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Autotests

Dans le document THESE UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE (Page 38-46)

C. Tests possibles pour le dépistage du VIH

3. Autotests

Désormais, suite à un arrêté du 9 novembre 2010 fixant les conditions de réalisation des TROD, en plus de situations d’urgence, ils peuvent être proposés par les médecins dans

leur cabinet libéral ou par les médecins, biologistes médicaux, sages-femmes, infirmiers,

techniciens de laboratoire exerçant dans un établissement de santé ou dans des structures

de prévention ou associatives habilitées (34). Les salariés ou bénévoles, non professionnels

de santé, ayant reçu une formation et intervenant dans une structure de prévention ou une

structure associative, peuvent également proposer les TROD.

Le développement des TROD en cabinet de médecine générale fait partie du PLNS

2010-2014, afin de faciliter l’accès au dépistage des populations dont le recours au dispositif

actuel est insuffisant par rapport à leur exposition au risque et d’améliorer l’accès aux

résultats du dépistage (19).

3. Autotests

a) Principes

Il s’agit de tests de dépistage à résultat rapide. La seule différence est que le

prélèvement et l’analyse du test sont effectués directement par l’intéressé et non par une

tierce personne, permettant à toute personne de réaliser et de lire elle-même le résultat

d’un test de dépistage sans consultation pré ni post-test. Ce sont des dispositifs de

diagnostic in vitro.

Les autotests sont clairement définis dans un rapport du CNS (35):

Tests unitaires permettant la détection des anticorps anti-VIH 1 et anti-VIH 2.

Réalisés directement par l’intéressé, sans recours à une tierce personne.

Délivrés sans prescription médicale, disponible dans le commerce.

Ne nécessitent pas d’instrumentation spécifique autre que celle mise à disposition.

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Ils requièrent deux étapes : l’auto-prélèvement puis l’auto-analyse du résultat après recueil soit de sang total par prélèvement capillaire, soit de liquide créviculaire par

prélèvement salivaire. Les autotests reposent actuellement sur la technique de

l’immuno-chromatographie. Le liquide prélevé est déposé sur une bandelette et doit

entraîner une réaction colorée, simple ou double, au terme d’un délai inférieur à

trente minutes. Une réaction du réactif de révélation laissera apparaître une ligne

colorée au site de contrôle (C) indiquant le bon fonctionnement du dispositif puis en

cas de résultat positif, une réaction de l’antigène laissera apparaître une seconde ligne

colorée au site de test (T), indiquant la présence d’anticorps anti-VIH.

Le résultat est donné dans un délai court, en général en moins de 30 minutes.

Le résultat doit être impérativement confirmé par un dépistage reposant sur des techniques de laboratoires standardisés.

b) Performance de l’autotest salivaire

Les autotests peuvent être réalisés à partir de deux liquides biologiques, le sang ou la

salive. Nous nous intéresserons dans notre étude essentiellement à l’autotest salivaire OraQuick® In-Home HIV car il s’agit de l’autotest validé aux Etats-Unis par la Food and Drug

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Une étude de phase III a été réalisée par la société OraSure, incluant 5 385 participants réalisant un autotest salivaire OraQuick® In-Home HIV à domicile et sans observation (…).

Selon cette étude, la spécificité de cet autotest a été établie à 99,98%, pouvant être jugée

très satisfaisante mais sa sensibilité a été établie à 92,9%. La sensibilité de ce test est donc

nettement diminuée lorsqu’il est réalisé seul car elle est établie à 99,3% lorsque ce même

test est réalisé par une tierce personne entraînée.

Une étude menée à Singapour entre 2008 et 2010, évaluant la performance de

l’autotest salivaire OraQuick® In-Home HIV, retrouve une performance meilleure que celle

établie par la société Orasure avec une sensibilité à 96,9% (36). Cependant cette étude

établit la performance du test en le comparant à son utilisation par du personnel médical

entraîné. Inversement, une étude menée à Cape Town, en Afrique du Sud, en 2012, évaluant

la performance de l’autotest salivaire OraQuick® In-Home HIV auprès de personnel soignant

de statut VIH inconnu, retrouve une performance nettement inférieure à celle établie par la

société Orasure avec une sensibilité à 66,7% (37). La performance du test est établie en

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Performance de l’autotest salivaire OraQuick® In-Home HIV selon plusieurs études.

c) Historique et limites de l’autotest salivaire

En France, la question de la mise sur le marché d’autotests de dépistage du VIH se

pose depuis 1998. Le CNS a rendu à deux reprises, en 1998 et en 2004, un avis défavorable

devant la présence de trop nombreux inconvénients. Ces tests laissent le sujet seul face à son diagnostic, ouvrent une brèche dans la santé publique en laissant le dépistage sans

support financier et ils pourraient conduire à des usages contraires aux droits des personnes, avec une fiabilité insuffisante.

