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6. Evénements indésirables médicamenteux publiés sur les antipaludiques

6.6. Associations d’antipaludiques

Définition : les associations médicamenteuses ont pour but d’obtenir une synergie d’action en raison de cibles différentes ou de cinétiques complémentaires, afin de permettre une réduction de la posologie de certains médicaments pour en limiter les effets secondaires

Principe : la probabilité d’apparition simultanée d’une résistance à deux agents chimiothérapiques dont les mécanismes d’action sont différents est extrêmement faible.

Comme dans la prise en charge des affections bactériennes, l'association de plusieurs molécules antipaludiques vise à améliorer l'efficacité du traitement, dans certains cas par synergie potentialisatrice, en rendant de toute façon hautement improbable l'émergence de résistance. Idéalement, le régime thérapeutique doit être sûr et bien toléré (pas d’effets secondaires sérieux, ni d’évènements fatals adverses), stable (pas de problème de stockage en terme d’humidité et de température), efficace (taux de guérison au moins égal à 75-90%), pouvant être administré par voie orale, rectale ou parentérale (régime utilisable en toute circonstance), disponible en monodose (pour minimiser l’inobservance du traitement, possibilité d’administration par des illettrés à domicile, ou à défaut un régime simple court ≤ 3 jours), efficace contre tous les stades de développement du parasite (l’effet gamétocytocide pourrait réduire la transmission si le médicament est utilisé à large spectre), non susceptible d’induire la résistance (le médicament doit en tout cas minimiser le développement ou le taux d’acquisition de la résistance par les parasites) et accessible à tous (coût et disponibilité géographique).

Les principes actifs contenus dans le régime doivent avoir une demi-vie d’élimination pareille et ne présenter aucune autre interaction pharmacocinétique négative significative sur le plan clinique (parce que les parasites exposés à des concentrations décroissantes d’un des principes actifs en combinaison sont plus susceptibles d’être transmis si la sélection pour la résistance à ce principe actif prenait place). Ils doivent avoir un mode d’action indépendant (réduire la chance de survenue de résistance), agir synergistiquement in-vivo (augmente l’efficacité d’une seule goutte), et être produits sous forme de combinaison de doses fixes dans une seule formulation (éviter le risque qu’une seule part du médicament associé à été pris). Lorsqu’ils sont combinés, le potentiel d’être nocif, causé en combinant les effets secondaires de plus d’un principe actif ou en générant de nouveaux effets secondaires à travers une interaction médicamenteuse imprévisible ils doivent être pesés contre le bénéfice potentiel de la combinaison.

Avantages

Pas d’interactions indésirables avec les autres antipaludéens sur le métabolisme ; Réduction plus rapide de la parasitémie ;

Réduction du taux de recrudescence de Plasmodium falciparum ;

Préservation du nouvel arsenal thérapeutique de l’apparition de résistances consécutives au contact entre les souches parasitaires et les dérivés de l’artémisinine en monothérapie.

Le paludisme est une protozoose eucaryotique des globules rouges. Il peut atteindre des fardeaux jusqu'à 1013 dans le sang de l’hôte humain, bien que plusieurs infections symptomatiques soient causées entre 107 et 1012 parasites (217). Si deux médicaments sont utilisés avec différents modes d’action, et dès lors, avec différents mécanismes de résistance, alors la probabilité qu’un parasite développe la résistance à la fois aux deux médicaments pendant un même cycle de division cellulaire est le produit de leurs probabilités individuelles (218, 219). Ceci est particulièrement relevant au paludisme parce qu’à n’importe quel moment, il y a seulement environ 1017 parasites dans le monde entier (220, 221). La plupart des mécanismes de chimiorésistance sont la conséquence de mutations génétiques. Le taux de mutations pour les eucaryotes est de l’ordre de 1 sur 106 divisions mais les parasites résistants mutants viables sont sélectionnés à des fréquences beaucoup plus faibles. La duplication des gènes survient plus volontiers que les mutations à travers le génome parasitaire et peut aussi contribuer à la chimiorésistance.

L’objectif d’utiliser un régime de traitement sur 3 jours est de couvrir deux cycles asexuels des stades parasitaires, avec les deux antipaludiques à des concentrations efficaces pour tuer tous les parasites. En plus, l’antipaludique partenaire doit assurer que les parasites ne sont pas exposés aux dérivés de l’artémisinine en monothérapie, laquelle augmente le risque d’émergence de résistance (222, 223). Malheureusement, il existe déjà des parasites présentant une susceptibilité diminuée aux dérivés de l’artémisinine au Cambodge (224, 225). Pour le biologiste, ce scenario est familier ; le développement de la résistance des pathogènes à n’importe quel médicament est inévitable. La question n’est pas si, mais quand et où la résistance du pathogène va apparaître.

Inconvénients

Effectuer un bilan des traitements antérieurs, afin de prévenir les interactions indésirables, et donc prévenir les échecs thérapeutiques (antagonisme/agonisme).

En prophylaxie:

• L'association chloroquine-proguanil (Savarine® : 100 mg/200mg par comprimé, respectivement) est recommandée chez l'adulte dans les

zones de chloroquinorésistance modérée. Elle est efficace et bien tolérée chez les femmes enceintes (226).

