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L’ARCHITECTURE, UN EXEMPLE DE CONCEPTION CRÉATIVE Le croquis d’architecture se décompose en deux catégories :

Conception, créativité et modélisation 3D

CHAPITRE 1. CONCEPTION, CRÉATIVITÉ ET MODÉLISATION 3D distribution de ces fonctions du dessin au cours du temps(4)

1.3. L’ARCHITECTURE, UN EXEMPLE DE CONCEPTION CRÉATIVE Le croquis d’architecture se décompose en deux catégories :

– Le croquis d’analyse et d’observation, essentiellement voué à extraire le concept architectural qui a sous-tendu la conception d’un bâtiment construit ou au moins conçu.

– Le croquis d’étude, qui est l’esquisse de conception, celui dont nous discutons ici. Il diffère du croquis d’observation par sa démarche de simulation graphique, contrairement à la vision à posteriori du premier.

Bien que pouvant être distinguées par leur finalité, ces deux catégories de dessins demeurent proches de par leur caractère conceptuel.

Le dessin géométral

Le dessin géométral est un mode de dessin que l’on peut qualifier de plus technique, en deux dimen-sions, et qui consiste à fragmenter la représentation en coupes, plans et élévations. Le qualificatif de « technique » n’implique pas pour autant, dans les premières phases de conception, une notion de pré-cision dans les mesures et l’échelle. Car, c’est un fait constaté par tous les observateurs de la tâche de conception architecturale, ce type de dessin est celui qui est utilisé majoritairement par les archi-tectes. La perspective, ou autres représentations que l’on pourrait qualifier de réalistes (maquettes), n’interviennent que plus tard dans le projet.

L’utilisation de cette décomposition des dimensions soulève, selon Daniel ESTEVEZ, le « para-doxe du géométral ». En effet, ces dessin fragmentent le projet, ce qui est à priori contraire à la démarche globale de la résolution du problème, et de plus ne semblent pas prendre en compte les aspects volumiques (deux dimensions). Il ressort surtout des études que présente l’auteur que c’est une décomposition de l’horizontal et du vertical, privilégiant le plan (là ou l’Homme évolue), et fo-calisant l’architecte sur les points d’intérêt, sans pour autant les déconnecter. Ces représentations ne négligent pas l’aspect tridimensionnel, mais rendent la figuration plus proche des images mentales du concepteur, habitué à les manipuler.

Le calque

Bien plus qu’un papier « semi-transparent » comme nous le connaissons pour recopier des dessins, le calque fut longtemps pour les architectes le papier à dessiner. Cette tendance à toutefois diminuée, mais les habitudes sont tenaces (sûrement parce-qu’elles ont fait leurs preuves) et les architectes uti-lisent toujours du papier calque, appelé calque d’étude, sous forme de rouleaux de petite dimension. Ce papier est surtout utilisé comme support pour réaliser des croquis rapides, à tous moments et en-droits. Mais le calque sous cette forme est aussi utilisé pour effectuer des retouches ou différentes variantes sur un dessin, plan ou croquis, en déroulant une pièce du rouleau sur la première feuille.

Dès lors, il est à prendre en compte que l’architecte peut, en plus de la technique de dessin en elle-même, faire intervenir le support physique dans sa démarche. La propriété de transparence du calque permet de l’utiliser comme un support à des alternatives issues d’une même base de départ. Mais cette utilisation est rare en architecture. En effet, le calque est principalement utilisé pour assurer la conser-vation de solutions satisfaisantes tout au long du projet. Il fait alors office de mémoire, permettant de constituer des couches dans l’élaboration des solutions au problème. Lorsqu’une solution semble convenable, l’architecte la conserve et rajoute un calque par dessus pour continuer à travailler sur des parties encore insatisfaisantes ou tout simplement pour élaborer de nouvelles solutions. Le projet évolue, sans que les nouvelles solutions ne remplacent jamais vraiment les anciennes, ou toutefois en gardant une trace de leur évolution, leur mise en relation étant assurée par la transparence.

L’architecte Louis I. KAHN, avait associé le calque au fusain. Outre les apports « transparents » du calque, l’utilisation du fusain lui permettait d’estomper, quasiment effacer des traits de la main lorsque

CHAPITRE 1. CONCEPTION, CRÉATIVITÉ ET MODÉLISATION 3D ceux-ci ne le satisfaisait pas. La conjonction fusain-calque fait alors qu’il reste une trace du trait sur le calque, mémoire du dessin (la figure 1.8, croquis de phase préliminaire de conception de Louis I. KAHN, montre à plusieurs endroit des corrections faites par le concepteur).

