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Augmentation de la compacité des lipides des membranes induite par la

Dans l’objectif d’étudier l’effet de la pénétratine sur la compacité des membranes lipidiques, nous avons utilisé la sonde d’environnement Laurdan.

Précédemment, il avait été montré que la pénétratine était capable d'induire la rigidité des phospholipides sur les membranes PG et PE, mais pas sur les membranes PC (Ofelia Maniti, Alves, Trugnan, and Ayala-Sanmartin 2010). Afin de mieux comprendre l'effet observé de la pénétratine sur l'organisation des lipides, nous avons étudié l'interaction de la pénétratine sur des membranes avec des lipides synthétiques bien caractérisées comme la DMPC qui sont capables de s’organiser de manière stable en trois différentes phases :

• à 9°C (phase gel),

• à 19°C (phase gel ondulée), • à 30°C (phase liquide)

en présence ou en absence d'un phospholipide chargé négativement (DMPC et DMPC/DMPG (9/1)).

La Figure 42 représente un exemple de spectre de fluorescence du Laurdan d’une membrane DMPC/DMPG LUV à 30°C (phase liquide) avec et sans pénétratine.

Figure 42. Effets de la pénétratine sur la compacité des membranes. Spectres de fluorescence du Laurdan dans des LUV DMPC/DMPG (9/1) à 30°C en l'absence (bleu) et en présence de pénétratine au rapport P/L 1/10 (rouge).

Sur les membranes DMPC, la pénétratine a montré un effet modéré sur la compacité des lipides qui dépend des phases lipidiques. Comme exposé sur la Figure 43A, pour un faible rapport P/L (Peptide/Lipide) (1/50), la pénétratine a montré une petite diminution de la compacité des lipides uniquement pour la phase liquide (30°C). Pour de fortes valeurs du rapport P/L (1/10), l'effet sur la compacité des lipides est visible dans les trois phases : gel (9°C), gel ondulé (19°C) et liquide (30°C).

En présence du lipide chargé négativement DMPG qui augmente l'affinité des membranes pour la pénétratine, l’effet du peptide sur la compacité des lipides est plus marqué. Sur la Figure 43B, la diminution de la compacité a été observée pour les deux ratios P/L, mais il est apparu que les changements induits par le peptide sont plus forts en phase liquide et moins importants en phase gel ondulée. Afin d'étudier davantage l'effet de la pénétratine sur l'organisation des lipides, nous avons étudié la

thermodynamique des transitions de phase des lipides (gel-gel ondulée et gel ondulée-liquide) par calorimétrie différentielle (DSC).

Figure 43. Changements du paramètre GP (GP) du spectre de fluorescence du Laurdan induits par la pénétratine. (A) GP des membranes DMPC. (B) GP des membranes DMPC/PG (9/1). Les membranes après l’addition de la pénétratine à deux différents rapports molaires P/L et à trois températures correspondant aux phases gel (9°C), gel-ondulée (19°C) et liquide (30°C). Les expériences ont été effectuées de 17 à 19 fois. Les barres représentent les valeurs moyennes avec SE : *: p < 0,05. ** : p < 0,01. ***: p < 0,001. Étoiles à la base des barres sont liées à la différence entre GP avant et après addition de la pénétratine. Étoiles avec des lignes sont liées à la comparaison entre les différentes conditions.

3. La pénétratine favorise la transition vers la phase gel ondulée :

étude par calorimétrie

Les résultats obtenus par la fluorescence de Laurdan et par diffraction des rayons X montrent que la pénétratine est capable d’induire une réorganisation des membranes lipidiques. Afin de mieux comprendre l’effet de la pénétratine sur la stabilité thermique des différentes phases lipidiques, nous avons effectué des expériences de calorimétrie avec des membranes (MLV) DMPC et DMPC/DMPG (9/1) en l'absence et en présence de pénétratine aux rapports molaires P/L 1/10 et 1/50. Les thermogrammes typiques ont montré deux pics correspondants aux transitions entre les phases gel-gel ondulée et gel ondulé-liquide (Figure 44). Les valeurs de température et d'enthalpie de transition sont indiquées dans le Tableau 3. Pour des membranes DMPC, un pic pour la température de pré-transition (Tpre), transition de la phase gel Lβ’ vers la phase gel ondulée Pβ’, a été observé à partir de 12,5°C. Pour la température de transition (Tm) (phase Pβ’ vers la phase liquide Lα) nous avons observé la transition à 23,6°C, en accord avec les valeurs publiées (I. Alves et al. 2008; Janiak, Small, and Shipley 1976; Walrant et al. 2013). Après l'addition de pénétratine, nous n’avons pas observé de variation importante pour les températures de transition à faible rapport peptide/lipide (1/50). Cependant, à un rapport peptide/lipide plus élevée (1/10), nous avons observé diminution de la température de pré-transition (Tpre) avec une valeur de 11,7°C. Les températures de transition (Tm) en présence du peptide sont restées stables par rapport à la DMPC seule. Pour étudier l'effet d'une charge négative dans les membranes, des MLV ont été préparées avec DMPC/DMPG (9/1). L'effet de la pénétratine dans ces membranes a été similaire, bien que plus prononcée par rapport aux membranes DMPC. Le peptide induit un décalage plus important du pic de pré-transition ce qui se traduit par une diminution de la température de pré-transition de deux degrés (10,5°C) (Figure 45A et Tableau 3). De plus, nous avons observé une très faible, mais constante et significative, augmentation de la température de transition (quelques dixièmes de degré) (Figure 45B). Ces effets ont été observés à basse et à haute concentration de pénétratine, mais étaient plus importants avec une forte concentration de pénétratine (ratio molaire peptide/lipide de 1/10) avec un abaissement de température de 1,9°C pour la transition