Cependant, de nombreux autotests salivaires de dépistage du VIH sont disponibles à

l’achat sur Internet malgré l’absence d’autorisation de mise sur le marché en France. Et

depuis 2006 le CNS souligne l’urgence de faire évoluer le dispositif de dépistage en France

avec une nécessité de le banaliser.

La question a donc été à nouveau soulevée et le CNS, après avoir pris en considération

les caractéristiques et les performances des nouveaux tests, a rendu un avis favorable à la

mise sur le marché des autotests le 20 décembre 2012 (20). Secondairement, fin 2013, la

Ministre de la Santé s’est déclarée favorable à la mise en place des autotests comme outil

Etude Objectif Lieu Date Population Taille de

l'échantillonSensibilité Spécificité

Will an Unsupervised Self-Testing Strategy for HIV Work in Health Care Workers of South Africa? A Cross Sectional Pilot Feasibility Study (39) Evaluer la performance de l’autotest salivaire Cape Town, Afrique du Sud 2012 Personnel soignant de statut VIH inconnu 251 66,7% 100%

Accuracy and User-Acceptability of HIV Self-Testing Using an Oral Fluid-Based HIV Rapid Test (40)

Evaluer la performance de l’autotest salivaire réalisé par des personnes non entrainées en comparaison à son utilisation par des personnes entrainées Singapour 2008-2010 Population se présentant dans des centres de dépistage du VIH, n'ayant jamais réalisé d'autotest 994 dont 200 séropositifs 96,9% 99,6%

The Uptake and Accuracy of Oral Kits for HIV Self-Testing in High HIV Prevalence Setting: A Cross-Sectional Feasibility Study in Blantyre, Malawi (41)

Evaluer l'utilisation et la précision de l'autotest salivaire dans la population générale

Malawi,

Afrique 2010

Population

générale 260 97,9% 100%

Will Patients “Opt In” to Perform Their Own Rapid HIV Test in the Emergency Department? (42)

Evaluer la faisabilité et la précision de l'autotest réalisé par des personnes non initiées en comparaison à des personnes entrainées

Baltimore, Etats-Unis 2008-2009 Population se présentant aux urgences 478 99,8% 100%

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complémentaire dans l’offre de dépistage du VIH. Elle a déclaré le 1er décembre 2014 qu’ils seraient mis en vente à partir du 1er juillet 2015 avec le marquage CE à un prix d’environ 20

euros qui pourra être fixé librement par les fabricants. Il n’est pas prévu actuellement qu’ils

soient pris en charge par l’assurance maladie mais ils seraient délivrés gratuitement par

certaines associations.

L’avis favorable du CNS en faveur des autotests est cependant associé à plusieurs

recommandations :

Un bon encadrement de leur diffusion avec une information de qualité pour leur bonne utilisation.

Le résultat doit être systématiquement confirmé par un test biologique conventionnel car ils présentent une bonne spécificité mais leur sensibilité apparaît encore

insuffisante, notamment en phase de primo-infection.

Les autotests doivent être accompagnés du dépistage des autres IST.

Les modes d’accès doivent être diversifiés et adaptés aux besoins, comme la vente libre en pharmacie, parapharmacies et sur internet. Il faut également assurer une

distribution par différents opérateurs pertinents comme le médecin généraliste et les associations avec une distribution aux populations fortement exposées au risque de

transmission du VIH.

Le kit doit contenir différents documents, dont les coordonnées de supports d’assistance.

Le CCNE a également donné son avis sur la mise à disposition de l’autotest salivaire en

mars 2013 et recommande que des précautions soient prises par les autorités sanitaires

dans de nombreux domaines (41). En effet, la réalisation de cet autotest pose la question

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d’accompagnement et par une moindre fiabilité des résultats dans son utilisation par des personnes non entrainées. La simplicité de la réalisation du test pourrait faciliter la pression

immédiate d’un partenaire, de la famille ou du milieu professionnel.

Dans son rapport de 2013 portant sur la prise en charge médicale des PPVIH, le groupe

d’experts dirigé par le Professeur Morlat se montre favorable à la mise sur le marché des

autotests susceptibles de compléter l’offre de dépistage (18). Ce groupe recommande un

bon encadrement de leur diffusion. Il attire l’attention sur le besoin d’accompagnement des

utilisateurs via une ligne téléphonique et sur la nécessaire diffusion d’autotests gratuits aux

populations les plus à risques car le coût de l’autotest peut être un frein à son accès. Il attire

également l’attention sur le besoin de financement d’un programme de recherche sur

l’utilisation des autotests en France.

