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Du trait à un système de modélisation 3D créatif

CHAPITRE 3. DU TRAIT À UN SYSTÈME DE MODÉLISATION 3D CRÉATIF

3.3. L’ÉTUDE DU TRAIT 3 Analyses et résultats

Nous avons développé un outil informatique permettant de « rejouer » chaque dessin chronologi-quement, d’en étiqueter les traits selon notre taxinomie et d’appliquer différents outils d’analyse (voir figure 3.5). Des 26 réalisations de nos sujets, seules 24 ont étés retenues pour constituer notre cor-pus d’étude. En effet, l’un des dessins s’est avéré inexploitable pour des raisons techniques. L’autre dessin a été ignoré car trop éloigné de la consigne : le sujet avait dessiné des parties de bâtiments destructurées et sans rapport les unes avec les autres. Ces 24 dessins forment un corpus de 9858 traits.

FIGURE3.5 –Logiciel d’analyse des dessins. Cette application permet de naviguer chronologiquement dans la construction des dessins, d’en étiqueter les traits suivant notre taxinomie, de n’afficher que les traits d’un type et d’appliquer des outils d’analyse.

Dans la suite, nous emploierons souvent le mot dessin, sans spécifier dessin architectural en pers-pective dans le cadre de notre étude par souci de simplification. Il est toutefois important de considérer que nos propositions ne visent en aucun cas à généraliser nos résultats à tous types de dessins et aux tâches qui y sont liées.

La première observation est que le temps utilisé pour effectuer le travail demandé varie de 10 à 25 minutes (du moment où le sujet s’installe et reçoit la consigne à celui où il quitte la table), pour un temps de dessin effectif de 2 minutes 30 à 19 minutes 30 (temps passé entre le premier et le dernier trait du dessin). La moyenne de temps de dessin est de 8 minutes, avec un écart type de plus de 4 minutes. Le constat que nous pouvons faire de cette observation est l’irrégularité dans la

CHAPITRE 3. DU TRAIT À UN SYSTÈME DE MODÉLISATION 3D CRÉATIF durée de l’expérience selon les sujet, sans pouvoir en tirer de conclusions. Il est évident que chacun à besoin de plus ou moins de temps pour accomplir cette tâche, selon la complexité de sa création, ses habitudes et ses aptitudes. Toutefois, nous pouvons tout de même considérer que les sujets étaient (plus ou moins) experts dans le domaine du dessin. Cette expertise leur permet, dans une certaine mesure, de se détacher des difficultés techniques et de ne pas être limités par un apprentissage ou des hésitations imputables à l’outil et son utilisation. Ainsi, quel que soit le sujet, nous considérons que le temps passé à dessiner était entièrement consacré à la tâche et que hésitations ou ralentissements s’inscrivaient dans la démarche créative.

Pour ce qui est de la consigne, celle-ci fut en général respectée. Seul le dernier ordre, celui de ne pas dessiner l’environnement extérieur, fut dans la quasi totalité des cas ignoré. Cela nous a natu-rellement conduit à prendre en compte ces traits dans notre taxinomie lors de l’étiquetage des traits (traits de style/embellissement). Cette dérogation à la consigne peut paraître anodine mais a pourtant été l’une des bases de notre concept de table à dessin virtuelle et d’interface de dessin libre, comme nous le montrerons dans la section 3.4 page 75.

Pourcentages des différents types de traits

Dans un premier temps, nous avons considéré le pourcentage de chaque type de traits dans tous les dessins du corpus (voir tableau 3.1). Les traits les plus nombreux sont les traits primaires (35%), bien que leur nombre soit de peu supérieur à celui des traits de décor (33%), ce qui va de soi étant donné que la tâche à réaliser était de dessiner un bâtiment. Ces traits (primaires) étant « l’armature » de la réalisation, il semble logique qu’ils soient majoritaires.

Type de trait Pourcentage

Construction 4 Principal Primaire Secondaire 22 13 Détail 18 Décor 33 Style 10

TABLEAU3.1 – Pourcentage des différents types de traits dans le corpus.