de phase Lβ’- Pβ’. En ce qui concerne l'enthalpie, nous avons observé une diminution significative pour les MLV avec une grande concentration de pénétratine pendant la pré-transition. Cette diminution de l'enthalpie est probablement due à l'hétérogénéité induite par le peptide dans l'échantillon (introduction de différentes structures lamellaires dans le système).

Afin d'étudier davantage l'effet du peptide dans les membranes, nous avons préparé des membranes de DPPC/DPPG car la présence de DMPG avait induit des effets plus importants avec les chaines carbonées palmitoyl (16C) et myristoyl (14C). Les résultats présentés dans le Tableau 3 montrent un comportement similaire pour DPPC/DPPG par rapport aux MLV de DMPC/DMPG. A un rapport P/L 1/10, la pénétratine réduit la température de pré-transition de 2,1°C. Nous avons observé de la même façon une baisse de l'enthalpie pour la transition de phase Lβ’ - Pβ’.

Figure 44. Effets de la pénétratine sur les températures de transition des membranes DMPC/DMPG. Le profil DSC du MLV avant (noir) et après l’addition de pénétratine (rouge) au rapport molaire P/L 1/10. Les signaux endothermiques pointent vers le haut.

Figure 45. Effets de la pénétratine sur les températures de transition des membranes DMPC/DMPG. (A) Détail des températures de pré-transition (gel Lβ’ à gel-ondulée Pβ’) des MLV en l'absence et en présence de pénétratine pour le rapport P/L 1/10. (B) Détail des températures de transition (gel-ondulée Pβ’ à liquide Lα) des MLV en absence et en présence de pénétratine pour le rapport P/L 1/50. MLV avant (noir) et après addition pénétratine (rouge). Les signaux endothermiques pointent vers le haut.

Comme le montre le Tableau 3, le peptide réduit de manière significative la température de pré-transition et augmente légèrement la température de transition. De même que pour les expériences avec le Laurdan, les effets du peptide ont été plus forts avec les membranes de DMPC/DMPG qu’avec les membranes de DMPC. Les résultats sont similaires pour les membranes de DPPC/DPPG. Ainsi, la pénétratine semble favoriser la transition vers la phase gel ondulée de manière à la stabiliser. Un comportement

similaire a été remarqué pour le peptide S4 (13)-PV avec des membranes de DPPC (Cardoso et al. 2012). Type de MLV Rapport peptide/lipide (P/L) Tpre (°C) Hpre (kJ/mol) Tm (° C) Hm (kJ/mol) DMPC 0 12,5  0,37 2,7  0,19 23,6  0,24 21,0  1,6 1/50 12,4  0,38 2,6  0,23 23,6  0,24 22,0  1,0 1/10 11,7  0,33* 2,2  0,18* 23,5  0,15 19,4  1,4 DMPC/DMPG (9/1) 0 12,4  0,19 1,9  0,25 23,6  0,15 18,0  1,0 1/50 11,5  0,34* 1,2  1,6* 23,7  0,16** 18,0  1,4 1/10 10,5  0,34*** 1,0  1,8** 23,7  0,16* 19,5  1,6 DPPC/DPPG (9/1) 0 31,8  0,30 1,9  0,12 40,6  0,17 22,7  1,4 1/50 32,0  0,10 1,5  0,20 *** 41,0  0,10* 21,7  1,7* 1/10 29,7  0,30*** 1,1  0,06 *** 40,5  0,10 20,4  0,9*

Tableau 3. Paramètres thermodynamiques mesurés par DSC pour l'interaction de la pénétratine avec les différents MLV. Les valeurs sont les moyennes ± écart-type. Des expériences ont été réalisées de 7 à 11 fois pour les membranes DMPC et DMPC/DMPG et de 3 à 5 expériences pour DPPC/DPPG. La signification statistique a été réalisée par comparaison des membranes seules ou en présence de pénétratine (* p < 0,05. ** p < 0,01. *** p < 0,001).