• Aucun résultat trouvé

Approches principalement centrées sur les aspects structurels du conte 36

objectif, dans la mesure où non seulement les trois versions -orale, Perraltienne et Grimmienne-, ont constitué une source d’inspiration pour les adaptations contemporaines, mais également les approches théoriques que critiques, intellectuels et chercheurs ont développées. Les pages suivantes ont donc comme deuxième objet d’étudier les approches privilégiées par les albums contemporains, leurs enjeux, mais aussi de voir celles qui ont été écartées.

IV. Approches principalement centrées sur les aspects structurels du

conte

L’approche folkloriste constitue une approche fondamentale à partir de laquelle vont se positionner toutes les autres, c’est pourquoi nous l’aborderons en premier. Le dictionnaire des Sciences Humaines donne la définition suivante du mot folkloriste :

Sous le nom folkloriste, on désigne celui qui étudie les usages, les traditions, les croyances, la littérature orale et l'art populaire des sociétés à écriture. Il se distingue de l' « ethnologue rural » par les méthodes employées, mais surtout par la perspective envisagée : il attache plus d'importance à la collecte, au classement et à l'étude comparée des faits culturels qu'à leur interprétation, et il est souvent tourné vers le passé et vers la recherche des survivances28.

La démarche des folkloristes consiste, comme le rappelle Pierre Erny29, à collecter les textes populaires, soit par le biais d'une enquête directe auprès des

28 F. GRESLE, M. PERRIN, M. PANOFF, P. TRIPIER, Dictionnaire des sciences humaines,

Paris, Nathan, 1990, p. 124.

conteurs, soit à travers les sources écrites existantes, afin d'en établir le classement, la comparaison, l'analyse des thèmes et des motifs, et la publication. Comme le souligne la définition précédemment citée, la démarche folkloriste attache davantage d'importance aux tâches matérielles que sont la collecte et le classement, qu'à la recherche de sens, prise en charge, comme nous le verrons, par d'autres domaines de recherche.

La naissance du mouvement folkloriste remonte à la première moitié du XIXème siècle. Face à la dégénérescence des contes oraux, nombreux sont les chercheurs qui décident d’entreprendre, dans la plupart des pays d'Europe et dans le sillage des frères Grimm, un travail de collecte des textes populaires (contes, légendes), afin de sauver de l'oubli un patrimoine voué à disparaître. Selon Jaime García Padrino dans Libros y literatura para niños en la España contemporánea30, c'est en effet sous l’impulsion du mouvement romantique en Europe, et comme manifestation de l’exaltation nationaliste dans l’Europe de la première moitié du XIXème siècle, que les formes narratives d’origine traditionnelle reçoivent pour la première fois un traitement spécial, et que chaque nation commence à s'intéresser à ses racines culturelles. L’approche folkloriste du conte est née, et elle connaîtra son heure de gloire dans l'entre-deux siècles, grâce notamment, au travail mené par l'école finnoise. Ses apports sont fondamentaux, et sa démarche peut être ainsi résumée : rassembler le plus de matériaux possibles dans une aire géographique la plus vaste possible, afin d'en dégager les traits les plus pertinents.

L'école finnoise est la première à distinguer les notions de « conte-type », « variante » et « version » à travers la classification établie par les folkloristes Antti Aarne et Stith Thompson au début du XXème siècle. Ceux-ci proposent en effet une classification internationale des contes traditionnels. La notion de « conte-type » se réfère aux récits dont les ressemblances l’emportent sur les différences. Les versions écrites attestées, constituent des textes dont les épisodes particuliers peuvent être considérés comme des variantes par rapport au conte-type. Les contes seraient donc à rattacher à un « conte-type », c’est-à-dire au squelette d’une intrigue dont ils ne seraient que les variantes.

30 J. GARCÍA PADRINO, Libros y literatura para niños en la España contemporánea,

L’école finnoise postule également l’existence pour chaque « conte-type », d’un archétype, c’est-à-dire d’une forme originelle du conte d’où dériveraient toutes les versions attestées, et celles qui se sont perdues en cours de route. Cet archétype possèderait une existence historique car les folkloristes estiment que chaque conte serait né dans un endroit précis, à partir duquel il se serait diffusé. Ils supposent que le conte se serait transmis de nombreuses années sans d’importantes modifications, dans une même aire géographique, puis, qu’il se serait modifié pour s’adapter à un nouveau contexte culturel.

