfaits dans le groupe plus grande sera la tendance de l’individu à s’identifier au groupe

ƒ Plus faible sera la quantité de compétition existant entre les membres d’un groupe et un individus, plus forte sera la tendance de l’individu à s’identifier au groupe.

5.1.2.2.2 Les effets des convictions

Dans ce contexte, les biais cognitifs influencent largement les convictions des dirigeants, lesquelles fondent l’appropriation de l’information. Les convictions présentes dans l’organisation résultent du fonctionnement de sa mémoire. Cette mémoire organisationnelle varie selon les parties de l’organisation et des personnes concernées. Le développement des convictions est fonction de la structure préexistante des connaissances des réseaux de confiance et d’amitié des acteurs et du statut des participants. Les convictions sont très sensibles au détail du calendrier à l’ordre temporel au contexte de l’information (Cohen, March, 1974).