• L'association pyriméthamine-dapsone (Maloprim®) a été largement utilisée en prophylaxie chez les enfants. Elle a été bien tolérée avec des effets variables à long terme (227).

• D'autres associations jouent un rôle plus discret dans l'arsenal prophylactique ou sont en phase d’essai clinique dans différentes zones d’endémie palustre.

En curatif, les associations font surtout appel aux antifoliques et antifoliniques.

• La pyriméthamine-sulfadoxine (SP), une association à dose fixe et traitement à dose unique (Fansidar® : 25 mg/ 500mg par comprimé) occupe une place importante dans les schémas thérapeutiques à cause de son coût très bas et de son efficacité en zone de chloroquinorésistance modérée. Elle a été utilisée pour remplacer la chloroquine comme médicament de première intention dans le traitement de l’accès palustre simple jusque récemment en 2004-2006 (228).

La pyriméthamine découverte au cours de la seconde guerre mondiale a une bonne biodisponibilité ; elle est absorbée dans les heures qui suivent son administration chez les enfants atteints de paludisme, et a une demi-vie d’élimination d’environ 80 heures.

Cependant, des parasites résistants se développent rapidement en quelques semaines et pratiquement la moitie des personnes présente des parasites résistants au bout de deux années d’utilisation (229, 230).

Quand la Sulfadoxine est utilisée en monothérapie, la résistance se développe rapidement comme dans le cas de la pyriméthamine. La Sulfadoxine a une bonne biodisponibilité tout comme la pyriméthamine, et sa demi-vie d’élimination est de 120 heures chez les enfants atteints de paludisme (230).

Après la chloroquine, l’association pyriméthamine-sulfadoxine a été la plus utilisée dans le traitement du paludisme dans les années 1960 – 1980. Cependant, à cause de la résistance, elle est rarement utilisée en dehors de l’Afrique, où elle continue d’être utilisée soit dans le traitement de l’accès palustre simple ou dans le traitement préventif intermittent chez les femmes enceintes (TPIg). Les données sur ce dernier point indiquent que deux doses curatives à but préventif ont un bénéfice substantiel chez les femmes enceintes non-infectées par le VIH en Afrique, mais des doses plus fréquentes semblent être nécessaires chez celles infectées par le VIH. En effet, le TPIg réduit le risque d’infection placentaire par 52% (RR = 0,48 [0,35-0,68]), le risque de petits poids à la naissance par 29% (RR = 0,71 [0,55-0,92]), et le risque d’anémie par 10% (RR = 0,90 [0,81-0,99] ; (231)). Cependant, l’implémentation du TPIg chez les

femmes enceintes a été sous optimale en partie à cause des réticences pour cause d’une toxicité potentielle de la SP pendant la grossesse et semble augmenter la production de gamétocytes au cours de la grossesse (232). Le TPIg avec la SP a été bien toléré en Afrique quand il est donné à raison de 2-4 doses thérapeutiques pendant la grossesse (49, 233, 234) Cependant, la SP ne doit pas être administrée en même temps que le cotrimoxazole, vu leurs mécanismes d’action redondants et leurs actions synergétiques à aggraver les réactions adverses secondaires.

La SP peut causer des érythèmes multiformes, le syndrome de Steven Johnson et la nécrose épidermique toxique. Ces effets sont observés surtout après une utilisation prolongée en prophylaxie (233). La SP a une toxicité partagée avec les autres sulfonamides. Il existe aussi une sensibilité croisée entre les sulfonamides et d’autres composés chimiques similaires (sulfonylurée, thiazides et acetazolamide). La SP peut provoquer chez certains sujets des douleurs gastro-intestinales (maux de ventre, nausées et diarrhées) et céphalées. La démangeaison est rapportée par environ 12%

de patients en Afrique (43). Des cas d’hépatotoxicité, des réactions d’hypersensibilité, des réactions hématologiques ont été rapportées dans la littérature (233). Il n’existe aucun antidote en cas d’overdose avec la SP. Un lavage gastrique précoce et un traitement symptomatique sont recommandés en cas d’overdose. L’excrétion de la sulfadoxine peut être accélérée par l’alcalinisation des urines. La pyriméthamine et la sulfadoxine sont toutes deux excrétées dans le lait maternel. En absence de données suffisantes, la SP n’est pas recommandée chez la femme allaitante.

• La pharmacocinétique du trimétoprime-sulfaméthoxazole (Bactrim®) ne permet pas son utilisation dans le traitement du paludisme.

• Le Fansimef® (association triple de Fansidar® et de méfloquine) n'a pas fait la preuve de sa supériorité lors d'une utilisation large en Asie : elle impose un sous dosage du composant ayant la plus lente élimination, la méfloquine, qui risque de faire émerger les résistances (235).

• Les associations utilisant qinghaosu et autres antipaludiques (artésunate-méfloquine ; artéméther-luméfantrine (co-artéméther, CoArtem®, Riamet®), SP-artésunate, chloroquine-artésunate, amodiaquine-artésunate, etc.) commencent à être utilisées en Asie dans les zones de multi résistance et en Afrique pour le traitement du paludisme simple et compliqué. Elles sont diligemment recommandées par l’OMS.