En 1910 paraît l’ouvrage d’Antti Aarne qui sera augmenté et actualisé par Stith Thompson en 1928, puis en 1961. Cette typologie des contes, le Aarne-Thompson Index, deviendra alors la référence absolue auprès des folkloristes et universitaires du monde entier. Même si cette classification a souvent été critiquée en raison de son manque de fiabilité et de l’influence des frères Grimm (finalement peu représentatifs comme nous le verrons de la tradition populaire) sur les contes recensés, il n’en demeure pas moins qu’elle constitue encore de nos jours une base pour une majorité de chercheurs intéressés par le conte.

La classification établie par l’école finlandaise fut le détonateur de recherches nationales destinées à combler certains manques. En France, elle servit de point de départ, dès les années 1950, à l’étude précédemment mentionnée de Paul Delarue : le Catalogue raisonné du conte populaire français, qui reprend la typologie des chercheurs finlandais pour classer les 10 000 contes recensés en France et dans les pays francophones. Avant la mise au point de la classification internationale de Aarne- Thompson, les contes étaient ordonnés selon des critères thématiques propres à chaque collecteur. L’ouvrage mis au point par Paul Delarue, secondé dans sa tâche par Marie- Louise Tenèze, qui continua son travail après sa mort, reprend la structure et la numérotation de l’index de Aarne et Thompson, mais remplace la structure du conte- type par un texte désigné comme le conte populaire prototypique.

En Allemagne, les travaux des folkloristes Johannes Bolte et Georg Polivka sont importants, car ils amplifient les annotations des contes des frères Grimm, et font connaître de nombreuses versions parallèles et variantes. Marianne Rumpf et Gottfried Henßen sont eux aussi à mentionner dans le cadre de l'étude du Petit chaperon rouge, dans la mesure où ils interprètent l’histoire comme un conte d’avertissement destiné à

mettre en garde les enfants contre les dangers de la forêt. Soulignons qu’aucun des deux cependant, ne s’interesse aux raisons socio-discursives de cette mise en garde.

En Espagne, un travail de collecte a également lieu, bien que plus tardivement que dans le reste de l'Europe. Cependant, on observe une tendance davantage tournée, dans un premier temps, vers une littérarisation des contes, que vers un travail scientifique rigoureux consistant à récupérer et fixer par écrit le plus fidèlement possible ces éléments traditionnels. Fernán Caballero31 est la plus importante représentante de cette tendance, qu’Antonio Rodríguez Almodóvar, spécialiste du folklore en Espagne, désigne sous le nom d’étape Folklórico-costumbrista32, et qui trouve son origine dans le milieu du XIXème siècle. Son travail s’organise selon deux grandes collections : Cuentos y poesías populares andaluces (1859) et Cuentos, adivinas y refranes populares infantiles (1877). D’autres auteurs s’inscrivent également à l’intérieur de cette tendance : Ariza, Antonio Trueba ou le Père Coloma. Leur travail se caractérise par une modification des contes collectés, dans une intention moralisatrice, littéraire, voire politique.

D’autres essaient au contraire, dans le sillage des frères Grimm, de rester le plus fidèles possibles à la tradition orale, cependant leur travail n’atteindra jamais l’ampleur de celui des Grimm en Allemagne. Antonio Rodríguez Almodóvar explique cela par l’existence d’obstacles de nature idéologique : en effet, un tel travail aurait révélé de trop grandes similitudes entre les contes collectés en Espagne, et dans d’autres parties d’Europe, réduisant à néant leur spécificité nationale. Or, cela était contraire à l’idéologie du moment, davantage propice à la défense et à la revendication d’une souveraineté nationale, qu’à la reconnaissance de caractéristiques supranationales.