Les avantages de l’autotest salivaire par rapport à l’autotest sanguin sont qu’il est plus

simple dans son exécution et que l’ensemble des composants ne doit pas être éliminé

comme les « déchets par activité de soin à risques infectieux ». Cependant, il apporte des

résultats moins fiables que l’autotest pratiqué sur du sang total (sensibilité à 93% versus

98,5%).

Un des objectifs de la mise à disposition de ces autotests est de dépister les personnes

qui n’utilisent pas les méthodes de dépistage classiques ou qui ne se font pas dépister. L’autotest salivaire pourrait permettre en France, selon des hypothèses réalisées par les

autorités sanitaires américaines, de découvrir 4 000 nouvelles séropositivités et d’éviter 400 nouvelles infections (21). Cependant, si l’autotest était seulement utilisé par les personnes

qui utilisent les méthodes de dépistage classiques, compte tenu de sa moindre sensibilité, la conséquence pourrait être négative avec une diminution du nombre de nouveaux

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d) A l’étranger

Aux Etats-Unis, la FDA a approuvé depuis 1996 un « Home Access HIV1 Test System »,

un test anonyme de dépistage de l’infection au VIH par un auto-prélèvement capillaire à domicile avant l’envoi de l’échantillon à un laboratoire et avec le rendu du résultat et des

conseils remis par téléphone. Ceci a permis d’élargir le dépistage comme le montre une étude réalisée aux Etats-Unis pour évaluer l’utilisation de ce test durant la première année

de commercialisation (42). Sur une année, 174 316 kits ont été vendus, permettant le

diagnostic d’infection au VIH chez 0,9% des utilisateurs, dont 49% n’avaient jamais réalisé de

test auparavant. Parmi tous les utilisateurs, 60% n’avaient jamais réalisé de test de

dépistage.

Puis la FDA a approuvé en novembre 2012 un TROD sur prélèvement salivaire,

l’OraQuick, test réalisé par une tierce personne entrainée. Enfin, l’autotest salivaire de

dépistage du VIH, l’OraQuick® In-Home HIV, a été autorisé le 3 juillet 2012 par la FDA,

permettant sa vente libre depuis octobre 2012 et sa réalisation sans supervision médicale.

Les autorités sanitaires américaines, FDA et Centers for Disease Control and

Prevention, ont réalisé une étude d’impact de l’introduction des autotests aux États-Unis

(21) (35). L’évaluation du rapport bénéfices / risques apparaissait complexe à réaliser. Les

risques recouvraient le nombre de faux négatifs parmi les personnes qui optaient désormais

pour l’autotest et le nombre de transmissions du VIH non évitées en raison de ces faux

négatifs. Les bénéfices recouvraient le nombre de nouveaux diagnostics d’infection au VIH et

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L’évaluation de l’autotest par les autorités américaines s’appuyait sur plusieurs facteurs en retenant plusieurs hypothèses :

La sensibilité du test : 93% selon l’évaluation de phase III de la FDA.

Son usage par des populations données : 25% parmi les hommes homosexuels, 25% des UDI, 10% des hétérosexuels à bas risque mais 0% des hétérosexuels à haut risque.

La part des usagers au regard du dépistage : L’hypothèse était que 39% des personnes dépistées positives au VIH par un autotest et confirmées par un test conventionnel

n’auraient pas été identifiées par les dispositifs classiques car elles ne les fréquentaient

pas.

Le nombre de transmissions du VIH évitées : 10 contaminations évitées pour 100 nouveaux diagnostics.

Différents calculs ont permis d’établir que son introduction et sa commercialisation la

première année aux Etats-Unis pourraient permettre de diagnostiquer 44 000 nouvelles

infections et prévenir 4000 nouvelles infections au VIH.

Les évaluations d’impact permettent de considérer que les bénéfices l’emporteraient sur les risques et elles soulignent l’enjeu de toucher les publics peu ou pas dépistés pour

maximiser les effets bénéfiques de l’introduction du nouvel outil. Cependant l’argumentaire développé aux Etats-Unis pour autoriser la vente libre de l’autotest ne tient pas compte du

prix, s’élevant à 39 $. De plus, aucun résultat d’étude sur l’évaluation post-marketing n’est

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IV. Matériels et méthodes

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