FIGURE 1.8 – Calque et fusain. Un dessin de conception de l’architecte Louis I. KAHN, réalisé au fusain, sur du calque. Ce croquis porte la mémoire des étapes de la conception, par les traits, leur superposition et leur persistance. Image tirée de The Louis I. Kahn Collection, Univeristy of Pennsylvannia, http://www. design.upenn.edu/archives/majorcollections/kahn.html .

Finalement, il nous paraît clair que le dessin spéculatif, le dessin de la pensée (de l’analyse aux solutions), se caractérise avant tout par la liberté que prend l’architecte pour arriver à ses fin. Liberté qu’offre le croquis, de par sa simplicité d’emploi. Il est en effet courant d’observer un (ou plusieurs) concepteur(s) en train de griffonner sur un coin de table ou sur un sous-bock à bière(5), comme le montre la figure 1.5 au début de cette section. Le croquis est accessible à tous moments et en tous lieux. Mais la notion de liberté se retrouve aussi dans les aspects techniques du dessin de conception de l’architecte. Il va utiliser toutes les représentations figuratives dont il dispose (croquis, en perspective ou plans, coupes, élévations, calques) pour supporter son processus de création mental, dégagé de beaucoup d’aspects techniques (Michel-Ange disait qu’« On ne dessine pas avec sa main ; mais avec son cerveau. »). La figure 1.9 page ci-contre est une esquisse d’étude tirée de [Lebahar, 1983] qui illustre bien ce propos de mélange des techniques sur un même dessin.

Dès lors que nous avons vu les trois activités principales de la conception architecturale (diagnos-tique, simulation graphique et modèle de construction), ainsi que les différents types de représenta-tions graphiques qui s’y entrecroisent (dessins spéculatif, descriptif et prescriptif), nous pouvons nous poser la question de la place que tient l’informatique dans ce processus.

(5)Nous devons cette vision empreinte de convivialité (le coin de table) et de « Belgitude » (le sous-bock) à nos fréquentes et fructueuses discussions sur le sujet avec Louis-Paul UNTERSTELLERet Pierre LECLERCQ.

1.3. L’ARCHITECTURE, UN EXEMPLE DE CONCEPTION CRÉATIVE

FIGURE1.9 – Esquisse d’étude. Cette esquisse tirée de [Lebahar, 1983] illustre l’emploi de différentes pra-tiques figuratives pour supporter la conception architecturale (organigramme, croquis perspective, plan, coupe).

1.3.3 La CAO et l’informatique en architecture

De par les capacités de calcul et de représentation qu’ils offrent, les outils numériques ont rapi-dement été perçus comme pouvant aider à la conception, en particulier en architecture : simulations, rendus graphiques, archivage, etc. Historiquement (nous en reparlerons au début du prochain cha-pitre), l’ordinateur a d’abord permis de produire des images, des sorties graphiques. Ces premiers systèmes datant des années 70 ne proposaient pas d’interfaces graphiques et de fonctionnalités temps réel comme nous les connaissons aujourd’hui. L’objectif principal était alors la spécification et la mo-délisation des outils mathématiques nécessaires à cette production de représentations graphiques. Puis progressivement, ces systèmes ont évolués vers l’interactivité en conservant l’existant, proposant une démarche centrée sur la représentation graphique sans vraiment présupposer des méthodes de travail des concepteurs (en particulier en architecture). Ces outils, dit de CAO (Conception Assistée par Or-dinateur), sont à notre avis « passés à côté » en faisant de cette représentation graphique un but, alors que comme nous l’avons vu tout au long de ce chapitre, c’est un moyen, un outil.

La place actuelle

La CAO tiens de nos jours une place importante dans la majorité des bureaux de conception architecturale. Place ouvrant même des possibilités inédites, selon l’architecte de renom Franck O. GEHRY : « The Guggenheim museum in Bilbao and the Walt Disney Concert Hall (in Los Angeles) could not exist today if we hadn’t met Dassault, because there was no way to explore these kinds of shapes and make them economically feasible » [Day, 2004].

CHAPITRE 1. CONCEPTION, CRÉATIVITÉ ET MODÉLISATION 3D

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