Il faudra attendre l'étape suivante, dénommée folklórico positivista, avec à sa tête Machado Álvarez, pour qu’une autre perspective soit adoptée, davantage tournée vers la recherche d’une transcription fidèle, bien que celle-ci, comme le fait remarquer Antonio Rodríguez Almodóvar, soit toute relative, et n’ait rien à voir avec la notion de

31 Fernán Caballero, pseudonyme de l’écrivaine Cecilia Böhl de Faber y Larrea (1796-1877) :

d’origine allemande, elle joua un rôle-clé dans la rénovation du roman espagnol, et plus particulièrement, du roman costumbrista. Son roman le plus connu, La gaviota (1849), s’inscrit au carrefour du réalisme et du romantisme. Son intérêt pour les récits et traditions populaires en fait l’une des premières folkloristes en Espagne.

32 A. RODRÍGUEZ ALMODÓVAR, Los cuentos populares o la tentativa de un texto infinito,

fidélité telle que nous l’entendons actuellement. Les travaux des chercheurs de cette école sont consignés principalement dans la Biblioteca de Tradiciones populares españolas33.

L’étape folklórico-filológica34 qui lui fait suite dans les années 1880, s’inscrit dans le sillage de l’école finnoise, mais ce n’est que dans les années 1920-1930, qu’elle se développe en Espagne, grâce aux apports fondamentaux d'Aurelio M. Espinosa (père et fils)35.

Si ces ouvrages vont faire avancer la recherche folklorique de façon significative, ils n’auront que peu de retentissement auprès du grand public qui privilégiera, comme le souligne Antonio Rodríguez Almodóvar, les ouvrages pour la jeunesse d’inspiration folklorique : contes de la maison d’édition Calleja, contes publiés dans des revues telles qu’Estampa, Gente Menuda, El Imparcial, Macaco etc., contes d’auteurs tels qu’Elena Fortún ou Antoniorrobles. Le traitement que subissent les contes n’a rien ici d’une retranscription fidèle ; il s’agit au contraire pour ces artistes, comme nous le verrons plus loin, de s’approprier les contes et de les faire correspondre à leur univers particulier, dans le contexte espagnol de la littérature de jeunesse du moment.

La Guerre Civile et l'avènement du régime franquiste vont occasionner, dans la recherche folklorique, un vide que déplore Antonio Rodríguez Almodóvar. Cela ne veut pas dire que des contes ne seront pas publiés : des revues telles que Maravillas, Chicos, Mis Chicas, Bazar etc. s’emploieront à le faire, dans la même intention que précédemment. Les contes de Calleja seront immités et publiés massivement par des maisons d’édition comme Bruguera, FHER, Sopena, Susaeta etc. Puis Anaya, SM, Alfaguara, Espasa-Calpe à partir des années 1970, s’emploieront elles-aussi à publier

33 Biblioteca de Tradiciones populares españolas, dirigida por Antonio Machado y Álvarez,

Sevilla-Madrid, 1883-1886, 11 tomos.

34 Ibid.

Pour plus de précisions, voir également : A. RODRÍGUEZ ALMODÓVAR, El texto infinito.

Ensayos sobre el cuento popular, Madrid, FGSR, 2004, p. 176.

35 M. AURELIO ESPINOSA (père), Cuentos populares españoles, recogidos de la tradición oral de España, Standford University, 1923-1926, 3 Vols. Edition espagnole : Madrid, 1946-

1947, 3 vols.

M. AURELIO ESPINOSA (fils), Cuentos populares de Castilla y de León, Madrid, CSIC, 1987-1988.

des contes36 en les transformant à leur guise.

Il va falloir attendre la fin des années 1970 pour qu’un travail rigoureux de collecte folklorique soit repris, afin de palier les manques inhérents à l’époque franquiste. Le travail d’Antonio Rodríguez Almodóvar marque une étape fondamentale. A la fois chercheur, auteur et collecteur de contes, il est l'une des figures contemporaines les plus reconnues dans le domaine du folklore. Lui-même s’incrit à l’intérieur d’une quatrième étape qu’il nomme semiótico-antropológica, et prend pour base les travaux de Propp. Parallèlement à ce travail de recherche, des ouvrages destinés à un vaste public, résultats de ces collectes, sont publiés et permettent de diffuser et de faire connaître le folklore national37.

