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3.2 Interactions locales

3.2.2 Aspects statiques : RMN spectrale

Les deux parties de l’hamiltonien (3.18), magnétique et quadrupolaire, vont influer sur le déplacement de la résonance RMN. Nous allons tout d’abord présenter l’apport de chaque partie sur ce déplacement, puis présenter des simulations de spectres de poudre et de monocristal sur les exemples de l’17O (I=5/2) et du 19F (I = 1/2) étudiés durant cette thèse.

Déplacement magnétique

Le champ local magnétique ~Hloc peut être décrit par : ~

Hloc = K + σ · ~H0 (3.29) où σ est le tenseur de shift chimique et K est celui de déplacement hyperfin. σ est en général faible et indépendant de la température. Il est caractéristique de chaque com-posé. Il représente la contribution des orbitales des couches pleines et correspond à la seconde partie de l’hamiltonien hyperfin (3.18). K est le tenseur de déplacement hyperfin correspondant aux première et troisième parties de l’hamiltonien hyperfin (3.18). C’est la grandeur qui nous intéresse plus particulièrement ici car elle porte l’information sur le magnétisme local.

Lorsque le champ ~H0 est appliqué dans une direction donnée α, la relation précédente devient scalaire et la valeur du tenseur hyperfin est directement reliée à la susceptibilité par :

Kα = Aα hf

NAµBχα (3.30)

où Aαhf est la constante hyperfine. Elle est exprimée en Oe/µB lorsque K est sans unité et µB et χ sont exprimés en unités cgs.

En prenant en compte le tenseur de déplacement hyperfin, l’hamiltonien magnétique (3.19) peut se réécrire comme :

HM = −γn~~I 1 + KH~0 (3.31) Soit (x, y, z) le repère dans lequel le tenseur K est diagonal et (X0, Y0, Z0) le repère du laboratoire. Si le champ magnétique extérieur est appliqué suivant Z0, et que nous négligeons les fluctuations transverses, l’hamiltonien magnétique peut être réécrit :

HM = −γn~IZ0   ~Z0· ~Z0 +  Kx~x · ~Z0 2 + Ky~y · ~Z0 2 + Kz~z · ~Z0 2 H0 (3.32) Ainsi, il est possible de connaitre la fréquence de résonance correspond à la transi-tion entre deux niveaux d’énergie, νm = (Em−1 − Em)/h où Em = hm|HM|mi qui est mesurée expérimentalement en RMN. En pratique nous nous intéressons à la différence de fréquence par rapport à la référence ν0, fréquence correspondant au champ appliqué. Si l’on se place dans la convention d’angle de K. Narita et al. [Narita et al., 1966] (figure 3.5) nous obtenons :

∆ν = νm− ν0 = ν0Kxsin2θ cos2φ + Kysin2θ sin2φ + Kzcos2θ (3.33) Ainsi, le déplacement de la raie est indépendant du niveau d’énergie considéré. Afin de comparer les spectres obtenus sous différents champs appliqués, il est plus simple de comparer directement les valeurs expérimentales donnant ∆ν/ν0. Cette grandeur est sans unité et permet de visualiser directement le shift. En effet, si on prend le cas particulier où θ = 0 nous obtenons :

∆ν

ν0 = Kz (3.34)

Dans la pratique, il est plus commode d’étudier le déplacement en terme de contri-butions anisotrope, isotrope et axiale pour mieux comprendre l’origine microscopique de chaque terme en comparant avec l’hamiltonien hyperfin (3.18). Nous allons donc avoir trois nouvelles valeurs de tenseur qui sont déduites des valeurs Kx, Ky et Kz :

Kiso = Kx+Ky+Kz 3 (3.35) Kaniso = Ky−Kx 2 (3.36) Kaxial = 2Kz−Kx−Ky 6 (3.37)

L’expression (3.33) peut alors se réécrire sous la forme : ∆ν

ν0 = Kiso+ Kaxial(3 cos

2θ − 1) + Kanisosin2θ cos 2φ (3.38)

Déplacement quadrupolaire

Dans nos composés, les effets quadrupolaires sont faibles par rapport au champ appli-qué (νQ0 ∼ 1 %). Ils seront donc traités en perturbations par rapport à l’hamiltonien Zeeman. Le calcul détaillé est exposé dans la référence [Abragam, 1961]. Au premier ordre, le déplacement est dépendant de la valeur du nombre quantique m :

∆νm→m−1(1) = −1 2νQ  m − 1 2 

3 cos2θ0− 1 + η sin2θ0cos 2φ0 (3.39) où θ0 et φ0 décrivent l’orientation du repère du tenseur quadrupolaire par rapport au champ magnétique appliqué. On obtient 2I fréquences de résonances dont les intensités,

Figure 3.5 – Convention d’angle et représentation de champ extérieur dans le repère du tenseur K

Figure 3.6 – Gauche : levée de dégénérescence des niveaux d’énergie Zeeman d’un spin nucléaire 5/2 sans et avec les effets quadrupolaires au premier ordre. Droite : simulation du spectre RMN dans le cas de θ0 = 0 avec νQ = 2 MHz. Le spectre est composé de 5 raies toutes distantes de νQ.

données par la probabilité de transition entre les différents niveaux, sont proportionnelles à [I(I + 1) − m(m − 1)]. Au premier ordre la position de la raie centrale (m = 1/2) n’est pas affectée . Cependant, au second ordre, des interactions quadrupolaires assez fortes ont un effet sur le déplacement de la raie centrale. Dans le cas où η = 0 ce calcul n’affecte que la raie centrale et donne :