Mais le résultat important porte sur les traits de construction. Nous avions émis l’hypothèse que les dessinateurs, et en particulier les architectes, utilisaient souvent des lignes de fuite pour dessiner en perspective. Cette hypothèse est confortée par le fait que cette technique leur est enseignée dans le cadre de leurs cours de dessin. Un tel usage peut, dans le cadre d’un système informatique de dessin, donner lieu à un outil spécifique. Or, il s’avère qu’il n’y a que 4% de traits de construction sur l’en-semble du corpus. Ce résultat remet en cause notre hypothèse d’une utilisation intensive de traits de construction, dans le cas de notre échantillon(4).

Nous avons tout de même jugé important de caractériser ces traits même s’ils sont peu nombreux. Nous avons observé que les traits de construction utilisés sont en majorité de simples points de repère (un seul point ou des traits relativement courts par rapport aux autres), ou parfois des traits plus longs

(4)Les sujets de notre étude étant des étudiants pour la plupart, il serait intéressant de réaliser la même étude sur un échantillon d’architectes confirmés afin de voir si les résultats sont identiques.

3.3. L’ÉTUDE DU TRAIT mais très peu marqués. Nous n’avons pas pu caractériser un niveau de pression sur le stylet caractéris-tique de ces traits, n’ayant pas enregistré cette donnée. Toutefois, notre observation des dessins papier nous a permis de constater que celui-ci était probablement très significativement inférieur que dans le cas des autres traits. Nous formulons donc la proposition suivante :

Proposition 3.2 Les traits de construction d’un dessin architectural en perspective peuvent être

ca-ractérisés par une longueur relativement courte (points) et/ou une pression relativement faible sur le stylet.

Distribution temporelle des catégories de traits

Nous avons vu précédemment que la répartition des types de traits sur la totalité du dessin n’était pas d’un grand intérêt, excepté pour les traits de construction. C’est pourquoi nous nous sommes penchés sur leur distribution temporelle pendant le dessin. Le principe est de représenter et d’étudier l’évolution du nombre des traits de chaque type tout au long du temps de création du dessin. Il faut pour cela fixer un temps d’échantillonnage afin de partitionner le temps de dessin en intervalles. Pour chaque intervalle, il suffit alors de comptabiliser le nombre de traits de chaque catégorie qui y débute pour construire une visualisation de l’évolution du nombre de traits (ordonnée) de chaque catégorie (courbes de couleur) en fonction du temps (abscisse), comme le montre la figure 3.6 page suivante.

Plus les intervalles seront petits, plus l’échantillonnage sera précis, mais les tendances majeures des courbes restent visibles (des intervalles de 1 à 2 secondes, par exemple). L’observation de ces graphiques individuels (figure 3.6 page suivante), nous a révélé un regroupement des traits principaux en début de dessin. Afin de confirmer et formaliser ce résultat, nous avons appliqué la même analyse sur tout le corpus, dans le but d’établir un invariant dans la distribution temporelle des classes de traits. Pour cela, nous avons normalisé les temps relatifs des traits de chaque dessin en pourcentage de temps global du dessin. Ainsi, nous avons pu construire un graphique unique pour tout le corpus de dessins (voir figure 3.7 page 69).

Nous observons sur ce graphique :

1. que même s’il sont peu nombreux sur l’ensemble des traits, les traits de construction sont en nombre conséquent dans les 10 premiers pourcents du temps total de dessin.

2. que les traits principaux primaires sont les plus nombreux dans les 30 premiers pourcents du temps total du dessin.

3. un autre pic de traits principaux primaires aux deux tiers du dessin.

4. une augmentation constante du nombre de traits principaux secondaires dans le dernier tiers du dessin.

Les deux premières observations permettent d’identifier une phase constructive dans l’activité de dessin en perspective, phase qui situe au début du dessin la création de la plus grosse part des couches précédemment nommées technique et d’intérêt. La position temporelle de cette phase de traits principaux primaire va dans le sens d’une observation empirique de Pierre LECLERCQ sur une esquisse descriptive [Leclercq, 1996]. Il constatait que la structure fonctionnelle et le partitionnement des espaces d’un appartement dessiné étaient présents après environ 40 pourcents des étapes du dessin. Ce résultat n’a pas été généralisé par d’autres observations, mais nous pouvons tout de même dresser un parallèle avec notre observation du dessin en perspective. La phase constructive que nous situons

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