Les apports des folkloristes sont fondamentaux pour l'étude du Petit chaperon rouge, notamment ceux de l'école finnoise. La classification d'Antii Aarne répertorie différents thèmes. Le numéro 333 correspond au titre suivant : The Glutton. (Red Riding hood) : « The wolf or other monsters devours human beings until all of them are rescued alive from his belly »38 (un monstre (qui peut être un loup) dévore des hommes et des animaux, mais ceux-ci sont libérés et reviennent vivants à la lumière du jour). Comme l'a souligné Pierre Erny à la suite d'Aarne, Thompson et Delarue, trois contes différents se trouvent réunis sous ce numéro :

- Un conte d'animaux se trouvant sous le numéro 123 : Le loup, la chèvre et les chevreaux.

- Un conte merveilleux : Le Petit chaperon rouge même si, comme le souligne Pierre Erny, le sauvetage des victimes est plus caractéristique de la version des Grimm que de celle de Perrault, et que dans la plupart des versions orales, la fillette parvient à s'échapper et ne se fait donc pas dévorer.

- Un conte de randonnée (voir les numéros 2027-2028) mettant en avant le thème de la dévoration : un être vorace avale successivement des aliments, des objets,

36 A. RODRÍGUEZ ALMODÓVAR, Op. Cit. p. 178.

37 La série la plus populaire d’ouvrages destinés à récupérer le patrimoine folklorique national,

et à le diffuser auprès des enfants, est celle d’Antonio Rodríguez Almodóvar, Los cuentos de la

Media Lunita, publiés à partir de 1985.

38 A. AARNE, S. THOMPSON, The types of the folktale, Helsinki, Academia scientiarum

des animaux, des gens, le soleil et la lune. Il finit par éclater en libérant toutes les personnes avalées.

Il est intéressant de souligner qu’en Espagne, les folkloristes font état de versions proches du conte d’animaux et du conte de randonnée précédemment évoquées. Le conte merveilleux en revanche n’affleure pas dans les collectes, ce qui pourrait a priori signifier qu’il ne doit sa présence dans la Péninsule, que grâce aux adaptations de la version des Grimm. Nous reviendrons en détail sur ces aspects un peu plus loin.

Les folkloristes se sont également posés la question du destinataire. Comme nous l’avons dit, ils considèrent que le conte, lorsqu’il faisait partie du domaine oral, n’était pas destiné à être raconté exclusivement à des enfants, l’enfance ne faisant d’ailleurs pas l’objet pendant longtemps, d’une distinction avec l’âge adulte39. S’il est passé dans le domaine de l’enfance, c’est surtout en raison de la publication des Contes de Perrault et de ceux des frères Grimm. Comme l’attestent la préface et l’illustration du frontispice des Histoires ou contes du temps passé40, l’œuvre était bien destinée aux enfants, en plus du public adulte mondain des salons, même si, comme le souligne Nicole Belmont, ce n’est que lors de son passage dans la littérature de colportage, qu’elle atteindra le public le plus large. Les contes de Grimm et les versions illustrées qui en dériveront, contribueront à populariser les contes auprès des enfants. Mais certains chercheurs insistent bien sur le fait que le lien entre l’enfance et le conte ne tient pas uniquement à l’appropriation du conte par les Grimm et l’édition destinée aux enfants. En effet, Nicole Belmont, dans le sillage de Paul Sébillot, défend l’idée de l’existence « dans la société traditionnelle (de) quelques contes merveilleux destinés aux enfants 41 ». Charles Joisten, après avoir analysé le répertoire des conteurs et des conteuses, mentionne également l’existence de contes destinés aux enfants, qu’il range ensuite selon six contes-types parmi lesquels on trouve :

Le petit Poucet avalé par la vache (T 700), Le petit chaperon rouge (T

39 Voir P. ARIÈS, L’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Paris, Seuil, 1975.

40 C. PERRAULT, Op. Cit.

333), Ma mère m’a tué, mon père m’a mangé (T 720), Le loup et les chevreaux (T 123), Rends-moi ma jambe (T 366)42.