∆ν1/2→−1/2(2) = − ν 2 Q 16ν0  I(I + 1) − 3 4  (1 − cos2θ0)(9 cos2θ0− 1) (3.40) Ainsi, dans le cas d’un monocristal placé dans un champ parallèle à l’axe z (θ0 = 0), il n’y a pas de déplacement de raie centrale dû aux effets quadrupolaires et nous avons des raies satellites aux fréquences ν0+ (m − 1/2)νQ/2, ..., ν0− (m + 1/2)νQ/2. La figure 3.6 représente schématiquement la levée de dégénérescence Zeeman et le spectre RMN dans un tel cas pour une expérience de RMN sondant un noyau de spins 5/2 (cas de l’17O). Le lecteur intéressé par les résultats obtenus pour η 6= 0 pourra consulter [Laplace,2011;

Bono,2004].

quadrupolaire :

∆νm = ∆νmag(θ, φ) + ∆νquad0, φ0) (3.41) Spectre pour une poudre

Dans le cas d’une poudre les angles (θ,φ) et (θ00) prennent toutes les valeurs possibles selon une distribution sphérique isotrope. De ce fait les raies sont élargies et leur forme est modifiée. Pour les calculs développés dans la suite, nous nous restreindrons au cas où θ = θ0 et φ = φ0. Le nombre de noyaux pour lesquels le champ forme un angle θ, φ par rapport aux axes principaux vaut :

dN (θ, φ) = N0dΩ=

N0

sin θdθdφ (3.42) où N0 représente le nombre total de noyaux sondés. Chaque variable αi = f (θ, φ) peut être redéfinie en fonction de la fréquence ν. Nous pouvons ainsi redéfinir le nombre de noyaux sondés par :

dN (ν) = N0f (ν)Q

i ∂ν

∂αi

(3.43)

où f (ν) est une fonction caractéristique du système étudié. Nous allons donc avoir dans les spectres de poudre des singularités et des épaulements, définis par ∂α∂ν

i = 0 et ∂α∂ν

i → ∞. Ces singularités et épaulement seront spécifiques à chaque type de système sondé.

Prenons par exemple le cas d’un couplage dipolaire pour des noyaux de spins I=1/2. Dans le régime paramagnétique, les spins des ions environnant le noyau sondé sont alignés selon le champ appliqué. Le champ créé par le moment magnétique d’un ion ~µ sur un noyau sonde dont la position par rapport à l’ion est représentée par ~r est :

~ Hdip= µ0 4π  3(~µ · ~r)~r r5~µ r3  (3.44) Soit θ l’angle entre la direction du spin (et donc du champ magnétique appliqué) et ~r. La projection du champ dipolaire selon la direction du champ extérieur vaut alors :

Hdip = µ0µ

4πr3 3 cos2θ − 1 (3.45) Par comparaison avec l’hamiltonien (3.38), nous voyons que le champ dipolaire correspond à un tenseur K axial. Nous pouvons donc, en ne prenant en compte que la partie axiale de (3.38), exprimer θ en fonction de ν. cos2θ = 1 3  ∆ν Kaxialν0 + 1  (3.46) En intégrant l’équation (3.42) sur toutes les valeurs de φ nous obtenons

dN (θ, φ) = −N0 2 d(cos θ) = − N0 2 ∂ cos θ ∂ν (3.47)

Figure 3.7 – Simulation du spectre RMN dû au couplage dipolaire avec Kaxialν0 = 10 MHz

Si nous comparons cette équation à l’expression (3.43), nous avons dans ce cas αi = cos θ et f (ν) = −1/2.

De plus, nous avons des singularités dans le spectre lorsque ∂ cos θ∂ν = ∂ cos θ∂∆ν = 0 c’est à dire quand θ = π/2 et un épaulement pour θ = 0 ou π. Le nombre de noyaux pour une fréquence donnée vaut :

dN (ν) = N0 2 dν 6Kaxialν0 r 1 3  1 + K∆ν axialν0  (3.48)

Dans le spectre nous aurons donc une singularité, représentée par un pic, à ∆ν =

−Kaxialν0 et un épaulement à ∆ν = 2Kaxialν0. Le spectre de poudre dans ce cas est

représenté sur la figure 3.7.

Néanmoins, les spectres de poudres RMN peuvent devenir très compliqués à analyser dans le cas de spin plus grand où il existe une partie quadrupolaire. Par exemple, un spectre de poudres relatif à l’17O (I=5/2) qui possède un tenseur hyperfin anisotrope et avec η non nul présente 12 singularités et épaulements.

Spectre pour un monocristal.

Dans le cas d’une étude sur un monocristal, nous pouvons choisir une orientation en sélectionant un couple de valeur (θ, φ). Cela simplifie les spectres étudiés et diminue la largeur des raies, permettant ainsi de faire des analyses plus fines sur la susceptibilité intrinsèque des composés.

Dans le cadre de notre étude par RMN du fluor sur DQVOF les échantillons synthéti-sés étaient malheureusement tous sous forme de poudre polycristalline. Cependant, nous avons travaillé avec des poudres orientées sous champ magnétique. Dans ces poudres, les cristallites sont préférentiellement orientées selon au moins une direction cristallogra-phique. Par exemple, dans nos échantillons orientés, toutes les cristallites sont orientées selon le même axe z. En appliquant le champ magnétique extérieur selon cet axe nous sélectionnons le couple (0, φ). La résonance ainsi observée nous donne directement :

∆ν

Nous avons donc une seule raie par environnement magnétique, ce qui facilite gran-dement la compréhension des spectres. Cependant, du fait d’une certaine distribution quand à l’alignement des cristallites, le spectre obtenu ne sera jamais aussi précis qu’un spectre effectué sur un monocristal. De plus, les cristallites ne s’orientent souvent que selon un axe particulier, il est alors impossible de sonder avec précision tous les couples (θ, φ) avec cette méthode.