Nicole Belmont parle d’eux comme des contes transmis principalement par les femmes, les mères ou les grand-mères, des récits « que les conteurs conscients de leur art semblaient déprécier et négliger 43». Le conte de la mère-grand, de même que les Petits chaperons rouges de Perrault et des frères Grimm, ne seraient, pour les folkloristes, que des variantes du conte de type 333, qui fait partie de ce répertoire spécifiquement destiné aux enfants, même si nous savons que la notion d’enfance est historiquement datée. Cette réflexion des folkloristes autour du type de destinataire sera particulièrement utile pour notre étude portant sur la réappropriation du Petit chaperon rouge pour les enfants.

Les folkloristes nous donnent également des indications sur les thèmes et les variantes d'un même conte. Certains motifs de la tradition orale, comme nous l'avons vu au début, leur semblent propres et disparaîtront des versions littéraires. Comme l'a montré Paul Delarue, suite à l'étude de versions populaires orales, françaises, tyroliennes et italiennes du Petit chaperon rouge : sur 19 récits, 13 suivent le schéma de Perrault (dans la mesure où le conte s’achève sur la dévoration de la fillette). En revanche, aucune ne reprend la fin de la version des Grimm (caractérisée par le sauvetage des deux personnages féminins) et 6 s'achèvent sur la fuite de l'héroïne.

Pierre Erny44 a établi un canevas à partir du travail de Paul Delarue qui nous permet d'avoir une idée des différentes variantes du conte oral en France, puisqu’il fait ressortir la multiplicité des versions orales et des combinaisons possibles45.

Enfin, les folkloristes nous apportent des renseignements utiles concernant le repérage géographique des contes. Leur classification selon leur aire géographique, nous permet d'évaluer leur fréquence dans une zone donnée. Cependant, il faut souligner, comme le fait Pierre Erny, l'aspect aléatoire d'un tel procédé. En effet, certains vides peuvent être dus, certes, à l'absence de contes dans une aire donnée, mais ils peuvent aussi provenir de lacunes inhérentes à l'enquête. C'est pourquoi, c'est

42 Ibid. 43 Ibid.

44 P. ERNY, Op. Cit. p. 89. 45 Voir Annexe V.

avec quelques réserves que nous devons aborder les résultats des recherches folkloristes sur le Petit chaperon rouge.

D'après les enquêtes dont nous disposons, certaines zones seraient plus fertiles que d'autres, en matière de Petits chaperons rouges. Michèle Simonsens insiste sur le fait qu’avant Perrault, le Petit chaperon rouge n’aurait existé dans la tradition orale que « sur un territoire étroit allant du bassin de la Loire au nord des Alpes 46 ». Selon elle, sa propagation ultérieure à l’étranger, en Allemagne notamment serait uniquement due au succès du récit de Perrault et à celui des frères Grimm. La classification d’Aarne et Thompson met en évidence une forte présence du conte de type 333 dans les pays nordiques (Suède, Finlande, Danemark, Irlande) et en France, évoquant 32 versions de ce conte dans ce pays47. Paul Delarue fait quant à lui état de la France comme d'un foyer de Petits chaperons rouges. Il en recense 35 versions, situées plus particulièrement dans les zones du bassin de la Loire ou les zones proches des Alpes, confirmant ainsi les conclusions de Simonsens, et note l'existence de quelques versions éparses dans les pays voisins, l'Italie, l'Allemagne ou les Pays-Bas, peut-être inspirées des versions françaises. Marie-Louise Tenèze quant à elle a parlé d'une zone centrale suivant la vallée de la Loire.

Si toutes ces études mettent en évidence l'abondance de Petits chaperons rouges en France, en Italie et dans certains pays du Nord, elles font également ressortir la faible présence du conte en Espagne, corroborant la thèse de Michèle Simonsens, et nous permettant d'émettre l'hypothèse que l'Espagne n'est pas un foyer de Petits chaperons rouges.

Parmi les chercheurs qui se sont interessés au cas de l’Espagne, nous devons mentionner Aarne et Thompson, qui s'appuient sur les recherches de l'hispaniste nord- américain Boggs, auteur du premier catalogue typologique du conte espagnol48, et de l'espagnol Espinosa49. Ceux-ci ne font état que de deux versions orales du conte dans

46 M. SIMONSENS, Op. Cit p. 59.

47A.AARNE et S. THOMPSON 1964 [1928], The Types of the Folktales. A Classification and